SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 mai 2022
Rejet non spécialement motivé
Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10397 F
Pourvoi n° Y 21-10.271
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 MAI 2022
La société Wolters Kluwer France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 21-10.271 contre l'arrêt rendu le 6 janvier 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l'opposant à Mme [E] [Y], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, les observations écrites de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Wolters Kluwer France, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [Y], après débats en l'audience publique du 15 mars 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, M. Pion, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Wolters Kluwer France aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Wolters Kluwer France et la condamne à payer à Mme [Y] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Wolters Kluwer France
La société Wolters Kluwer France fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR annulé le licenciement de Madame [Y] du 14 décembre 2016 comme discriminatoire, d'AVOIR ordonné la réintégration de la salariée à son poste et d'AVOIR condamné la société Wolters Kluwer France à lui payer une indemnité égale au montant de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir entre son éviction de l'entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont elle a pu bénéficier durant cette période, des dommages et intérêts de 3.507 euros au titre de son préjudice économique, 3.000 euros au titre de son préjudice moral et 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les intérêts et les dépens de première instance et d'appel ;
1. ALORS QU' il résultait des termes de l'accord collectif d'entreprise sur le télétravail du 9 avril 2015 ainsi que des prévisions de l'avenant au contrat de travail de Madame [Y] relatif à son accession au télétravail, que cette forme d'organisation du travail était réversible, chacune des parties ayant la faculté d'y mettre fin ; qu'en faisant du maintien de cette forme d'organisation du travail une obligation pesant sur l'employeur dont la modification nécessitait l'accord de la salariée, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des dispositions convenues tant par l'accord collectif que par le contrat individuel de travail, en violation des dispositions de l'article 5.1 de l'accord d'entreprise sur le télétravail du 9 avril 2015 et des articles L. 1221-1 et L. 1132-1 du code du travail et 1103 du code civil ;
2. ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait retenir que la salariée avait été victime d'une discrimination après son retour de congé maternité en raison du refus opposé par l'employeur à sa demande de maintien d'une deuxième journée télétravaillée au motif que l'accord d'entreprise sur le télétravail en prévoit le principe pour les travailleurs à temps partiel ainsi que pour les salariées au retour de congé maternité, sur recommandation du médecin du travail ; qu'en effet, l'accord ne prévoit aucune obligation en ce sens qui s'imposerait à l'employeur, pas plus dans le cadre du temps partiel qu'à l'issue d'un congé maternité ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a ajouté à l'article 6.5 de l'accord d'entreprise sur le télétravail et l'a violé par fausse application, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1132-1 du code du travail ;
3. ALORS ENCORE QUE la cour d'appel ne pouvait retenir que la salariée avait été victime d'une discrimination après son retour de congé maternité en raison du refus opposé par l'employeur au maintien à son profit d'une deuxième journée télé-travaillée au motif « qu'il n'est pas contesté que 86 % de l'équipe est en télétravail le jour concerné », sans avoir constaté pour autant qu'une majorité de salarié(e)s ayant un statut équivalent à celui de Madame [Y] avaient bien obtenu deux journées de télétravail, peu important le « jour concerné » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, par un motif insuffisant, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et 1134-1 du code du travail ;
4. ALORS, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QUE la cour d'appel ne pouvait retenir que la salariée avait été victime d'une discrimination après son retour de congé maternité sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de l'exposante, ce qu'avait été son comportement avant cette suspension de son contrat de travail, compte tenu notamment de la gestion défectueuse de ses fonctions, de son cumul d'activités et de son incapacité à travailler en équipe ; qu'en s'abstenant de prendre en considération ces éléments qui étaient de nature à établir l'absence de traitement discriminatoire, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et 1134-1 du code du travail ;
5. ALORS, AU SURPLUS, QUE la cour d'appel ne pouvait retenir que la charge de travail de la salariée au sein de la société Wolters Kluwer était trop lourde sans répondre aux conclusions de cette dernière qui faisait valoir que Madame [Y] avait elle-même demandé un aménagement de sa clause d'exclusivité pour pouvoir continuer à dispenser des cours en école de commerce et pour conserver une clientèle personnelle ; qu'en s'abstenant de rechercher quel était l'impact de ce cumul d'activités sur l'organisation des fonctions et la charge de travail de la salariée, ce qui était de nature à établir l'absence de discrimination à son égard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-2 du code du travail ;
6. ALORS, ENFIN, QU' en matière prud'homale, la preuve des faits est libre et la preuve testimoniale ne saurait, matériellement, être une preuve préétablie ; qu'il en résulte que la cour d'appel ne pouvait pas écarter les éléments de preuve produits par l'employeur justifiant, par des données objectives, le licenciement prononcé, au seul motif que les attestations produites avaient été établies a posteriori ; que la cour d'appel ne pouvait omettre d'examiner le contenu de ces attestations ainsi que le bilan établi par Madame [Y] elle-même à l'issue de l'entretien d'évaluation réalisé avant son départ en congé maternité, révélant dès cette époque son désaccord avec son manager et ses difficultés à travailler avec certaines équipes ainsi que « de nombreuses problématiques de travail et de reporting » ; qu'en refusant ainsi d'examiner les offres de preuve de la société Wolters Kluwer par des motifs inopérants, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.