CIV. 3
VB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 février 2022
Rejet non spécialement motivé
Mme TEILLER, président
Décision n° 10079 F
Pourvoi n° Y 19-18.267
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 FÉVRIER 2022
1°/ M. [D] [C],
2°/ Mme [V] [C],
domiciliés tous deux 117 [Adresse 1], 42100 Saint-Etienne,
ont formé le pourvoi n° Y 19-18.267 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2019 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme [Y] [O], épouse [L],
2°/ à M. [A] [L],
domicilié tous deux [Adresse 5],
3°/ au syndicat des copropriétaires du 117 [Adresse 1], dont le siège est 117 [Adresse 1], 42100 Saint-Etienne, représenté par son syndic bénévole, M. [A] [L], domicilié [Adresse 6],
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Jariel, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Occhipinti, avocat de M. et Mme [C], de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de de M. et Mme [L] et du syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], après débats en l'audience publique du 4 janvier 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jariel, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme [C] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [C] et les condamne à payer à M. et Mme [L] et au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me Occhipinti, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [C]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de M. et Mme [C] et spécialement la demande de fermeture de l'escalier entre le lot n° 1 et le lot n° 2 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les époux [C] invoquent une clause stipulée au paragraphe "servitudes" de leur acte d'acquisition ainsi libellée : "pour permettre à la SCI Copel, venderesse, d'accéder plus facilement au surplus de l'immeuble cadastré sous le numéro 31 de la section [Cadastre 2] AC, lieudit "[Adresse 7]", pour une contenance de deux ares quatre-vingts huit centiares dont elle est propriétaire en vertu de l'acquisition sus-énoncée en l'origine de propriété, M. [S] et M. [F] lui concèdent, ce qui est accepté à titre de servitude réelle et perpétuelle, un droit de passage sur la rue Docteur [J] [I]. Ce droit de passage s'exercera sur la partie hachurée en jaune sur le plan annexé aux présentes après mention. Il pourra être exercé en tout temps et à toute heure par le propriétaire dudit immeuble ou ses ayants-cause". Cette servitude conventionnelle, rappelée au règlement de copropriété, est issue d'un acte du 9 décembre 1985 par lequel la SCI Copel a vendu à MM. [F] et [S] une parcelle de terrain cadastrée n°[Cadastre 4] de la section AC [Cadastre 2] et contigüe à l'immeuble cadastré [Cadastre 3] section AC [Cadastre 2], de 2 a 88 ca, conservé par la venderesse et pour la desserte duquel la servitude conventionnelle a été consentie. Si le lot 31 correspond effectivement à la parcelle sur laquelle est édifié l'immeuble de la copropriété et si le cadastre fait apparaître qu'elle jouxte la parcelle [Cadastre 4] par l'Ouest, les deux parcelles étant situées le long de la [Adresse 1], il n'existe aucun élément permettant d'identifier l'assiette de cette servitude dont il n'existe aucune trace sur le terrain et dont rien ne permet d'affirmer qu'elle ait été un jour mise en oeuvre pour assurer la desserte par l'arrière de la copropriété. Les servitudes conventionnelles s'éteignent par le non usage trentenaire en application de l'article 706 du code civil et les époux [C] n'apportent aucune preuve d'un usage de cette servitude depuis moins de trente ans. En tout état de cause, en application de l'article 703, les servitudes cessent lorsque les choses se trouvent en tel état qu'on ne peut plus en user. Or les photographies produites par les parties font apparaître que la parcelle [Cadastre 4] est fermée en bordure de la [Adresse 1] sur toute sa longueur par une construction à usage de garages et que la parcelle [Cadastre 3] est clôturée par un mur édifié sur la limite avec la parcelle [Cadastre 4], l'escalier litigieux étant appuyé sur ce mur, de sorte qu'aucun passage permettant d'accéder à la [Adresse 1] depuis la parcelle [Cadastre 3] en passant par la parcelle [Cadastre 4] n'est plus possible et que la servitude s'est éteinte en application de l'article 703, La configuration actuelle des lieux fait que le lot 2 est enclavé et qu'il n'a d'accès à la voie publique que par la cour et l'escalier, La définition des lots rappelée aux actes respectifs des parties est la reprise du descriptif figurant au règlement de copropriété. Cette définition traduit la volonté des époux [M] qui ont fait construire le bâtiment en vue de le diviser en 2 lots et établir le règlement de copropriété à cette fin. Il en ressort que le lot n°2 a la jouissance privative de l'accès à l'appartement depuis la [Adresse 1], ce qui doit se comprendre comme incluant l'escalier sur toute sa hauteur y compris le palier et la partie de cour située dans le prolongement de l'escalier jusqu'à la [Adresse 1], que le lot 1 a la jouissance privative du reste de la cour et donc du "retour Nord Est" seulement jusqu'au passage desservant le lot n°2 et non pas jusqu'à la limite de propriété avec la parcelle [Cadastre 4]. Il importe donc peu que l'acte des époux [G] ne fasse pas mention d'une servitude de passage au profit du lot n°2, l'assiette du passage se trouvant sur une partie de la cour dont les propriétaires du lot n° 1 n'ont pas la jouissance privative, Le jugement doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de fermeture de l'escalier et de condamnation du syndicat des copropriétaires à faire respecter la servitude de passage convenue à l'acte du acte du 9 décembre 1985 ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'acte de vente régularisé au profit de M. et Mme [C] le 28 mai 2010 stipule les éléments suivants au paragraphe intitulé « sur les servitudes » (p.9-10): « Pour permettre à la SCI Copel, venderesse, d' accéder plus facilement au surplus de l'immeuble cadastré sous le numéro 31 de la section [Cadastre 2] AC, lieudit « [Adresse 7] pour une contenance de deux ares quatre-vingts huit centiares dont elle est propriétaire en vertu de l'acquisition sus-énoncée en l'origine de propriété, M. [S] et M. [F] lui concèdent, ce qui est accepté à titre de servitude réelle et perpétuelle, un droit de passage sur la rue Docteur [J] [I]. Ce droit de passage 'exercera sur la partie hachurée en jaune sur le plan annexé aux présentes après mention. Il pourra être exercé en tout temps et à toute heure par le propriétaire dudit immeuble ou ses ayants-causes ». A cet acte, est annexé un plan cadastral qui figure la partie hachurée en jaune comme étant l'accès actuel à la [Adresse 1]. L'acte de vente des époux [L] indique que ces derniers auront « la jouissance exclusive et particulière du terrain situé sur l'arrière de la propriété du sol et de l'accès à l'appartement depuis la [Adresse 1] ». Cette mention est directement issue du Règlement de copropriété établi le 18 septembre l998 et annexé aux deux actes de ventes qui indique, en page 6, que le lot n° 2 comporte « la jouissance exclusive et particulière du terrain situé sur I 'arrière de la propriété du sol et de l'accès à l'appartement depuis la [Adresse 1] ». Au vu du plan cadastral, du schéma, d'une photographie ct d'un constat d'huissier du 10 juillet 2013 produits par les défendeurs, il convient de constater que le lot n° 2 se trouverait complètement enclavé et dépourvu de tout accès à la rue s'il n'avait pas été logiquement prévu l'accès à la [Adresse 1] par le passage sur la parcelle de M. et Mme [C] dont il convient de préciser qu'il ne s'agit pas d'une partie privative mais d'une partie commune dont M. et Mme [C] ont la jouissance exclusive. Dans ces conditions, M. et Mme [C] seront déboutes de leur demande relative à la fermeture de l'escalier situé sur leur lot ;
1°) - ALORS QUE les parties n'avaient pas soulevé de moyen tiré de l'application des articles 703 et 706 du code civil ; qu'en relevant d'office l'application de ces textes, sans les soumettre à la discussion préalable des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°) - ALORS QUE c'est à celui qui prétend qu'une servitude s'est éteinte par non-usage qu'il appartient de le prouver ; qu'en énonçant que M. et Mme [C] n'établissaient pas l'usage de la servitude, quand il aurait fallu démontrer son absence d'usage pour établir son extinction, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation des articles 1353 et 1315 du code civil, ce dernier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3°) - ALORS QUE si les servitudes cessent lorsque les choses se trouvent en tel étant qu'on ne peut plus en user, une telle extinction n'est possible que si l'impossibilité d'usage vient du propriétaire du fonds dominant ; que la cour d'appel s'est bornée à constater que l'usage de la servitude n'était plus possible du fait de la présence de garages et d'un mur ; qu'en ne précisant pas qui était à l'origine de ces constructions, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 706 du code civil ;
4°) - ALORS QU'en retenant, par motifs adoptés, que le lot des époux [L] était enclavé, sans exclure par des motifs pertinents la possibilité pour eux de passer par le terrain voisin, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, et a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
5°) - ALORS QUE le règlement de copropriété (pp. 5 et 6) définit le lot n° 1 comme comprenant « la jouissance exclusive et particulière du terrain situé en façade du bâtiment sur la rue [J] [I] avec retour au Nord-est » et le lot n° 2 comme « l'intégralité du 1er étage du bâtiment, ( ) avec entrée indépendante sur l'arrière du bâtiment conformément à la demande de permis de construire modificatif, La jouissance exclusive et particulière du terrain situé à l'arrière du bâtiment et de l'accès à l'appartement depuis la [Adresse 1] » ; qu'il en résulte que l'accès au lot n° 2 se fait nécessairement par l'arrière du bâtiment ; qu'en énonçant qu'il résultait du règlement de copropriété que le lot n° 2 pouvait avoir accès à la [Adresse 1] par l'escalier passant dans la cour de la maison, c'est-à-dire à l'avant de celle-ci, la cour d'appel a dénaturé ce document, en violation du principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné les époux [C] à retirer le portail mobile entreposé sur le trottoir devant le mur de clôture et utilisé pour clore la cour en prenant appui sur des plots ou des parpaings ce dans un délai de quinze jours à compter de la signification du présent arrêt et sous astreinte de 30 € par jour de retard ;
AUX MOTIFS QUE s'agissant du portail, aucune disposition du règlement de copropriété n'autorise les copropriétaires du lot n° 1 à "aménager librement" les parties communes dont ils ont la jouissance privative et sur lesquelles ils n'ont qu'un droit d'usage exclusif. Il résulte des photographies versées aux débats que le portail en cause est une barrière mobile entreposée sur le trottoir le long du mur de clôture et qui peut être placée devant l'ouverture de la cour en prenant appui sur des plots ou des parpaings. Cette disposition ne répond à aucune mesure de sécurité et est susceptible de causer des dommages à des tiers, engageant ainsi la responsabilité du syndicat des copropriétaires de sorte que les époux [L] sont fondés à en demander le retrait sous astreinte ;
ALORS QUE les juges du fond doivent préciser le fondement des condamnations qu'ils prononcent ; que la cour d'appel ne constate aucune violation du règlement de copropriété ou d'un texte légal ou règlementaire justifiant que le portail soit retiré ; qu'elle a ainsi violé l'article 12 du code de procédure civile.