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23/11/2022 | FRANCE | N°20-15.904

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 23 novembre 2022, 20-15.904


CIV. 1

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 23 novembre 2022




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10790 F

Pourvoi n° A 20-15.904




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 23 NOVEMBRE 2022

M. [P] [H], domicilié [Adr

esse 1], a formé le pourvoi n° A 20-15.904 contre l'arrêt rendu le 9 mars 2020 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre - section 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à M...

CIV. 1

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 23 novembre 2022




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10790 F

Pourvoi n° A 20-15.904




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 23 NOVEMBRE 2022

M. [P] [H], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 20-15.904 contre l'arrêt rendu le 9 mars 2020 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre - section 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [C] [S], domiciliée [Adresse 2],

2°/ à M. [J] [T], domicilié [Adresse 4] (Estonie),

3°/ à Mme [V] [T], domiciliée [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.


Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations écrites de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [H], de la SCP Doumic-Seiller, avocat de Mme [S], de M. [T] et de Mme [T], après débats en l'audience publique du 4 octobre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [H] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [H] et le condamne à payer à Mme [S], M. [T] et Mme [T] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille vingt-deux, signé par lui même et Mme Vignes, greffier de chambre présent lors du prononcé. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [H]

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. [P] [H] a engagé sa responsabilité civile professionnelle dans le cadre de la rédaction des actes authentiques du 30 janvier 2009 et d'AVOIR condamné M. [P] [H] à verser à Mme [C] [S], M. [J] [T] et Mme [V] [T] la somme de 184.538 euros en réparation de leur préjudice ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE le notaire, tenu d'un devoir de conseil absolu, doit veiller à l'efficacité des actes qu'il dresse ; qu'il doit informer et éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets de l'acte auquel il prête son concours, notamment quant à ses incidences fiscales qu'il lui appartient de prévoir ; qu'à défaut, il engage sa responsabilité sur le fondement de l'article 1382 devenu 1240 du code civil à la mesure du préjudice en relation de causalité avec la faute commise ; que les compétences personnelles des parties ne le dispensent pas de son devoir de conseil ; que la preuve du conseil ou de l'information donnée lui incombe et peut être rapportée par tous moyens ; que l'existence d'une faute constituée par une erreur rédactionnelle n'est pas discutée par les parties ; que la clause insérée dans l'acte de vente du fonds de commerce en date du 30 janvier 2009 selon laquelle « le cessionnaire est propriétaire du fonds cédé à compter de ce jour et il en a la jouissance à compter rétroactivement du 15 novembre 2008, par la prise de possession réelle lesdits biens étant à cette date libres de toute location ou occupation » a été rectifiée par acte du 29 avril 2011 par une clause ainsi libellée « les comparants précisent que c'est à tort et par erreur et par suite d'une ERREUR MATERIELLE s'il a été indiqué à l'acte ci-dessus que le transfert de propriété du fonds de commerce vendu intervenait « à compter de ce jour », soit le 30 janvier 2009 (jour de l'acte) alors, qu'en réalité, ce transfert de propriété est intervenu tout comme le transfert de jouissance, le 15 novembre 2008, et que la VOLONTE DES PARTIES à l'acte était bien que le transfert de propriété du fonds de commerce vendu ait lieu rétroactivement au 15 novembre 2008, tout comme l'entrée en jouissance » ; que Me [H] a également failli à son obligation de conseil et commis une faute en ne s'assurant pas de l'efficacité juridique de celle clause insérée à l'acte de vente du fonds de commerce qui prévoit une rétroactivité de l'entrée en jouissance et du transfert de propriété dans les actes de vente du fonds de commerce et de l'immeuble ; que le courrier adressé le 14 décembre 2008 par M. [T] au centre des impôts de [Localité 3] pour l'informer de la cession de son usine démontre qu'il avait connaissance de la nécessité de réaliser la vente du fonds de commerce avant le terme de l'année 2008 afin de pouvoir bénéficier d'une exonération fiscale sur les plus-values liées à cette cession ; que le manquement du notaire réside, non pas dans une absence d'information délivrée sur ce point aux époux [T], mais dans la délivrance d'un conseil inadapté consistant en la possibilité de faire rétroagir les effets de la vente et le transfert de propriété par la seule insertion d'une clause de rétroactivité dans les actes de vente au mépris des principes d'annualité de l'impôt et de l'interdiction de faire remonter les effets d'un contrat affectant les résultats d'un exercice comptable sur un exercice déjà clos ; que l'insertion de cette seule clause, sans autre élément permettant de démontrer que la vente était parfaite, au sens de l'article 1583 du code civil, en raison d'un accord des parties sur le fonds de commerce objet de la vente et sur son prix dès la fin de l'année 2008 et que le transfert de propriété avait réellement eu lieu avant le 30 janvier 2009 n'était pas de nature à satisfaire l'objectif recherché par les époux [T] de pouvoir imputer les plus-values relatives à cette vente sur l'exercice comptable et fiscal de l'année 2008 afin de bénéficier d'une exonération intégrale des droits fiscaux y afférents ; que ce but est établi par les démarches qu'ils ont initiées dès octobre 2008 pour vendre le fonds de commerce, date rappelée par Me [H] dans ses correspondances des 22 août 2011 et 26 août 2014, mais également pour doter la SARL Moulin de Mousquety, créée le 15 novembre 2008, d'une personnalité juridique avant la fin de l'année 2008 et dont ils justifient par l'avis de constitution publié le 18 décembre 2008 et le dépôt des statuts au greffe du tribunal de commerce de Toulon le 19 décembre 2008 ; que s'il existait une volonté commune des parties de fixer le transfert de propriété au 15 novembre 2008, comme affirmé dans l'acte rectificatif du 29 avril 2011, celle-ci n'a pas été retenue par l'administration fiscale ni par le juge administratif qui ont considéré qu'aucun accord sur la chose et le prix de la vente n'avait été matérialisé avant le terme de l'année 2008 ; que l'arrêt de la cour administrative d'appel indique