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21/09/2022 | FRANCE | N°20-11.104

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 21 septembre 2022, 20-11.104


CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 septembre 2022




Rejet non spécialement motivé


Mme TEILLER, président



Décision n° 10426 F


Pourvois n°
G 20-11.104
J 21-11.454 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 SEPTEMBR

E 2022


I. 1°/ M. [D] [O],

2°/ Mme [P] [T], épouse [O],

domiciliés tous deux [Adresse 1],

ont formé les pourvois n° G 20-11.104 contre un arrêt rendu le 22 novembre 2...

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 septembre 2022




Rejet non spécialement motivé


Mme TEILLER, président



Décision n° 10426 F


Pourvois n°
G 20-11.104
J 21-11.454 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 SEPTEMBRE 2022


I. 1°/ M. [D] [O],

2°/ Mme [P] [T], épouse [O],

domiciliés tous deux [Adresse 1],

ont formé les pourvois n° G 20-11.104 contre un arrêt rendu le 22 novembre 2019 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre civile, section A) et n° J 21-11.454 contre un arrêt rendu le 2 décembre 2020 par la cour d'appel de Colmar et une ordonnance rendue le 6 octobre 2020 du juge de la mise en état de la cour d'appel de Colmar, dans le litige les opposant :

1°/ à Mme [Z] [I], veuve [A], domiciliée [Adresse 2],

2°/ à Mme [H] [X], domiciliée [Adresse 3],

3°/ à Mme [N] [L], épouse [X], domiciliée [Adresse 4],

défenderesses à la cassation.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de M. Baraké, conseiller référendaire, les observations écrites de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. et Mme [O], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mmes [X] et [L], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [A], après débats en l'audience publique du 28 juin 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Baraké, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° G 20-11.104 et J 21-11.454 sont joints.

2. Il est donné acte à M. [O] et Mme [N] [T], épouse [O] du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'ordonnance rendue le 6 octobre 2020 par le juge de la mise en état de la cour d'appel de Colmar.

3. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre des décisions attaquées, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

4. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. et Mme [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. et Mme [O] et les condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme [A] et la somme globale de 3 000 euros à M. et Mme [X] ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SAS Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour les époux [O] (demandeurs au pourvoi n° G 20-11.104)

Les époux [O] font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déclarés responsables du trouble anormal de voisinage que constitue pour Mme [A] le risque d'effondrement du mur litigieux et d'avoir rejeté les demandes de dommages-intérêts dirigés contre cette dernière ;

AUX MOTIFS QU'il résulte du rapport d'expertise judiciaire que, si le vice de conception affectant le mur était connu de Mme [I], veuve [A], depuis un rapport du bureau d'études Bondue en date du 15 décembre 1976, des travaux confortatifs avaient été réalisés suite à ce rapport et que le mur, quoique présentant d'importantes fissures, était ensuite resté en l'état jusqu'en 2006, date à laquelle les époux [O] ont entrepris des travaux de construction d'une piscine ayant entraîné un rehaussement de leur terrain et augmenté les charges supportées par le mur ; que le risque d'éboulement du mur n'a été révélé à Mme [I], veuve [A], que par le rapport qu'elle a fait établir par M. [W] le 5 juin 2012 ; que ce n'est qu'à compter de cette date que Mme [I], veuve [A], a connu les faits lui permettant d'exercer son action ; qu'en conséquence, celle-ci, introduite par assignation du 28 mai 2014, n'est pas prescrite ; que le risque d'éboulement du mur sur le terrain de Mme [I], veuve [A], confirmé par l'expert judiciaire, constitue, même s'il ne s'est pas encore réalisé, un trouble anormal de voisinage, qui engage la responsabilité des époux [O], propriétaires du mur, à l'égard de Mme [I], veuve [A], quand bien même l'origine de ce trouble serait-elle antérieure à la date où les époux [O] ont acquis leur terrain ; que les époux [O] ne sont donc pas fondés à contester devoir remédier à la situation de danger créée par leur mur ; qu'ils justifient avoir fait réaliser par la société Este, selon facture du 15 novembre 2017 d'un montant de 30 253,03 euros, des travaux confortatifs, sous le contrôle du bureau d'études Vonesch ; que toutefois, l'expert judiciaire avait indiqué qu'il était "impossible d'envisager la simple consolidation d'un ouvrage dont le seul examen visuel montre qu'il est incapable d'assurer une fonction de soutènement", et il avait évalué au minimum à 62 640 euros hors taxes les travaux à réaliser ; que par ailleurs, au vu du constat d'huissier que Mme [I], veuve [A], a fait réaliser le 7 novembre 2017 et du rapport du service de l'urbanisme du 26 avril 2018, il n'apparaît pas de manière certaine que les travaux réalisés par les époux [O] ont permis d'éliminer tout risque d'effondrement du mur ; qu'il convient donc d'ordonner le retour du dossier à l'expert judiciaire, afin qu'il examine les travaux réalisés, se prononce sur leur efficacité et indique, le cas échéant, si d'autres travaux sont nécessaires ;

1°) ALORS QUE le point de départ du délai de prescription de l'action en trouble anormal de voisinage résultant d'un risque lié aux désordres affectant un ouvrage est le jour où l'auteur de l'action a pu en constater l'existence sans aggravation ultérieure ; qu'en se bornant à considérer, pour retenir que l'action n'était pas prescrite, que le mur affecté d'un vice de conception connu depuis 1976 ayant fait l'objet de travaux confortatifs était resté en l'état jusqu'en 2006 où les époux [O] ont fait construire une piscine ayant entraîné un rehaussement de leur terrain et une augmentation de la charge supportée par le mur et à affirmer le risque d'éboulement du mur n'a été révélé à Mme [A] que par le rapport qu'elle a fait établir le 5 juin 2012, date à laquelle elle a connu les faits lui permettant d'exercer son action, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne ressortait pas des conclusions du rapport d'expertise que les graves désordres affectant le mur de soutènement, connus depuis l'origine par Mme [A], n'étaient pas restés sans évolution entre 1976 et 2013, affectaient de manière identique le mur, tant dans la partie située sur la propriété [O] que sur les parties aux droits des autres propriétés, de sorte que la piscine réalisée en 2006 n'avait pas eu d'effet aggravant en dépit de l'augmentation de la charge et que Mme [A] avait ainsi une parfaite connaissance du risque depuis 1976, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'ancien article 2270-1 et de l'actuel article 2224 du code civil, ensemble le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

2°) ALORS QUE les jugements doivent être motivés ; qu'en retenant l'entière responsabilité des époux [O] pour le trouble anormal de voisinage causé à Mme [A], sans répondre au moyen tiré de ce que Mme [A], eu égard à son inertie depuis de nombreuses années alors qu'elle connaissait parfaitement le mauvais état du mur, devait être considérée comme ayant accepté le risque d'éboulement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :


M. et Mme [O] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à un tiers la garantie que les époux [X] leur devront ;

AUX MOTIFS QUE selon l'expert judiciaire [S], le mur litigieux, construit en 1965 environ, était, dès l'origine, affecté de non-conformités graves et inapte à assurer une fonction de soutènement ; qu'il ajoute que les renforts mis en place postérieurement au rapport du bureau d'études Bondue du 15 décembre 1976 sont incapables d'assurer leur fonction ; que l'expert a constaté que les fissures affectant le mur n'avaient pratiquement pas évolué depuis 1976 ; qu'il est ainsi démontré que, lors de la vente du 5 septembre 2003 entre les époux [X] et les époux [O], le mur présentait de graves désordres ; que contrairement à ce qui est prétendu par les époux [X], ces désordres n'étaient pas apparents pour les époux [O] ; qu'en effet, les fissures et déformations affectant le mur n'étaient visibles que depuis le bas, c'est-à-dire depuis la propriété [A], et non depuis la propriété vendue par les époux [X] aux époux [O] que ceux-ci avaient visitée avant la vente, l'état du mur ne pouvant pas être examiné depuis le haut, d'autant qu'il est masqué par de la végétation ; qu'en revanche, les époux [X] connaissaient l'état du mur, depuis le rapport Bondue du 15 décembre 1976 qui leur avait été communiqué et qui avait mis en évidence les vices de conception dont il était affecté ; qu'ils n'ignoraient pas, par ailleurs, que les travaux préconisés par le rapport Bondue n'avaient pas été réalisés ; qu'enfin, ayant demeuré sur place de 1976 à 2003, ils ne pouvaient ignorer les fissures et déformations qui affectaient le mur lors de la vente aux époux [O] ; que l'existence du vice, son antériorité à la vente, son caractère caché pour les acquéreurs et sa connaissance par les vendeurs sont ainsi établis ; que toutefois, ce vice n'est pas la seule cause du risque d'effondrement du mur ; qu'en effet, les travaux réalisés en 2006 par les époux [X] ont aggravé ce risque ; que pour la réalisation de leur piscine, les époux [X] ont créé un remblai soutenu par des traverses de chemin de fer, ce qui a augmenté la charge pesant sur le mur ; que de plus, ces travaux ont été réalisés sans respecter la distance minimale par rapport à la propriété contiguë de Mme [A] ; que l'expert a émis l'avis que les travaux des époux [O] ont eu "une incidence complémentaire éventuelle"
sur le mur litigieux, la cour estime que cette incidence est certaine, compte tenu du fait que le mur, bien qu'imparfaitement consolidé suite au rapport Bondue de 1976, était demeuré en l'état jusqu'en 2006, sans susciter aucune crainte la part des propriétaires concernés par un éventuel risque d'effondrement ; qu'en considération de ces éléments, il convient d'accueillir le recours des époux [O] contre les époux [X], seulement dans la limite d'un tiers ;

