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26/10/2022 | FRANCE | N°20-16174;20-16798

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 octobre 2022, 20-16174 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 octobre 2022

Cassation partielle

Mme VAISSETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 620 F-D

Pourvois n°
U 20-16.174
X 20-16.798 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET Ã

‰CONOMIQUE, DU 26 OCTOBRE 2022

I - La société Beologic, dont le siège est [Adresse 6]), a formé le pourvoi n° U 20-16.174 contre un arrêt rendu ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 octobre 2022

Cassation partielle

Mme VAISSETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 620 F-D

Pourvois n°
U 20-16.174
X 20-16.798 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 26 OCTOBRE 2022

I - La société Beologic, dont le siège est [Adresse 6]), a formé le pourvoi n° U 20-16.174 contre un arrêt rendu le 12 février 2020 par la cour d'appel de Toulouse (2e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MMA IARD, société anonyme,

2°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, société d'assurance mutuelle à cotisations fixes,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 2],

3°/ à M. [K] [H], domicilié [Adresse 1], pris en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société Eco tendance,

4°/ à la société HDI Global SE, dont le siège est [Adresse 3]),

5°/ à la société Boissec, société anonyme, dont le siège est [Adresse 9]),

6°/ à la société Inter mutuelles entreprises, société anonyme à directoire, dont le siège est [Adresse 4],

7°/ à la société Etablissements [I] [D], société anonyme, dont le siège est [Adresse 8],

8°/ à la société Eco tendance, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], anciennement dénommée société Wood Chop,

9°/ à la société Amlin Insurance SE, dont le siège est [Adresse 7] (Belgique), venant aux droits de la société Amlin Europe compagnie d'assurance,

défendeurs à la cassation.

II - la société Etablissements [I] [D], a formé le pourvoi n° X 20-16.798 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MMA IARD,

2°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles,

3°/ à M. [K] [H], pris en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société Eco tendance,

4°/ à la société HDI Global SE,

5°/ à la société Boissec,

6°/ à la société Inter mutuelles entreprises,

7°/ à la société Eco tendance, anciennement dénommée société Wood Chop,

8°/ à la société Beologic,

9°/ à la société Amlin Insurance SE, venant aux droits de la société Amlin Europe compagnie d'assurance,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse au pourvoi n° U 20-16.174 invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi n° X 20-16.798 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Beologic, de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Etablissements [I] [D], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Inter mutuelles entreprises, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société HDI Global SE, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Amlin Insurance SE, de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat des sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Boissec, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° U 20-16.174 et X 20-16.798 sont joints.

Désistement partiel

2. Il est donné acte à la société Etablissements [I] [D] (la société [D]) du désistement de son pourvoi n° X 20-16.798 en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Amlin Insurance SE, Beologic, Eco tendance, Inter mutuelles entreprises, Boissec, HDI Global SE et M. [H], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Eco tendance.

Faits et procédure

3. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 12 février 2020), la société suisse Boissec, qui commercialise des produits en bois, a acheté à la société Eco tendance des lames en bois composite.

4. À la suite de réclamations de ses clients portant sur divers désordres affectant les lames, la société Boissec, par acte du 26 juin 2014, a assigné la société Eco tendance et son assureur, la société Inter mutuelles entreprises (la société IME) en indemnisation des préjudices subis.
5. Par acte du 31 juillet 2014, la société IME a assigné en garantie la société [D], fabricant des lames, et ses assureurs, les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles (les sociétés MMA), lesquelles ont appelé en garantie la société belge Beologic, fournisseur de la matière première, et ses assureurs, les sociétés Amlin Europe compagnie d'assurance, aux droits de laquelle vient la société Amlin Insurance SE (la société Amlin) et HDI Gerling Assurance, aux droits de laquelle vient la société HDI Global SE (la société HDI).
.
6. La société Eco tendance a été placée en procédure de sauvegarde le 16 septembre 2014 puis en liquidation judiciaire par un jugement du 15 septembre 2015. La société Boissec a régulièrement déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire, M. [H].

