SOC.
OR
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 janvier 2022
Rejet non spécialement motivé
M. HUGLO, conseiller doyen faisant
fonction de président
Décision n° 10026 F
Pourvoi n° H 20-16.255
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 5 JANVIER 2022
L'Union sanitaire et sociale Aude Pyrénées, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée Association audoise sociale et médicale, venant aux droits de l'association Accueil info drogue et addiction 11 (AIDEA 11), a formé le pourvoi n° H 20-16.255 contre deux arrêts rendus les 15 mai 2019 et 8 janvier 2020 par la cour d'appel de Montpellier (4e A chambre sociale) dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [G] [K], épouse [V], domiciliée [Adresse 1],
2°/ à l'Union locale CGT de Narbonne, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattacciniet Rebeyrol, avocat de l'Union sanitaire et sociale Aude Pyrénées, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme [K], après débats en l'audience publique du 10 novembre 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Il est donné acte à l'Union sanitaire et sociale Aude Pyrénées de sa reprise d'instance.
2. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre des décisions attaquées, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
3. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Union sanitaire et sociale Aude Pyrénées aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'Union sanitaire et sociale Aude Pyrénées et la condamne à payer à Mme [K] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour l'Union sanitaire et sociale Aude Pyrénées
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué du 15 mai 2019 d'AVOIR condamné l'association AIDEA 11 à payer à Mme [V] les sommes de 5 000 € en réparation du préjudice résultant de la discrimination et 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné l'association AIDEA 11 à payer à l'union locale CGT de Narbonne la somme de 400 € à titre de dommages et intérêts, ainsi qu'aux dépens de l'instance,
AUX MOTIFS QUE Sur la discrimination syndicale : L'article L 1132-1 du code du travail prévoit qu'aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire notamment en matière de rémunération, d'affectation, de promotion professionnelle, de mutation. L'article L 2141-5 du code du travail interdit à tout employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions concernant un salarié. L'article L 1134-1 prévoit qu'en cas de litige, le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et qu'au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Les développements de Mme [V] sur « le contexte de carence de gouvernance de l'association » sont sans pertinence pour établir des éléments de fait laissant supposer une discrimination. Mme [V] soutient qu'il existait un poste de cadre et qu'elle était légitime à y prétendre. Si l'association ne fournit effectivement aucune justification de demande de financement d'un poste d'assistant administratif statut cadre, il ne peut qu'être constaté que ce poste n'existait pas dans l'association. Mme [V] fait ensuite valoir que l'employeur a promu d'autres salariés visant notamment le comptable pour qui un nouveau poste de cadre a été créé, la création d'un poste d'assistante sociale cadre et d' un poste de Chef éducateur qui n'existaient pas, ainsi que la transformation de plusieurs postes d'animateurs transformés en éducateurs spécialisés. Elle ajoute que des « postes nouveaux d'AMP » ont été demandés sur 2016, qu'en 2018 le comptable entré en 2004 a bénéficié d'une nouvelle promotion et en tant que chef de bureau statut cadre. Toutefois, elle ne justifie pas d'une comparaison avec des salariés placés dans la même situation qu'elle et exerçant des fonctions similaires ou identiques. La comparaison avec la salariée qui comme elle, était classée secrétaire de direction et avait la même ancienneté, montre que les rémunérations étaient identiques. Elle produit un extrait du budget prévisionnel 2009 où est évoquée la transformation d'un poste de secrétaire de direction en cadre administratif. Elle fait valoir l'état du personnel du budget prévisionnel 2010 où est envisagée la transformation du poste de Mme [D] de secrétaire de direction en