COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 18 mai 2022
Rejet non spécialement motivé
M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10322 F
Pourvoi n° X 19-25.465
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 MAI 2022
M. [L] [S], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 19-25.465 contre l'arrêt rendu le 9 octobre 2019 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant à M. [L] [J], domicilié [Adresse 4], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [S], de la SCP Spinosi, avocat de M. [J], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 22 mars 2022 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Mamou, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [S] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [S] et le condamne à payer à M. [J] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour M. [S].
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé valable la promesse de vente sous seing privé en date du 15 avril [lire 2 avril] 2015 par laquelle [L] [S] s'engage à céder son fonds de commerce d'accessoires, cadeaux, souvenirs, presse et gérance d'un débit de tabac, sis à [Adresse 2] et d'AVOIR, en conséquence, condamné [L] [S], sous astreinte provisoire de 200 € par jour de retard à compter du deuxième mois suivant la signification du jugement et pendant un an passé ce délai, à effectuer les actes positifs nécessaires à la réalisation des conditions suspensives contenues dans la promesse de vente sus-nommée ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur le moyen tiré de la non réalisation des conditions suspensives, [ ] s'il est patent que les conditions suspensives prévues au contrat, en particulier celle de l'obtention par l'acquéreur de l'agrément par la Régie des Tabacs, n'ont pas été réalisées avant la date butoir du 15 janvier 2016, il est certain qu'aux termes de l'article 20 du décret n° 2010-720 du 28 juin 2010 l'obtention de l'agrément suppose la présentation du successeur par le cédant à l'administration dont s'agit, et ce préalablement à la vente ; que la condition suspensive telle que prévue à la promesse de vente ne pouvait donc être réalisée que si le vendeur accomplissait les démarches nécessaires ; qu'en ce sens, les démarches du vendeur étaient bien incluses dans le champ contractuel ainsi que le soutient l'intimé puisque, d'une part, elles découlaient d'une obligation légale, et que d'autre part, l'acquéreur ne pouvait lui-même fournir toutes pièces utiles à l'instruction de son dossier que si le vendeur faisait d'abord diligence ; que cela est rappelé dans le courrier de la Direction régionale des Douanes et droits indirects du 29 juillet 2015 ; que comme le fait plaider l'intimé, M. [S] ne peut exciper de sa propre abstention, qu'il qualifie d'ailleurs de volontaire, pour soutenir l'inefficacité de la promesse de vente, alors même que M. [J] lui a vainement fait signifier le 4 septembre 2015 une sommation interpellative pour obtenir l'exécution de ses obligations ; [ ] que, sur la demande de nullité de l'acte pour cause de violence, il convient en premier lieu de rectifier la chronologie des actes signés par M. [S], en indiquant, contrairement à ce qu'il soutient, que la reconnaissance de dette de 80.000 € est postérieure à la promesse de vente ; que l'existence de la dette ne pouvait donc pas être en elle-même un moyen de pression à l'encontre du cédant ; que les pressions psychologiques allégués par l'appelant ne sont établies par aucune pièce et c'est donc à bon droit que le tribunal a écarté la violence morale comme cause de nullité de l'acte ; que la condamnation d'[L] [S], prononcée par le tribunal, à effectuer sous astreinte les actes positifs nécessaires à la réalisation des conditions suspensives contenues dans la promesse de vente est parfaitement justifiée puisque c'est sa propre carence qui empêchait la réalisation des conditions suspensives ; qu'il n'y a pas lieu de modifier la durée de l'astreinte telle que fixée par le premier juge, son montant étant suffisamment dissuasif pour contraindre M. [S] à exécuter ses obligations ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la réitération de la vente sous réserves de la réalisation des conditions suspensives, car