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi n° X 20-16.798, ci-après annexé

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen relevé d'office

8. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article 7.2 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur les contrats de vente internationale de marchandises (la CVIM) :

9. Il résulte de ce texte que les questions concernant les matières régies par la CVIM et qui ne sont pas expressément tranchées par elle sont réglées selon les principes généraux dont elle s'inspire ou, à défaut de ces principes, conformément à la loi applicable en vertu des règles du droit international privé.

10. Pour déclarer recevable le recours de la société [D] formé à l'encontre de la société Beologic sur le fondement de la CVIM et dire qu'elle n'est pas forclose, l'arrêt se réfère aux seules dispositions de cette convention.

11. En statuant ainsi, alors que la CVIM, si elle impose à l'acheteur un délai pour dénoncer un défaut de conformité, ne comporte aucune règle de prescription, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le troisième moyen du pourvoi n° U 20-16.174

Enoncé du moyen

12. La société Beologic fait grief à l'arrêt de dire que les sociétés Amlin et HDI ne sont pas tenues de garantir le sinistre et de les mettre hors de cause, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le dispositif des conclusions de la société Amlin ne demandait aucunement sa mise hors de cause mais sollicitait seulement, sur le fondement des clauses d'exclusion de garantie, de déduire de la condamnation susceptible d'être prononcée à sa charge, les sommes de 58 720,20 euros au titre du remplacement des produits défectueux et 24 560,98 euros au titre des frais de dépose – repose ; qu'en jugeant purement et simplement que "la garantie de l'assureur n'(est) pas applicable" pour mettre entièrement ce dernier hors de cause, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

13. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

14. Pour dire que la société Amlin n'est pas tenue de garantir le sinistre et la mettre hors de cause, l'arrêt retient que le contrat n'est pas vidé de sa substance par les deux clauses d'exclusion invoquées par l'assureur et qu'une extension de garantie s'applique aux frais de dépose et de repose pour les produits jusqu'à trois ans après leur date de fabrication.

Il retient encore que cette garantie avait pris fin au moment de l'assignation en justice délivrée courant août 2014.

15. En statuant ainsi, alors que dans ses conclusions d'appel, sous le titre « sur la garantie de la société Amlin », au visa de deux clauses de ses conditions générales et particulières, la société Amlin demandait à la cour d'appel, d'une part, de la déclarer fondée à exclure de sa garantie le prix de remplacement des produits livrés par elle, incorporés dans les lames prétendument défectueuses après le processus d'extrusion réalisé par la société [D] et donc de déduire de la condamnation définitive susceptible d‘être prononcée à son égard une certaine somme correspondant au prix de remplacement de ces produits livrés par elle, de seconde part, de la déclarer fondée à exclure de sa garantie les frais de dépose-repose des produits fabriqués plus de trois ans auparavant et donc de déduire de la condamnation éventuellement prononcée contre elle une certaine somme correspondant aux frais de dépose-repose des produits défectueux qui n'étaient plus garantis à la date de délivrance de l'assignation de la société [D] à son encontre, ce dont il s'évince que la société Amlin ne déniait pas sa garantie pour la totalité des chefs de préjudice, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

16. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée sur le moyen relevé d'office entraîne, par voie de conséquence, celle des chefs de dispositif qui, par confirmation du jugement, condamne la société Beologic en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, et, y ajoutant, autorise la société [D] à recouvrer à l'encontre de la société Beologic la moitié des condamnations mises à sa charge, dit qu'au final la société Beologic supportera 1/3 des condamnations allouées à la société Boissec, rejette la demande de la société Beologic en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

Mise hors de cause

17. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause, sur leur demande, les sociétés MMA, IME, HDI, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les premier et deuxième moyens du pourvoi n° U 20-16.174, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il condamne la société Beologic en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, et, y ajoutant, déclare la société Etablissements [I] [D] recevable en son recours à l'encontre de la société Beologic sur le fondement de la Convention de Vienne et dit qu'elle n'est pas forclose, autorise la société Etablissements [I] [D] à recouvrer à l'encontre de la société Beologic la moitié des condamnations mises à sa charge, dit qu'au final la société Beologic supportera 1/3 des condamnations allouées à la société Boissec, rejette la demande de la société Beologic en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens, dit que la société Amlin Insurance SE n'est pas tenue de garantir le sinistre et la met hors de cause, l'arrêt rendu le 12 février 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Met hors de cause, sur leur demande, les sociétés MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles, Inter mutuelles entreprises et HDI Global SE ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne la société Etablissements [I] [D] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi n° U 20-16.174 par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société Beologic.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la société ETABLISSEMENTS [I] [D] recevable en son recours à l'encontre de la société BEOLOGIC sur le fondement de la Convention de Vienne et dit qu'elle n'est pas forclose ;

