CIV. 3
RM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 15 février 2023
Rejet non spécialement motivé
Mme TEILLER, président
Décision n° 10110 F
Pourvoi n° N 21-25.004
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 15 FÉVRIER 2023
1°/ l'Établissement public du parc et de la grande halle de [Localité 5], dont le siège est [Adresse 4],
2°/ la Mutuelle assurance des instituteurs de France, société d'assurance mutuelle, dont le siège est [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° N 21-25.004 contre l'arrêt rendu le 5 octobre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 8), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme [J] [H] épouse [U],
2°/ à M. [Y] [U],
domicilés tous deux [Adresse 1],
3°/ à M. [N] [U], domicilié [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Gallet, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de l'Établissement public du parc et de la grande halle de [Localité 5], de la Mutuelle assurance des instituteurs de France, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de Mme [J] [U] et de MM. [Y] et [N] [U], après débats en l'audience publique du 10 janvier 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Gallet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Andrich, conseiller, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Établissement public du parc et de la grande halle de [Localité 5], la mutuelle assurance instituteur France aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'Établissement public du parc et de la grande halle de [Localité 5] et de la Mutuelle assurance des instituteurs de France et les condamne à payer à Mme [J] [U], MM. [Y] et [N] [U] la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille vingt-trois.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour l'Établissement public du parc et de la grande halle de [Localité 5] (EPPGHV), la Mutuelle assurance des instituteurs de France (Maif).
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné in solidum l'EPPGHV et la Maif à payer aux consorts [U] les sommes de 1.423.379,59 € au titre des travaux de réparation, 12.857 € au titre des travaux de dégagement du poteau, 33.177,04 € au titre des travaux d'enlèvement des gravats et de l'étaiement, 3.462 € au titre des frais de main d'oeuvre supportés pendant l'expertise et 137.000 € TTC au titre de la perte de loyers, avec intérêts aux taux légal à compter de la présente décision et, d'AVOIR, en conséquence, débouté la Maif de sa demande en dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur la responsabilité du fait du commettant, il résulte du rapport d'expertise que le sinistre a pour origine la faute commise par le préposé de l'EPPGHV de sorte que cet établissement doit être tenu pour responsable de la faute de son salarié sauf à démontrer la force majeure, dont les éléments constitutifs doivent être appréciés à l'égard du préposé ; qu'en l'espèce, les intimés entendent s'exonérer en invoquant les manquements ci-dessus rappelé du bailleur à ses obligations, manquements qu'il convient donc d'examiner distinctement ; que, sur le manquement à l'obligation de délivrance, les intimés avancent que l'aménagement de l'entrepôt était incompatible avec l'usage d'engins motorisés ; mais que, conformément au contrat, « les lieux loués sont destinés au stockage et à l'entreposage de matériels de spectacle et de divers matériaux selon la liste non exhaustive annexée aux présentes » ; que toutefois, aucune liste n'étant annexée et aucune pièce n'étant produite permettant de démontrer que les parties ont, à quelque moment de leurs relations, contractuellement entendu que des éléments de fort tonnage, impliquant l'utilisation d'engins motorisés lourds soient entreposés dans les locaux, pour lesquels le rapport d'expertise a constaté qu'il n'était pas adaptés, « en tout état de cause, aucun engin motorisé ne pouvait être utilisé à l'intérieur du bâtiment » ; que l'EPPGHV, en tant que professionnel qui connaissait parfaitement