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30/11/2022 | FRANCE | N°21-14.276

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 30 novembre 2022, 21-14.276


CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 novembre 2022




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10821 F

Pourvoi n° B 21-14.276




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 30 NOVEMBRE 2022

1°/ M. [D] [O], domiciliÃ

© [Adresse 2],

2°/ M. [C] [O], domicilié [Adresse 6],

3°/ Mme [E] [O], domiciliée [Adresse 9],

ont formé le pourvoi n° B 21-14.276 contre l'arrêt rendu le 29 janvier 20...

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 novembre 2022




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10821 F

Pourvoi n° B 21-14.276




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 30 NOVEMBRE 2022

1°/ M. [D] [O], domicilié [Adresse 2],

2°/ M. [C] [O], domicilié [Adresse 6],

3°/ Mme [E] [O], domiciliée [Adresse 9],

ont formé le pourvoi n° B 21-14.276 contre l'arrêt rendu le 29 janvier 2021 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme [K] [N], épouse [I], domiciliée [Adresse 7],

2°/ à M. [Z] [N], domicilié [Adresse 8],

3°/ à Mme [X] [N], veuve [S], domiciliée [Adresse 3],

4°/ à Mme [L] [T], domiciliée [Adresse 1],

5°/à la société AFER, groupement d'intérêt économique,

6°/ à l'Association française d'épargne et de retraite (AFER),

ayant toutes leur siège [Adresse 4],

7°/ à la société Capma-Capmi, dont le siège est [Adresse 5], société d'assurance mutuelle,

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Antoine, conseiller, les observations écrites de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de MM. [D] et [C] [O] et de Mme [O], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Capma-Capmi, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de Mmes [K] et [X] [N], de M. [N] et de Mme [T], de la SCP Richard, avocat du groupement d'intérêt économique AFER, après débats en l'audience publique du 18 octobre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Antoine, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Il est donné acte à MM. [D] et [C] [O] et Mme [O] du désistement partiel de leur pourvoi à l'encontre de l'Association française d'épargne et de retraite (AFER).

2. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

3. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. [D] et [C] [O] et Mme [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. [D] et [C] [O] et Mme [O] et les condamne à payer à Mmes [K] et [X] [N], M. [N] et Mme [T] la somme de 3 000 euros ; ainsi que la somme de 1 000 euros chacun au GIE AFER et à la société Capma-Capmi.

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour MM. [D] et [C] [O] et Mme [O].

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé pour insanité d'esprit le testament établi par acte authentique du 10 février 2014 désignant [D] [O], [C] [O] et [E] [O] comme bénéficiaires des contrats d'assurance vie souscrit par [M] [O] auprès de la société Capma-Capmi ;

