LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 juillet 2023
Cassation partielle
Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 477 F-D
Pourvoi n° B 22-17.109
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUILLET 2023
1°/ M. [O] [P],
2°/ Mme [C] [K], épouse [P],
domiciliés tous deux [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° B 22-17.109 contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2022 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1ère section), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Ged Energies, dont le siège est lieudit [Adresse 4], venant aux droits de la société Champ'énergie,
2°/ à la société Vivescia Transport, dont le siège est [Adresse 1],
3°/ à M. [G] [L], domicilié [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de M. et Mme [P], après débats en l'audience publique du 31 mai 2023 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, M. Jessel, conseiller, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. et Mme [P] du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société GED Energies et la société Vivescia Transport.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 18 janvier 2022), suivant facture du 25 octobre 2013, M. et Mme [P] ont confié à M. [L] la fourniture et la pose d'une chaudière à granulés de bois, d'un silo, d'un ballon d'eau chaude et de divers éléments de fonctionnement.
3. Se plaignant de dysfonctionnements de l'appareil les privant d'eau chaude et de chauffage, ils ont sollicité une mesure d'expertise en référé, puis ont assigné M. [L] ainsi que la société Champ'énergies, fournisseur des pellets, mis en cause par l'expert dans la réalisation des dommages. Celle-ci a appelé en garantie la société Vivescia transport.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. et Mme [P] font grief à l'arrêt de limiter à 10% la part de responsabilité de M. [L] et de le condamner dans cette proportion à leur payer les seules sommes de 600 euros chacun au titre de leur préjudice de jouissance et de 150 euros chacun au titre de leur préjudice moral, alors « que le débiteur d'une obligation est condamné au paiement de l'entier dommage à raison de l'inexécution de l'obligation, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par un événement constitutif de force majeure ; que pour infirmer le jugement et dire que M. [L] ne serait tenu de verser à M. et Mme [L] que les sommes de 600 € et de 150 € chacun, au titre de leurs préjudice de jouissance et de leur préjudice moral, la cour d'appel a dit que la part de la faute imputable à M. [L] dans la réalisation du dommage n'excède pas 10 % ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence d'une cause extérieure à l'origine du dommage justifiant de réduire la part de responsabilité de M. [L], et alors qu'elle avait exclu toute faute imputable à la société Ged Energies, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2017, désormais l'article 1231-1. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1147 et 1148 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
5. Il résulte de ces textes que le débiteur d'une obligation est condamné au paiement de l'entier dommage à raison de l'inexécution de celle-ci, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par un événement constitutif de force majeure.
6. Pour limiter à 10% la part de responsabilité de M. [L] et le condamner dans cette proportion à payer à M. et Mme [P] les seules sommes de 600 euros chacun au titre de leur préjudice de jouissance et de 150 euros chacun au titre de leur préjudice moral, l'arrêt retient que, selon l'expert, les dysfonctionnements de la chaudière sont principalement dus aux fines particules contenues dans les pellets présents dans le silo de stockage et que le chargement du camion ainsi que la livraison sur site, par un camion trop éloigné de la buse, ont conduit à la détérioration de la qualité des pellets, que le camion chargé de la livraison des pellets devait s'approcher à une distance minimale de la buse de remplissage afin d'éviter de les détériorer et que cette exigence n'a pas fait l'objet d'un avertissement suffisant de M. et Mme [P] par M. [L].
7. En statuant ainsi, alors qu'il résulte de ces constatations que la faute commise par M. [L] a concouru à la réalisation du dommage, de sorte qu'il devait être condamné à le réparer en totalité, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite les sommes que M. [L] doit payer à M. et Mme [P] à 600 euros chacun en réparation de leur préjudice de jouissance et 150 euros chacun en réparation de leur préjudice moral, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 18 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Condamne M. et Mme [P] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [L] à payer à M. et Mme [P] la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille vingt-trois.