la nature du matériel qu'il souhaitait stocker et qui n'en a pas informé le bailleur, ne saurait, en conséquence, reprocher à celui-ci de ne pas avoir respecter son obligation de délivrance, la mention « engins » sur le plan des locaux étant insuffisante en soi pour laisser supposer qu'il s'agirait d'engins motorisés et de surcroit d'engins lourds, comme celui de 8 tonnes utilisé par l'EPPGHV ; ( ) qu'en conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré quant à la responsabilité ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, ( ) il constant que le bail conclu entre Madame [U] et l'EPPGHV a été prolongé par avenants successifs jusqu'au 31 décembre 2009, et que le 2 mars 2009, une partie de la toiture de l'entrepôt s'est effondrée ; que des dégradations sont ainsi survenues pendant la jouissance du bien par le preneur ; qu'il ressort du rapport d'expertise du 14 décembre 2015 (p.31) que « l'effondrement du bâtiment est dû à un choc provoqué par un enfin de levage motorisé de plus de 8 tonnes loué par l'EPPGHV sur un poteau de structure » ; que les dégradations de l'entrepôt résultent donc du heurt entre un poteau soutenant sa structure et un engin motorisé ; qu'il n'est pas contesté que cet engin était conduit par un salarié de l'EPPGHV et que celui-ci a commis une erreur de manoeuvre à l'origine de l'accident ; qu'en effet, les défendeurs indiquent dans leurs conclusions en page 9 : « s'il est exact qu'une faute du préposé a constitué un élément déclencheur, il ne saurait sérieusement être soutenu qu'une erreur de conduite d'un chariot élévateur puisse constituer une faute imprévisible . » ; qu'indépendamment de son caractère imprévisible, cette erreur de conduite caractérise une faute du salarié à l'origine du fait dommageable ; qu'il est constant que ce salarié était employé par l'EPPGHV ; que compte tenu de ce lien de subordination, et du fait que le salarié agissait dans l'exercice de ses fonctions, l'EPPGHV doit être tenu pour responsable de la faute de ce dernier ; que l'EPPGHV est donc présumé responsable de ce sinistre au regard des dispositions de l'article 1732 du code civil, sauf à démontrer les circonstances de la force majeure ; que le preneur cherche néanmoins à s'exonérer de cette responsabilité en invoquant des manquements du bailleur à ses obligations de délivrance conforme, de maintien du bien en bon état de réparation et de garantie des vices cachés, eu égard à l'aménagement de l'entrepôt, incompatible avec la circulation d'engins motorisés, ainsi qu'à la mauvaise qualité du béton constituant les poteaux ; que s'agissant d'abord de l'aménagement de l'entrepôt, le rapport d'expertise du 14 décembre 2015 (p.32) constate « Dans un bâtiment de stockage permettant l'usage d'engin motorisé de fort tonnage, les structures – si elles ne sont pas conçues et dimensionnées en conséquence – doivent être protégées d'éventuels chocs (souvent par des arceaux en tubes d'acier) et les zones de roulage matérialisées au sol. Le bâtiment de l'indivision [U] loué à l'EPPGHV ne comportait pas ces équipements obligatoires. Aucun élément ne nous a permis de déterminer si ces équipements devaient être réalisés par le propriétaire ou le locataire. En tout état de cause, aucun engin motorisé ne pouvait être utilisé à l'intérieur du bâtiment » ; qu'il est donc établi que l'entrepôt n'a pas fait l'objet des aménagements requis par l'utilisation d'engins motorisés ; que les défendeurs soutiennent que ces aménagements incombaient au bailleur, en vertu de son obligation de délivrance conforme, en affirmant que ce dernier ne pouvait ignorer que de tels engins y seraient utilisés ; que cependant, il ressort du bail que la destination des lieux ne prévoit pas expressément l'usage d'engins motorisés ; qu'en effet, il y est seulement stipulé que « Les lieux loués sont destinés au stockage et à l'entreposage de matériels de spectacle et divers matériaux selon la liste non exhaustive annexée aux présentes » ; que le bail ne