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16/02/2022 | FRANCE | N°18-19.925

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na, 16 février 2022, 18-19.925


SOC.

CA3



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 février 2022




Rejet non spécialement motivé


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10160 F

Pourvoi n° E 18-19.925




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 FÉVRIER 2022>
La société Op Serv, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° E 18-19.925 contre l'arrêt rendu le 22 mai 2018 par la cour d'appel...

SOC.

CA3



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 février 2022




Rejet non spécialement motivé


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10160 F

Pourvoi n° E 18-19.925




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 FÉVRIER 2022

La société Op Serv, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° E 18-19.925 contre l'arrêt rendu le 22 mai 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant à M. [Z] [K] [F], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations écrites de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Op Serv, de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de M. [K] [F], après débats en l'audience publique du 4 janvier 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Op Serv aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Op Serv et la condamne à payer à M. [K] [F] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Op Serv


PREMIER MOYEN DE CASSATION :


Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif d'avoir dit que le licenciement de M. [K] [F] était fondé sur une cause réelle et sérieuse, mais non sur une faute grave, d'avoir condamné en conséquence la société OP SERV à payer à M. [K] [F] les sommes de 7.934 euros à titre de rappel de salaires pendant la mise à pied et 793,40 euros pour les congés payés afférents, 15.868 euros à titre d'indemnité de préavis, 1.586,80 euros pour les congés payés afférents, et 8.873 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, ainsi que la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QU' « il ressort des pièces produites et des explications des parties qu'elles ont eu des discussions infructueuses sur une éventuelle rupture conventionnelle, à la suite desquelles elles ont eu un échange de mail le 21 janvier 2013, M. [H] écrivant en premier : 'tu viens de quitter l'entreprise en indiquant que tu arrêtes de travailler.... C'est inacceptable ; il reste des bogues à solder (...) qui sont sur le chemin critique de la livraison de janvier. Je te demande de te ressaisir et de finaliser le travail (...) ', auquel M. [K] [F] a répondu : 'je prends mes congés jusqu'à ce que tu tiennes tes engagements. De toute façon, j'ai encore beaucoup de congés à prendre...', suivi du mail suivant de M. [H] : 'congés refusés : on peut envisager que tu les prennes à partir de février (livraison de la build attendue) : il y a une procédure pour les demandes de congés valable pour tous les collaborateurs, y compris toi (...)' ; le 25 janvier, M. [K] [F] lui a écrit que son absence n'empêchait pas les dossiers d'avancer, et concernant sa prise de congés : 'tu m'as mis dans l'obligation d'agir ainsi. Comme tu le sais, mes demandes de congés sont toujours faites verbalement et malheureusement, la plupart de mes demandes sont refusées, au motif du travail en cours. A ce jour je cumule 27 jours de congés (que je prends actuellement). C'est la raison pour laquelle et en ce début d'année, il m'apparaît opportun de les prendre' ; En vertu des articles L. 3141-13 du code du travail, l'employeur est seul habilité à déterminer la date des congés et le départ du salarié en congés sans autorisation constitue un acte d'insubordination, justifiant son licenciement ; l'argumentation de M. [K] [F] selon laquelle il avait été convenu et accepté qu'il puisse prendre ses congés n'est aucunement étayée et en toute hypothèse, il ne pouvait passer outre le refus de l'employeur ; la faute commise est donc caractérisée ; En revanche, s'il est exact, comme le fait valoir la société OP SERV, que M. [K] [F] n'a jamais demandé à prendre ses congés avant la fin du mois de janvier 2013 comme la procédure mise en place au sein de la société lui permettait de le faire, il ressort de ses bulletins de paie qu'il avait acquis 9,84 jours de congés au titre de l'année N-1, (16,64 en cours d'acquisition pour l'année en cours), étant rappelé que la mention sur les bulletins de paye du solde de congés acquis au titre de la période antérieure équivaut à un accord de l'employeur pour le report des congés payés ; Or eu égard à la finalité qu'assigne aux congés payés annuels la directive n° 2003/88/CE du parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé ; Par ailleurs, la société OP SERV ne justifie pas de la désorganisation qu'aurait causé le départ en congés payés de M. [K] [F], étant rappelé que la preuve de la faute grave incombe à l'employeur ; Enfin le chantage allégué à la rupture conventionnelle était partagé, M. [H] ayant indiqué, dans son mail du 21 janvier lui refusant ses congés : 'Soit tu démissionnes, soit on trouve un accord de séparation conformément à ce que prévoit le droit du travail' ; Il résulte de ce qui précède que la faute commise par M. [K] [F] en passant outre le refus de l'employeur de prendre des congés acquis justifiait son licenciement mais ne nécessitait pas la rupture immédiate du contrat de travail ; il convient en conséquence de confirmer le jugement, mais seulement en ce qu'il a débouté M. [K] [F] de sa demande de dommages et intérêts ; Sur la base de son salaire brut à la date du licenciement, M. [K] [F] a droit à un rappel de salaires au titre de la mise à pied, soit 7.934 euros et les congés payés afférents, et à une indemnité compensatrice de préavis, sur la base d'une durée de préavis de deux mois admise par les parties, de 15.868 euros et les congés payés afférents ; Il ressort des pièces produites que le contrat de travail de M. [K] [F] signé le 1er juillet 2010 a suivi immédiatement le contrat précédent, si bien que l'ancienneté de M. [K] [F] à la date du licenciement était de 3 ans, 3 mois et 19 jours ; il a donc droit à une indemnité conventionnelle de licenciement de 8.873 euros » ;

