CIV. 1
CA3
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 mars 2022
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10210 F
Pourvoi n° K 20-20.950
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 MARS 2022
Mme [B] [J] épouse [K], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 20-20.950 contre l'arrêt rendu le 6 août 2020 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile A), dans le litige l'opposant à la caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations écrites de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de Mme [J], de Me Balat, avocat de la caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin, après débats en l'audience publique du 18 janvier 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [J] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille vingt-deux.
Le conseiller referendaire rapporteur le president
Le greffier de chambre MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SARL Le Prado - Gilbert, avocat aux Conseils, pour Mme [J]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR condamné Mme [B] [K] à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin la somme de 43 805,12 euros, outre intérêts au taux de 4,20 % majoré de trois points à compter du 1er février 2014 au titre du prêt de 80 000 euros [souscrit le 20 mars 2009] et de l'avoir déboutée de ses demandes.
ALORS D'UNE PART QUE la banque dispensatrice de crédit est tenue, lors de l'octroi d'un prêt à un emprunteur non averti, d'une obligation de mise en garde à raison des capacités financières de ce dernier et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; que le caractère adapté du crédit s'apprécie à la date de conclusion du contrat, au regard du patrimoine de l'emprunteur, de ses revenus et de ses charges ; que pour juger que la Caisse n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde à l'égard de Mme [K], et condamner cette emprunteuse, pourtant non avertie, au paiement des sommes restant dues au titre du prêt souscrit le 20 mars 2009, la cour d'appel, après avoir constaté que celle-ci avait perçu en 2008 des revenus mensuels inférieurs à 250 euros et relevé que l'avis d'imposition de 2007 mentionne que les revenus industriels et commerciaux de son époux commun en biens se sont élevés à 48 758 euros et que ce premier prêt était destiné à financer l'achat d'un fonds de commerce de boulangerie, retient que le dossier prévisionnel de création d'activité d'avril 2009 à mars 2012 projetait un résultat de 22 645 euros en 2009/2010, 32 593 euros en 2010/2011 et 34 032 euros en 2011/2012 et que les crédits litigieux ont été remboursés pendant plusieurs années, (de sorte) que les crédits (sic) étaient, lors de leur souscription, adaptés aux capacités financières des emprunteurs ; qu'en statuant ainsi sans préciser le montant des revenus perçus par M. [K] en 2018 et en se déterminant par des motifs tirés des seuls revenus escomptés dans le cadre de l'opération financée par la banque, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'adaptation du prêt de 80 000 euros aux capacités financières des emprunteurs au 20 mars 2009, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
ALORS D'AUTRE PART QUE le banquier dispensateur de crédit est tenu d'un devoir de mise en garde lorsque l'octroi du crédit est inadapté aux capacités financières de l'emprunteur non averti et fait naître pour ce dernier un risque d'endettement excessif ; que la banque doit vérifier la viabilité du projet et rechercher si les perspectives de rentabiliser l'opération sont normales et ne présentent pas de facteurs de risques excédant ceux inhérents à toute entreprise ; que dans ses conclusions notifiées le 11 janvier 2019 (p 11 § 8 à § 12), Mme [K], se fondant sur le dossier « client professionnel » du 29 janvier 2009 aux termes duquel la Caisse concluait que « la boulangerie rachetée à un trésorerie négative du fait qu'elle est fortement dépendante des fournisseurs » et que « la trésorerie négative est anormale dans ce secteur » reprochait à la Caisse de s'être abstenue de l' aviser des risques encourus ; que pour écarter l'existence d'un devoir de mise en garde de la Caisse à l'égard de Mme [K], pourtant qualifiée d'emprunteuse non avertie, la cour d'appel se borne à retenir que le dossier prévisionnel de création d'activité d'avril 2009 à mars 2012 projetait un résultat de 22 65 euros en 2009/2010, 32 593 euros en 2010/2011 et 34 032 euros en 2011/2012 et que l'avis d'imposition 2007 mentionne que les bénéficies industriels et commerciaux de M. [K] se sont élevés à 48 758 euros ;
qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, si la Caisse avait rempli son obligation de mise en garde à l'égard de Mme [K] sur les risques particuliers attachés à la poursuite de l'exploitation de ce fonds de commerce de boulangerie à l'acquisition duquel le prêt du 20 mars 2009 était affecté, la cour d'appel a, de nouveau, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
ALORS ENFIN QUE l'établissement de crédit, tenu d'un devoir de mise en garde à l'égard d'emprunteurs profanes doit, avant de leur apporter son concours, vérifier leurs capacités financières et les alerter sur les risques découlant de leur endettement ; que dans ses conclusions notifiées le 11 janvier 2019 (p. 11 § 2 à § 4), Mme [K] faisait valoir que « la banque savait que l'opération était risquée puisque même le prévisionnel de création d'activité précise : le ratio d'autonomie financière est de 0.22 en 2009-2010, 0.34 en 2010-2011 et 0.53 en 2011-2012. Les sources professionnelles du milieu bancaire préconisant un ratio supérieur à 1 » et que « la viabilité de l'activité n'était envisagée que par l'augmentation des fonds propres et le recours à de nouveaux emprunts » ; que pour écarter la responsabilité de la Caisse à l'égard de Mme [K], emprunteuse non avertie, au titre de son devoir de mise en garde, l'arrêt se prononce sur la faisabilité du projet par référence aux seuls résultats mentionnés dans le dossier prévisionnel, à savoir 22 65 euros en 2009/2010, 32 593 euros en 2010/2011 et 34 032 euros en 2011/2012 ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, si la charge de remboursement du prêt de 80 000 euros pouvait, au regard des conditions évoquées dans ce dossier, être supportée par l'exploitation du fonds à l'acquisition duquel le prêt était affecté, la cour d'appel a, de nouveau, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR condamné Mme [B] [K] à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin la somme de 46 579,03 euros, outre intérêts au taux de 4,50 % majoré de trois points à compter du 1er février 2014 au titre du prêt de 53 100 euros [souscrit le 28 juillet 2010] et de l'avoir déboutée de ses demandes.