comporte donc aucune mention relative à l'utilisation d'engins motorisés, et la liste de ces matériaux invoquée par les défendeurs n'est pas versée aux débats ; que de plus, bien que le plan des lieux annexé au bail comporte la mention « accès engin », celle-ci peut également concerner des engins manuels de type transpalette, tels que mentionnés par le rapport d'expertise du 15 décembre 2014 (p.30), et ne permet donc pas de déduire un accord contractuel sur l'usage d'engins motorisés ; que, par ailleurs, si le preneur invoque l'utilisation par le bailleur d'un local voisin, ainsi que la nature du matériel entreposé : « des éléments de gradins, structures métalliques composées de modules de près de 10 mètres linéaires » (page 8 des conclusions), aucune pièce n'est versée à l'appui de ces dires ; qu'enfin, le moyen selon lequel le bailleur aurait été tenu de ces obligations d'aménagement en tant que maître d'ouvrage s'avère également inopérant, faute pour les défendeurs de démontrer cette qualité, et vu l'imprécision des fondements juridiques invoqués ; que les défendeurs échouent donc à apporter la preuve que le bailleur était dans l'obligation de réaliser ces aménagements ; que le manquement à l'obligation de délivrance conforme n'est ainsi pas démontré ;
ALORS QU'il appartient au bailleur de démontrer que l'usage, qui peut être raisonnablement attendu de la chose louée, est, par exception, exclu du périmètre du contrat de bail ; que dans leurs conclusions d'appel, l'EPPGHV et la Maif expliquaient, qu'aux termes du contrat de louage conclu entre les parties le 20 septembre 2004, le bien loué consistait en « un espace à usage d'entrepôt d'une contenance de 1200 m² » prévoyant un « accès engin », caractéristiques laissant supposer que ce local de grande taille à usage d'entrepôt industriel pouvait accueillir des engins motorisés de levage et de manutention, de sorte que seules des stipulations contractuelles expresses étaient susceptibles d'exclure, par exception, l'utilisation de tels engins (concl., p. 6 § 1 et avant dernier § et p. 8 § 2) ; qu'en retenant, pour écarter tout manquement du bailleur à son obligation de délivrance conforme, qu'il n'était pas démontré que les parties se seraient contractuellement accordées sur l'utilisation d'engins motorisés au sein de l'entrepôt, rendue nécessaire par la nature des matériels stockés (jugement, p. 6 in fine et p. 7 § 1-2 ; arrêt., p. 6 § 2), la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 (devenu 1353) du code civil, ensemble l'article 1719 du code civil.
II.-
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné in solidum l'EPPGHV et la Maif à payer aux consorts [U] les sommes de 1.423.379,59 € au titre des travaux de réparation, 12.857 € au titre des travaux de dégagement du poteau, 33.177,04 € au titre des travaux d'enlèvement des gravats et de l'étaiement, 3.462 € au titre des frais de main d'oeuvre supportés pendant l'expertise et 137.000 € TTC au titre de la perte de loyers, avec intérêts aux taux légal à compter de la présente décision et, d'AVOIR, en conséquence, débouté la Maif de sa demande en dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur la responsabilité du fait du commettant, il résulte du rapport d'expertise que le sinistre a pour origine la faute commise par le préposé de l'EPPGHV de sorte que cet établissement doit être tenu pour responsable de la faute de son salarié sauf à démontrer la force majeure, dont les éléments constitutifs doivent être appréciés à l'égard du préposé ; qu'en l'espèce, les intimés entendent s'exonérer en invoquant les manquements ci-dessus rappelé du bailleur à ses obligations, manquements qu'il convient donc d'examiner distinctement ; ( ) que, sur la garantie des vices cachés, ce manquement ne peut être retenu dans la mesure où il résulte clairement du rapport d'expertise que « le petit défaut de qualité du béton du poteau cassé n'a pas d'incidence tant que le poteau reprend des efforts verticaux mais le fragilise lors