comme l'a dit le tribunal cette réalisation ne dépend pas uniquement de la volonté des parties ; que, de plus, cette réitération de la vente en cas de réalisation des conditions suspensives découle de toute façon des termes de la promesse de vente ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur la nullité de la promesse de vente, tout d'abord, l'article 20 du décret n°2010-720 du 8 juin 2010 relatif à l'exercice du monopole de la vente au détail des tabacs manufacturés dispose notamment que le gérant en exercice d'un débit de tabac ordinaire qui cesse son activité, ou le propriétaire du fonds en cas de location-gérance, peut présenter comme successeur au directeur régional des douanes et droits indirects, selon les cas, l'acheteur ou le locataire-gérant du fonds de commerce associé au débit ; que la présentation du successeur au directeur régional des douanes et droits indirects doit être effectuée avant la vente du fonds de commerce associé au débit de tabac ; qu'en l'espèce, la promesse de vente conclue entre Messieurs [S] et [J] stipule à la page 11 que la convention a lieu sous la condition suspensive de l'obtention par l'acquéreur de toutes les autorisations administratives nécessaires pour l'exercice de la profession et en particulier son agrément par la régie des tabacs en qualité de titulaire de l'autorisation de gérer le débit de tabacs faisant partie du fonds cédé ; qu'ainsi, à l'inverse de ce que prétend Monsieur [S], la promesse de vente ne saurait être nulle car cette formalité n'a pas été réalisée avant sa conclusion, alors que la vente ne pouvait devenir parfaite qu'au moment où la condition concernée était réalisée ; qu'autrement dit, l'agrément serait forcément intervenu avant la vente, le cas échéant ; [ ] qu'enfin, les articles 1109 et 1112 du code civil disposent qu'il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol ; qu'il y a violence lorsqu'elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu'elle peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent ; qu'on a égard, en cette matière, à l'âge, au sexe et à la condition des personnes ; qu'en l'espèce, il ressort du certificat médical du 10 juin 2016, des scanners et IRM cérébral du même mois, que Monsieur [S] a « décrit » au Docteur [P] « un tableau de troubles cognitifs et de modification psycho-comportementale et caractérielle se majorant depuis environ un semestre » ; que le patient « décrit une susceptibilité accrue, un sentiment de vulnérabilité » entre autres ; que les examens passés mettent en évidence les lésions mises en rapport avec les séquelles d'un traumatisme crânien ; qu'il n'est pas précisé la date de cet accident, s'il est ancien ou non ; que le 21 avril 2015, Monsieur [S] signait une reconnaissance de dettes d'un montant de 80.000 €, par ailleurs garantie par le nantissement du fonds de commerce querellé ; que cet acte, postérieur à la promesse de vente, ne saurait être interprété comme révélant que le consentement du cessionnaire a été extorqué au moment de la signature de la promesse de vente ; qu'il en ressort surtout que le cessionnaire avait vraisemblablement des difficultés à payer les 100.000 € comptant et qu'un arrangement a été trouvé, sans qu'aucune violence ne puisse en être déduite ipso facto ; que par ailleurs, il ressort de l'attestation de [E] [T], en date du 22 octobre 2015, que les deux parties à l'acte sont tombées d'accord sur le prix, au vu des éléments financiers transmis par le cabinet Kalliste Fiduciaire ; qu'il émane par ailleurs d'autres courriers, l'instar de celui rédigé par Monsieur [S] à Monsieur [F] le 9 avril 2015, ou encore de l'attestation des experts-comptables Monsieur [W] et Madame [G], qu'aucun climat de pression n'assombrissait les négociations de vente du débit de tabac, encadrées par des professionnels ; que la pression, c'est-à-dire la violence morale, alléguée par le demandeur comme l'ayant conduit à signer chaque page de la promesse n'est pas démontrée, s'agissant par exemple de chantage, d'autant que l'état de santé de Monsieur [S] peut difficilement être pris en compte dans le cadre de l'appréciation de cette éventuelle violence, alors qu'aucun traumatisme crânien ne saurait de fait entraîner une vulnérabilité, surtout