ainsi que « l'article 27 des statuts de la SARL Moulin de Mousquety, enregistrés au service des impôts des entreprises de [Localité 5]-Est le 12 décembre 2008, mentionne un prix de cession du fonds de commerce s'établissant à 1 000 000 euros » et que « ce prix étant différent de celui mentionné dans l'acte notarié du 30 janvier 2009, soit 740 000 euros, M. et Mme [T] ne sauraient soutenir qu'un accord sur la chose et le prix serait intervenu avant le 30 janvier 2009 » ; que le notaire, en charge de ce projet de vente, avait pourtant eu connaissance des statuts de la société prévoyant un prix d'achat différent de celui qui a été finalement décidé selon le courrier qui lui a été adressé le 9 décembre 2008 par les époux [T] mentionnant, en toute fin, « ci-joint également notre projet de statuts, nous avons rendez-vous jeudi prochain à la chambre de commerce de Toulon pour l'immatriculation » et avait reçu Mme [T] en rendez-vous le 28 novembre 2008, date qu'il retient dans ses conclusions comme celle où la décision de vendre a été prise, et avait nécessairement abordé le prix de vente du fonds de commerce avec elle autant que le projet d'achat de la SARL Moulin de Mousquety en cours de constitution ; que dès lors, la seule insertion d'une clause prévoyant un transfert de propriété à une date antérieure à l'acte de vente n'était pas de nature à permettre d'établir la réalité objective de ce transfert et aux époux [T] d'obtenir une exonération totale des droits fiscaux relatifs aux plus-values de cette cession ; que les fautes de Me [H] sont caractérisées et sont directement à l'origine du préjudice subi par les consorts [T] consistant en un redressement fiscal pour taxation des plus-values générées par la cession du fonds de commerce qui ne pouvaient être rattachées qu'à l'exercice en cours lors de la réalisation de la vente, soit l'année 2009 ; que ce notaire a, par là même, engagé sa responsabilité, étant tenu de toute faute préjudiciable commise par lui dans l'exercice de ses fonctions ; que les consorts [T] sont bien fondés à réclamer une indemnisation intégrale des sommes qu'ils ont dû acquitter au titre de l'imposition des plus-values de la cession ; que ne constitue pas une perte de chance, mais un préjudice entièrement consommé le préjudice subi par eux du fait du redressement fiscal supporté, dès lors qu'ils ont été privés, par les fautes du notaire, de l'exonération fiscale prévue à l'article 151 septies II du code général des impôts à laquelle ils auraient eu droit si la vente était intervenue avant le 31 décembre 2008 pour en remplir toutes les conditions notamment de seuil de chiffres d'affaires, ce qui n'est pas discuté par les parties ; que contrairement à ce que soutient Me [H], rien n'établit qu'il était dans l'impossibilité d'instrumenter avant le 31 décembre 2008 en raison d'une saisine trop tardive des époux [T] ; que l'examen des pièces versées aux débats démontre que dès octobre 2008, il a été avisé du projet de vente du fonds de commerce par les époux [T], qu'il les a reçus en rendez-vous le 28 novembre 2008, que par courrier daté du 9 décembre 2008 ceux-ci lui ont fait parvenir les éléments chiffrés nécessaires à l'obtention de l'exonération fiscale susvisée pour préparer l'acte, les statuts de la SARL en cours de constitution et l'information sur la date de rendez-vous pour l'immatriculation de la société dont ils ont déposé les statuts le 19 décembre 2008 aux fins d'immatriculation ; que le notaire a lui-même communiqué, par courrier du 26 août 2014, les demandes de renseignements envoyées le 1er décembre 2008 à la commune de l'Isle-sur-Sorgue ainsi qu'un récapitulatif des différentes diligences réalisées ; que bien que cette lettre fasse état d'une demande expédiée le 1er décembre 2008 pour connaître l'existence, ou non, d'un droit de préemption urbain sur la vente du fonds de commerce, mais dont aucune copie n'a été versée aux débats par les parties, le notaire n'a fait parvenir aucune relance à la mairie afin d'obtenir une réponse rapide sur ce point alors qu'il avait reçu, dès le 4 décembre 2008, une réponse de cette dernière relative à la situation de l'immeuble à vendre et à un éventuel droit de préemption le concernant et ce, malgré l'urgence à instrumenter l'acte de vente du fonds de commerce avant la fin de l'année 2008 ; que Me [H] se contente d'ailleurs de se retrancher derrière une impossibilité pour les consorts [T] « d'obtenir l'ensemble des pièces indispensables dans un délai aussi bref » sans pour autant détailler les pièces manquantes pour établir l'acte de vente de fonds de commerce, dont rien n'imposait qu'il soit dressé le même jour que l'acte de vente de l'immeuble, et alors qu'il lui appartenait de recueillir certaines de ces pièces indispensables ; qu'au vu des pièces justificatives produites (proposition de rectification de novembre 2010, avis d'imposition d'août et septembre 2011, mise en demeure du 3 juin 2014), les consorts [T] ont été dispensés de l'intégralité des suppléments d'imposition pour l'année 2008 ainsi que des majorations de 40 % pour manquement délibéré pour l'année 2009 ; que selon la proposition de rectification du 29 novembre 2010 les sommes dues s'établissaient à 256.906 euros à savoir 167.852 euros au titre de l'impôt, 3.672 euros au titre du prélèvement social, 8.856 euros au titre de la CSG, 540 euros au titre de la CRDS, 3.618 euros au titre des intérêts de retard et 72.368 euros au titre des majorations pour manquement délibéré (calculées sur l'impôt sur le revenu soit 67.141 euros, sur le prélèvement social soit 1.469 euros, sur la CSG soit 3.542 euros, sur la CRDS soit 216 euros) ; qu'en l'absence de production de tout autre document actualisé, ce document détaillé doit servir de base au chiffrage du préjudice ; que la mise en demeure de payer du 3 juin 2014 ne peut servir de référence dès lors que le chiffre de l'impôt sur le revenu 2009 soit 238.350 euros au 31/07/2011 inclut déjà les pénalités de 40 % puisque ce chiffre, rajouté à la somme de 18.556 euros figurant au titre des prélèvements sociaux, donne bien un total de 256.906 euros ; que la teneur de l'arrêt de la cour administrative d'appel de 2016 qui a écarté l'application des majorations de l'article 1729 du code général des impôts ramène l'imposition de 2009 à 184.538 euros (256.906 euros – 72.368 euros) ; que Me [H] sera condamné au paiement de cette somme à titre de dommages et intérêts ; que le jugement sera réformé sur la nature et le montant de l'indemnisation allouée ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Mme [C] [S], veuve [T], M. [J] [T] et Mme [V] [T] recherchent la responsabilité délictuelle du notaire, sur un double manquement : en premier lieu, l'erreur rédactionnelle commise dans l'acte authentique de vente du fonds de commerce en date du 30 janvier 2009 sur la