AUX MOTIFS QUE « sur le recours de la société ETABLISSEMENTS [I] [D] à l'encontre de la société BEOLOGIC ;

Qu'il est engagé sur le fondement de la Convention de Vienne (CVIM) et il y a lieu de se reporter aux développements plus haut en ce qui concerne les conditions d'application de ladite convention et la non-conformité des produits livrés ;

Que la société BEOLOGIC ne peut valablement soutenir que la dénonciation n'a pas été faite à bref délai au sens de la CVIM ou serait forclose alors que :
- dès le 9 mars 2012 elle a été informée par Monsieur [I] [D] de l'existence de non-conformités causées par l'éclatement des lames de terrasse fabriquées avec le compound et invitée à assumer sa part de responsabilité ce qui démontre que le défaut a été dénoncé à bref délai ;
- dès la fin de l'année 2011, elle avait conscience des difficultés et de la nécessité de remplacer le polyéthylène par PVC "qui provoque moins de déformations sur le profil et moins d'absorption d'eau puisqu'il y a moins de bois et que le PVC est une meilleure barrière contre l'humidité" selon la pièce numéro 20 versée aux débats qui témoigne de l'existence d'un litige avec une société située au Portugal, ce qui l'empêche d'opposer la déchéance alors qu'elle connaissait ou ne pouvait ignorer l'existence des défauts invoqués ;

Qu'en définitive il y a lieu de débouter la société BEOLOGIC de l'ensemble des moyens qu'elle oppose aux actions dirigées à son encontre et de dire que l'appel en garantie formée à son encontre, dans le cadre de l'action récursoire du fabricant auquel elle a fourni la matière première, est recevable » ;

1°/ ALORS QU'aux termes de l'article 39 de la Convention de Vienne sur les contrats de vente internationale de marchandises, l'acheteur qui se prévaut d'un défaut de conformité dans le cadre de livraisons successives, doit le dénoncer au vendeur en précisant les références de chaque lot livré affecté par ledit défaut ; que pour déclarer recevable l'action récursoire de la société ETABLISSEMENTS [I] [D] à l'encontre de la société BEOLOGIC, la Cour d'appel s'est fondée sur le courrier unique et général du 9 mars 2012 adressé par Monsieur [I] [D] à l'exposante ; qu'en statuant ainsi, alors que ce courrier n'indiquait pas les différentes dates auxquelles l'acheteur avait précisément obtenu livraison de chaque lot de compound prétendument défectueux ainsi que le faisait valoir l'exposante dans ses écritures, la Cour d'appel a violé l'article 39 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 ;

2°/ ALORS QU'aux termes de l'article 39 de la Convention de Vienne sur les contrats de vente internationale de marchandises, l'acheteur est dans tous les cas déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité, s'il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises ; que pour déclarer recevable l'action récursoire de la société ETABLISSEMENTS [I] [D] à l'encontre de la société BEOLOGIC, la Cour d'appel s'est bornée à énoncer que « le défaut a été dénoncé à bref délai » ; qu'en statuant ainsi, alors que les premiers lots de compound ont été livrés dès mars 2008 et que la dénonciation du défaut est prétendument intervenue le 9 mars 2012 ainsi que l'ont constaté les juges du fond, la Cour d'appel a violé l'article 39 § 2 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 par refus d'application ;