AUX MOTIFS QUE sur la nullité pour insanité d'esprit, (…) aux termes de l'article 414-1 du code civil, pour faire un acte valable il faut être sain d'esprit. C'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte ; que l'article 901 du code civil dispose par ailleurs que pour faire une libéralité, il faut être sain d'esprit ; qu'en application de ces dispositions, il suffit, pour celui qui agit en nullité, d'établir que la personne n'était pas saine d'esprit à l'époque de l'acte ou de la libéralité, sauf au bénéficiaire à démontrer qu'elle était exceptionnellement dans un intervalle de lucidité au moment de sa conclusion ; que l'insanité d'esprit vise toutes les affections mentales par l'effet desquelles l'intelligence du disposant et sa faculté de discernement sont altérées ; qu'il convient donc en l'espèce d'examiner si l'intelligence et la faculté de discernement de M. [M] [O] étaient altérées, entre janvier 2013 et février 2014, période durant laquelle il a modifié le bénéficiaire de son contrat d'assurance vue AFER (18 janvier 2013) et où il a testé (10 février 2014) ; qu'il ressort, d'abord, des pièces produite par l'association et le GIE AFER que M. [O] avait écrit à cet assureur le 3 février 2010 pour l'interroger sur le bénéficiaire de son capital à son décès, le notaire lui ayant dit que son fils, « avec lequel nous n'avons plus de relations depuis 35 ans et qui nous a fait énormément de misères » avait droit à 50% du capital ; qu'il écrivait : « comment cela est-il possible, est-ce que ma lettre du 22-3-01 n'est plus valable sans avoir été informé ? » qu'ensuite, selon le propre courrier du 20 novembre 2012 du conseil de [D] [V] [O] à [B] et [K] [I] – pour se plaindre de ce que ces derniers abusaient de la générosité de son père, qui les aurait accusés de vols, et fait un « mini AVC », il avait 98 ans (en réalité même 99 ans depuis le 18 novembre) et était « très affaibli » ; que, de plus, selon le certificat médical du 28 décembre 2012 établi par le docteur [A] [Y] pour la mise sous protection de M. [O], à la demande de M. [I], « l'équipe soignante a été surprise du revirement récent de l'attitude de M. [O] envers certains membres de sa famille » ; « à son arrivée, il avait refusé tout contact avec son fils adoptif et appréciait l'aide de sa nièce et de son neveu par alliance », mais la situation avait changé après une hospitalisation au [11] de [Localité 10] en mars 2012 pour un état confusionnel et des chutes à répétition, M. [O] étant devenu « suspicieux vis-à-vis d'eux » ; Que le médecin a conclu : « l'attitude véhémente à l'égard de son neveu s'est accentuée avec la venue de plus en plus fréquente de son fils adoptif et des petits-enfants, ces dernières semaines, selon le personnel de l'établissement. M [O] présente des idées de préjudice et semble être sous influence de ces visites » ; que le médecin a conclu qu'il présentait un état physique et psychologique fragile, une personnalité influençable altérant ses capacités de discernement, altérations n'apparaissant pas susceptibles de connaitre une amélioration, et qu'il devait être placé sous curatelle ; Que c'est à la suite de ce certificat, joint à la requête du 9 janvier 2013 de Mme [I], que la juge des tutelles de Colmar a placé M. [O] sous sauvegarde de justice le 10 janvier 2013, puis sous curatelle renforcée le 14 mai 2013 ; que Mme [P], directrice de l'Ehpad où résidait M. [O], a attesté, le 2 février 2015, qu'il souffrait de démence depuis son arrivée le 1er novembre 2011 (précisant notamment « il ne sait plus où il est, pense que sa femme l'attend, veut partir pour les vendanges… ») et que, de l'automne/hiver 2012 à juin 2013, où sa nièce et son mari avaient décidé, suite aux accusations de [D] [O], de ne plus revenir voir leur oncle et d'engager une procédure de curatelle, la présence de [D] [O] était très régulière ; qu'elle a ajouté que « durant la période précédent juin 2013, les sorties de M. [O] avec son fils étaient de plus en plus fréquentes, et le résident revenait parfois – pour ne pas dire souvent – malade (nausées, diarrhées, doublées d'agressivité ou d'euphorie…) » et que, le 28 mars 2013, elle a pris la décision d'écrire au procureur de la République afin de l'alerter sur l'état de plus en plus engourdi de M. [O], en fonction des visites et sorties avec son fils ; qu'elle a encore indiqué que, suite à la mise sous curatelle, M. [O] restait souvent alcoolisé et que les visites de son fils continuaient ; que le procès-verbal d'audition d'[M] [O] par le juge des tutelles du 14 mars 2013, dont une copie est produite par les intimés, confirme que celui-ci était sous l'emprise de son fils, et qu'il se croyait victime de détournements d'argent par sa nièce, ce pourquoi il avait donné procuration à son fils, « chargé de remettre tout en ordre », et « bloqué les comptes avec son beau-fils » ; pour que le juge se rende compte que « [K] l'avait volé », il voulait qu'il téléphone à son fils, sans quoi il ne répondrait plus à ses questions ; que Mme [W], curatrice de M. [O] du 14 mai 2013 à son décès, atteste que son état de santé était fluctuant, ayant certaines fois des difficultés à se concentrer, voire même à la reconnaître, bien que le rendez-vous ait été prévu ; que s'agissant du testament, elle indique qu'elle était présente, ainsi que le fils adoptif de M. [O] et [J] [O], que l'acte était déjà prêt à leur arrivée et qu'il a été signé après lecture ; que si M. [D] [O] observe que le notaire n'était pas obligé de mentionner les personnes dont la présence n'était pas nécessaire, il ne conteste pas avoir été présent ; que Mme [U], née [H] [F], amie d'[M] [O], atteste aussi, le 24 janvier 2015, qu'elle lui rendait visite avec son mari à la maison de retraite une fois par mois de novembre 2011 à juillet 2014, qu'elle avait connaissance du différend avec son fils adoptif avec lequel il avait coupé tout lien et que, ayant remarqué dans la chambre courant 2013 la présence d'une photo de lui avec son fils, ils l'avaient interrogé sur la personne se trouvant à côté de lui sur la photo et qu'il leur avait répondu que c'était son père, sans pouvoir leur dire que « c'était [V] son fils » ; Que par ailleurs, il a été établi par expertise que M. [O] n'était pas le rédacteur du texte du courrier du 18 janvier 2013, mais son fils [D] [V], au profit duquel la modification était effectuée, et qu'il avait seulement signé ce courrier ; qu'au vu de ces éléments, il est certain que l'intelligence et la faculté de discernement d'[M] [O] étaient altérées et qu'il était sous l'influence de son fils adoptif, [D] [V] [O], depuis au moins le 20 novembre 2012, et donc dès la date de la signature de la lettre du 18 janvier 2013, rédigée par ce dernier, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a annulé pour insanité d'esprit, tant la modification de la clause bénéficiaire en date du 18 janvier 2013, que le testament notarié du 10 février 2014 ;

1) ALORS QUE l'ouverture d'une mesure de protection, quelle qu'elle soit, ne fait pas présumer le trouble mental du majeur protégé ; qu'en retenant que le placement d'[M] [O] sous curatelle renforcée établissait l'altération de ses facultés mentales, de nature à empêcher l'expression de sa volonté au moment de l'établissement du testament authentique du 10 février 2014, la cour d'appel a violé les articles 414-1 et 901 du code civil ;

2) ALORS QUE le majeur sous curatelle peut librement tester sous réserve d'être sain d'esprit au moment de la passation de l'acte ; que le caractère libre et éclairé du consentement donné par le majeur sous curatelle s'apprécie au regard tant de ses facultés de discernement que des circonstances particulières ayant entouré la passation de l'acte ; que, dans leurs conclusions d'appel, les consorts [O] faisaient observer que le testament du 10 février 2014 avait été dicté par [M] [O] au notaire instrumentaire, en présence de deux témoins et de sa curatrice, laquelle s'était assurée, conformément à sa mission, que cet acte correspondait à la volonté d'[M] [O] et que celui-ci en saisissait toute la portée (concl., p.10-12 et p.14-15) ; qu'en se bornant à affirmer, pour prononcer l'annulation du testament du 10 février 2014 pour insanité d'esprit, qu'au moment où le testament avait été reçu par le notaire, « l'intelligence et la faculté de discernement d'[M] [O] étaient altérées et qu'il était sous l'influence de son fils adoptif », sans s'expliquer sur la présence du notaire, des deux témoins et de la curatrice d'[M] [O], circonstances censées contrebalancer une éventuelle influence exercée sur le majeur protégé et garantir l'intégrité de son consentement au moment de la passation de l'acte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 414-1 et 901 du code civil, ensemble l'article 470 du code civil ;

3) ALORS QUE le fait que l'acte soit passé devant le notaire, lequel a l'obligation de s'assurer de l'intégrité du consentement du majeur protégé pour lequel il instrumente, doit être pris en considération pour apprécier le caractère libre et éclairé du consentement donné par le majeur lors de la passation de l'acte ; que, dans leurs conclusions d'appel, les consorts [O] insistaient sur le fait que le testament du 10 février 2014 avait été passé à l'étude de Me [G], notaire, lequel s'était longuement entretenu préalablement à la passation de l'acte avec [M] [O], alors sous curatelle renforcée, et que la présence du notaire dans cette hypothèse était de nature à conforter la validité du testament litigieux (concl., p. 10 § 3 et in fine et p.14 § 5) ; qu'en prononçant l'annulation du testament du 10 février 2014 pour insanité d'esprit d'[M] [O], sans s'expliquer sur le caractère notarié dudit testament et les garanties censées en découler s'agissant de l'intégrité du consentement du testateur au moment de la passation de l'acte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 414-1 et 901 du code civil, ensemble l'article 1382 (devenu 1240) du code civil.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 21-14.276
Date de la décision : 30/11/2022
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Première chambre civile, arrêt n°21-14.276 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 30 nov. 2022, pourvoi n°21-14.276, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.14.276
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