cadre administratif niveau 1 dans le cadre d'une recentralisation à [Localité 4] des missions de gestion. Elle invoque le courrier de l'inspection du travail du 7 janvier 2010 : toutefois dans ce courrier, l'inspecteur indique ne pas avoir à faire d'observation sur ce point de la recentralisation des missions sur [Localité 4]. Mme [V] soutient qu'elle pouvait revendiquer d'être promue « attaché administratif-cadre de niveau 1 » dans la mesure où les fonctions qu'elle exerçait étaient en parfaite adéquation avec les exigences de cet emploi, visant sa fiche de poste « seconder la directrice, collaboratrice d'un cadre, assurer des fonctions d'assistance qui impliquent de se substituer à la directrice en son absence, management d'équipe, encadrement du secrétariat... ». À partir de son entretien annuel professionnel du 29 mai 2006, pièce manuscrite et non signée, elle fait valoir que l'employeur « avait donc envisagé cette promotion » : cet écrit mentionne seulement « je soutiens sa demande de promotion d'attaché administratif » : il n'en ressort aucun engagement de l'association. Elle produit des attestations de salariés. Toutefois, ces attestations n'apportent pas d'éléments précis permettant de caractériser que Mme [V] exerçait des missions relevant de la fonction d'assistant administratif. Il n'est ainsi pas précisé en quoi consistait la mise en place d'une « véritable ingénierie et (d')une logistique administrative efficiente et opérationnelle » ou d'une « stratégie logistique administrative commune ». Il ne peut davantage être caractérisé qu'en matière informatique, elle remplissait des fonctions d'assistant administratif. La notion de « gestion administrative du contrat » est totalement floue. Contrairement à ce que Mme [V] soutient, ces attestations aux termes imprécis, ne permettent pas de retenir qu'elle avait des fonctions de « gestion d'équipe », alors que plusieurs attestations parlent de ses fonctions de « secrétaire de direction ». Mme [V] n'établit pas ainsi qu'elle exerçait conformément aux dispositions conventionnelles du poste d'attaché administratif « des tâches complexes dans le domaine administratif impliquant l'analyse, la synthèse et l'exploitation des informations liées à l'un des services de l'entreprise » ou « des fonctions de secrétaire général de direction » où elle « organise et coordonne pour un supérieur hiérarchique, la transmission et la rédaction des informations ». Ainsi que l'a pertinemment relevé le jugement, l'employeur a refusé la promotion « pour raisons budgétaires » par courrier du 14 septembre 2006, position constamment réaffirmée par la suite. Ce refus de promotion est donc antérieur à sa première fonction de représentation intervenue le 29 mars 2007. Si l'employeur évoquait la mise en commun du secrétariat de direction avec le service de [Localité 4] comme perspective pouvant permettre à la salariée de « réitérer son souhait », il ne peut qu'être constaté que cette perspective ne s'est pas réalisée. Mme [V] soutient ensuite avoir été dépossédée de ses fonctions. Mme [M] atteste que « depuis son élection en tant que déléguée du personnel et son statut de déléguée syndicale, j'ai pu constater que progressivement, des tâches de travail lui étaient retirées sans l'avertir. Elle n'a plus eu accès au réseau informatique (notamment sur les dossiers du personnel). Elle n'a plus eu la gestion du recrutement des salariés et progressivement, j'ai pu observer qu'elle se faisait « placardiser » au fur et à mesure de ses engagements auprès du personnel ». Mme [A] atteste : « arrivée en février 2008, j'ai pu depuis observer une évolution dans les différentes tâches effectuées par [V]. Lors de mon recrutement, c'est elle qui assurait la prise des rendez-vous, la gestion administrative du contrat. Aujourd'hui, ces tâches liées à la gestion administrative du personnel ne lui incombe plus ». Elle fait également état de « la gestion des demandes de récupération qu'elle était habilitée à signer en l'absence de la Direction, ce qui n'est actuellement plus le cas ». M. [C] atteste « au cours des années, il me semble qu'elle a subi une « mise au placard » dans ses fonctions de secrétaire de direction. Ainsi, elle a été dessaisi de plusieurs tâches d'importances qu'elle