LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° T 21-81.957 F-D
N° 00065
ECF
19 JANVIER 2022
CASSATION
M. DE LAROSIÈRE DE CHAMPFEU conseiller le plus ancien faisant fonction de président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 19 JANVIER 2022
M. [K] [Y] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises de l'Hérault, en date du 2 mars 2021, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 25 mars 2020, pourvoi n° 19-81.799), l'a condamné, pour meurtre, à trente ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté de quinze ans et cinq ans d'interdiction de détenir une arme, ainsi que contre l'arrêt du 30 septembre 2017 par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civil.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Sudre, conseiller, les observations de la SCPBauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [K] [Y], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 décembre 2021 où étaient présents M. de Larosière de Champfeu, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Sudre, conseiller rapporteur, Mme Slove, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance du 9 novembre 2016, le juge d'instruction d'[Localité 2] a renvoyé M. [K] [Y] devant la cour d'assises de Vaucluse sous l'accusation de meurtre de [H] [N], survenu le [Date décès 1] 2013, par arme blanche.
3. Par arrêt du 29 septembre 2017, la cour d'assises de Vaucluse a déclaré M. [Y] coupable de ces faits et l'a condamné à trente ans de réclusion criminelle. Par arrêt du 30 septembre 2017, la cour a prononcé sur les intérêts civils.
4. M. [Y] a relevé appel principal de ces décisions et le ministère public et les parties civiles appel incident.
5. Par arrêt du 25 janvier 2019, la cour d'assises du Gard, statuant en appel, a condamné M. [Y] à trente ans de réclusion criminelle et la cour a prononcé sur les intérêts civils.
6. M. [Y] a formé un pourvoi en cassation contre ces décisions, et par arrêt du 25 mars 2020, la Cour de cassation a cassé l'arrêt pénal, en ses seules dispositions relatives à la peine, celles relatives à la culpabilité et celles relatives à l'arrêt civil étant expressément maintenues et renvoyé l'affaire devant la cour d'assises de l'Hérault pour qu'il soit statué, dans les limites de la cassation prononcée, sur la peine devant être appliquée.
7. Par arrêt du 2 mars 2021, la juridiction de renvoi a condamné M. [Y] à trente ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté de quinze ans et cinq ans d'interdiction de détenir une arme.
Sur la recevabilité du pourvoi formé le 8 mars 2021 contre l'arrêt civil
8. Les dispositions de l'arrêt civil, rendu le 30 septembre 2017 par la cour d'assises de [Localité 3], ayant été expressément maintenues par l'arrêt de la Cour de cassation du 25 mars 2020, sont devenues définitives de sorte que le pourvoi formé le 8 mars 2021 contre ce même arrêt civil est irrecevable.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [Y] à une peine de réclusion criminelle de trente ans et l'a assortie d'une période de sûreté de quinze ans, alors « que la période de sûreté doit faire l'objet d'une décision spéciale et motivée lorsqu'elle est facultative ou excède la durée prévue de plein droit ; que la période de sûreté est facultative en cas de condamnation pour meurtre simple ; qu'en assortissant la peine de trente années de réclusion criminelle d'une période de sûreté de quinze ans sans motiver sa décision, la cour d'assises a violé les articles 132-23 du code pénal et 365-1 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 132-23 du code pénal et 365-1 du code de procédure pénale :
10. Il se déduit de ces textes que, si la période de sûreté constitue une modalité d'exécution de la peine, elle présente un lien étroit avec la peine et l'appréciation par le juge des circonstances propres à l'espèce, de sorte que, faisant corps avec elle, elle doit faire l'objet d'une décision spéciale et motivée lorsqu'elle est facultative ou excède la durée prévue de plein droit.
11. Il résulte de l'arrêt attaqué du 2 mars 2021, que si la cour d'assises a motivé la condamnation de l'accusé, déclaré coupable de meurtre, à une peine de trente ans de réclusion criminelle, sa décision relative à la période de sûreté facultative prononcée n'est assortie d'aucune motivation spéciale.
12. En prononçant ainsi, la cour d'assises a méconnu les textes susvisés.
13. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
14. Compte tenu de l'arrêt du 25 mars 2020, par lequel la Cour de cassation a cassé l'arrêt pénal rendu le 25 janvier 2019 par la cour d'assises du Gard, en ses seules dispositions relatives à la peine, celles relatives à la culpabilité et celles relatives à l'arrêt civil étant expressément maintenues et renvoyé l'affaire devant la cour d'assises de l'Hérault pour qu'il soit statué, dans les limites de la cassation prononcée, sur la peine devant être appliquée, la cassation à intervenir concerne toutes les dispositions de l'arrêt rendu le 2 mars 2021, par la cour d'assises de renvoi de l'Hérault ayant statué sur la peine.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'assises de l'Hérault, en date du 2 mars 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises de l'Hérault et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-neuf janvier deux mille vingt-deux.