1°) ALORS QUE la responsabilité pour trouble anormal de voisinage suppose l'existence d'un lien de causalité entre un trouble et l'action de son auteur ; qu'en considérant, pour limiter à un tiers la garantie due par les époux [X], qu'il était certain, contrairement à ce qu'a retenu l'expert, que la construction de la piscine par les époux [O] avait entraîné les désordres dès lors que le mur de soutènement était demeuré en l'état jusqu'en 2006 « sans susciter aucune crainte de la part des propriétaires concernés par un éventuel risque d'effondrement » (arrêt, p. 8, al. 2), la cour d'appel qui s'est prononcé par des considérations impropres à caractériser la certitude du lien de causalité entre la réalisation de la piscine et l'aggravation du risque, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les articles 1641 et 1645 du même code, ensemble le principe selon lequel nul ne doit causer de trouble anormal de voisinage ;

2°) ALORS QUE la responsabilité pour trouble anormal de voisinage suppose l'existence d'un lien de causalité entre un trouble et l'action de son auteur ; qu'en se bornant à affirmer, pour limiter à un tiers la garantie due par les époux [X], que, contrairement à ce qu'avait retenu l'expert, l'incidence de la construction de la piscine sur l'état du mur était certaine, dès lors que le mur, bien qu'imparfaitement consolidé suite au rapport Bondue de 1976, était demeuré en l'état jusqu'en 2006 avec la quiétude des riverains, sans rechercher si les graves désordres affectant le mur de soutènement, connus depuis l'origine, n'étaient pas restés sans évolution entre 1976 et 2013, ce qui manifestait une absence d'évolution du trouble lui-même, et affectaient de manière identique le mur tant dans la partie située sur la propriété [O] que sur les parties aux droits des autres propriétés, de sorte que la piscine réalisée en 2006 n'avait pas eu d'effet aggravant en dépit de l'augmentation de la charge, la cour d'appel qui s'est contentée de contredire les conclusions de l'expert, sans expliquer pourquoi son raisonnement aurait été erroné, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, des articles 1641 et 1645 du même code, ensemble le principe selon lequel nul ne doit causer de trouble anormal de voisinage. Moyens produits par la SAS Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour Les époux [O] (demandeurs au pourvoi n° J 21-11.454)

PREMIER MOYEN DE CASSATION :


Les époux [O] font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnés à supprimer tout appui sur le mur litigieux, notamment en retirant toutes les terres appuyées contre ce mur jusqu'à niveau du sol de la propriété de Mme [A] et à supprimer les parties du mur menaçant de s'effondrer sur la propriété de Mme [A], notamment la partie haute du mur qui penche vers la propriété de cette dernière, de leur avoir imparti un délai de trois mois pour effectuer ces travaux, sous astreinte de 100 € par jour de retard passé ce délai et de leur avoir interdit de prendre quelque appui que ce soit sur le mur litigieux ;

ALORS QUE la cassation entraîne l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir de l'arrêt mixte du 22 novembre 2019 rendu dans le même litige par la même cour d'appel (pourvoi n° G 20-11.104) entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt attaqué en application de l'article 625 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :


Les époux [O] font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnés à supprimer les parties du mur menaçant de s'effondrer sur la propriété de Mme [A], notamment la partie haute du mur qui penche vers sa propriété ;

ALORS QUE le juge est tenu de trancher le litige qui lui est soumis en indiquant précisément l'objet des condamnations prononcées contre les parties ; qu'en se bornant à condamner les époux [O] à supprimer les parties du mur menaçant de s'effondrer sur la propriété de Mme [A], notamment la partie haute du mur qui penche vers la propriété de cette dernière, sans exposer précisément dans le dispositif les parties du mur menaçant de s'effondrer, la cour d'appel dont l'arrêt n'est pas plus explicite dans ses motifs, a violé les articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 20-11.104
Date de la décision : 21/09/2022
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour d'appel de Colmar

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 21 sep. 2022, pourvoi n°20-11.104, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.11.104
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