CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 2 mars 2022
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN président,
Décision n° 10181 F
Pourvoi n° W 20-20.615
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2022
1°/ Mme [V] [W], épouse [J], domiciliée [Adresse 10],
2°/ Mme [U] [W], divorcée [D], domiciliée [Adresse 2],
3°/ M. [X] [W], domicilié [Adresse 7],
4°/ M. [T] [W], domicilié [Adresse 13] (États-Unis),
5°/ Mme [S] [W], épouse [M], domiciliée [Adresse 6],
6°/ Mme [K] [W], domiciliée [Adresse 14] (Finlande),
7°/ Mme [O] [D], épouse [Z], domiciliée [Adresse 5],
8°/ M. [Y] [D], domicilié [Adresse 3],
9°/ M. [B] [D], domicilié [Adresse 8],
10°/ Mme [N] [J], épouse [E], domiciliée [Adresse 1],
11°/ M. [H] [J], domicilié [Adresse 9],
12°/ Mme [C] [J] épouse [P], domiciliée [Adresse 4] (Suisse),
13°/ M. [G] [J], domicilié [Adresse 12],
ont formé le pourvoi n° W 20-20.615 contre l'arrêt rendu le 10 mars 2020 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige les opposant à Mme [R] [F], veuve [W], domiciliée [Adresse 11] (Suisse), défenderesse à la cassation.
Un pourvoi incident a été formé contre le même arrêt par Mme [F].
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Vigneau, conseiller, les observations écrites de Me Le Prado, avocat de Mmes [V], [U], [S] et [K] [W], MM. [X] et [T] [W], Mme [D], MM. [Y] et [B] [D], Mmes [N] et [C] [J], MM. [H] et [G] [J], de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme [F], veuve [W], après débats en l'audience publique du 11 janvier 2022 où étaient présents M. Chauvin, président , M. Vigneau, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation du pourvoi principal et le moyen du pourvoi incident, annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne Mmes [V], [U], [S] et [K] [W], MM. [X] et [T] [W], Mme [D], MM. [Y] et [B] [D], Mmes [N] et [C] [J], MM. [H] et [G] [J] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mmes [V], [U], [S] et [K] [W], MM. [X] et [T] [W], Mme [D], MM. [Y] et [B] [D], Mmes [N] et [C] [J], MM. [H] et [G] [J] et les condamne à payer à Mme [F], veuve [W], la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille vingt-deux et signé par lui et Mme Berthomier, greffier présent lors du prononcé.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit, au pourvoi principal, par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mmes [V], [U], [S] et [K] [W], MM. [X] et [T] [W], Mme [D], MM. [Y] et [B] [D], Mmes [N] et [C] [J], MM. [H] et [G] [J],
LE MOYEN reproche à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué,
D'AVOIR déclaré valide le testament olographe du 26 octobre 2009 ;
AUX MOTIFS QUE (sur) la demande d'application du testament authentique du 9 octobre 2007, (
) ; qu'en préambule il y a lieu de tenir compte de ce que les pièces produites aux débats établissent qu'à l'âge de 90 ans, [A] [W] a souhaité s'établir en Suisse, ce qui est constaté par les décisions judiciaires produites aux débats ; qu'il a manifesté expressément cette intention dans un curriculum vitae destiné aux autorités suisses ; que si son décès est survenu avant le déménagement en Suisse, il n'en demeure pas moins que toutes les formalités nécessaires à celui-ci étaient accomplies, les époux [W] ayant en particulier mandaté deux avocats suisses pour ce faire ; qu'en particulier, [A] [W] avait rédigé procuration en faveur de l'un d'eux aux fins de signer le bail pour son futur logement en Suisse ; que c'est à juste titre que Mme [F] veuve [W] fait valoir que la question de la juridiction compétente et de la loi applicable au règlement de la succession de [A] [W] n'a définitivement été tranchée au profit de la compétence du juge français et de l'applicabilité de la loi française que par l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 7 juin 2012 et l'arrêt du 24 septembre 2012 de la onzième cour de droit civil du tribunal fédéral suisse ; que par suite le dépôt du testament olographe auprès du juge de paix de Nyon en Suisse dont la photocopie certifiée conforme a été transmise à tous les successibles par le greffier de cette juridiction le 21 février 2010, ne peut être considéré comme frauduleux ; qu'ensuite l'article 970 du code civil dispose que le testament olographe ne sera point valable, s'il est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur : il n'est assujetti à aucune autre forme ; qu'il y a lieu d'observer que ce texte ne prévoit pas d'autres conditions de forme et précise même que le testament n'est assujetti à aucune autre forme que celles qu'il prescrit ; qu'en outre, si l'article 1007 du code civil dispose que tout testament olographe sera, avant d'être mis à disposition déposé entre les mains d'un notaire, ce texte ne prévoit pas davantage de sanctions en cas de non-respect de cette formalité ; que le but de celle-ci est d'ailleurs d'assurer la conservation du testament ; qu'or, l'original du testament de [A] [W] du 9 octobre 2009, s'il n'a pas été déposé auprès d'un notaire français, a bien fait l'objet d'un dépôt auprès du juge de paix de Nyon, ce qui est de nature à en assurer la conservation ; que le but poursuivi par le texte est donc