réalisait auparavant au niveau administratif ». Mme [E] atteste « [G] peu à peu a été dépossédée d'une partie de ses fonctions de secrétaire de direction, surtout au niveau de la gestion du personnel ». Mme [F] atteste : « cette salariée a été dépossédée de nombreuses tâches qui lui incombent en tant que secrétaire de direction ». M. [B] atteste : « avec l'argument de la recentralisation au siège, Mme [V] s'est retrouvée progressivement dépossédée de ce dont elle était missionnée jusque là. Son poste a été vidé d'une partie essentielle de ses attributions. Pour étayer son assertion selon laquelle on lui aurait coupé l'accès au réseau « secrétariat de direction », Mme [V] fournit ses propres écrits. Toutefois, l'inspecteur du travail par courrier du 7 janvier 2010 retenait que « l' accès au réseau informatique du secrétariat de direction lui a été ôté en septembre 2008' Mme [V] n'a pas été avertie par avance de cette modification dans ses fonctions et vos accès ». L'employeur n'a pas contesté cette coupure d'accès. Mme [V] fait valoir que M. [R] après une première promotion, a été positionné au coefficient 439 (même regroupement métier et même coefficient qu'elle) et a été promu de nouveau au statut cadre en 2018 au coefficient 467 coefficient auquel pouvait également prétendre les secrétaires de direction : M. [R] exerçait des fonctions de comptable, distinctes de celles de secrétaire de direction. Mme [V] invoque le rapport d'audit de l'ARS de juin 2011 où il est indiqué que « sur [Localité 5], la secrétaire de direction a été rétrogradée dans ses fonctions. Elle n'assume plus le suivi de la logistique sur le site de [Localité 5], les plannings, les congés, les contrats de travail ». Elle rappelle les termes du rapport d'août 2013 de Mme [I], directrice démissionnaire d'où il ressort que « la directrice lui a confiée à nouveau certains travaux notamment logistiques (commandes, courriers, gestion des congés') mais le bureau a refusé que la directrice lui confie les missions de gestion du personnel de [Localité 5] (contrats de travail, gestion des dossiers ). Mme [V] fait état d'un « état anxieux réactionnel suite à violence au travail » résultant de l'avis d'arrêt de travail du 24 septembre 2009, de la reconnaissance de son accident du travail du 24 septembre 2009, Le « relationnel Direction/ [V] » a été discuté en réunion de délégués du personnel. Lors de la réunion déléguées DP/CEC du 31 janvier 2013, il a été évoqué les difficultés objectives résultant des absences de Mme [V], difficultés au niveau administratif et de l'accueil des usagers et de leur entourage. Toutefois, ce compte-rendu ne remet à aucun moment en cause le libre exercice des mandats de la salariée. Par courrier du 19 mars 2012, l'employeur notifiait à Mme [V] une « sanction » pour avoir malgré une note contraire, réceptionné un courrier recommandé adressé à la présidence sans chercher à la joindre pour s'assurer qu'elle pourrait consulter le courrier dans les deux jours. Cette sanction était annulée par l'employeur suite à une action prud'homale engagée par la salariée. Mme [V] affirme que secrétaire de direction, elle n'a plus eu d'accès à l'agenda de la direction. Elle soutient n'avoir « à ce jour ... plus aucune tâche administrative en rapport avec son poste, aucune consigne de travail, aucune réponse à ses mails, aucun courrier, toujours pas d'accès à l'agenda de la direction' » et que « son poste est réduit à un simple poste d'agent d'accueil. » Elle ne justifie toutefois pas de la suppression de tout travail en lien avec la direction, ni qu'il lui a été supprimé des fonctions d'encadrement du secrétariat, ni qu'elle ne serait plus sollicitée pour des réunions extérieures et des assemblées générales, pour se substituer à la direction en son absence ou pour l'animation des réunions. Si le rapport de l' ARS fait état du souhait de vouloir stopper les ateliers, il n'en résulte pas que Mme [V] se serait vue supprimer un « atelier qu'elle animait depuis plus de 10 ans ». Mme [V] n'avait pas la responsabilité du rapport d'activité dont la rédaction relevait de la direction. Mme [V] n'établit pas que l'employeur ne « lui fournit plus de travail ». Mme [V] entend se prévaloir d'un blocage de carrière. Elle n'établit