date d'effet de la cession, en second lieu, le manquement du notaire à son devoir de conseil, en ce qu'il n'a pas attiré l'attention des parties sur les conséquences fiscales des actes signés le 30 janvier 2009 ; que s'agissant de l'erreur rédactionnelle ou « erreur de plume » affectant l'acte de cession du fonds de commerce, celle-ci n'est pas contestée par Me [P] [H] : il a reconnu dans un courrier adressé au conseil des époux [T] le 22/08/2011 qu'il avait été mentionné par erreur dans l'acte que le transfert de propriété intervenait à la date de l'acte alors qu'il devait être mentionné un transfert de propriété rétroactif au 15/11/2008 ; que Me [H] a d'ailleurs établi un acte rectificatif le 29 avril 2011 ; que s'agissant du devoir de conseil qui s'impose au notaire, il convient de relever que celui-ci est absolu : il ne s'efface ni devant les connaissances personnelles du client, ni même l'assistance de celui-ci par un professionnel ou un tiers avisé ; que ce devoir de conseil s'étend à l'efficacité des actes qui rédige, et aux conséquences fiscales de ces actes ; qu'en l'espèce, Me [P] [H] ne conteste pas avoir eu connaissance de l'intention des époux [T] avant d'établir les actes de cession ; qu'il confirme même dans son courrier du 22/08/2011 avoir reçu ceux-ci dès octobre 2008 pour évoquer le projet de cession, puis préparer un prévisionnel financier pour l'opération et le coût financier des ventes à intervenir, et enfin préparer les pièces nécessaires aux actes de cessions des biens immobiliers et du fonds de commerce de centrale hydroélectrique ; que pour autant, les demandeurs indiquent que l'attention des époux [T] n'a jamais été attirée par le notaire sur les conséquences fiscales de la signature de l'acte de cession du fonds de commerce postérieurement au 31 décembre 2008 ; que Me [P] [H] ne démontre pas avoir satisfait à cette obligation ; qu'or il résulte de l'analyse de la proposition de rectification fiscale du 29/11/2010 que l'acte de cession du fonds de commerce établi le 30/01/2009 ne pouvait faire rétroagir les conséquences fiscales de la cession sur l'exercice 2008, en particulier au 15/11/2008 comme le souhaitaient les parties ; que les dispositions de l'article 38 du CGI et le principe fiscal d'annualité de l'impôt conduisaient en effet à ne pas pouvoir retenir sur l'exercice 2008 les résultats issus d'un contrat signé sur l'exercice 2009, fût-ce un contrat comportant une clause de rétroactivité de la cession ; que les demandeurs ont appris pour la première fois cette information importante au travers des dernières écritures de Me [P] [H], lequel conteste l'existence du dommage en indiquant que les impositions étaient dues quelles que soient les mentions de l'acte ; que le but poursuivi par les époux [T] était d'imputer fiscalement à la SARL Moulin de Mousquety les résultats de la période du 15/11/2008 au 31/12/2008, ainsi qu'ils y ont procédé dans leur déclaration fiscale du 14/12/2008 ; que la SARL Moulin de Mousquety a d'ailleurs été constituée également le 15/11/2008 pour permettre cette opération ; qu'il appartenait au notaire, chargé de la rédaction des actes afférents au projet de ses clients, d'attirer leur attention sur les limites imposées au but poursuivi par les règles fiscales en vigueur ; que le notaire n'ayant pas délivré cette information en temps utile, alors qu'il a reçu ses clients dès octobre 2008, ne peut s'exonérer de sa responsabilité en expliquant que ses clients n'avaient pas rassemblé les documents utiles à la signature de l'acte avant la fin de l'année 2008 ; que les fautes reprochées à Me [P] [H] sont donc constituées ; que les époux [T] se sont vus notifier une imposition rectificative de : - 14.178 euros eu titre de l'impôt sur le revenu 2008, - 238.350 euros au titre de l'impôt sur le revenu 2009, - 18.556 euros au titre des prélèvements sociaux ; que ces sommes incluent des pénalités à hauteur de 40 % ; que l'administration fiscale a en effet réintégré les résultats d'exploitation enregistrés au nom de la SARL Moulin du Mousquety pour les périodes allant du 15/11/2008 au 31/12/2008 et du 01/01/2009 au 30/01/2009 aux résultats de l'activité exploitée à titre individuel par M. [T] ; qu'elle a également remis en cause le bénéfice de l'exonération de plus-value de cession concernant la cession du fonds de commerce et la cession de l'ensemble immobilier et du droit d'eau, et rattaché ces plus-values à l'exercice 2009 ; que dans le cadre de la procédure administrative engagée par les époux [T] pour contester les rehaussements et pénalités qui leur étaient réclamées, ceux-ci ont obtenu en cours d'instance une décharge des impositions et pénalités au titre de l'année 2008, à hauteur de 14.178 euros, prononcée par décision du directeur départemental des finances publiques du Var le 12 décembre 2014 ; que par décision du 23 février 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a considéré que l'administration fiscale avait, à tort, réintégré dans les résultats de l'exercice clos en 2009 de l'activité exercée à titre individuel par M. [T] les produits et charges d'exploitation de la centrale hydro-électrique pour la période du 1er au 30 janvier 2009 ; qu'elle a estimé que, si la rétroactivité de la cession sur le plan fiscal ne pouvait intervenir sur un exercice antérieur (2008), elle pouvait en revanche intervenir sur l'exercice de signature de l'acte (2009) ; que la cour a donc accordé aux époux [T] une décharge d'imposition à hauteur de 2.115 euros sur 2009 ; qu'elle a en revanche refusé toute décharge concernant les plus-values de cession rattachées à l'exercice fiscal 2009 ; que dès lors, il est constaté que : -l'erreur rédactionnelle commise par le notaire dans l'acte de cession du fonds de commerce du 30 janvier 2009 avait engendré une imposition indue sur la période du 01/01/2009 au 30/01/2009, dont le dégrèvement avait été refusé tant par l'administration fiscale que par le tribunal administratif de Toulon, et a été finalement admis par la cour administrative d'appel, que le préjudice subsistant pour les parties sur ce point réside uniquement dans la nécessité pour elles d'avoir dû mener une longue procédure administrative pour obtenir le dégrèvement, que toutefois aucune demande n'est formulée à ce titre, - cette erreur rédactionnelle en revanche n'a pas entraîné d'imposition indue sur l'exercice 2008, car sans sa survenance, cette imposition aurait malgré tout été exigible des époux [T] en application des règles fiscales, et en tout état de cause a fait l'objet d'un dégrèvement total, - le défaut de conseil par le notaire, sur les conséquences fiscales des actes dont il est le rédacteur, et sur l'importance de la date de signature de ces actes (avant ou après le 31/12/2008) quant aux impositions dues par les signataires, a causé aux parties un préjudice ;