1. ALORS QUE le refus réitéré du salarié de revenir travailler, en dépit de plusieurs mises en demeure, rend impossible son maintien dans l'entreprise et constitue ainsi une faute grave ; qu'au cas présent, la société OP SERV reprochait à M. [K] [F] de s'être absenté subitement et sans avoir respecté la procédure de pose des congés, à une période où l'entreprise procédait au lancement d'un produit pour lequel sa présence était essentielle ; que la société OP SERV lui reprochait aussi d'avoir persisté à refuser de revenir travailler en dépit de deux mises en demeure qui lui avaient été adressées les 23 janvier et 6 février 2013 ; qu'en considérant que l'existence d'un solde de congés payés à la date des faits de 9,84 jours (et 16,64 jours en cours d'acquisition) aurait atténué la gravité du manquement de M. [K] [F], cependant que ce dernier persistait à refuser de reprendre le travail, ce qui caractérisait l'impossibilité de maintenir le salarié dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations et a violé l'article L. 1234-1 du Code du travail ;

2. ALORS QUE si l'employeur est tenu de prendre des mesures de nature à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement ses droits à congés, il ne saurait lui être reproché d'avoir manqué à cette obligation dès lors qu'il justifie que le salarié venait de prendre 5 jours de congés et avait régulièrement bénéficié de congés au cours des mois précédents (cf. conclusions de l'exposante p.19) ; qu'il en va d'autant plus ainsi lorsque l'employeur a indiqué au salarié qui demande à partir en congés qu'il pourrait le faire à très brève échéance (moins d'un mois), une fois que le lancement d'un produit pour lequel sa présence est indispensable aura été effectué ; qu'au cas présent, la société OP SERV faisait valoir que le solde de congés à prendre pour M. [K] [F] d'ici le mois de mai 2013 était seulement de 9,84 jours et qu'il lui avait été indiqué le 23 janvier qu'il pourrait prendre ses congés dès le mois de février, après la livraison de la nouvelle version du produit « ROK » (conclusions p. 19) ; qu'en considérant cependant que la société OP SERV n'avait pas pris les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congés, ce qui justifiait selon la cour d'appel que la qualification de faute grave soit écartée, cette dernière a violé les articles L. 1234-1 et L. 3141-12 du code du travail, ensemble la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;

3. ALORS QUE la faute grave ne suppose pas que le comportement du salarié ait nécessairement eu des conséquences préjudiciables pour l'employeur ; qu'au cas présent, la société OP.SERV faisait valoir dans ses conclusions que chaque grief reproché au salarié constituait en tant que tel une faute grave (conclusions OP SERV pp. 12 à 19) ; qu'en considérant toutefois que la gravité du comportement de M. [K] [F] pouvait être atténuée par le fait que « la société OP SERV ne justifie pas de la désorganisation qu'aurait causé le départ en congés payés de Monsieur [K] [F], étant rappelé que la preuve de la faute grave incombe à l'employeur » (arrêt p.4 al.8) la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;