d'un choc ou lors de la reprise d'efforts horizontaux provoquant un flambement » et qu'en l'espèce, « l'effondrement du bâtiment est dû à un choc provoqué par un engin de levage motorisé de plus de 8 tonnes loué par l'EPPGHV » ; qu'en conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré quant à la responsabilité ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, ( ) il constant que le bail conclu entre Madame [U] et l'EPPGHV a été prolongé par avenants successifs jusqu'au 31 décembre 2009, et que le 2 mars 2009, une partie de la toiture de l'entrepôt s'est effondrée ; que des dégradations sont ainsi survenues pendant la jouissance du bien par le preneur ; qu'il ressort du rapport d'expertise du 14 décembre 2015 (p.31) que « l'effondrement du bâtiment est dû à un choc provoqué par un enfin de levage motorisé de plus de 8 tonnes loué par l'EPPGHV sur un poteau de structure » ; que les dégradations de l'entrepôt résultent donc du heurt entre un poteau soutenant sa structure et un engin motorisé ; qu'il n'est pas contesté que cet engin était conduit par un salarié de l'EPPGHV et que celui-ci a commis une erreur de manoeuvre à l'origine de l'accident ; qu'en effet, les défendeurs indiquent dans leurs conclusions en page 9 : « s'il est exact qu'une faute du préposé a constitué un élément déclencheur, il ne saurait sérieusement être soutenu qu'une erreur de conduite d'un chariot élévateur puisse constituer une faute imprévisible . » ; qu'indépendamment de son caractère imprévisible, cette erreur de conduite caractérise une faute du salarié à l'origine du fait dommageable ; qu'il est constant que ce salarié était employé par l'EPPGHV ; que compte tenu de ce lien de subordination, et du fait que le salarié agissait dans l'exercice de ses fonctions, l'EPPGHV doit être tenu pour responsable de la faute de ce dernier ; que l'EPPGHV est donc présumé responsable de ce sinistre au regard des dispositions de l'article 1732 du code civil, sauf à démontrer les circonstances de la force majeure ; que le preneur cherche néanmoins à s'exonérer de cette responsabilité en invoquant des manquements du bailleur à ses obligations de délivrance conforme, de maintien du bien en bon état de réparation et de garantie des vices cachés, eu égard à l'aménagement de l'entrepôt, incompatible avec la circulation d'engins motorisés, ainsi qu'à la mauvaise qualité du béton constituant les poteaux ; ( ) que s'agissant ensuite du défaut de qualité du béton, celui-ci n'a été révélé que par les investigations menées dans le cadre de l'expertise judiciaire, alors même que le preneur avait occupé les lieux pendant près de cinq ans (du 1er octobre 2004 au 2 mars 2009) ; qu'il n'est donc pas établi que l'absence de travaux par le bailleur ait affecté l'usage du bien et il ne peut donc lui être reproché d'avoir manqué à son obligation d'entretien ; qu'en outre, le rapport d'expertise du 14 décembre 2015 (p.31) conclut : « l'effondrement du bâtiment est dû à un choc provoqué par un enfin de levage motorisé de plus de 8 tonnes loué par l'EPPGHV sur un poteau de structure. ( ) Le petit défaut de qualité du béton du poteau cassé n'a pas d'incidence tant que le poteau reprend des efforts verticaux mais le fragilise lors d'un choc ou lors de la reprise d'efforts horizontaux provoquant un flambement » ; qu'il est ainsi démontré que le sinistre trouve sa cause dans le choc survenu avec le chariot élévateur, et non dans le défaut de qualité du béton composant le poteau ; que par conséquent, ce défaut n'empêchant pas l'usage de l'entrepôt, le preneur ne démontre pas les caractéristiques du vice caché ;