si un certain temps s'est écoulé depuis, sauf à en croire les affirmations du demandeur, telles que retranscrites par un médecin qui ne s'est pas livré à un diagnostic ; qu'il convient en conséquence de dire que la promesse de vente discutée est valable ; que, sur l'exécution forcée de la promesse, aux termes des articles 1134 et 1135 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ce qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. Les convention obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature ; que l'article 1178 du code civil dispose que la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement ; que sur le fondement de l'article 1142 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté peut forcer l'autre à l'exécution lorsque celle-ci est possible ; que l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que tout juge peut, même d'officie, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de la décision ; qu'en l'espèce, il ressort des propres déclarations de Monsieur [S] que ce dernier n'a plus souhaité vendre son fonds de commerce à Monsieur [J] et n'a donc plus souhaité accomplir la formalité prévue par le décret du 28 juin 2010 visant à obtenir l'autorisation administrative préalable à toute cession d'un débit de tabacs et consistant à présenter son successeur à l'administration compétente ; qu'ainsi le vendeur a failli dans l'exécution de ses obligations contractuelles et, étant précisé qu'aucune impossibilité n'est alléguée comme s'opposant au caractère réalisation des conditions, l'exécution en nature s'impose, en ce qu'elle doit être préférée à l'allocation de dommages-intérêts, et conformément à la demande du cessionnaire ; que le contrat précise les conditions suspensives suivantes : * obtention par l'acquéreur de toutes les autorisations administratives nécessaires pour l'exercice de la profession et en particulier son agrément à la régie des tabacs en qualité de titulaire de l'autorisation de gérer le débit de tabacs faisant partie du fonds cédé ; * obtention par le vendeur d'une note d'urbanisme ne révélant aucune disposition susceptible de gêner l'exploitation du fonds ou susceptible de déprécier sa valeur actuelle ; * obtention par le vendeur des états des inscriptions sur le fonds délivrés par le tribunal de commerce ne révélant aucune inscription sur le fonds nécessitant une procédure de purge ; * absence de l'exercice du droit de préemption par la mairie de [Localité 3] ; * accord du propriétaire bailleur des locaux pour autoriser la cession et le renouvellement du bail aux mêmes charges et conditions ; qu'ainsi Monsieur [J] [lire Monsieur [S]] sera condamné à exécuter les actes positifs nécessaires à la réalisation des conditions suspensives incluses dans la promesse de vente, qui lui incombaient, à savoir : * obtention de l'accord du propriétaire bailleur des locaux pour autoriser la cession et le renouvellement du bail aux mêmes charges et conditions ; obtention des états des inscriptions sur le fonds délivrés par le tribunal de commerce ne révélant aucune inscription sur le fonds nécessitant une procédure de purge ; obtention d'une note d'urbanisme ne révélant aucune disposition susceptible de gêner l'exploitation du fonds ou susceptible de déprécier sa valeur actuelle ; présentation de Monsieur [J] au directeur régional des douanes et droits indirects, aux fins qu'il puisse le cas échéant obtenir l'autorisation administrative nécessaire ; qu'il convient de préciser que cette dernière obligation de faire devra respecter les termes de l'article 20 – VI de l'article 20 du décret en cause (« la personne souhaitant présenter un successeur adresse sa demande au directeur régional des douanes et droits indirects, qui en accuse réception et transmet, par courrier au candidat les conditions générales à réunir et la liste des pièces à fournir, identique à celle requise en matière d'appel à candidature ») ; que néanmoins, il n'y a pas lieu, malgré ce que demande le défendeur, d'ordonner la réitération de la promesse de vente, alors que les actes positifs que Monsieur [S] est présentement condamné à effectuer en vue de la réalisation des conditions suspensives, ne signifient pas de fait leur réalisation, qui n'est pas