3°/ ALORS QU'aux termes de l'article 40 de la Convention de Vienne sur les contrats de vente internationale de marchandises, la connaissance par le vendeur du défaut de conformité doit s'apprécier au jour de la vente ou de la livraison des marchandises ; que pour déclarer recevable l'action récursoire de la société ETABLISSEMENTS [I] [D] à l'encontre de la société BEOLOGIC, la Cour d'appel a retenu que l'exposante avait eu connaissance du défaut affectant le compound dès la fin de l'année 2011, soit postérieurement aux différentes ventes et livraisons des marchandises ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 40 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir autorisé la société ETABLISSEMENTS [I] [D] à recouvrer à l'encontre de la société BEOLOGIC la moitié des condamnations mises à sa charge et d'avoir dit qu'au final la société BELOGIC supportera 1/3 des condamnations allouées à la société BOISSEC ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la garantie due par les sociétés ETABLISSEMENTS [I] [D] et BEOLOGIC :

Que selon les pièces versées aux débats, la société BOISSEC s'est exclusivement fournie auprès de la société ECO TENDANCE laquelle a confié le processus de fabrication à deux sociétés distinctes, les sociétés ETABLISSEMENTS [I] [D] et la société BEOLOGIC ;

Que selon les conclusions concordantes des experts précédemment mandatés, la première est défaillante dans le processus d'extrusion réalisé dans ses ateliers qui est responsable d'une faible compacité du produit tandis que la seconde a fourni une matière première qui présentait un fort caractère hydrophile avec une proportion de 70% bois et de 30% PEHD qui a contribué aux désordres ;

Que le respect des normes ne suffit pas à exonérer le fabricant de sa responsabilité dès lors que la proportion trop élevée de bois dans le compound couplée à des défauts de fabrication et de compactage expliquent la forte sensibilité des lames Belavia à l'humidité ainsi que leur porosité qui entraîne des déformations et un vieillissement prématuré ;

Que c'est en vain que la société ETABLISSEMENTS [I] [D] prétend qu'aucun manquement de sa part n'est démontré dans le processus d'extrusion (en se basant sur le rapport de l'expert [J]) aux motifs que les tests effectués sur un autre polymère pour la fabrication du bois de la gamme ALVEA n'ont révélé aucune anomalie alors qu'il n'est pas contestable que la gamme BELAVIA présentait un manque d'adhérence entre les particules de bois et le polyéthylène, les lames façonnées présentant une très grande hétérogénéité de structure avec la présence d'agglomérats et de manques ;

Que la responsabilité des deux sociétés étant engagée pour avoir contribué ensemble à la réalisation du dommage, il y a lieu de condamner la société ETABLISSEMENTS [I] [D] à garantir l'acquéreur, la société BOISSEC, de son préjudice et également d'accueillir son recours à l'encontre de son fournisseur de matières, la société BEOLOGIC » ;

1°/ ALORS QUE la société BEOLOGIC faisait valoir dans ses conclusions que la société BOISSEC, en qualité de spécialiste du bois, avait commis une négligence fautive ayant contribué à la réalisation de son préjudice dans la mesure où elle n'a pas demandé à sa co-contractante les analyses effectuées sur les lames de terrasse avant leur commercialisation ; qu'en omettant de répondre au moyen formulé par la société BEOLOGIC, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

2°/ ALORS QUE la société BEOLOGIC faisait valoir dans ses conclusions qu'il résultait des conditions générales de vente de l'exposante, figurant au verso de toutes ses factures adressées et réceptionnées par la société ETABLISSEMENTS [I] [D], que l'indemnisation financière susceptible d'être réglée par la société BEOLOGIC était limitée au montant de l'indemnité servie par son assurance ; qu'en omettant de répondre au moyen formulé par la société BEOLOGIC, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société MS AMLIN ASSURANCE et la société HDI GLOBAL SE ne sont pas tenues à garantir le sinistre et les met hors de cause ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la garantie de la société AMLIN INSURANCE :

Que le contrat entre la société BEOLOGIC et son assureur est régi par la loi belge, en l'espèce la loi du 25 juin 1992, la loi du 4 avril 2014 n'étant entrée en vigueur qu'à compter du 14 novembre 2014 soit postérieurement à la résiliation du contrat intervenu avec effet au 1er janvier 2013 ;

Que la société BEOLOGIC prétend que le contrat comprend des clauses contradictoires en sorte que le contrat est vidé de sa substance et partant inopposable ;

Que la société d'assurance prétend pour sa part que le droit belge reconnaît la validité des clauses d'exclusion de garantie, en particulier dans les assurances non obligatoires comme en l'espèce, que l'exclusion qui a une portée limitée n'altère en rien la substance du contrat et que c'est sans le démontrer ni s'en expliquer davantage que la société BEOLOGIC soutient le contraire ;

Que selon le contrat, la société BELOGIC est assurée lorsqu'est mise en cause sa responsabilité civile pour tous dommages occasionnés à des tiers par des produits après leur livraison par des travaux après leur exécution ; que sont considérés comme dommages après livraison ou exécution de travaux, tout dommage résultant d'un défaut des produits ou des travaux, imputable à une erreur ou une négligence dans la conception, à la fabrication, la transformation, la préparation ou le conditionnement, à l'emballage, aux instruments et au mode d'emploi ;

Qu'en outre, elle est assurée pour tous dommages occasionnés à des biens appartenant à des tiers par les produits livrés ou défectueux et/ou par les travaux dans lequel ils étaient incorporés ;

Que la compagnie d'assurances oppose à sn assurée deux clauses d'exclusion :
- la clause d'exclusion relative au remplacement ou à la réparation des produits livrés qui figure à l'article 22 du chapitre III de la « Garantie après livraison » des conditions générales de la police d'assurances ;
- la clause afférente aux frais de dépose et repose, démontage et remontage des produits livrés défectueux prévus à l'article TL1 des conditions particulières ;

Que compte tenu du fait que les produits assurés ont été incorporés aux lames de bois composite, elle prétend selon des calculs détaillés dans ses écritures auxquelles il convient de se reporter, qu'en tout état de cause il y aurait lieu de déduire d'une éventuelle responsabilité la somme de 16 613,52 euros correspondant au prix de remplacement des produits livrés restés en stock et en ce qui concerne les marchandises déjà fournies aux clients, la somme de 42 106,68 soit au totale la somme de 58 720,20 euros ;

Que la clause qui stipule que "la garantie ne s'applique pas pour le remplacement ou la réparation des produits livrés et/ou des travaux exécutés qui sont défectueux" est claire et précise et il ne peut être sérieusement soutenu que l'attention de l'assuré n'a pas été suffisamment attirée sur cette exclusion lors de la signature du contrat ;

Que l'exclusion n'a pas une portée générale puisqu'elle permet de mobiliser la responsabilité civile de l'assuré après livraison pour les dommages causés aux tiers ou à ses biens ; qu'elle a seulement pour effet, comme il a été vu pour les contrats d'assurance souscrits par les sociétés françaises, d'exclure le remplacement ou la réparation du produit lui-même qui s'avère défectueux ;

Que dès lors il ne peut être prétendu que le contrat est vidé de sa substance et partant inopposable ;

Qu'en ce qui concerne les frais de dépose et repose (qui constitue une extension de garantie), il est stipulé au contrat que cette garantie ne s'applique plus aux produits trois ans après leur date de fabrication ;

Qu'il est acquis en l'espèce que les livraisons de compound auprès des établissements [D] se sont échelonnés entre 2009 et janvier 2010 ; qu'il y a lieu de prendre en compte cette dernière date comme point de départ du délai, la matière première étant nécessairement fabriquée avant ;

Que la garantie était donc éteinte au moment de l'assignation en justice intervenue courant août 2014 étant précisé qu'il n'est nullement établi qu'une dénonciation de l'existence d'un sinistre ait été faite dans le délai auprès de la compagnie d'assurances ; que le fait qu'il s'agisse d'un dommage sériel est sans conséquence sur l'application de la clause ;

Que rien n'interdit à la société d'assurance de délimiter les conditions de sa garantie dans le temps dès lors que la clause est rédigée de manière claire et non équivoque ; qu'il n'y a pas lieu de la réputer non écrite, aucun déséquilibre n'étant démontré entre les obligations de l'assureur et ceux du preneur d'assurance ;

Que la garantie de l'assureur n'étant pas applicable il n'y a pas lieu de rappeler le montant de la franchise et des plafonds stipulés au contrat ;

Que la société BELOGIC sera déboutée de sa demande tendant à être couverte par sa compagnie d'assurance au titre de sa responsabilité civile après livraison » ;

ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le dispositif des conclusions de la société AMLIN ASSURANCE ne demandait aucunement sa mise hors de cause mais sollicitait seulement, sur le fondement des clauses d'exclusion de garantie, de déduire de la condamnation susceptible d'être prononcée à sa charge, les sommes de 58.720,20 euros au titre du remplacement des produits défectueux et 24.560,98 euros au titre des frais de dépose – repose ; qu'en jugeant purement et simplement que « la garantie de l'assureur n'(est) pas applicable » pour mettre entièrement ce dernier hors de cause, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et a ainsi violé l'article 4 du Code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi n° X 20-16.798 par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements [I] [D].

