CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 25 janvier 2023
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10080 F
Pourvoi n° T 21-20.616
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 JANVIER 2023
Mme [L] [Y], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-20.616 contre l'arrêt rendu le 3 juin 2021 par la cour d'appel de Douai (chambre 7, section 1), dans le litige l'opposant à M. [R] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Duval, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de Mme [Y], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 6 décembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Duval, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour Mme [Y]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Mme [Y] fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait prononcé aux torts partagés des époux le divorce de Mme [Y] et de M. [D], ordonné la mention du divorce en marge de l'acte de mariage ainsi qu'en marge de l'acte de naissance de chacun des époux, conformément aux dispositions de l'article 1082 du code de procédure civile et rappelé que seul le dispositif du jugement pourra être reproduit pour la transcription de la décision dans un acte authentique ou un acte public ;
1° ALORS QUE seule une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune constitue une faute permettant de justifier que le divorce soit prononcé aux torts exclusifs du conjoint ayant commis cette faute ou, en cas de faute de l'autre conjoint, aux torts partagés ; qu'une relation adultère ne peut constituer une faute susceptible de justifier que le divorce soit prononcé aux torts partagés des deux époux ou d'entraîner le divorce aux torts exclusifs de l'époux qui a entretenu cette relation lorsque cette situation avait été librement acceptée par l'autre conjoint ; que, dans ses écritures d'appel, M. [D] faisait état de la récurrence des liaisons extraconjugales que Mme [Y] entretenait, lesquelles étaient toujours pardonnées ; que, dès lors, l'existence de liaisons adultères était un fait ancien et accepté par M. [D], qui ne pouvait donc s'en prévaloir pour solliciter le divorce aux torts exclusifs de son épouse ; qu'en retenant, pour prononcer le divorce aux torts partagés des époux, que Mme [Y] avait commis une faute en entretenant une relation extraconjugale en 2013 et que cette relation avait perduré jusqu'en 2015, cependant que l'existence de relations adultères consommées par Mme [Y] était un fait connu de son mari et accepté par lui, et qui, par ailleurs, n'empêchait pas à la vie commune de se maintenir, ce pourquoi M. [D] s'était prévalu de cette situation pour demander le divorce uniquement le 7 juin 2019, soit postérieurement à la requête en divorce déposée par Mme [Y] le 2 juillet 2015, la cour d'appel a violé l'article 242 du code civil ;
2° ALORS QUE le juge ne peut prononcer le divorce aux torts partagés des deux époux sans examiner tous les griefs invoqués par l'un ou l'autre époux ; que, pour prononcer le divorce aux torts partagés des époux, la cour d'appel a considéré que la faute de Mme [Y] était constituée, outre par l'entretien d'une relation adultère, par l'existence de messages vocaux véhéments à l'encontre de M. [D] ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si cette faute pouvait être excusée par la malhonnêteté patrimoniale de M. [D], qui avait confisqué l'ordinateur de Mme [Y] et la quasi-intégralité des meubles meublant le domicile dont elle avait obtenu la jouissance par une ordonnance du 10 décembre 2015, en ayant connaissance de ce que, faute de moyens, elle ne pourrait les remplacer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 242 et 245 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [Y] fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il l'avait condamnée à payer à M. [D] la somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts ;
ALORS QUE la faute d'un époux peut entraîner sa condamnation à payer à son conjoint une indemnité tendant à réparer le préjudice distinct de celui résultant de la rupture de la vie commune qu'elle a créé ; que cette faute peut être caractérisée par l'exercice abusif d'une action en justice seulement si des circonstances particulières rendent cette action fautive ; que, sur le prononcé du divorce, la cour d'appel a retenu, tant par motifs propres (arrêt attaqué, p. 4, § 5) qu'adoptés (jugement entrepris, p. 7, § 3) que les violences de M. [D] à l'égard de Mme [Y] étaient crédibles au regard de quatre attestations de témoins, d'un certificat médical faisant état d'une érosion superficielle du versant muqueux de la lèvre inférieure et d'une contusion superficielle en regard de la mandibule gauche et du défaut d'explication de M. [D] sur ces faits ; que la cour d'appel a retenu que ces violences, dont la crédibilité était avérée, constituaient un manquement par M. [D] à son devoir de respect à l'égard de Mme [Y] et justifiaient que le divorce soit prononcé aux torts partagés des deux époux ; que, toutefois, la cour d'appel a accueilli la demande de dommages-intérêts de M. [D] aux motifs que Mme [Y] aurait tenté de lui nuire en introduisant à son encontre une action devant le tribunal correctionnel de Béthune pour des faits de violence dont il a été relaxé ; qu'en considérant que l'action de Mme [Y] tendant à dénoncer la violence dont son mari avait fait preuve à son encontre constituait une faute, après avoir pourtant retenu que M. [D] était un mari violent, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1240 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Mme [Y] fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait limité à la somme de 38 400 euros la condamnation de M. [D] à lui payer une prestation compensatoire en capital ;
1° ALORS QUE la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ;
que la cassation à intervenir sur le premier moyen, relatif au principe même du divorce, entraînera la cassation du chef de l'arrêt relatif à la prestation compensatoire, qui ne s'apprécie qu'à la date de la rupture du lien matrimonial, par application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE pour apprécier la disparité résultant de la rupture du lien conjugal et le montant de la prestation compensatoire, il n'y a pas lieu de tenir compte de la part devant revenir à l'épouse lorsque la liquidation est égalitaire ; qu'en prenant en considération, pour limiter la prestation compensatoire de Mme [Y] à la somme de 38 400 euros, le montant de la créance de participation dont M. [D] serait redevable envers Mme [Y] à l'issue de la liquidation du régime matrimonial de participation aux acquêts déterminé par Me [O] à la demande exclusive de M. [D] et l'actif net revenant à l'épouse, cependant que les sommes devant revenir à Mme [Y] à l'issue de la liquidation du régime matrimonial étaient nécessairement égalitaires au regard du régime de participation aux acquêts choisi par les époux, de sorte que la cour d'appel ne pouvait pas en tenir compte pour limiter la prestation compensatoire due à Mme [Y], la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;
3° ALORS QUE la pension alimentaire, qui présente un caractère provisoire, ne peut être prise en compte pour fixer la prestation compensatoire due à un conjoint ; qu'en tenant compte, pour limiter la prestation compensatoire de Mme [Y] à la somme de 38 400 euros, de la somme de 20 700 euros correspondant à la pension alimentaire versée par M. [D] en 2019 à Mme [Y] au titre de son devoir de secours, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil.