CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 23 novembre 2022
Rejet non spécialement motivé
Mme TEILLER, président
Décision n° 10553 F
Pourvoi n° C 21-17.911
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 NOVEMBRE 2022
La Caisse des dépôts et consignations, établissement public, dont le siège est [Adresse 3], représentée par sa mandataire la société Esset, anciennement dénommée Foncia Institutional Property Management, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 21-17.911 contre un arrêt rendu le 16 février 2021 rectifié le 23 février 2021 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 2e section), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [L] [P],
2°/ à Mme [R] [S], épouse [P],
domiciliés tous deux [Adresse 1],
3°/ à Mme [U] [M], épouse [S],
4°/ à M. [Y] [S],
domiciliés tous deux [Adresse 5],
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Gallet, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la Caisse des dépôts et consignations, après débats en l'audience publique du 11 octobre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Gallet, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Caisse des dépôts et consignations aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Caisse des dépôts et consignations ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la Caisse des dépôts et consignations
Il est fait grief à l'arrêt attaqué du 16 février 2021 d'AVOIR ordonné à la Caisse des dépôts et consignations de produire, dans le délai de quatre mois à compter de la signification de la présente décision, pour les années 2014 et 2015, des décomptes de charges conformes aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989 et du décret n° 87-713 du 26 août 1987 et présentés par catégorie de dépenses, isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble situé [Adresse 4]) parmi les dépenses de l'ensemble immobilier, répartissant lesdites dépenses par cage d'escalier de l'immeuble, ne comportant, pour l'immeuble et la cage d'escalier considérés, que les dépenses afférentes à des prestations accessoires aux locaux loués par les locataires ou à des services dont ils ont bénéficié, tels que définis par la liste annexée au décret n° 87-713 du 26 août 1987, à l'exclusion des dépenses de gardiennage non justifiées à ce jour et d'AVOIR, en conséquence, sursis à statuer sur l'ensemble des autres demandes principales et accessoires formées par la Caisse des dépôts et consignations et d'AVOIR débouté la Caisse des dépôts et consignations de ses demandes en paiement de la somme de 1.504,86 € avec intérêts au taux légal, de la somme de 150,49 € au titre de la clause pénale et de capitalisation des intérêts ;
AUX MOTIFS QUE, sur la demande en paiement de la Caisse des dépôts et consignations au titre des régularisations de charges des années 2014 et 2015 (1.504,86 €), la Caisse des dépôts et consignations expose à la cour que cette demande n'est pas prescrite, le point de départ de la prescription correspondant à la date de régularisation des charges, soit le 1er mai 2017, et que les époux [P] sont mal fondés à solliciter l'annulation des régularisations de charges et la restitution des provisions qu'ils ont acquittées, dès lors qu'elle s'est conformée en tous points aux exigences de l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989 en communiquant à ses locataires un décompte par nature de charges et en tenant à leur disposition les pièces justificatives pendant six mois à compter de l'envoi du décompte ; qu'elle souligne que le mode de répartition des charges est parfaitement équitable en ce qu'il prend en compte la surface habitable et en ce qu'il est conforme aux usages et adopté par la quasi-totalité des ensembles immobiliers du parc locatif ; que la Caisse des dépôts et consignations demande, dans le corps de ses écritures, à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à présenter des décomptes de charges isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble occupé par les époux [P] et répartissant les dépenses par cage d'escalier de l'immeuble ; qu'elle expose que les charges n'étant pas réparties par bâtiment, il n'était pas possible de verser aux débats les charges afférentes au seul bâtiment occupé par les époux [P] et [S] ; que les locataires infirmés soutiennent que le bailleur ne peut refacturer aux locataires que les prestations et services dont ils bénéficient directement, que l'appartement occupé par les époux [P] se trouve au sein d'un ensemble immobilier composé de 32 immeubles dont la Caisse des dépôts et consignations est propriétaire, que la bailleresse ne peut faire masse de la totalité des dépenses récupérables des 32 immeubles et les répartir entre les locataires de l'ensemble immobilier au prorata des surfaces qu'ils occupent, chacun de ces immeubles ayant ses parties communes, escaliers et ascenseurs qui lui sont propres, le nombre d'ascenseurs étant différents selon les immeubles, certains immeubles disposant d'espaces verts et/ou de gardiens et d'autres non ; qu'ils exposent que le système de répartition des charges adoptés par la Caisse des dépôts et consignations aboutit à refacturer à des locataires des sommes qui ne correspondent ni à des prestations accessoires à la chose louée, puisqu'elles correspondent à un autre immeuble, ni à des services dont ils bénéficient ; que, sur ce, la cour relève que le chef du jugement déféré ayant condamné la Caisse des dépôts et consignations à présenter des décomptes de charges isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble occupé par les époux [P] et répartissant les dépenses par cage d'escalier de l'immeuble ne fait l'objet d'aucune prétention dans le dispositif des dernières conclusions de l'appelante, qui seul saisit la cour ;
1) ALORS QUE les juges sont tenus de ne pas dénaturer les conclusions qui les saisissent ; qu'en l'espèce, dans le dispositif de ses dernières conclusions d'appel, la Caisse des dépôts et consignations demandait, d'une part, la confirmation du jugement rendu le 7 mars 2019 par le tribunal d'instance de Courbevoie en ce qu'il a constaté la prescription et déclaré irrecevables les demandes reconventionnelles des locataires en indemnisation d'un trouble de jouissance et allocation subséquente de dommages-intérêts pour procédure abusive et en contestation des charges locatives pour les années 2012 et 2013, et, d'autre part, l'infirmation du même jugement pour le surplus (concl., p. 18 -19) ; qu'il en résultait que la Caisse des dépôts et consignations sollicitait la réformation du jugement rendu le 7 mars 2019 par le tribunal d'instance de Courbevoie, en ce qu'il lui a ordonné de produire des décomptes de charges conformes aux exigences de l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989 et au décret du 26 août 1987 ; qu'en affirmant que, dans le dispositif de ses dernières conclusions d'appel, la Caisse des dépôts et consignations ne sollicitait pas l'infirmation du « chef du jugement déféré [l']ayant condamnée à présenter des décomptes de charges isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble occupé par les époux [P] et répartissant les dépenses par cage d'escalier de l'immeuble », la cour d'appel, qui a dénaturé les conclusions de la Caisse des dépôts et consignations, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QU'il appartient à la cour d'appel d'interpréter le dispositif des conclusions des parties à la lumière des motifs qu'elles contiennent ; qu'en l'espèce, dans le dispositif de ses dernières conclusions d'appel, la Caisse des dépôts et consignations sollicitait l' « infirmation du jugement rendu le 7 mars 2019 par le tribunal d'instance de Courbevoie » (concl., p. 19) ; que la cour d'appel a constaté que « la Caisse des dépôts et consignations demande, dans le corps de ses écritures, à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à présenter des décomptes de charges isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble occupé par les époux [P] et répartissant les dépenses par cage d'escalier de l'immeuble » (arrêt, p. 6 § 6) ; qu'en affirmant que « le chef du jugement déféré ayant condamné la Caisse des dépôts et consignations à présenter des décomptes de charges isolant les seules dépenses afférentes à l'immeuble occupé par les époux [P] et répartissant les dépenses par cage d'escalier de l'immeuble ne fai[sait] l'objet d'aucune prétention dans le dispositif des dernières conclusions de l'appelante, qui seul saisit la cour », la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 954, alinéa 3 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017.