pas qu'il lui a été promis un poste de cadre, ne pouvant se prévaloir que d'un soutien de la directrice en poste en 2006, à sa demande de promotion. Elle établit par contre que de 2005 à 2013, elle a stagné au coefficient 439. Mme [V] n'a pas bénéficié d'entretien professionnel depuis celui du 29 mai 2006, en violation de l'accord national sur la formation professionnelle du 5 décembre 2003 modifié en juillet . Elle produit les attestations de Mme [E] qui atteste avoir depuis son embauche en 2007 avoir eu un entretien professionnel et de Mme [F] qui écrit avoir eu deux entretiens professionnels depuis 2009. De ce qui précède, il résulte que Mme [V] qui n'établit pas que les fonctions qu'elle exerçait relevait de la fonction d'assistant administratif position cadre qu'elle revendique et que l'employeur se soit engagé à une telle promotion, prouve par contre qu'elle a été dépossédée d'un certain nombre de ses fonctions depuis l'exercice de ses différents mandats, notamment dans la gestion des dossiers du personnel, dans la gestion des demandes de récupération, par la coupure de l'accès au réseau informatique du secrétariat de direction, par la suppression du suivi de la logistique des plannings, congés et contrats de travail, par la suppression de l'accès à l'agenda de la direction. Elle a également fait l'objet en 2012 d'une sanction que l'employeur a ensuite retirée. Elle établit que l'employeur a envisagé de créer un poste de cadre où serait affectée sa collègue, secrétaire de direction à [Localité 4]. Mme [V] établit également qu'un autre salarié M. [R], placé au même coefficient 439 qu'elle avant qu'elle exerce ses mandats, a bénéficié du statut cadre progressant jusqu'au coefficient 467, alors qu'elle stagne au même coefficient depuis 2006. Il doit être toutefois relevé qu'elle ne justifie pas d'une identité de fonctions avec M [R], comptable. Elle n'a pas eu d'entretien professionnel depuis 2006. Ces éléments laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte du fait de l'activité syndicale de la salariée, il appartient à l'employeur de prouver que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. L'employeur fait valoir qu'aucun des salariés n'a bénéficié de promotions eu égard aux restrictions budgétaires de l'ARS, à l'exception de ceux dont l'évolution était obligatoire eu égard à la convention collective, soit en l'occurrence M. [R] comptable. L'employeur établit que Mme [V] est positionnée au même coefficient que Mme [D] qui exerce des fonctions identiques de secrétaire de direction et avait la même ancienneté et que l'une et l'autre n'ont pas connu de progression de rémunération. Il est établi que M. [R] n'exerçait pas des fonctions identiques ou similaires à celle de Mme [V]. Le rapport de l'ARS constate une rétrogradation au regard du retrait d'un certain nombre de fonctions, retrait corroboré par attestations. Le fait que le compte rendu de la délégation territoriale de l'ARS du COPIL de suivi de l'audit du 3 octobre 2012, le courrier du délégué territorial de l'Aude du 25 octobre 2013 et le compte rendu du COPIL de suivi de l'audit du 28 mai 2013 ne mentionnent pas la situation de Mme [V], ne constitue pas une justification du retrait de fonctions constaté par l'ARS en 2011 et corroboré par attestations. Par contre, l'employeur justifie notamment par un compte rendu de réunion du 18 juin 2009 de sa décision de réorganisation du travail administratif des secrétariats de direction avec un recentrage de l'ensemble des dossiers administratifs sur le poste de [Localité 4], Mme [V] se voyait chargée de collecter les chiffres de fréquentation CSAPA des deux sites et la conception des statistiques. Cette répartition est corroborée par la fiche de poste de Mme [D], secrétaire de direction sur le site de [Localité 4], par des comptes rendus de réunion des 17 novembre et 15 décembre 2009. La présidente de l'association vient confirmer par attestation cette nouvelle répartition des tâches en 2009 en raison de la centralisation au siège de [Localité 4] de la gestion administrative et comptable et explique que Mme [V] a été chargée de la réalisation technique du rapport d'activité et de tâches statistiques. Il est ainsi établi que le fait que Mme [V] n'assure plus