COMM.
DB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 19 janvier 2022
Rejet non spécialement motivé
M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10044 F
Pourvoi n° U 19-20.471
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 JANVIER 2022
La société Rosemill Estate, société anonyme de droit luxembourgeois, dont le siège est [Adresse 1] (Luxembourg), a formé le pourvoi n° U 19-20.471 contre l'arrêt rendu le 19 mars 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige l'opposant :
1°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 2],
2°/ au directeur départemental des finances publiques du Var, représenté par le directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, domicilié [Adresse 3]
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations écrites de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Rosemill Estate, de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques, et du directeur départemental des finances publiques du Var, représenté par le directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2021 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Rosemill Estate aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Rosemill Estate et la condamne à payer au directeur général des finances publiques et au directeur départemental des finances publiques du Var, représenté par le directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé en l'audience publique du dix-neuf janvier deux mille vingt-deux, et signé par M. Ponsot, conseiller qui en a délibéré, en remplacement de M. Guérin empêché.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour la société Rosemill Estate.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'administration fiscale était légitime à imposer à la taxe de 3% la société Rosemill Estate en raison de l'inobservation par celle-ci de l'article 990 E 3° du code général des impôts,
Aux motifs que « En l'espèce, aux termes de statuts enregistrés à Diekirch le 05 décembre 2006 et déposés au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg le 02 mars 2007, le capital de la société Rosemill Estate, composé de 320 actions, est détenu par deux sociétés sises aux îles Samoa, Tyndall Management SA et Nationwide Management SA (160 actions chacune) ; qu'il ressort des pièces produites que la société Rosemill Estate a déposé, au titre des années 2008 à 2010, sa déclaration n°2746 de taxe annuelle de 3% en se plaçant sous le régime de l'exonération et en mentionnant dans chacune des déclarations qu'elle a effectuées les noms de deux actionnaires suivants : Tyndall Management Services SA dont le siège est à Luxembourg, pour 160 actions, et Nationwide Management Services SA, dont le siège est également à Luxembourg, pour 160 actions ; que pour justifier de cette discordance entre les statuts et les mentions portées sur les déclarations adressées à l'administration fiscale, la société intimée indique avoir procédé le 1er mars 2007 à des actes de cession d'actions et soutient justifier suffisamment, à travers les documents qu'elle a communiqués au cours de la procédure, de l'identité de ses actionnaires, au regard notamment de la réalité des actes de vente intervenus le 1er mars 2007 ; qu'il convient de retenir que le régime de l'exonération de l'article 990 E est dérogatoire ce qui suppose qu'au travers des déclarations faites par la société, l'identité et l'adresse des associés soient portées à la connaissance de l'administration, les informations données devant être complètes et sincères, à défaut de quoi le régime déclaratif est dénué de sens ; qu'il incombe en conséquent à la société intimée, dès lors qu'elle dépose des déclarations en vue de bénéficier du régime dérogatoire de l'article 990 E d'apporter tous éléments de justification concernant la détention du capital social par les associés déclarés ; qu'en l'occurrence, la société Rosemill Estate produit: - la copie des deux actes de cessions ( rédigés en langue anglaise) portant les mentions suivantes : *cession le 1er mars 2007 par la société Tyndall Mangement SA à la société Tyndall Management Services SA de 160 actions qu'elle détenait dans la société Rosemill Estate, *cession le 1er mars 2007 par la société Nationwide Management SA à la société Nationwide Management Services SA de 160 actions qu'elle détenait dans la société Rosemill Estate, - la copie d'un document dénommé « registre des actions » de la société Rosemill Estate daté du 28 février 2007 ; que force est de constater que ces seules pièces sont insuffisantes pour établir la réalité de la qualité d'associés des deux sociétés luxembourgeoises pour les années considérées ; qu'en effet, les actes de cession sont dépourvus de toute valeur probante, comme n'ayant pas de date certaine à défaut de tout enregistrement, le fait qu'une telle formalité ne soit pas requise en droit luxembourgeois étant dénué de toute portée, dès lors que la société intimée réclame le bénéfice d'un régime dérogatoire institué par la législation fiscale française et qu'il lui appartient en conséquence de démontrer la sincérité des documents qu'elle produit notamment au regard du fait générateur de l'impôt ; qu'en d'autres termes, elle se doit d'être aussi transparente qu'une société ayant son siège en France ; que la simple production de copies, non traduites, plusieurs années après les déclarations, d'actes qualifiés « d'actes de cession » établis sur la seule foi des déclarations de parties intéressées au litige n' est pas probante ; que l'apposition