seulement dépendante de la volonté des parties, ou en tout cas ne peut apparaître certaine à ce stade, ainsi en est-il par exemple de l'agrément que doit obtenir le gérant du débit de tabac et qui requière qu'il remplisse certaines conditions prévues par l'article 5 du décret ; qu'aux fins d'assurer la bonne exécution de la présente décision, il sera ordonné une astreinte provisoire d'un montant de 200 € par jour de retard, qui commencera à courir deux mois après la signification du présent jugement, et qui prendra fin quatorze mois après, sa durée totale étant donc égale à douze mois, délai au terme duquel elle pourra être liquidée le cas échéant ; que rien ne justifie que le tribunal se réserve la liquidation de la présente astreinte ;
1) ALORS QUE les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux les ont faits ; qu'en l'espèce, la promesse de vente passée le 2 avril 2015 entre M. [S], vendeur, et M. [J], acquéreur, avait été conclue sous la condition suspensive de l'obtention, par l'acquéreur, de « toutes les autorisations administratives nécessaires pour l'exercice de la profession et en particulier son agrément par la Régie des Tabacs en qualité de titulaire de l'autorisation de gérer le débit de tabacs faisant partie du fonds cédé » (prod.) ; que ladite promesse prévoyait qu'à défaut de réalisation de cette condition d'ici le 15 janvier 2016, au plus tard, la promesse devait être considérée comme sans effet ; que la cour d'appel a constaté qu'il était patent que « les conditions suspensives prévues au contrat, en particulier celle de l'obtention par l'acquéreur de l'agrément par la Régie des Tabacs, n'ont pas été réalisées avant la date butoir du 15 janvier 2016 » (arrêt, p. 5 § 5) ; qu'en jugeant pourtant que la promesse de vente du 2 avril 2015 était valable et devait produire effet, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 1134 (devenu 1103) du code civil ;
2) ALORS QUE la violence vicie le consentement lorsque sans elle l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes ; que dans ses conclusions, M. [S] faisait valoir que son consentement à la promesse de vente du 2 avril 2015 lui avait été extorqué par la violence dans la mesure où, au jour de la signature, pesait sur lui une contrainte économique résultant du fait qu'il était débiteur envers l'acquéreur, M. [J], d'une somme qu'il était dans l'incapacité matérielle de rembourser et pour laquelle les parties avaient régularisé postérieurement une reconnaissance de dette, le 21 avril 2015 (concl., p. 17 in fine et p. 18 § 1 et in fine) ; qu'en affirmant qu'aucune violence n'avait été exercée au moment de la conclusion de la promesse de vente du 2 avril 2015 dans la mesure où la dette contractée par M. [S] envers M. [J] l'avait été postérieurement à la conclusion de ladite promesse, sans s'expliquer sur le virement de 15.000 € au profit de M. [S], en date du 25 mars 2015, dont la copie avait été versée aux débats par M. [J] lui-même, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1109 (devenu 1130) et 1112 (devenu 1140) du code civil ;
3) ALORS, en toute hypothèse, QUE le vice de violence peut s'apprécier au regard d'éléments postérieurs à la date de formation du contrat ; que dans ses conclusions, M. [S] faisait valoir que son consentement à la promesse de vente du 2 avril 2015 lui avait été extorqué par la violence dans la mesure où, au jour de la signature, pesait sur lui une contrainte économique résultant du fait qu'il était débiteur envers l'acquéreur, M. [J], d'une somme de 80.000 € qu'il était dans l'incapacité matérielle de rembourser et pour laquelle les parties avaient régularisé postérieurement une reconnaissance de dette, le 21 avril 2015 ; qu'en retenant qu'aucune violence n'avait été exercée contre M. [S] au moment de la conclusion de la promesse de vente du 2 avril 2015 et que, partant, ladite promesse était valable, au motif en réalité inopérant que l'acte de reconnaissance de dette avait été régularisé entre les parties le 21 avril 2015, postérieurement à la promesse de vente litigieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1109 (devenu 1130) et 1112 (devenu 1140) du code civil ;