4. ALORS QUE le juge ne peut méconnaitre les termes du litige ; qu'au cas présent, comme le soulignait la société OP SERV (conclusions p. 16), M. [K] [F] ne faisait nullement valoir qu'il aurait subi un quelconque chantage à la rupture conventionnelle de la part de son employeur et ne présentait aucun commencement d'explication en ce sens ; que, toutefois, pour écarter le grief relatif au chantage à la rupture conventionnelle que lui avait fait subir M. [K] [F] et retenir que le licenciement n'était pas fondé sur une faute grave, la cour d'appel a estimé que ce chantage était partagé dans la mesure où l'employeur lui avait indiqué que s'il souhaitait quitter l'entreprise, il devait soit démissionner, soit trouver un accord « conformément à ce que prévoit le droit du travail » (arrêt p.5 al.1) ; qu'en se déterminant ainsi, cependant le salarié ne faisait pas valoir qu'il avait été victime d'un quelconque chantage de la part de son employeur, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

5. ALORS QUE la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties ; que ne constitue pas une pression illicite assimilable à un chantage le seul fait, pour un employeur, de rappeler à un salarié en réaction à un chantage à la rupture conventionnelle de sa part, qu'il peut mettre un terme à la relation de travail, soit en négociant une rupture conventionnelle conformément aux règles encadrant cette rupture, soit en démissionnant ; qu'au cas présent, la société OP SERV faisait valoir qu'elle avait été contrainte de rappeler à M. [K] [F] par un courrier électronique du 21 janvier 2013 qu'il ne pouvait obtenir la rupture conventionnelle de son contrat en refusant de continuer à travailler et que s'il pouvait toujours démissionner, la négociation d'une rupture conventionnelle impliquait nécessairement une négociation exclusive de tout chantage (conclusions pp. 15 à 17) ; que pour écarter le grief de l'employeur relatif au chantage à la rupture conventionnelle que lui avait fait subir M. [K] [F] et retenir que le licenciement n'était pas fondé sur une faute grave, la cour d'appel a estimé que ce chantage était partagé dans la mesure où l'employeur lui avait indiqué par courriel que s'il souhaitait partir de l'entreprise, il devait soit démissionner, soit trouver un accord « conformément à ce que prévoit le droit du travail » (arrêt p. 5 al. 1) ; qu'en se déterminant ainsi, cependant que le courrier électronique du 21 janvier 2013 ne constituait pas une pression illicite assimilable à un chantage à la rupture conventionnelle, la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail.


SECOND MOYEN DE CASSATION :


Il est fait grief à l'arrêt infirmatif d'avoir condamné la société OP SERV à payer à M. [K] [F] la somme de 8.873 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE « Il ressort des pièces produites que le contrat de travail de M. [K] [F] signé le 1er juillet 2010 a suivi immédiatement le contrat précédent, si bien que l'ancienneté de M. [K] [F] à la date du licenciement était de 3 ans, 3 mois et 19 jours ; il a donc droit à une indemnité conventionnelle de licenciement de 8.873 euros » ;

ALORS QUE sauf disposition légale, conventionnelle ou contractuelle contraire, la rupture d'un premier contrat de travail suivi d'une réembauche fait perdre l'ancienneté du salarié acquise au titre du premier contrat de travail, seule l'ancienneté acquise à compter de la conclusion du second contrat de travail étant prise en considération pour le calcul du montant de l'indemnité de licenciement ; qu'au cas présent, la société OP SERV faisait expressément valoir que M. [K] [F] n'avait, au moment de son licenciement, qu'une ancienneté de 2 ans et 7 mois et qu'il ne pouvait ainsi prétendre à une indemnité de licenciement qu'à hauteur de 7.140 euros (conclusions p. 21) ; qu'il était en effet constant que M. [K] [F] avait été embauché par un premier contrat de travail le 22 novembre 2009 dont la période d'essai avait été rompue le 10 mai 2010 et qu'un second contrat n'avait été signé que le 1er juillet 2010, soit près de deux mois plus tard, avant d'être rompu le 11 mars 2013 ; que, toutefois, pour condamner l'exposante au paiement d'une indemnité conventionnelle de licenciement à hauteur de 8.873 euros, la cour d'appel a estimé que M. [K] [F] avait une ancienneté de 3 ans, 3 mois et 19 jours dans la mesure où le contrat du 1er juillet 2010 avait « suivi immédiatement le contrat précédent » (cour d'appel p.5 al.4) ; qu'en se déterminant ainsi, cependant que la seule circonstance qu'un second contrat avait été signé près de deux mois après la rupture du premier contrat ne permettait pas à M. [K] [F] de se prévaloir, dans le calcul de son indemnité de licenciement, de l'ancienneté acquise au titre du premier contrat, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1221-1 et L. 1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 18-19.925
Date de la décision : 16/02/2022
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris K3


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte rnsm/na, 16 fév. 2022, pourvoi n°18-19.925, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:18.19.925
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