1°) ALORS QUE l'officier ministériel, qui est tenu de traduire de manière impartiale la volonté des parties, ne peut instrumenter un acte que les parties n'ont pas conclu ; qu'en reprochant à M. [H] d'avoir conseillé aux époux [T] de faire rétroagir, dans l'acte de cession de leur fonds de commerce du 30 janvier 2009, le transfert de propriété de ce fonds au 15 novembre 2008 et de n'avoir pas réalisé la vente de ce fonds avant le terme de l'année 2008, seul moyen pour qu'ils puissent bénéficier d'une exonération de l'impôt sur la plus-value liée à cette cession, quand elle relevait elle-même qu'il n'existait aucun accord sur la chose et sur le prix de la cession entre les parties avant le 31 décembre 2008, comme l'avait jugé avant elle la cour administrative d'appel de Marseille dans son arrêt en date du 23 janvier 2016, ce dont il résultait que le notaire ne pouvait instrumenter une vente sur laquelle les parties ne s'étaient pas entendues, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

2°) ALORS QUE la vente est parfaite entre les parties dès qu'on est convenu de la chose et du prix ; qu'en affirmant que rien n'établit que le notaire était dans l'impossibilité d'instrumenter la vente avant le 31 décembre 2008, bien qu'elle ait elle-même relevé que les parties n'étaient pas parvenues à un accord sur la chose et sur le prix avant cette date, la cour d'appel a violé l'article 1583 du code civil ;