4) ALORS QUE le juge ne peut se prononcer par des motifs dubitatifs ou hypothétiques ; qu'en l'espèce, pour retenir qu'aucune violence n'avait été exercée contre M. [S] au moment de la conclusion de la promesse de vente du 2 avril 2015, la cour d'appel a jugé, par motifs adoptés des premiers juges, que le 21 avril 2015, M. [S] avait certes signé une reconnaissance de dette d'un montant de 80.000 €, mais qu'il en ressortait surtout que M. [J] « avait vraisemblablement des difficultés à payer les 100.000 € comptant et qu'un arrangement a été trouvé sans qu'aucune violence ne puisse en être déduite ipso facto » (jugement, p. 5 § 7) ; qu'en se prononçant ainsi, par un motif hypothétique relatif à l'origine de la dette contractée par M. [S] à l'égard de M. [J], la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné [L] [S], sous astreinte provisoire de 200 € par jour de retard à compter du deuxième mois suivant la signification du jugement et pendant un an passé ce délai, à effectuer les actes positifs nécessaires à la réalisation des conditions suspensives contenues dans la promesse de vente sous seing privé en date du 2 avril 2015 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la condamnation d'[L] [S], prononcée par le tribunal, à effectuer sous astreinte les actes positifs nécessaires à la réalisation des conditions suspensives contenues dans la promesse de vente est parfaitement justifiée puisque c'est sa propre carence qui empêchait la réalisation des conditions suspensives ; qu'il n'y a pas lieu de modifier la durée de l'astreinte telle que fixée par le premier juge, son montant étant suffisamment dissuasif pour contraindre M. [S] à exécuter ses obligations ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la réitération de la vente sous réserves de la réalisation des conditions suspensives, car comme l'a dit le tribunal cette réalisation ne dépend pas uniquement de la volonté des parties ; que, de plus, cette réitération de la vente en cas de réalisation des conditions suspensives découle de toute façon des termes de la promesse de vente ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur l'exécution forcée de la promesse, aux termes des articles 1134 et 1135 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ce qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. Les convention obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature ; que l'article 1178 du code civil dispose que la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement ; que sur le fondement de l'article 1142 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté peut forcer l'autre à l'exécution lorsque celle-ci est possible ; que l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que tout juge peut, même d'officie, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de la décision ; qu'en l'espèce, il ressort des propres déclarations de Monsieur [S] que ce dernier n'a plus souhaité vendre son fonds de commerce à Monsieur [J] et n'a donc plus souhaité accomplir la formalité prévue par le décret du 28 juin 2010 visant à obtenir l'autorisation administrative préalable à toute cession d'un débit de tabacs et consistant à présenter son successeur à l'administration compétente ; qu'ainsi le vendeur a failli dans l'exécution de ses obligations contractuelles et, étant précisé qu'aucune impossibilité n'est alléguée comme s'opposant au caractère réalisation des conditions, l'exécution en nature s'impose, en ce qu'elle doit être préférée à l'allocation de dommages-intérêts, et conformément à la demande du cessionnaire ; que le contrat précise les conditions suspensives suivantes : * obtention par l'acquéreur de toutes les autorisations administratives nécessaires pour l'exercice de la profession et en particulier son agrément à la régie des tabacs en qualité de titulaire de l'autorisation de gérer le débit de tabacs faisant partie du fonds cédé ; * obtention par le vendeur d'une note d'urbanisme ne révélant aucune disposition susceptible de gêner l'exploitation du fonds ou susceptible de déprécier sa valeur actuelle ; * obtention par le vendeur des états des inscriptions sur le fonds délivrés par le tribunal de commerce ne révélant aucune inscription sur le fonds nécessitant une procédure de purge ; * absence de l'exercice du droit de préemption par la