les tâches administratives relatives à la gestion du personnel étaient la conséquence d'une réorganisation mise en oeuvre par l'employeur relevant de son pouvoir de direction. Cette réorganisation justifiée par une mutualisation des moyens n'impliquait qu'une nouvelle répartition des fonctions et non une modification des conditions de travail. Cette réorganisation tendant à regrouper les fonctions de gestion du personnel au siège de l'entreprise pouvait justifier que l'employeur envisage la création d'un poste de cadre à [Localité 4] et qu'il envisage de le confier à la secrétaire de direction qui justifiait de sa présence dans l'association dès sa création. Ce projet n'a pas abouti. Le mail de la directrice du 26 mai 2015 vient confirmer que Mme [V] participe bien à la réalisation technique du rapport d'activité. La succession de quatre directeurs et des vacances de ce poste ne sauraient justifier l'absence totale d'entretien professionnel depuis 2006, et ce alors que la salariée établit que d'autres salariés ont bénéficié d'un tel entretien depuis 2007 ou 2009. L'employeur n'établit pas de raisons objectives justifiant la coupure de l'accès au réseau informatique de la direction, et à l'agenda de la direction. Il ne justifie pas davantage des raisons du prononcé de la sanction de 2012 qu'il a ensuite retirée. Au regard de ces éléments, vu les dispositions de l'article L 1134-1 susvisé, vu l'absence de justification de l'absence d'entretien annuel, du bien fondé de la sanction prononcée, de la privation des accès informatiques, les faits de discrimination syndicale sont établis. Vu les faits retenus à ce titre et le préjudice en résultant pour la salariée, il convient de lui allouer une indemnité de 5000 €.
Sur l'intervention de l'Union locale CGT de Narbonne : Vu l'article L 2132-3 du code du travail, le syndicat est fondé à demander réparation du dommage résultant du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente, par les agissements de discrimination commis à l'encontre de Mme [V], déléguée syndicale CGT. Au regard de la nature des agissements retenus au titre de la discrimination et de leurs conséquences, il convient d'allouer à l'organisation syndicale intervenante la somme de 400 € à titre de dommages et intérêts. (...) le fait de privation de l'accès à l'agenda de la direction n'est pas remis en cause par l'employeur » ;
1. ALORS QU'il incombe au salarié d'établir la matérialité des éléments de fait qui, selon lui, laissent présumer une discrimination syndicale et ce n'est que si cette preuve est rapportée que l'employeur doit justifier ses décisions par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, en affirmant à l'appui de sa décision que Mme [V] prouvait avoir été dépossédée d'un certain nombre de ses fonctions depuis l'exercice de ses différents mandats notamment par la suppression de l'accès à l'agenda de la direction, sans avoir précisé de quelle pièce résultait la preuve de cette suppression d'accès, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ;
2. ALORS en outre QUE lorsqu'une partie a la charge de la preuve, celle-ci ne peut se déduire du silence opposé à sa demande par la partie adverse ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu à l'appui de sa décision, dans le cadre de ses motifs relatifs au harcèlement moral, que la privation de l'accès à l'agenda de la direction n'était pas remise en cause par l'employeur ; qu'en statuant de la sorte, quand une absence de contestation ne dispensait pas la salariée d'établir ce fait qu'elle invoquait à l'appui de la demande fondée sur la discrimination, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail, ensemble l'article 1315 devenu 1353 du code civil ;