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir dit que les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles ne sont pas tenues à garantir le sinistre et de les avoir mises hors de cause ;

Aux motifs que « la société MMA demande de réformer le jugement du tribunal de commerce qui l'a condamnée in solidum avec son assuré à indemniser la société Boissec aux motifs principaux que la seule garantie éventuellement mobilisable (au titre des dommages immatériels non consécutifs) est épuisée, que les demandes d'indemnisation ne sont pas justifiées et que sa garantie exclut en tout état de cause les frais de remplacement des lames de bois ; que la police prévoit que la société Établissements [I] [D] est assurée pour sa responsabilité civile après livraison ou achèvement des travaux : -pour les dommages matériels et immatériels consécutifs à hauteur de 2 millions d'euros -pour les dommages immatériels non consécutifs à hauteur de 305 000 € -pour les frais de dépose ou de repose à hauteur de 305 000 € -pour les frais de retrait des produits livrés à hauteur de 305 000 € ; qu'il est stipulé que ces montants sont exprimés par sinistre, pour l'ensemble des sinistres d'une même année d'assurance ; que la compagnie MMA rappelle que le contrat garantit les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'assuré peut encourir du fait des dommages corporels, matériels et immatériels causés à un tiers et imputables aux activités assurées, dans les limites et conditions stipulées par la police, mais non pas les dommages causés aux produits fournis par l'assuré ; qu'autrement dit « le risque de l'entreprise » est exclu ; que sont ainsi expressément exclus « les frais nécessaires pour remplacer les biens fournis par l'assuré ainsi que le montant du remboursement total ou partiel des produits, matériels, travaux ou prestations défectueux dès lors qu'il est dans l'obligation de procéder à ce remplacement » ; qu'il est soutenu par la société Établissements [I] [D] que la clause d'exclusion n'aurait pas été portée à sa connaissance faute d'avoir signé le contrat et paraphé son avenant. Cependant, l'avenant avec effet au 1er mai 2012 qui a été effectivement signé par l'assuré en page 7/34 ne comporte qu'une modification tarifaire du contrat d'origine qui a été souscrit le 4 novembre 2005 dans des termes identiques et a été signé par ses soins ;