ALORS D'UNE PART QUE le banquier dispensateur de crédit est tenu d'un devoir de mise en garde lorsque l'octroi du crédit est inadapté aux capacités financières de l'emprunteur non averti et fait naître, pour ce dernier un risque d'endettement excessif ; que le caractère adapté du crédit aux capacités financières de l'emprunteur s'apprécie à la date de conclusion du contrat, au regard du patrimoine de l'emprunteur, de ses revenus et de ses charges ; que pour juger que la Caisse n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde à l'égard de Mme [K] et condamner cette emprunteuse, pourtant non avertie, au paiement des sommes restant dues au titre du prêt souscrit le 28 juillet 2010, l'arrêt après avoir relevé que celle-ci avait perçu en 2008 des revenus mensuels inférieurs à 250 euros, retient successivement que l'avis d'imposition de 2007 fait apparaître que les revenus industriels et commerciaux de son époux, coemprunteur et commun en biens se sont élevés à 48 758 euros ; que ce second prêt avait pour finalité un financement de trésorerie de l'activité de boulangerie, que le dossier prévisionnel de création d'activité d'avril 2009 à mars 2012 projetait un résultat de 22 645 euros en 2009/2010, 32 593 euros en 2010/2011 et 34 032 euros en 2011/2012 ; que les crédits litigieux ont été remboursés pendant plusieurs années, (de sorte) que les crédits étaient, lors de leur souscription, adaptés aux capacités financières des emprunteurs ; qu'en statuant ainsi, par des motifs généraux, se rapportant indifféremment aux deux prêts litigieux et partant, sans rechercher, comme elle le devait, si à la date de conclusion du second prêt, intervenu le 28 juillet 2010 celui-ci était adapté aux capacités financières de M et Mme [K], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
ALORS D'AUTRE PART QUE le banquier dispensateur de crédit est tenu d'un devoir de mise en garde lorsque l'octroi du crédit est inadapté aux capacités financières de l'emprunteur profane et fait naître, pour ce dernier un risque d'endettement excessif ; que le caractère adapté du crédit s'apprécie à la date de conclusion du crédit, au regard du patrimoine de l'emprunteur, de ses revenus et de ses charges ; que pour exclure l'existence d'un devoir de mise en garde de la Caisse à l'égard de Mme [K], pourtant emprunteuse non avertie, l'arrêt, tout en constatant que le second prêt en cause avait pour objet de financer un besoin de trésorerie de la boulangerie, se borne à retenir que le dossier prévisionnel de création d'activité d'avril 2009 à mars 2012 projetait un résultat de 22 645 euros en 2009/2010, 32 593 euros en 2010/2011 et 34 032 euros en 2011/2012 ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si le second prêt de 53 100 euros souscrit le 28 juillet 2010 était adapté aux capacités financières des emprunteurs à la date de son octroi et n'avait pas créé un risque d'endettement excessif contre lequel la Caisse devait mettre en garde Mme [K], coemprunteuse profane, la cour d'appel a, de nouveau, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
ALORS ENFIN QUE les juges du fond doivent répondre aux conclusions dont ils sont régulièrement saisis ; que dans ses écritures notifiées le 11 janvier 2019, Mme [K] faisait valoir que « le chiffre d'affaires prévisionnel n'a jamais été atteint » (p 2 § 9), que « le prêt souscrit en juillet 2010 avait pour but de pallier un besoin de trésorerie, compte tenu des difficultés financières rencontrées » (p 2 in fine) et que « à cette époque les seuls revenus du couple étaient issus de l'exploitation du fonds » (p 11 § 7) ; qu'en déduisant l'adaptation des crédits litigieux aux capacités financières des emprunteurs à la date de leur souscription des seuls résultats prévisionnels, sans répondre à ces conclusions déterminantes, établissant que la souscription du second prêt avait créé un risque d'endettement excessif des emprunteurs nécessitant l'exercice par la Caisse de son devoir de mise en garde de Mme [K], coemprunteuse non avertie, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Le greffier de chambre