CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 février 2022
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10158 F
Pourvoi n° R 20-19.299
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 FÉVRIER 2022
M. [L] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 20-19.299 contre l'arrêt rendu le 12 février 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à [K] [I], veuve [D], ayant été domiciliée [Adresse 3], décédée,
2°/ à Mme [S] [D], épouse [F], domiciliée [Adresse 2], prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'héritière de [K] [I], veuve [D],
3°/ à M. [C] [P], domicilié [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
Mme [S] [D] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Brouchot, avocat de M. [L] [D], de Me Balat, avocat de Mme [S] [D], après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen unique de cassation du pourvoi principal et celui du pourvoi incident, annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Condamne M. [L] [D] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille vingt-deux.
Le conseiller referendaire rapporteur le president
Le greffier de chambre MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour M. [L] [D], demandeur au pourvoi principal.
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. [L] [D] de sa demande de reconnaissance de sa créance de salaire différé dans la succession de M. [G] [D] ;
AUX MOTIFS QU'aux termes des dispositions de l'article L. 321-13 du code rural, "Les descendants d'un exploitant agricole qui, âgés de plus de dix-huit ans, participent directement et effectivement à l'exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d'un contrat de travail à salaire différé sans que la prise en compte de ce salaire pour la détermination des parts successorales puisse donner lieu au paiement d'une soulte à la charge des cohéritiers
" ; qu'aux termes de l'article L. 321-19 de ce même code, "La preuve de la participation à l'exploitation agricole dans les conditions définies aux articles L. 321-13 à L. 321-18 pourra être apportée par tous moyens
" ; qu'il appartient donc bien à M. [L] [D] qui sollicite une créance de salaire différé d'apporter la preuve de sa participation directe et effective à l'exploitation agricole familiale, sans avoir été associé aux bénéfices ni aux pertes, et sans avoir reçu de salaire en argent en contrepartie de sa collaboration ; qu'à ce titre, l'appelant indique qu'il était déclaré par ses parents en qualité d'aide familial auprès de la Mutualité Sociale Agricole (MSA) ; que selon le relevé de la MSA en date du 20 mai 2011, il a été affilié au régime non salarié agricole à compter de 1978 et au régime salarié agricole depuis 1988, tandis que le responsable de département de la MSA Beauce Coeur de Loire a attesté le 21 septembre 2011 que M. [L] [D] a été inscrit du 1er janvier 1977 au 31 décembre 1984 en qualité d'aide familial chez son père [G] [D] ; mais que, comme le rappelle M. [L] [D] lui-même, l'affiliation d'un descendant d'exploitant agricole en tant qu'aide familial n'implique pas que celui-ci perçoive une rémunération pour cette activité (Cass., Civ. 1ère, 11 février 1997, n° 95-13304) ; que le paiement d'un salaire à M. [L] [D] ne peut donc se présumer ni se déduire de son affiliation à la MSA en qualité d'aide familial ; que les intimés affirment toutefois que M. [L] [D] est resté auprès de son père pour être affilié à la MSA en qualité d'aide familial contre la volonté du défunt et dans le seul but de ne pas déclarer ses revenus, ce qui n'est pas confirmé par M. [L] [D] qui indique n'avoir déposé aucune déclaration de revenus avant 1983, année de son mariage, et produit les avis de non-imposition de son couple au titre des années 1983 et 1984, soit alors qu'il était toujours affilié au régime non salarié agricole ; que si M. [L] [D] rappelle également à juste titre que "la créance de salaire différé est compatible avec le fait d'être logé, nourri et blanchi sur l''exploitation familiale, et même de recevoir un peu d'argent de poche", il ne produit néanmoins aucun élément permettant d'établir l'absence de rémunération pour son travail sur l'exploitation familiale pour la période du 1er août 1977 au 31 décembre 1982 ; que les attestations qu'il verse aux débats confirment en effet son travail sur l'exploitation familiale pour la période de août ou septembre 1977 à fin 1984 ou 1985, mais ne comportent aucune mention relative à l'absence ou non de rémunération de l'intéressé pour cette activité, peu important dès lors les autres éléments produits relatifs à l'exploitation pour son compte du domaine agricole postérieurement à la période visée à sa demande de créance de salaire différé ; qu'il s'ensuit que M. [L] [D] ne démontre pas le caractère gratuit de sa participation à l'exploitation agricole et ne rapporte pas la preuve qu'il remplit les conditions légales précitées pour bénéficier d'une créance de salaire différé ;
ALORS QUE les descendants d'un exploitant agricole qui, âgés de plus de dix-huit ans, participent directement et effectivement à l'exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d'un contrat de travail à salaire différé sans que la prise en compte de ce salaire pour la détermination des parts successorales puisse donner lieu au paiement d'une soulte à la charge des cohéritiers ; que, dans ses conclusions d'appel, M. [L] [D] avait régulièrement fait valoir qu'il était titulaire d'une créance de salaire différé, produisant aux débats des avis de non-imposition de son couple depuis la date de son mariage, et avait exposé, d'une part, que s'il avait perçu un salaire, il aurait été affilié à la MSA en tant que salarié agricole ce qui n'avait donc pas été le cas et, d'autre part, qu'il n'avait été déclaré auprès de cet organisme que pour bénéficier d'une protection sociale, ce qui établissait son absence de perception d'une rémunération en contrepartie de sa participation à l'exploitation agricole de son père ; qu'en s'abstenant de rechercher si M. [L] [D] n'avait pas établi l'existence d'un faisceau d'indices tendant à démontrer son défaut de rémunération en contrepartie de sa participation à l'exploitation agricole familiale de nature à lui ouvrir droit à la reconnaissance d'une créance de salaire différé sur la succession de son père, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 321-13 alinéa 1er et L. 321- 18 et L. 321 -19 du code rural. Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme [S] [D], demandresse au pourvoi incident.
Mme [D] épouse [F] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande de condamnation de M. [L] [D] à rapporter à la succession la somme de 92 000 euros au titre de l'indemnité d'occupation du bien sis commune du Charme du 1er juillet 1981 au 31 octobre 2019 ;
ALORS QUE le nu-propriétaire d'un bien immobilier qu'il occupe sans payer de loyer ne doit aucune indemnité d'occupation s'il démontre qu'il n'a pas empêché les usufruitiers d'exercer leurs droits d'accès au bien litigieux ; qu'en constatant que M. [L] [D] occupait gratuitement le bien immobilier qui lui avait été donné par ses parents [G] [D] et [K] [D] née [I] avec réserve d'usufruit, mais en l'exonérant cependant du paiement d'une indemnité d'occupation au motif qu'il n'était pas « justifié, ni démontré » qu'il « ait empêché le défunt d'exercer ses droits d'usufruitier » (arrêt attaqué, p. 7, alinéa 1er), cependant que c'était à M. [L] [D] qu'il de démontrer que la détention par lui-même des clés de la propriété qu'il occupait n'avait pas interdit à [G] [D] d'exercer ses droits d'usufruitier, la cour d'appel qui a inversé la charge de la preuve a violé l'article 1353 du code civil.
Le greffier de chambre