que dans ces conditions, l'assuré qui se prévaut du contrat, ne peut prétendre que seules certaines clauses (celles postérieures à sa signature) n'auraient pas été acceptées par lui et il y a lieu d'écarter sa réclamation au titre d'un dommage qui n'est pas couvert par la garantie ; que si la compagnie MMA reconnaît que sa garantie est éventuellement mobilisable au titre de la garantie « dommage immatériel non consécutif » dont le plafond est fixé contractuellement à 305 000 € par sinistre, elle prétend toutefois que la garantie serait épuisée dans la mesure où le plafond vaut pour l'ensemble du sinistre et qu'il a été entièrement consommé par les frais de défense engagés dans l'intérêt de l'assuré, soit pour la somme de 205 119,12 euros, dans le cadre des expertises judiciaires et amiables du cabinet Erget et pour 104 027,42 euros, au titre des frais et honoraires de l'avocat de son assuré ; que la société Établissements [I] [D] prétend pour sa part que la contrariété des clauses de la police quant au plafond de garantie doit conduire à considérer que le plafond de 305 000 € est reconstitué pour chaque année de réclamation, nonobstant le fait qu'il s'agit d'un sinistre sériel et qu'en outre les frais du cabinet Erget ne sauraient s'imputer sur les frais de défense de sorte que la garantie n'est pas épuisée ; que cependant, il est stipulé dans la police que « sont considérés comme formant un seul et même sinistre, quel que soit le nombre de lésés, les réclamations résultant d'une même erreur, malfaçon ou faute quelconque ; que chaque sinistre est imputé à l'année d'assurance au cours de laquelle la première réclamation a été présentée » ; qu'en l'espèce les réclamations relatives aux malfaçons des lames de bois Belavia se rattachent à un sinistre unique au sens dudit contrat ; que le contrat prévoyant que le montant des garanties est exprimé par sinistre, il n'y a pas de contrariété entre les différentes clauses du contrat et le plafond s'établit bien à 305 000 € pour l'ensemble du sinistre sériel dont s'agit, peu important le nombre de réclamations qui sont affectées à l'année de la première réclamation ; que juger que le plafond d'assurance serait reconstitué pour chaque année pour laquelle des réclamations sont intervenues, serait contraire aux stipulations de la clause qui n'a pas à être interprétée ; que c'est à bon droit que la compagnie MMA a globalisé les frais de défense qu'elle a exposés dans l'ensemble des dossiers pour lequel des réclamations ont été formées au titre d'un même sinistre ; que par contre elle ne saurait imputer sur la garantie des frais excessifs sans que l'assuré n'en soit informé et il y a lieu de réserver le cas d'abus ; que selon l'attestation fournie en pièce 8, le cabinet Erget a assisté l'assuré en qualité d'expert technique dans pas moins de 80 dossiers dont 47 expertises judiciaires et a facturé 1138 heures de travail effectif ainsi que 99 déplacements, le produit litigieux ayant été vendu dans toute la France ; que par ailleurs la société Établissements [I] [D] ne pouvait ignorer son intervention et son impact en termes de frais ainsi qu'il résulte des échanges de courriers produits aux débats puisque Monsieur [I] [D] s'adressait directement à l'expert amiable du cabinet, M. [O], pour le tenir informé de nouveaux développements ou de nouvelles réclamations ; qu'au vu de ces éléments, il y a lieu de constater que les frais ont été engagés dans l'intérêt de l'assuré et que le plafond prévu au titre des dommages immatériels non consécutifs de la garantie responsabilité civile est épuisé tant vis-à-vis de l'assuré que des tiers lésés ; qu'en ce qui concerne les frais de dépose et repose des produits défectueux fournis par l'assuré, la compagnie MMA n'est pas non plus tenue à cette garantie dès lors que le contrat prévoit qu'ils ne sont pris en charge que s'ils sont engagés par l'assuré, sous réserve que sa responsabilité soit du moins établie ; qu'or en l'espèce c'est la société Boissec qui a pris en charge ces frais et non pas l'assuré qui est bénéficiaire de l'assurance ; que pour l'ensemble de ces raisons, il y a lieu de réformer le jugement et de mettre hors de cause les sociétés MMA » ;

Alors que le juge doit procéder à l'interprétation d'un acte ambigu en recherchant, en présence de clauses contradictoires, la commune intention des parties ; qu'au cas présent, la cour d'appel a estimé que le plafond de garantie de l'assureur à hauteur de 305.000 euros était forfaitaire et ne pouvait donc être reconstitué chaque année, par application de la clause par laquelle « sont considérés comme formant un seul et même sinistre, quel que soit le nombre de lésés, les réclamations résultant d'une même erreur, malfaçon ou faute quelconque. Chaque sinistre est imputé à l'année d'assurance au cours de laquelle la première réclamation a été présentée » (art. 2.3.2.), clause qui « n'avait pas à être interprétée » ; qu'en statuant ainsi, lorsqu'une telle clause était contredite par d'autres stipulations qui mentionnaient que le plafond de 305.000 euros était exprimé par sinistre pour l'ensemble des sinistres d'une même année d'assurance (art. 1.2.1) et qu'il constituait la limite de l'engagement de l'assureur pour toutes les conséquences dommageables des sinistres portés à sa connaissance au cours d'une même année d'assurance (art. 2.3.2.), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, devenu l'article 1103 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20-16174;20-16798
Date de la décision : 26/10/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 12 février 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 oct. 2022, pourvoi n°20-16174;20-16798


Composition du Tribunal
Président : Mme Vaissette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SARL Le Prado - Gilbert, SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Alain Bénabent , SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 01/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.16174
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