3. ALORS QUE lorsque le salarié a établi des faits laissant présumer une discrimination syndicale, le juge doit vérifier s'ils ne sont pas justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le fait que Mme [V] n'assure plus les tâches administratives relatives à la gestion du personnel était la conséquence d'une réorganisation mise en oeuvre par l'employeur consistant à regrouper les fonctions de gestion du personnel au siège de l'entreprise à Carcassonne, réorganisation relevant du pouvoir de direction de l'employeur et objectivement justifiée par une mutualisation des moyens (arrêt, p. 10, § 4 et 5) ; qu'il résulte de l'arrêt que l'accès au réseau informatique de la direction était utilisé par Mme [V] pour la gestion des dossiers du personnel (cf. arrêt, p. 6, § 7) ; qu'en retenant cependant que l'employeur n'établissait pas de raisons objectives justifiant la coupure de l'accès au réseau informatique de la direction, sans rechercher si cet accès n'était pas devenu inutile du fait de la centralisation au siège des fonctions de gestion du personnel, elle-même jugée justifiée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué du 15 mai 2019 d'AVOIR condamné l'association AIDEA 11 à payer à Mme [V] les sommes de 4 000 € en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral, et 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens,
AUX MOTIFS QUE « Sur le harcèlement moral : L'article L 1152-1 du code du travail prévoit qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. L'article 1154-1 du code du travail en ses dispositions alors applicables prévoit que dès lors que le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu des ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Mme [V] invoque en premier lieu un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité suite à une agression commise le 24 septembre 2009 où une autre salariée l'a injuriée alors qu'elle distribuait un tract syndical. Il n'est pas établi que la directrice ne soit pas intervenue. Celle-ci dans son rapport d'incident, indique avoir demandé à la salariée fautive de retirer ses propos et obtenu qu'elle présente ses excuses à deux reprises, puis avoir décidé d'annuler la réunion prévue. La salariée en cause confirmait dans son rapport ces excuses et l'intervention de la directrice. L'employeur justifie avoir adressé à la salariée en cause un courrier du 24 septembre 2009 relevant le caractère inacceptable de son comportement, prononçant à son encontre une observation et lui demandant d'écrire une lettre d'excuse. Ainsi, face à cette agression verbale commise sur Mme [V], agression ponctuelle non prévisible et qui n'apparaît pas s'être renouvelée, l'employeur justifie être intervenu et avoir fait usage de son pouvoir pour réprimander la salariée en cause : le manquement à l'obligation de sécurité n'est pas établi. L'employeur ne dispose pas d'un pouvoir pour contraindre un salarié à adresser une lettre d'excuses. Si l'état anxio dépressif constaté le 24 septembre 2009 peut apparaître en lien avec l'agression subie de la part de l'autre salariée, il n'apparaît pas qu'il soit en lien avec un agissement imputable à l'employeur. Mme [V] invoque en second lieu sa mise à l'écart, invoquant les mêmes pièces que celles visées au titre de la discrimination. Ainsi qu'il a été dit, il n'est nullement établi que l'employeur n'a plus donné de travail à Mme [V]. Il n'est pas établi que la directrice était tenue de répondre à des mails de Mme [V] relatifs au financement du contrat d'une autre salariée, à un « document posant question » dont la teneur n'est pas précisée, à une proposition d'accord « ancienneté », à la réception d'un appel téléphonique relatif aux coordonnées d'une personne proposée pour le poste de directrice, à une confirmation de date pour une réunion de délégués du personnel. Quant aux interrogations du personnel sur les raisons du départ du directeur posées par lettre du 6 mars 2014, il n'est pas établi qu'elles justifiaient une réponse de la direction avant la réunion prévue le 18 mars suivant. L' « extrait du rapport de l'évaluation interne du 20 septembre 2013 » invoquée par la salariée (pièce n° 81) qui concerne « la gestion des ressources humaines » ne fait que rappeler l'organisation de cette gestion dans le cadre de la réorganisation mise en 'oeuvre par l'employeur. Le fait de privation de l'accès à l'agenda de la direction n'est pas remis en cause par l'employeur. Aucun élément n'établit que les représentants de la direction n'adressent plus la parole à Mme [V] et ne lui donnent pas des consignes de travail. Outre le fait que la rédaction du rapport d'activité ne relevait pas des fonctions de Mme [V], celle-ci n'établit pas avoir été déchargée de ses fonctions techniques relatives à ce rapport. Aucun élément de preuve n'est produit à l'appui des allégations de Mme [V] selon lesquelles elle serait présentée aux partenaires extérieurs comme « secrétaire accueillante » ou aurait fait l'objet de dénigrement. Mme [V] fait état de non-convocation à une réunion concernant l'ensemble des secrétaires de direction du 4 mai 2014, indiquant que sa collègue Mme [D] justifiant de la même ancienneté a été convoquée. Suite à son courrier du 29 mai, elle était convoquée à la réunion du 13 juin 2014. L'employeur ne s'explique pas sur ce point, ni sur le fait qu'elle n'a pas été convoquée aux réunions suivantes. Par contre, Mme [V] n'apporte aucun élément à l'appui de ses affirmations concernant des réunions hebdomadaires de cadres où sa collègue secrétaire de direction de [Localité 4] serait conviée. Mme [V] invoque le fait que suite aux déménagements des locaux en juillet 2018, elle a été isolée physiquement et qu'après avoir travaillé toute sa carrière au sein de son équipe, on l'a placée seule au rez-de-chaussée. Elle produit l'attestation de Mme [Z], directrice de juin 2016 à mai 2018 selon laquelle Mme [V] devait avoir son bureau au 1er étage avec les collègues de son équipe comme c'était le cas dans les anciens locaux. Mme [E] atteste : « il était prévu dans l'agencement des locaux que le secrétariat devait se trouver au 1er étage et non au rez-de-chaussée. Les plans initiaux peuvent en attester ». Le 26 mars 2012 Mme [V] faisait l'objet d'une sanction disciplinaire qui sera annulée par l'employeur suite à une action engagée par la salariée. Aucun élément n'est produit relatif à l'allégation d'un refus de « positionnement d'un jour de RTT ». Un refus de rupture conventionnelle sur demande du salarié n'est pas un agissement pouvant laisser présumer un harcèlement. Mme [V] fait valoir qu'elle est en arrêt maladie depuis le 1er août 2018, ainsi que les mentions d'état anxio dépressif figurant sur ses avis d'arrêt de travail. La mise à l'écart de la salariée résulte de la privation d'accès à l'agenda de la direction, du défaut de convocation à des réunions où sa collègue exerçant les mêmes fonctions était conviée, de l'isolement de son bureau au rez-de-chaussée. Ces agissements, le prononcé d'une sanction qui sera ensuite retirée et les éléments médicaux, pris dans leur ensemble, constituent des éléments permettant de présumer de l'existence d'un harcèlement moral. L'employeur n'apporte aucun élément justifiant la mise à l'écart de Mme [V] des réunions. En qualifiant le placement du bureau de Mme [V] au rez-de-chaussée, de « fait isolé dérisoire », l'employeur ne justifie pas cette mise à l'écart au niveau de la localisation du bureau. Le fait que la sanction de 2012 serait « ancienne, isolée et... a été levée » ne saurait justifier le prononcé de la sanction que l'employeur en la retirant, a considéré comme injustifiée. Si les éléments médicaux n'indiquent pas l'origine des troubles constatés, il convient de considérer qu'ils sont contemporains des agissements. Ainsi, l'employeur ne prouve pas que les agissements ci-dessus retenus ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Vu les dispositions des articles L 1152 et L 1154-1 du code du travail, les faits de harcèlement moral sont établis. Au regard des faits retenus et du préjudice subi par la salariée, il convient de lui allouer une indemnité de 4000 €. » ;
1. ALORS QU'il incombe au salarié d'établir, autrement que par ses seules affirmations, la matérialité d'éléments de fait précis, répétés et concordants pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard ; que lorsqu'une partie a la charge de la preuve, celle-ci ne peut se déduire du silence opposé à sa demande par la partie adverse ; qu'en retenant, parmi les éléments laissant présumer un harcèlement moral, la privation d'accès à l'agenda de la direction, au seul constat que cette privation d'accès n'était pas remise en cause par l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1152-4 du code du travail, ensemble l'article 1315 devenu 1353 du code civil ;
2. ALORS QU'il incombe au salarié d'établir, autrement que par ses seules affirmations, la matérialité d'éléments de fait précis, répétés et concordants pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard ; qu'en retenant, parmi les éléments laissant présumer un harcèlement moral, le défaut de convocation de Mme [V] à des réunions où sa collègue exerçant les mêmes fonctions était conviée et en reprochant à l'employeur de ne pas s'expliquer sur ce point, sans préciser de quel élément de preuve elle tirait l'absence de convocation de Mme [V] aux réunions postérieures à celle du 13 juin 2014, à laquelle l'arrêt relève qu'elle avait été convoquée après un oubli initial (arrêt, p. 12, dernier §), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1152-4 du code du travail ;
3. ALORS en toute hypothèse QUE l'existence d'un harcèlement moral suppose que soient caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en l'espèce, en retenant que la mise à l'écart de la salariée résultant de la privation d'accès à l'agenda de la direction, du défaut de convocation à des réunions où sa collègue exerçant les mêmes fonctions était conviée, de l'isolement de son bureau au rez-de-chaussée, ainsi que le prononcé d'une sanction ensuite retirée et la mention d'un état anxiodépressif sur les arrêts de travail constituaient des éléments permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 8 janvier 2020 d'AVOIR complété le dispositif de son arrêt du 15 mai 2019 en précisant : « fixe l'ancienneté de Mme [V] à la date du 1er novembre 1986 tant pour l'exécution que pour la rupture de son contrat de travail », et d'AVOIR condamné l'association aux dépens,
AUX MOTIFS QUE « La date d'ancienneté figurant dans le bulletin de paie vaut présomption de reprise d'ancienneté sauf à l'employeur à rapporter la preuve contraire. En l'espèce, si l'employeur affirme que le contrat de travail conclu avec Mme [V] faisait état d'une date d'embauche postérieure à l'ancienneté inscrite sur les bulletins de paie de la salariée à compter de décembre 2008 et que les bulletins de salaire antérieurs à décembre 2008 faisaient mention d'une ancienneté au 1er et au 2 juin 1998, ces éléments ne suffisent pas à écarter la présomption de reprise d'ancienneté de Mme [V]. L'employeur ne rapporte donc pas la preuve que l'ancienneté de Mme [V] n'a pas été reprise à la date du 1er novembre 1986. En conséquence, il y a lieu de fixer l'ancienneté de Mme [V] à la date du 1er novembre 1986, tant pour l'exécution que pour la rupture de son contrat de travail. » ;
ALORS QUE si la date d'ancienneté figurant dans le bulletin de paie vaut présomption de reprise d'ancienneté, l'employeur est en droit de rapporter la preuve contraire ; qu'en l'espèce, l'employeur soulignait que l'article 8.03.2 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 prévoyait, sous certaines conditions, la prise en compte de la durée de l'expérience professionnelle acquise antérieurement pour déterminer le taux de la prime d'ancienneté et que c'était pour cette raison qu'avait été mentionnée sur les bulletins de paie de la salariée, à partir de décembre 2008, une ancienneté au 1er novembre 1986, sans pour autant que cette date doive être prise en compte pour l'exécution du contrat de travail et le calcul des indemnités de rupture, ainsi que cela avait été indiqué à la salariée dans un courrier du 12 décembre 2018 (conclusions sur la requête en omission de statuer, p. 3-4 ; prod. 13) ; qu'en se bornant à affirmer, pour juger qu'il y avait lieu de fixer l'ancienneté de Mme [V] à la date du 1er novembre 1986 tant pour l'exécution que pour la rupture de son contrat de travail, que la mention par le contrat de travail d'une date d'embauche postérieure à l'ancienneté inscrite sur les bulletins de salaire à compter de décembre 2008 et la mention d'une ancienneté au 1er et 2 juin 1998 sur les bulletins de salaire antérieurs à décembre 2008 ne suffisaient pas à écarter la présomption de reprise d'ancienneté de Mme [V], sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la mention sur les bulletins de paie à partir de décembre 2008 d'une ancienneté au 1er novembre 1986 ne s'expliquait pas seulement par la prise en compte, prévue par la convention collective, de l'expérience antérieure pour le calcul de la prime d'ancienneté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 3243-1 du code du travail et de l'article 8.03.2 de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951.