CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 février 2023
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10143 F
Pourvoi n° F 21-22.307
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 15 FÉVRIER 2023
Mme [J] [N], épouse [D], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° F 21-22.307 contre l'arrêt rendu le 24 juin 2021 par la cour d'appel de Lyon (2e chambre B), dans le litige l'opposant à M. [Z] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Balat, avocat de Mme [N], de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [D], et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, Mme Auroy, conseiller doyen, M. Sassoust, avocat général, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [N] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille vingt-trois.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme [N]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Mme [J] [N] reproche à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé le divorce des époux sur le fondement de l'altération définitive du lien conjugal en application de l'article 237 du code civil et de l'avoir déboutée de sa demande tendant au prononcé du divorce pour faute imputable à M. [D] ;
ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE l'autorité de la chose jugée suppose une identité d'objet ; qu'en affirmant que Mme [N] ne pouvait plus invoquer les fautes commises par M. [D] au titre de faits survenus antérieurement au jugement du 11 décembre 2015 ayant rejeté sa demande en divorce au motif que ce jugement avait « acquis l'autorité de la chose jugée » et que « ces arguments ne peuvent donc être utilisés dans une seconde procédure en divorce pour faute » (arrêt attaqué, p. 7, alinéas 3 et 4), cependant que la seconde instance avait été engagée par M. [D] au titre d'une altération définitive du lien conjugal, Mme [N] ne faisant que défendre à cette requête par le moyen d'une demande reconventionnelle en divorce pour faute, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil ;
ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE le divorce peut être prononcé pour altération définitive du lien conjugal ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que M. [D] était recevable et fondé à solliciter le divorce pour le motif que « les époux viv[ent] séparément depuis plusieurs années » (arrêt attaqué, p. 9, alinéa 2) ; qu'en statuant ainsi après avoir constaté que M. [D] avait présenté sa Jean-Christophe BALAT Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation [Adresse 2] requête en divorce le 26 octobre 2016, soit quelques mois après le rejet, par jugement du 11 décembre 2015, d'une précédente demande fondée sur le même motif (arrêt attaqué, p. 2, alinéa 3 et p. 3, alinéa 3), sans s'en expliquer, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 237 du code civil ;
ALORS, EN TROISIEME LIEU, QU' en tout état de cause, le divorce pour faute est prononcé en présence de faits constituant une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ; que l'infidélité affective suffit à constituer une faute au sens de l'article 242 du code civil ; qu'en relevant que Mme [N] faisait valoir que son mari s'était inscrit durant le mariage dans une agence matrimoniale, puis en considérant que cette circonstance n'était pas constitutive d'une faute dès lors que les époux avaient décidé de se séparer (arrêt attaqué, p. 8, alinéa 4), cependant que l'inscription d'un époux dans une agence matrimoniale durant le mariage constitue en toute hypothèse une faute de l'époux, la cour d'appel a violé l'article 242 du code civil ;
ET ALORS, EN DERNIER LIEU, QU' en toute hypothèse, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Mme [N] reprochait à M. [D] de s'être inscrit dans une agence matrimoniale en faisant supporter le prix de cette inscription à la société AMGP dont elle détenait 30% des parts (arrêt attaqué, p. 8, alinéa 3) ; qu'en considérant que, même si une telle dépense « contrevient au droit des sociétés et même au code pénal », elle ne constituait pas une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations résultant du mariage et rendant intolérable le maintien de la vie commune, dans la mesure où les époux « avaient décidé de se séparer » (arrêt attaqué, p. 8, alinéa 4), sans rechercher si le fait pour M. [D] de procéder à des détournements de biens sociaux au détriment de son épouse associée ne caractérisait pas à lui seul une faute justifiant le divorce aux torts du mari, indépendamment de la décision prise par les époux de se séparer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 242 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [J] [N] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil ;
ALORS QU' indépendamment du divorce et de ses sanctions propres, l'époux qui invoque un préjudice étranger à celui résultant de la rupture du lien conjugal peut demander réparation à son conjoint dans les conditions du droit commun ; qu'en constatant que « Mme [J] [N] fonde sa demande de dommages et intérêts à la fois sur l'article 266 et sur l'article 1240 du code civil » (arrêt attaqué, p. 9, alinéa 3), puis en la déboutant de ses demandes indemnitaires au motif « qu'au soutien de sa demande de dommages et intérêts, Mme [J] [N] fait valoir qu'elle a été profondément blessée et humiliée par le comportement de M. [Z] [D] à son encontre au cours de leur mariage mais dès lors qu'aucun fait constitutif d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage, n'a été retenu à l'encontre de M. [Z] [D], Mme [J] [N] ne peut qu'être déboutée de sa demande tendant à la condamnation de M. [Z] [D] à lui verser la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts » (arrêt attaqué, p. 9, alinéa 6), cependant que l'indemnisation sollicitée dans les conditions du droit commun ne requiert pas l'existence d'un fait constitutif d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage, la cour d'appel a violé l'article 1240 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [J] [N] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande en paiement d'une prestation compensatoire ;
ALORS QUE dans ses écritures d'appel (conclusions du 21 avril 2021, p. 20, alinéas 6 et 7), Mme [N] faisait valoir que les ressources actuelles de M. [D] n'étaient pas connues et que les juges du fond ne pouvaient dès lors « se satisfaire d'un extrait du grand livre de la comptabilité de la société AMPG étant précisé que ce document n'a aucune valeur probante, d'une part, et que, d'autre part, M. [D] est seul décisionnaire de la rémunération qu'il se verse et des avantages qu'il se consent » ; qu'en énonçant notamment, pour dire n'y avoir lieu à prestation compensatoire à la charge de M. [D] au profit de Mme [N], que « le résultat de la Sarl AMPG a été déficitaire sur le dernier exercice en lecture du compte de résultat communiqué » (arrêt attaqué, p. 12, alinéa 4), sans répondre aux conclusions susvisées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.