3°) ALORS QUE un notaire ne peut être tenu de réparer le préjudice résultant du paiement d'une imposition, dès lors que ce paiement a été causé par un fait qui lui est étranger sur lequel celui-ci n'avait aucune influence et se serait, ainsi, en tout état de cause produit ; qu'en considérant que M. [H] devait indemniser les consorts [T] de l'impôt sur la plus-value dont ils auraient été exonérés si la cession de leur fonds de commerce était intervenue avant le 31 décembre 2008, car rien n'aurait établi qu'il aurait été dans l'impossibilité d'instrumenter avant cette date, quand elle relevait elle-même qu'il n'existait aucun accord sur la chose et sur le prix de la cession entre les parties avant le 31 décembre 2008, comme l'avait jugé avant elle la cour administrative d'appel de Marseille dans son arrêt en date du 23 janvier 2016, ce dont il résultait que l'absence de conclusion de la cession avant le terme de l'année 2008 et, partant, le paiement de l'impôt sur la plus-value liée à cette cession avait été causé, non par un manquement du notaire, mais par le défaut d'accord des parties sur les éléments essentiels de la cession, ce qui constituait un fait objectif, étranger à l'officier ministériel, la cour d'appel n'a pas, là encore, tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 1382, devenu 1240, du code civil.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 20-15.904
Date de la décision : 23/11/2022
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Première chambre civile, arrêt n°20-15.904 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse 11


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 23 nov. 2022, pourvoi n°20-15.904, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.15.904
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