SOC.
ZB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 mai 2022
Rejet non spécialement motivé
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10450 F
Pourvoi n° S 20-21.623
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MAI 2022
La société Groupama Asset Management, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 20-21.623 contre l'arrêt rendu le 14 octobre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [C] [F], domicilié [Adresse 1],
2°/ à Pôle emploi Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
M. [C] [F] et à formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Groupama
asset management, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [F], après débats en l'audience publique du 23 mars 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, Mme. Chamley-Coulet, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation du pourvoi principal et le moyen de cassation du pourvoi incident, annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE les pourvois, tant principal qu'incident ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Groupama Asset Management, demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
La société Groupama Asset Management fait grief à la décision attaquée d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral et les demandes afférentes à la nullité de la rupture du contrat de travail, d'AVOIR, statuant à nouveau de ces chefs, condamné la société Groupama Asset Management à verser à M. [F] les sommes de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, 60 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de la nullité de la rupture de son contrat de travail et 20 732,72 euros à titre d'indemnité de licenciement, d'AVOIR débouté la société Groupama Asset Management de ses demandes, et d'AVOIR ordonné à la société Groupama Asset Management le remboursement des allocations de chômage versées au salarié dans la limite de 6 mois d'indemnités ;
1) ALORS QUE l'article L.1154-1 du code de travail, tel qu'issu de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 n'est pas applicable à des faits antérieurs à l'entrée en vigueur de cette loi ; qu'en l'espèce, M. [F] prétendait avoir été victime de harcèlement moral en invoquant les conditions d'un changement de fonctions intervenu en mars 2012 et la réaction de son employeur aux difficultés avec son supérieur hiérarchique, « M. [X] » dont il avait fait état en décembre 2013 ; que le seul fait invoqué, postérieur à août 2016, était que M. [F] avait appris qu'une évolution organisationnelle devait avoir pour conséquence de le replacer sous la subordination de M. [X] qui n'était plus son supérieur depuis 2015 ; qu'en faisant néanmoins application, à l'ensemble des faits allégués, de l'article L. 1154-1 dans sa version issue de la loi du 8 août 2016 prévoyant que le salarié « présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement », à l'exclusion de l'article L. 1154-1 du code du travail dans sa version antérieure imposant au salarié « d'établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement », la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 1154-1 dans sa version issue de la loi du 8 août 2016, et par refus d'application l'article L. 1154-1 dans sa version issue de la loi du 3 janvier 2003, ensemble l'article 2 du code civil ;
2) ALORS en tout état de cause QUE pour retenir l'existence de faits laissant supposer un harcèlement moral, la cour d'appel, après avoir estimé que le consentement donné par le salarié en 2012 à la proposition de rétrogradation faite par l'employeur n'était pas viciée d'une part, qu'aucun des comportements inappropriés imputés au nouveau supérieur hiérarchique, sous l'autorité duquel le salarié devait travailler à compter de sa rétrogradation, n'étaient matériellement établis d'autre part, s'est bornée à relever qu'il n'avait à cette époque pas été répondu aux questions du salarié sur son rattachement hiérarchique et sur le périmètre du nouveau poste, que l'employeur ne justifiait pas l'insuffisance professionnelle ayant motivé la rétrogradation acceptée par le salarié, que ce dernier s'était alors retrouvé sous l'autorité d'une personne jusqu'alors au même niveau que lui, qu'une simple réponse négative lui avait été donnée lorsqu'il s'était plaint du comportement de ce nouveau supérieur, et qu'après qu'un terme avait été temporairement mis en 2015 et 2016 à ce rattachement hiérarchique, le salarié devait regagner un service dirigé par ce supérieur ; qu'en statuant ainsi sans caractériser des faits laissant supposer un harcèlement, la cour d'appel a violé les articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail ;
3) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent statuer par des motifs dubitatifs ; qu'en affirmant en l'espèce que les faits avancés par le salarié au titre d'un prétendu harcèlement moral étaient « précis et concordants, voire même établis », la cour d'appel a statué en l'état d'un doute sur le caractère établi ou non des faits avancés par le salarié et, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
La société Groupama Asset Management fait grief à la décision attaquée d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral et les demandes afférentes à la nullité de la rupture du contrat de travail, d'AVOIR, statuant à nouveau de ces chefs, condamné la société Groupama Asset Management à verser à M. [F] les sommes de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, 60 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de la nullité de la rupture de son contrat de travail et 20 732,72 euros à titre d'indemnité de licenciement, d'AVOIR débouté la société Groupama Asset Management de ses demandes, et d'AVOIR ordonné à la société Groupama Asset Management le remboursement des allocations de chômage versées au salarié dans la limite de 6 mois d'indemnités ;
ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a écarté l'existence d'un vice du consentement lors de l'accord donné par le salarié à sa rétrogradation en mars 2012 (arrêt page 4 § II. A. 1) ; qu'elle a par ailleurs reproché à l'employeur de ne pas avoir fourni au salarié lors de cette rétrogradation, les explications nécessaires à éclairer son consentement avant qu'il soit donné (arrêt page 5, § 2) ; qu'en statuant ainsi par des motifs contradictoires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
La société Groupama Asset Management fait grief à la décision attaquée d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes afférentes à la nullité de la rupture du contrat de travail, d'AVOIR, statuant à nouveau de ces chefs, condamné la société Groupama Asset Management à verser à M. [F] les sommes de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de la nullité de la rupture de son contrat de travail et 20 732,72 euros à titre d'indemnité de licenciement, d'AVOIR débouté la société Groupama Asset Management de ses demandes, et d'AVOIR ordonné à la société Groupama Asset Management le remboursement des allocations de chômage versées au salarié dans la limite de 6 mois d'indemnités ;
ALORS QUE la prise d'acte par un salarié de la rupture de son contrat de travail n'est justifiée qu'en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que la concomitance de la rétrogradation (survenue en 2012) et de la démission (donnée en 2017) pouvait être discutée, mais que les autres griefs retenus au titre du harcèlement moral rendaient la rupture du contrat de travail imputable à l'employeur ; que ces autres griefs étant dès lors seulement une brève réponse sans autre suite faite aux plaintes infondées du salarié en 2013, à l'égard de son supérieur hiérarchique de l'époque, et son appréhension de se retrouver à nouveau sous ses ordres compte-tenu de la réorganisation des services de l'entreprise fin 2016, il en résulte que la cour d'appel a statué par des motifs ne caractérisant pas des manquements suffisamment graves de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail, et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du code civil devenu 1224 à 1230 du code civil et de l'article L. 1231-1 du code du travail.
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. [F], demandeur au pourvoi incident
Monsieur [F] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande tendant à voir la société Groupama Asset Management condamnée à lui verser des dommages et intérêts au titre de la violation de l'obligation de sécurité ;
ALORS QUE la violation du droit à la santé et à la sécurité protégé par l'alinéa 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ainsi que l'article 31, § 1, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qui garantissent le droit à la santé et à la sécurité de tout travailleur, et dont l'obligation de sécurité n'est qu'une déclinaison, fait nécessairement subir au salarié un préjudice dont lui est due réparation ; qu'en déboutant Monsieur [F] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef la cour d'appel a violé les articles L 4121-1 et 4121-2 du code du travail, l'alinéa 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ainsi que l'article 31, § 1, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.