CIV. 1
OR
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 2 mars 2022
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10180 F
Pourvoi n° P 20-18.515
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2022
1°/ M. [T] [W],
2°/ Mme [K] [X], épouse [W],
domiciliés tous deux [Adresse 1],
3°/ Mme [R] [W], domiciliée [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° P 20-18.515 contre l'arrêt rendu le 15 janvier 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [M] [J], domicilié [Adresse 3],
2°/ à M. [U] [J], domicilié [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Vigneau, conseiller, les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [W] et de Mmes [K] et [R] [W], de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de MM. [M] et [U] [J], après débats en l'audience publique du 11 janvier 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Vigneau, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [W] et et Mmes [K] et [R] [W] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [W] et Mmes [K] et [R] [W] et les condamne à payer à MM. [M] et [U] [J] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille vingt-deux et signé par lui et Mme Berthomier, greffier présent lors du prononcé.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [W] et Mmes [K] et [R] [W]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. [W], Mme [X], épouse [W] et Mme [W], épouse [F] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les deux factures émises par l'exécuteur testamentaire à hauteur de la somme de 34 086 euros pour frais et de celle de 28 391,49 euros pour honoraires devaient être admises et réglées par la succession conformément aux dispositions testamentaires et figurer au passif de la succession, d'AVOIR renvoyé les parties devant le notaire liquidateur pour prise en compte de la rémunération de l'exécuteur testamentaire telle que retenue par la juridiction pour une total de 62 477,49 euros ;
ALORS QUE l'exécuteur testamentaire rend compte dans les six mois suivant la fin de sa mission ; qu'en retenant, pour écarter le moyen des consorts [W] pris, en l'absence de rapport de fin de mission, de ce que [J] n'avait pas exécuté sa mission et consacrer l'existence d'une créance de ses héritiers au titre de la rémunération d'exécuteur testamentaire, que « l'article 1033 du code civil n'impose pas que l'exécuteur testamentaire établisse un "rapport de fin de mission" » (arrêt, p. 7, § 8), la cour d'appel a violé ce texte.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
M. [W], Mme [X], épouse [W] et Mme [W], épouse [F] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté leurs demandes tendant à voir juger que [J] avait commis des fautes dans l'exécution de sa mission et de condamner en conséquence les consorts [J], ses héritiers, à payer la somme de 250 000 euros aux époux [W] ;
1) ALORS QUE tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant ; qu'en retenant, pour écarter toute faute de [J] dans l'exécution de son mandat, qu'« il n'apparaît pas de lien entre les redressements fiscaux et le refus de [J] de procéder à la reproduction et à la transmission d'un dossier selon lui de 300 pièces, sous prétexte que le paiement de ses factures lui était refusé » (arrêt, p. 10, § 3), après avoir pourtant préalablement considéré, « au regard du pouvoir que [J] s'était fait consentir par les légataires universels, pour "la prise en charge de l'intégralité du dossier de succession", que sa mission comprenait l'accomplissement des démarches nécessaires au bon règlement de la succession, sous réserve des compétences propres du notaire, ou des tâches que lesdits légataires décidaient d'accomplir de leur propre chef et sous leur propre responsabilité » (arrêt, p. 8, § 3), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait qu'il incombait à [J], en sa qualité de mandataire des époux [W] ayant pris en charge l'intégralité du dossier de succession, de rendre compte de sa gestion en remettant à ses mandants l'ensemble des éléments nécessaires au traitement du dossier successoral, de sorte que son refus à cet égard était nécessairement fautif, violant ainsi l'article 1993 du code civil ;
2) ALORS QUE tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant ; qu'en retenant, pour écarter le grief fait à [J] par les consorts [W] de n'avoir pas communiqué les documents relatifs à la valorisation du patrimoine immobilier tel qu'il la pratiquait dans le cadre de l'impôt de solidarité sur la fortune de la défunte, qu'« il ne lui a par ailleurs pas été demandé de rendre compte de la manière dont le patrimoine immobilier avait été valorisé dans le cadre des déclarations (ce qui aurait pu être utile dans le cadre d'une contestation du premier redressement, au vu de la déclaration ISF 2007, en possession des appelants : cf pièce 39) » (arrêt, p. 10, § 3), quand l'obligation de rendre compte incombant à [J] en sa qualité de mandataire devait être exécutée sans qu'il fût nécessaire de le solliciter, la cour d'appel a violé l'article 1993 du code civil ;
3) ALORS QU'en toute hypothèse, il appartient au mandataire d'établir qu'il a exécuté les obligations lui incombant ; qu'en retenant, pour écarter le grief fait à [J] par les consorts [W] de n'avoir pas calculé les droits successoraux et adressé l'information concernant le montant à payer et la date à ne pas dépasser, que « même si les pièces produites par les consorts [J] ne portent pas la trace d'une communication aux consorts [W] du montant des droits à payer, les appelants ne justifient non plus d'aucune interrogation non satisfaite sur ce point » (arrêt, p. 9, § 7), quand il incombait à [J], en sa qualité de mandataire des époux [W] ayant pris en charge l'intégralité du dossier de succession, d'informer lui-même les successibles des démarches qu'ils leur restait à accomplir et de rapporter la preuve qu'il avait satisfait à cette obligation, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1992 du code civil, ensemble l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;
4) ALORS QU'en toute hypothèse, le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion ; qu'en retenant, pour écarter le grief pris de ce que les manquements imputés à [J] étaient à l'origine des pénalités de retard qui leur avaient été réclamées et des redressements dont ils avaient fait l'objet, que « les redressements fiscaux sont intervenus alors que M. [W] avait fait savoir à M. [J], par lettres des 22 janvier 2009 et 5 février 2009, qu'il n'entendait plus lui confier la défense de ses intérêts » (arrêt, p. 10, § 2) après avoir constaté que « la déclaration de succession a été signée le 11 septembre 2008, et le solde des droits en résultant d'un montant de 472 279 euros a été réglé au mois d'avril 2009, en complément de plusieurs acomptes versés les 3 septembre 2007 (104 895 euros), 3 mars 2008 (200 000 euros) et 3 octobre 2008 (20 000 euros) » (arrêt, p. 8, § 4), ce dont il résultait que les paiements antérieurs à la décision des mandants de mettre fin aux fonctions du mandataire étant insuffisants, la cause de la tardiveté sanctionnée par l'administration fiscale était nécessairement antérieure à la cessation des fonctions du mandataire, de sorte qu'il devait en répondre, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1992 du code civil.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
M. [W], Mme [X], épouse [W] et Mme [W], épouse [F] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté leur demande tendant à la restitution par les consorts [J] ès qualités d'héritier de [J] de la somme de 64 000 euros perçue sans justification à titre d'honoraires sur l'exercice 2007 ;
ALORS QUE le motif dubitatif équivaut à un défaut de motif ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de restitution de la somme de 64 000 euros à titre d'honoraire perçus sans facture, par [J] au titre de l'exercice 2006, que « la mention d'honoraires pour un montant de 64.057 euros dans le compte de tutelle de l'année en cause (pièce 62 des appelants, dont ils ne produisent que le recto, mais dont la pièce 59 concernant une année précédente démontre qu'il a dû être signé au verso par M. [W]), est assortie de l'explication suivante "factures d'honoraires élevées (avocat, commission vente immobilière)"ce qui permet de douter qu'ils aient été intégralement facturés par [J] », la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs dubitatifs relatifs tant à l'acceptation du compte de tutelle qu'à la facturation intégrale des honoraires litigieux, a violé l'article 455 du code de procédure civile.
QUATRIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
M. [W], Mme [X], épouse [W] et Mme [W], épouse [F] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté leur demande tendant à la restitution par les consorts [J] ès qualités d'héritier de [J] de la somme de 274 000 euros, comprise dans celle de 366 000 euros visée dans le dispositif de leurs concluions, disparue des comptes de la succession sans justification ;
ALORS QUE tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant ; qu'en rejetant la demande de restitution de la somme de 274 000 euros au titre des sommes disparues de l'actif de la succession, aux motifs que « pour prétendre que des fonds auraient disparu, les consorts [W] se fondent sur le fait que le notaire n'a encaissé que deux sommes de 16 000 et 200 000 euros, en provenance de la banque Rothschild », tandis qu'« ils admettent avoir également bénéficié de deux sommes de 14.772,54 euros et de 24.251,24 euros, dont on retrouve la trace sur les relevés de compte de la banque Rothschild qu'ils produisent en pièces 56 et 57 », que « ces relevés montrent également qu'ils ont bénéficié d'une somme de 118 807 euros versée pour leur compte au Trésor Public le 29 avril 2011 », « qu'ainsi il est justifié de l'emploi d'une somme de 373 830,54 euros pour des avoirs à la banque Rothschild d'un montant initial de 369 174,86 euros, la valeur des titres ayant pu évoluer entre-temps », de sorte que « les consorts [W], qui s'abstiennent de produire les réponses faites par la banque Rothschild à leur demande de renseignements des 20 octobre et 12 novembre 2015, ne fournissent aucun élément sérieux de nature à étayer leur demande de restitution », quand il incombait à [J], en sa qualité d'exécuteur testamentaire et de mandataire des époux [W] ayant pris en charge l'intégralité du dossier de succession, de rendre compte, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1992 du code civil, ensemble l'article 1315, devenu 1353, du code civil.