1) ALORS QUE le bailleur est tenu de garantir le preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l'usage, quand bien même il ne les aurait pas connus lors du bail ; que, dans leurs conclusions d'appel, l'EPPGHV et la Maif faisaient valoir que les consorts [U] avaient manqué à leur obligation de garantie des vices cachés, en mettant à la disposition de l'EPPGHV un espace à usage d'entrepôt affecté d'un défaut empêchant l'usage auquel il était destiné et résidant dans la conception-même dudit entrepôt, puisque sa structure était supportée par des poteaux dont la fragilité imposait qu'ils soient protégés contre d'éventuels chocs causés par les engins de manutention habituellement utilisés dans ce type d'espace, ce qui n'était pas le cas (concl., p. 11 § 9-10) ; qu'en se bornant à affirmer, pour écarter l'existence d'un vice caché, que le défaut de qualité du béton composant le poteau litigieux n'était pas à l'origine du sinistre de sorte qu'il n'était pas démontré que ce défaut aurait empêché l'usage de l'entrepôt (jugement, p. 7 § 7-9 ; arrêt, p. 6 § 5), sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si les lieux loués n'étaient pas affectés d'un vice résidant dans leur conception-même, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1721 du code civil ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, dans son rapport d'expertise judiciaire du 14 décembre 2015, l'expert avait conclu que « l'effondrement du bâtiment est dû à un choc provoqué par un engin de levage motorisé de plus de 8 tonnes loué par l'EPPGHV sur un poteau de structure. ( ) Le petit défaut de qualité du béton du poteau cassé n'a pas d'incidence tant que le poteau reprend des efforts verticaux mais le fragilise lors d'un choc ou lors de la reprise d'efforts horizontaux provoquant un flambement » (prod.) ; qu'en retenant, pour écarter tout manquement du bailleur à son obligation de garantie des vices cachés, qu'il ressortait du rapport d'expertise judiciaire du 14 décembre 2015 que « le sinistre trouve sa cause dans le choc survenu avec le chariot élévateur, et non dans le défaut de qualité du béton composant le poteau », la cour d'appel, qui a dénaturé ledit rapport d'expertise, a violé l'article 1134 (devenu 1103) du code civil, ensemble le principe selon lequel le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné in solidum l'EPPGHV et la Maif à payer aux consorts [U] la somme 137.000 € TTC au titre de la perte de loyers, avec intérêts aux taux légal à compter de la présente décision ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur la perte des loyers, la cour approuve la motivation du premier juge quant à la réalité d'un préjudice au vu de l'analyse du bail du 1er mars 2015 qui exclut le bâtiment sinistré du périmètre des biens loués ; que la cour retient également l'évaluation faite, au vu du rapport d'expertise et du décompte de l'expert-comptable, KPMG, par le premier juge à hauteur de 350.444 euros ainsi que la réactualisation au 28 février 2020 par le même cabinet à la somme de 480.261,72 euros TTC ; que, s'agissant d'une perte de chance pour laquelle la cour estime pertinente l'évaluation proportionnée faite par le premier juge, il sera alloué à ce titre la somme de 137.000 € TTC ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur la perte des loyers, les défendeurs contestent cette perte de loyer, compte tenu du fait que le bailleur aurait trouvé un nouveau preneur depuis le sinistre, et que la durée excessive de l'expertise ne leur serait pas imputable ; que cependant, si un bail a bien été conclu le 1er mars 2015 entre les co-indivisaires [U] et la société française des montages, celui-ci stipule que « le bâtiment à usage de stockage partiellement détruit suite à l'effondrement d'une partie de la toiture est expressément exclu du périmètre des lieux loués » (pièce 13 [U]) ; que de surcroît, il ressort du procès-verbal de constat d'huissier du 21/07/2014 que Madame [U], constatant que le preneur occupait indûment ces lieux malgré les stipulations du bail, lui a donné sommation de déguerpir ; qu'il est donc démontré que l'entrepôt litigieux n'a pas été loué depuis le sinistre et le préjudice invoqué par les requérants s'avère donc certain et actuel ; que bien que les défendeurs ne soient pas responsables de la durée des opérations d'expertise, le principe de la réparation intégrale fait obstacle à toute atténuation consécutive de l'indemnisation du préjudice ; que le bail conclu entre les parties stipule que le prix du loyer sera réévalué chaque année à la date anniversaire du début du contrat, en fonction des variations de l'indice trimestriel du coût de la construction de l'INSEE, l'indice de base servant au calcul de la révision étant le dernier publié au 1er octobre 2004 ; que le rapport d'expertise du 14 décembre 2015, reprenant une attestation du 8 avril 2014 d'un expert-comptable KPMG, conclut « Depuis l'effondrement, le bâtiment n'a plus été loué, correspondant à une perte pour Madame [U] de avril 2009 au 31 mars 2014 de 219.967,20 euros TTC (10998,36 x 20 trimestres). Madame [U] a remboursé le loyer du mois de mars 2009 soit 10 998,36 €/3 = 3.666,12 € » (p.31 et annexe 30) ; que le décompte KPMG du 12 mai 2016 actualise cette somme à 350.444 € au 30 septembre 2016 (pièce 10 [U]) ; que cependant, le préjudice s'analyse en une perte de chance, la location présentant toujours un aléa : risque de vacance du fait de l'offre et de la demande, aléa d'impayés, aléa de procédures collectives, notamment ; que cette perte de chance ne peut équivaloir à l'entier dommage ; que compte-tenu des éléments versés aux dossiers, les dommages-intérêts sollicités au titre de la perte sont donc fondés et les défendeurs seront condamnés in solidum à payer aux consorts [U] la somme de 100.000 € avec intérêts à taux légal à compter du présent jugement ;
1) ALORS QUE seul l'Etat est tenu de réparer le préjudice causé à l'une des parties du fait de la durée excessive de la procédure, en particulier lorsque celle-ci résulte de la lenteur anormale des opérations d'expertise judiciaire ; que, dans leurs conclusions d'appel, l'EPPGHV et la Maif faisaient valoir qu'une grande partie de la perte de loyers subie par les consorts [U] était le résultat de la longueur excessive de la durée des opérations d'expertise qui s'étaient déroulées sur plus de six années, l'expert ayant à de très nombreuses reprises outrepassé les délais qui lui étaient impartis, ce dont l'EPPGHV et la Maif ne pouvaient être tenus pour responsables (concl., p. 2 § 12-13 et p. 14 § 4-5) ; qu'en condamnant in solidum l'EPPGHV et la Maif à payer aux consorts [U] la somme de 137.000 € au titre de la perte de loyers, pour l'intégralité de la période allant du 1er avril 2009 au 28 février 2020, quand il ressortait de ses propres constatations qu'ils n'étaient pas responsables de la durée excessive des opérations d'expertise (jugement, p. 9 § 7), la cour d'appel a violé l'article L.141-1 du code de l'organisation judiciaire, ensemble l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE le juge, qui constate que le préjudice à indemniser s'analyse en une perte de chance, est tenu de préciser à quelle fraction de l'entier préjudice la perte de chance indemnisée doit être évaluée et ne peut se borner à une appréciation forfaitaire de celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'il ressortait du décompte établi par l'expert-comptable KPMG le 27 février 2020, réactualisant la perte de loyers subie par les consorts [U] au 28 février 2020, qu'à cette date leur entier dommage s'élevait à la somme de 480.261,72 € TTC (arrêt, p. 7 § 7) ; que, par motifs adoptés des premiers juges, la cour a retenu que le préjudice des consorts [U], qui devait s'analyser en une perte de chance, ne pouvait équivaloir à l'entier dommage (jugement, p. 9 in fine et p. 10 § 1) ; qu'en se bornant à affirmer que « s'agissant d'une perte de chance pour laquelle la cour estime pertinente l'évaluation proportionnée faite par le premier juge, il sera alloué à ce titre la somme de 137.000 € TTC », (arrêt, p. 7 § 8), sans préciser à quelle fraction de l'entier préjudice des consorts [U] correspondait la perte de chance qu'elle avait forfaitairement évalué à ce montant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 (devenu 1231-1) du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.