rempli ; que le greffe de cette juridiction en a d'ailleurs communiqué photocopie certifiée conforme à tous les successibles conformément aux règles du droit suisse ; que l'article 1379 du code civil, issu de l'ordonnance du 10 février 2016 n'était pas en vigueur lors de l'introduction de l'instance le 3 août 2010 ; que néanmoins, la jurisprudence antérieure à l'entrée en vigueur de ce texte reconnaissait la valeur des copies fidèles et durables ; que la qualité de l'autorité dépositaire du testament litigieux ne permet pas de douter de la fidélité et de la durabilité des photocopies certifiées conformes adressée aux successibles par le greffe de la juridiction suisse ; qu'il y a lieu de plus de relever que si le légataire n'est en droit de faire la preuve de l'existence du testament olographe par la production de copies qu'en cas de perte fortuite, telle n'est pas la situation de la présente espèce, cette copie ayant été communiquée directement aux héritiers par le greffe de la juridiction suisse auprès de laquelle l'original est déposé et conservé par celle-ci ; qu'en outre, si les consorts [W] font valoir que la sincérité du testament doit être vérifiée conformément aux articles 287 et 288 du code de procédure civile dès lors qu'ils le contestent, force est de constater qu'ils n'en demandent pas la vérification dans le dispositif de leurs écritures qui seul saisit la cour par application de l'article 954 du code de procédure civile ; qu'ils n'en demandent pas davantage la représentation par la légataire instituée par celui-ci ; qu'enfin, ils n'en poursuivent pas non plus la nullité dans les termes de leur dispositif se bornant à demander à ce qu'il soit écarté au profit du testament authentique, ce qu'il n'y a pas lieu de faire pour les motifs sus-évoqués ; que le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point » ;
1°) ALORS QUE la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion ; qu'en demandant, dans le dispositif de leurs dernières conclusions, à la cour d'appel de juger que seul le testament authentique était valide, les consorts [W] lui avaient nécessairement demandé de juger que le testament olographe postérieur ne l'était pas et, partant, en ont recherché la nullité, ce qui supposait la vérification de sa sincérité et donc la production de son original ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel, qui était saisie des demandes ainsi formulées, a violé l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le testament olographe ne sera point valable, s'il n'est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur, ce qui impose la production de son original par celui qui s'en prévaut, dont seule la perte par suite d'un cas fortuit ou d'une force majeure autorise celui qui s'en prévaut à rapporter par tous moyens la preuve de son existence et de son contenu ; qu'en postulant la validité du testament olographe litigieux, sur la foi de son dépôt entre les mains d'un juge suisse, sans examen de son original, non produit devant elle, qui seul pouvait lui permettre d'en vérifier la sincérité, la cour d'appel a violé l'article 970 du code civil, ensemble l'article 1348, alinéa 1er, du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3°) ALORS QU' un défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans leurs écritures d'appel (concl., p. 10 s.), les consorts [W] ont invoqué la fraude commise par la veuve du défunt, ayant, après le décès de [A] [W], fait déplacer en Suisse le testament olographe, qu'il avait rédigé en France, pour le remettre entre les mains d'un juge de paix, sans autre motif que de provoquer ainsi l'application de la loi suisse ; qu'en omettant de se prononcer sur cette circonstance, propre à établir la fraude de Mme [F], la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Alain Bénabent, avocat aux conseils, pour Mme [F], veuve [W]
Madame [F] veuve [W] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes en rapport successoral et aux fins de voir ordonner une expertise financière
ALORS QU'une cour d'appel ne peut rejeter une demande aux seuls motifs adoptés des premiers juges, en ignorant les nouvelles pièces présentées en cause d'appel par les parties lorsque, de surcroît, les premiers juges en avaient déploré l'absence ; que le tribunal avait débouté l'exposante de sa demande en rapport successoral au motif qu'elle ne produisait aucune pièce de nature à démontrer l'existence du prêt consenti par le défunt à son fils ; qu'en appel, l'exposante a produit, en pièce n° 101, la reconnaissance de dette signée par Monsieur [X] [W], aux termes de laquelle il reconnaissait avoir emprunté et devoir à son père, le de cujus, la somme de 3 560 000 francs ; qu'en se bornant à énoncer, pour confirmer le jugement de ce chef, que « c'est par de justes motifs adoptés par la cour que le tribunal a débouté Mme [F] veuve [W] de ces demandes ; qu'en cause d'appel, celle-ci ne justifie d'aucun motif de nature à infirmer la décision de première instance sur ce point », la cour d'appel a purement et simplement ignoré la nouvelle pièce produite par l'exposante, et a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile