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08/03/2023 | FRANCE | N°21-18804

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 mars 2023, 21-18804


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 mars 2023

Cassation

Mme VAISSETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 183 F-D

Pourvoi n° Y 21-18.804

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023

L'Ecole d

u ski français de [2] de Couchevel 1850), dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Y 21-18.804 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2021 p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 mars 2023

Cassation

Mme VAISSETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 183 F-D

Pourvoi n° Y 21-18.804

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023

L'Ecole du ski français de [2] de Couchevel 1850), dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Y 21-18.804 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2021 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant à la société Offer SRL, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 1] (Italie), défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de l'ESF de [2], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Offer SRL, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 6 avril 2021), le 14 avril 2014, le syndicat local des Moniteurs du Ski Français de [2] (l'ESF de Courchevel) a commandé auprès de la société Tricolor sport, des tenues de ski techniques destinées à équiper ses moniteurs dans l'exercice de leur activité professionnelle, avec une date de livraison fixée au 30 novembre 2014.

2. A la suite de la défaillance de son sous-traitant, la société Tricolor sport a confié la fabrication des tenues à la société Offer qui les a livrées le 25 novembre 2015. L'ESF de Courchevel a payé à cette dernière la somme de 150 000 euros. Mais n'ayant pas payé le solde des factures réclamé par la société Offer, d'un montant de 141 331,78 euros, celle-ci l'a assignée en paiement.

3. La société Tricolor sport a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 15 décembre 2015.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L'ESF de Courchevel fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Offer la somme de 141 331,78 euros à titre de solde du prix, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2016, et de rejeter toutes ses demandes, alors « que constitue un contrat d'entreprise, et non une vente, le contrat portant sur la réalisation d'un produit qui ne correspond pas à des caractéristiques déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui, exigeant un travail spécifique, est destiné à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordres ; que l'ESF de Courchevel faisait valoir, devant la cour d'appel, que les tenues de ski qu'elle avait commandées auprès de la société Tricolor sport, et que lui avait livrées la société Offer, répondaient à ce critère propre au contrat d'entreprise, dès lors qu'elles correspondaient à des caractéristiques précises qui n'avaient pas été déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui avaient été définies de manière à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par l'ESF ; qu'elle en tirait, notamment, la conséquence que la société Offer avait la qualité de sous-traitant et que, n'ayant pas respecté les formalités de l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, elle ne pouvait pas agir en paiement directement à son encontre ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la commande passée par l'ESF de Courchevel ne portait pas sur un travail spécifique, et en se bornant à affirmer que "l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente", pour en déduire que l'ESF était liée à la société Offer par un contrat de vente, et pour accueillir sur ce fondement la demande en paiement formée par cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779 et 1787 du code civil, ensemble l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1582 et 1787 du code civil :

5. Il résulte de ces textes que constitue un contrat d'entreprise, et non un contrat de vente, le contrat portant non sur des choses déterminées à l'avance mais sur un travail spécifique destiné à répondre aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordre.

6. Pour condamner l'ESF de Courchevel à payer une certaine somme au titre du solde du prix à la société Offer, l'arrêt retient qu'elle a accepté sans réserves les marchandises qui lui ont été livrées par cette dernière, qui agissait comme propriétaire de celles-ci et à laquelle elle a payé un acompte le jour de la livraison. Il relève encore que la société Tricolor sport n'a, par la suite, jamais facturé l'ESF de Courchevel et que son liquidateur judiciaire a confirmé qu'il n'engagerait aucune procédure de recouvrement du prix des marchandises. Il ajoute que l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente.

7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitait l'ESF de Courchevel, si la commande passée par cette dernière ne portait pas sur un travail spécifique destiné à répondre à des besoins particuliers, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne la société Offer aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Offer et la condamne à payer au syndicat local des Moniteurs du Ski Français de [2] (ESF de [2]) la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour l'Ecole du ski français de [2] (ESF de [2]).

L'ESF de Courchevel fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir condamnée à payer à la société Offer SRL la somme de 141 331,78 euros à titre de solde du prix, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2016, et de l'avoir déboutée de toutes ses demandes ;

1) Alors que constitue un contrat d'entreprise, et non une vente, le contrat portant sur la réalisation d'un produit qui ne correspond pas à des caractéristiques déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui, exigeant un travail spécifique, est destiné à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordres ; que l'ESF de Courchevel faisait valoir, devant la cour d'appel, que les tenues de ski qu'elle avait commandées auprès de la société Tricolor sport, et que lui avait livrées la société Offer SRL, répondaient à ce critère propre au contrat d'entreprise, dès lors qu'elles correspondaient à des caractéristiques précises qui n'avaient pas été déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui avaient été définies de manière à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par l'ESF (conclusions d'appel, pp. 8-12) ; qu'elle en tirait, notamment, la conséquence que la société Offer SRL avait la qualité de sous-traitant et que, n'ayant pas respecté les formalités de l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, elle ne pouvait pas agir en paiement directement à son encontre (conclusions d'appel, pp. 12-13) ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la commande passée par l'ESF de Courchevel ne portait pas sur un travail spécifique, et en se bornant à affirmer que « l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente » (arrêt attaqué, p. 6, dernier §), pour en déduire que l'ESF était liée à la société Offer SRL par un contrat de vente, et pour accueillir sur ce fondement la demande en paiement formée par cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779 et 1787 du code civil, ensemble l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ;

2) Alors qu'en tout état de cause, selon l'article 13 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, l'obligation du maître de l'ouvrage, en cas d'action directe exercée par le sous-traitant, est limitée à ce qu'il doit encore à l'entrepreneur principal à la date de réception de la copie de la mise en demeure que le sous-traitant est tenu d'adresser à l'entrepreneur principal en application de l'article 12 de ladite loi ; qu'il suit de là que le maître de l'ouvrage, contre lequel le sous-traitant agit directement, peut opposer à ce dernier la compensation avec une créance connexe qu'il détient à l'égard de l'entrepreneur principal, dès lors qu'il s'agit d'une créance certaine à la date à laquelle il reçoit copie de la mise en demeure adressée à ce dernier ; que l'ESF de Courchevel opposait subsidiairement une telle compensation à la société Offer SRL, en se prévalant de la créance qu'elle avait déclarée à la procédure collective de la société Tricolor sport au titre d'une astreinte prononcée en référé et du préjudice résultant du retard de livraison (conclusions d'appel, pp. 13-14) ; que la cour d'appel a rejeté cette exception de compensation, comme inopposable à la société Offer SRL, motif pris de l'autonomie de « la vente » prétendument conclue entre cette société et l'ESF de Courchevel (arrêt attaqué, p. 7, §§ 4 et 5) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y avait été invitée par l'ESF, si la commande passée par celle-ci auprès de la société Tricolor sport, et exécutée par la société Offer SRL, ne portait pas sur un travail spécifique, justifiant les qualifications respectives de contrat d'entreprise, s'agissant des rapports entre l'ESF et Tricolor sport, et de sous-traitance, s'agissant de l'intervention d'Offer SRL, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779, 1787 du code civil et 13 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, ensemble les articles 1289 et 1291 dudit code, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 21-18804
Date de la décision : 08/03/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 06 avril 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 mar. 2023, pourvoi n°21-18804


Composition du Tribunal
Président : Mme Vaissette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.18804
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