d'une mention, toujours en langue anglaise, le 10 février 2016, soit neuf années après cette prétendue opération, par un notaire luxembourgeois, que la copie qui lui est présentée est conforme à l'original est dénuée de toute portée, puisque cet officier n'a pas authentifié l'acte et il ne peut en être tiré aucune conséquence sur la date certaine des cessions invoquées ; que quant au document intitulé « registre des actions » et consistant en réalité en une simple feuille volante comprenant un tableau de répartition du capital avant et après le 1er mars 2007, celui-ci ne peut être retenu puisqu'ayant été établi de manière unilatérale par l'entité qui entend bénéficier de l'exonération de la taxe, la même remarque s'imposant quant à la mention strictement identique apposée, toujours le 10 février 2016 par le même notaire, indiquant que la copie est conforme à l'original ; qu'il en résulte que les pièces produites par la société Rosemill Estate sont univoques, qu'il n'est pas davantage justifié par l'intimée de la réalité économique de l'opération, celle-ci se gardant de produire des éléments de preuve relatifs à des mouvements de fonds correspondant aux cessions invoquées et donc du paiement du prix convenu, ni de la réalité juridique du transfert des actions en cause ; que la
société Rosemill Estate n'est, en conséquence, pas en mesure de justifier, à la date du fait générateur des impositions litigieuses, de la réalité de la détention de son capital social et plus particulièrement de démontrer que l'identité de ses associés correspond effectivement aux mentions figurant sur chacune des déclarations concernées ; que c'est donc à tort que le premier juge a considéré que la société intimée a satisfait à son obligation de déclaration prévue à l'article 990 E du code général de l'impôt et qu'elle doit bénéficier de l'exonération de la taxe de 3% pour les années 2008, 2009 et 2010 ; que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions et il y a lieu de dire et juger que l'administration fiscale était légitime à imposer à la taxe de 3% la société Rosemill Estate en raison de l'inobservation par celle-ci de l'article 990 E » ;
1° Alors que l'article 990 E 3° du code général des impôts exonère de taxe annuelle égale à 3% de la valeur vénale des immeubles situés en France ou droits réels portant sur ces biens, prévue par l'article 990 D dudit code, les entités juridiques énumérées par le texte qui déclarent chaque année au plus tard le 15 mai, au lieu fixé par l'arrêté prévu à l'article 990 F, la situation, la consistance et la valeur des immeubles possédés au 1er janvier, l'identité et l'adresse des actionnaires, associés ou autres membres qui détiennent plus de 1 % des actions, parts ou autres droits dont ils ont connaissance à la même date, ainsi que le nombre des actions, parts ou autres droits détenus par chacun d'eux, au prorata du nombre d'actions, parts ou autres droits détenus au 1er janvier par des actionnaires, associés ou autres membres dont l'identité et l'adresse ont été déclarées ; que la taxe de l'article 990 D repose sur le principe que les entités juridiques détentrices de biens immobiliers en France sont redevables de cet impôt s'il n'est pas possible d'identifier les personnes physiques qui y détiennent des parts et actions ; que la preuve étant libre, l'identité des personnes physiques, qui détiennent des parts et actions, peut être rapportée par tout moyen ; que la SA Luxembourgeois Rosemill Estate a souscrit les déclarations correspondantes pour les années 2008 à 2010, en mentionnant comme actionnaires les sociétés Nationwide Management Services SA Luxembourg et Tyndall Management Services SA ; qu'il n'est pas contesté que les actionnaires initiaux n'étaient pas ces sociétés mais les sociétés Tyndall Management SA et Natiowide Management SA ; que pour justifier de l'identité de ces nouveaux actionnaires, la société Rosemill Estate a communiqué à l'administration fiscale des éléments sérieux, précis et concordants de nature à prouver la qualité d'actionnaires des sociétés Nationwide Management Services SA Luxembourg et Tyndall Management Services SA, soit les actes de cession de parts intervenues le 1er mars 2007 au profit des deux actionnaires désignés dans les déclarations, la copie du registre des actionnaires et les procès-verbaux des assemblées générales relatifs aux années 2008, 2009 et 2010 ; que l'administration fiscale n'a jamais contesté le caractère authentique de ces documents certifiés par un notaire luxembourgeois en 2016 ; que ces pièces étaient conformes au droit luxembourgeois lequel ne prévoit pas que la cession de parts doit être constatée par acte authentique et faire l'objet d'un enregistrement ; que le registre des actionnaires, qui a fait l'objet d'une authentification par un notaire luxembourgeois, mentionne bien l'identité de nouveaux actionnaires à compter du 1er mars 2007 ; qu'en retenant toutefois que la société Rosemill Estate n'était pas en mesure de justifier, à la date du fait générateur des impositions litigieuses, de la réalité de la détention de son capital social et plus particulièrement de démontrer que l'identité de ses associés correspondait effectivement aux mentions figurant sur chacune des déclarations concernées pour juger que l'administration fiscale était légitime à imposer à la taxe de 3% la société Rosemill Estate en raison de l'inobservation par celle-ci de l'article 990 E, la cour d'appel a violé les articles 990 D et 990 E du code général des impôts.