mairie de [Localité 3] ; * accord du propriétaire bailleur des locaux pour autoriser la cession et le renouvellement du bail aux mêmes charges et conditions ; qu'ainsi Monsieur [J] [lire Monsieur [S]] sera condamné à exécuter les actes positifs nécessaires à la réalisation des conditions suspensives incluses dans la promesse de vente, qui lui incombaient, à savoir : * obtention de l'accord du propriétaire bailleur des locaux pour autoriser la cession et le renouvellement du bail aux mêmes charges et conditions ; obtention des états des inscriptions sur le fonds délivrés par le tribunal de commerce ne révélant aucune inscription sur le fonds nécessitant une procédure de purge ; obtention d'une note d'urbanisme ne révélant aucune disposition susceptible de gêner l'exploitation du fonds ou susceptible de déprécier sa valeur actuelle ; présentation de Monsieur [J] au directeur régional des douanes et droits indirects, aux fins qu'il puisse le cas échéant obtenir l'autorisation administrative nécessaire ; qu'il convient de préciser que cette dernière obligation de faire devra respecter les termes de l'article 20 – VI de l'article 20 du décret en cause (« la personne souhaitant présenter un successeur adresse sa demande au directeur régional des douanes et droits indirects, qui en accuse réception et transmet, par courrier au candidat les conditions générales à réunir et la liste des pièces à fournir, identique à celle requise en matière d'appel à candidature ») ; que néanmoins, il n'y a pas lieu, malgré ce que demande le défendeur, d'ordonner la réitération de la promesse de vente, alors que les actes positifs que Monsieur [S] est présentement condamné à effectuer en vue de la réalisation des conditions suspensives, ne signifient pas de fait leur réalisation, qui n'est pas seulement dépendante de la volonté des parties, ou en tout cas ne peut apparaître certaine à ce stade, ainsi en est-il par exemple de l'agrément que doit obtenir le gérant du débit de tabac et qui requière qu'il remplisse certaines conditions prévues par l'article 5 du décret ; qu'aux fins d'assurer la bonne exécution de la présente décision, il sera ordonné une astreinte provisoire d'un montant de 200 € par jour de retard, qui commencera à courir deux mois après la signification du présent jugement, et qui prendra fin quatorze mois après, sa durée totale étant donc égale à douze mois, délai au terme duquel elle pourra être liquidée le cas échéant ; que rien ne justifie que le tribunal se réserve la liquidation de la présente astreinte ;
1) ALORS QUE les conventions font la loi des parties ; que la promesse de vente conclue le 2 avril 2015 entre M. [S] et M. [J] prévoit que, dans l'hypothèse où le comportement adopté par l'une des parties n'a pas permis de remplir toutes les conditions d'exécution de la vente, ce comportement est sanctionné par le versement à l'autre partie de la somme de 20.000 € à titre de clause pénale (prod.) ; qu'en condamnant M. [S] à exécuter les actes positifs nécessaires à la réalisation des conditions suspensives qui lui incombaient au titre de la promesse de vente et qu'il n'avait pas, par son comportement, permis de remplir, la cour d'appel qui a refusé d'appliquer la clause pénale contenue dans la promesse de vente du 2 avril 2015, a violé l'article 1134 (devenu 1103) du code civil ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QU'une partie à un contrat ne peut être condamnée à exécuter que les seules obligations qu'elle a souscrites aux termes dudit contrat ; qu'en l'espèce, la promesse de vente passée le 2 avril 2015 entre M. [S], vendeur, et M. [J], acquéreur, a été conclue sous la condition suspensive de l'obtention, par l'acquéreur, de « toutes les autorisations administratives nécessaires pour l'exercice de la profession et en particulier son agrément par la Régie des Tabacs en qualité de titulaire de l'autorisation de gérer le débit de tabacs faisant partie du fonds cédé » (prod.) ; qu'en condamnant M. [S] à exécuter les actes positifs nécessaires à la réalisation de la condition suspensive incombant en réalité à M. [J] et tendant à l'obtention par ce dernier des autorisations administratives nécessaires, la cour d'appel a violé l'article 1134 (devenu 1103) du code civil.