CIV. 1
OR
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 2 mars 2022
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10185 F
Pourvoi n° T 20-21.302
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2022
Mme [V] [D], épouse [Y], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 20-21.302 contre l'arrêt rendu le 7 juillet 2020 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [C] [D], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseiller, les observations écrites de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [D], épouse [Y], de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 11 janvier 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Poinseaux, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [Y] et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme [Y]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté une héritière (Mme [Y], l'exposante) de sa demande de rapport à la succession d'effets successoraux recélés par son frère (M. [D]) ;
ALORS QUE les juges ne peuvent rejeter les demandes des parties sans examiner les éléments de preuve versés aux débats à l'appui de leurs prétentions ; qu'en énonçant que, pour administrer la preuve du détournement par son frère d'un tableau qui serait attribué à [R] [N], l'héritière n'avait produit que l'attestation de son mari sans s'expliquer sur les nombreux échanges entre notaires, une correspondance dudit mari ainsi qu'une photographie prise dans l'ancien appartement des parents montrant le tableau litigieux accroché au mur, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, en outre, le juge ne peut se prononcer par voie d'affirmation ; qu'en s'appuyant sur la seule allégation du frère prétendant qu'il aurait trouvé le tableau litigieux dans la cave de ses parents, se déterminant de la sorte sur une simple déclaration de l'intéressé en sa faveur, à l'exclusion de tout autre élément de preuve qu'elle aurait dû par ailleurs analyser, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif, ne satisfaisant pas ainsi aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, enfin, le juge ne peut rejeter les demandes des parties sans examiner les éléments de preuve versés aux débats à l'appui de leurs prétentions ; qu'en énonçant que l'héritière n'administrait pas la preuve que les autres biens qu'elle accusait son frère d'avoir recelés étaient en possession de sa mère au moment du décès, sans même examiner les photographies prises par les agences immobilières(pièce 90 du bordereau) qui faisaient apparaître un tableau du père, une bonbonnière et une coupe en cristal qui avait par la suite disparue, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté une héritière (Mme [Y], l'exposante) de sa demande en rapport à la succession de libéralités consenties à son frère (M. [D]) ;
ALORS QUE, d'une part, seule la rémunération d'un service déjà rendu peut constituer une donation rémunératoire non rapportable ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a constaté que, le 30 octobre 2012, le frère avait reçu de sa mère la somme de 6 000 € rémunérant le service qu'il lui avait rendu entre la mi-août 2012 et, jusqu'à l'hospitalisation de celle-ci, début décembre 2012 ; qu'en déclarant que ce versement caractérisait une donation rémunératoire quand il était intervenu avant même l'achèvement du service rendu, la cour d'appel a violé les articles 843, 852, 893, 894 et 909 du code civil ;
ALORS QUE, d'autre part, seule la rémunération d'un service rendu par un enfant au défunt et excédant la piété filiale constitue une donation rémunératoire non rapportable ; qu'en l'espèce, pour énoncer que la somme de 6 000 € remise par la mère à son fils en octobre 2012 s'analysait en une donation rémunératoire, l'arrêt attaqué a considéré que le versement visait à indemniser le second des frais générés pour avoir accueilli et entretenu la première de mi-août à début décembre 2012, date de son hospitalisation, et était compatible avec la fortune du donateur ; qu'en se prononçant de la sorte sans vérifier, ainsi qu'elle y était invitée, si, durant cette même période, la défunte avait ellemême réalisé des dépenses pour pourvoir à son entretien de sorte que la somme remise à son fils avait un caractère exclusivement libéral, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard des articles 843, 852, 893, 894 et 909 du code civil ;
ALORS QUE, en outre, en présupposant que la somme de 6 000 € perçue par le fils visait à l'indemniser des frais générés pour avoir accueilli et assisté sa mère de mi-août à début décembre 2012, date de son hospitalisation, et était compatible avec la fortune de l'intéressée sans constater que l'assistance apportée par le fils avait excédé la piété filiale dont il était redevable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 843, 852, 893, 894 et 909 du code civil ;
ALORS QUE, de surcroît, les conclusions prises dans l'instance s'imposent au juge avec la même force obligatoire que les actes juridiques ; qu'en affirmant qu'il n'était « pas vraiment contesté » par l'héritière que, à compter de la miaoût 2012, son frère avait mis à la disposition de sa mère un appartement à [Localité 3] et qu'il s'était occupé d'elle jusqu'à début décembre tandis que, dans ses écritures, elle faisait valoir que la défunte s'était installée chez son fils seulement de mi-septembre au 7 décembre 2012, soit moins de trois mois, et que sur cette courte période elle avait effectué des dépenses à hauteur de 10 000 € qui couvraient davantage que les frais liés à son entretien, qui n'avait de la sorte pas été assumé par le fils, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'exposante en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, enfin, le juge ne peut se prononcer par voie d'affirmation ; qu'en s'appuyant, pour déclarer que n'étaient pas rapportables à la succession le tableau marine trois mâts et la console Louis XV en bois avec rose, sur la seule allégation du frère ayant prétendu que ces objets lui avaient été remis pour le remercier des trajets qu'il effectuait pour transporter ses parents de leur résidence principale à leur résidence secondaire, se déterminant de la sorte sur une simple déclaration de l'intéressé en sa faveur, à l'exclusion de tout autre élément de preuve qu'elle aurait dû par ailleurs analyser, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif, ne satisfaisant pas ainsi aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.