CIV. 2
DC5
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 décembre 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme LEROY-GISSINGER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10632 F
Pourvoi n° S 20-16.264
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 DÉCEMBRE 2021
Mme [J] [H], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 20-16.264 contre l'arrêt rendu le 9 mai 2019 par la cour d'appel de Douai (3e chambre), dans le litige l'opposant à la société Macif, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Besson, conseiller, les observations écrites de la SCP Boulloche, avocat de Mme [H], de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Macif, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 octobre 2021 où étaient présents Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Besson, conseiller rapporteur, Mme Bouvier, conseiller, et M. Carrasco, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [J] [H] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour Mme [J] [H]
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme [H] de sa demande de condamnation de la MACIF au paiement des sommes de 1144,50 € au titre des frais d'expertise et de 3600 € de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral ;
AUX MOTIFS QUE « les moyens soutenus par les parties ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ;
Qu'il convient seulement de souligner et d'ajouter les points suivants :
en premier lieu, en application de l'article 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, les contrats tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et doivent être exécutés de bonne foi ;
en deuxième lieu, aux termes des articles 1147, 1148, 1149 et 1150 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; il n'y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque, par suite d'une force majeure ou d'un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit ; les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après ; le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exécutée ;
en dernier lieu, il résulte de la combinaison des articles 1315 du code civil, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, et 9 du code de procédure civile que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver alors que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ;
Qu'il s'ensuit que c'est à l'assurée de rapporter la preuve de l'obligation de garantie de l'assureur, de sorte qu'il lui appartient de démontrer l'existence et les conditions de mise en oeuvre de la garantie dont elle réclame l'application ;
Qu'en l'espèce, il n'est pas sérieusement contestable que Mme [H] est l'assurée de la société MACIF, ce dont il résulte des relations de nature contractuelle entre celles-ci, la cour soulignant par ailleurs que Mme [H] demande la mise en oeuvre de la garantie contractée auprès de son assureur ;
Pour autant, Mme [H], sur qui pèse la charge de la preuve de démontrer que les honoraires de l'expert qu'elle a librement désigné sont garantis et pris en charge par la société MACIF au titre de la police d'assurance, et alors même que le premier juge a souligné qu'elle ne produisait pas le contrat sur lequel elle fonde sa demande indemnitaire, ne verse aucunement aux débats devant la cour d'appel la police d'assurance la liant à la société MACIF, et sur laquelle elle fonde néanmoins sa demande.
Qu'ensuite, si Mme [H] évoque dans le corps de ses écritures des dispositions du code de la route, celles-ci sont relatives à l'organisation de la profession d'expert automobile ou à la procédure applicable pour les véhicules endommagés, et elle n'invoque, à l'appui de ses demandes, aucune disposition légale, pour justifier de l'existence d'une obligation pour l'assureur de prendre en charge les frais de l'expert qu'elle a désigné ;
Que les moyens tirés du caractère légitime du libre choix de l'expert, du caractère contradictoire de la détermination du préjudice matériel et du lien de causalité entre l'accident et l'expertise ne justifient également pas la demande de Mme [H] tendant au remboursement des frais de l'expert qu'elle a librement engagé ;
Qu'à titre surabondant, une lecture attentive de la jurisprudence versée par Mme [H] (pièces nº 16-1, 17, 18, 19, 21, 22, 23, 26, 27, 28, 29, 30, 31 et 32) montre que si les juges du fond ont admis que les honoraires de l'expert choisi par l'assuré victime d'un sinistre doivent être compris dans le préjudice matériel souffert par lui et indemnisés à ce titre, c'est à l'occasion de l'exercice par cet assuré victime d'un sinistre d'une action directe contre l'assureur du responsable sur le fondement de l'article L. 124-3 du code des assurances, qui énonce en son alinéa 1er que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable, et non contre son propre assureur comme dans la présente espèce ;
Qu'il s'ensuit que Mme [H] est particulièrement mal fondée à arguer de ces décisions des juges du fond pour justifier de l'obligation de son propre assureur, la société MACIF, de prendre en charge les frais de l'expert qu'elle a librement choisi de désigner ;
Qu'en l'état de ces énonciations et constatations, Mme [H] ne justifiant d'aucune obligation légale ou contractuelle à la charge de la société MACIF de lui rembourser les frais de l'expert qu'elle a librement engagé, le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande tendant à cette fin ;
Que si Mme [H] soutient qu'elle a subi un préjudice moral au motif que la société MACIF a été défaillante dans son obligation de prendre à sa charge les frais de l'expert qu'elle a elle-même diligenté, force est de constater, au vu des motifs énoncés, que la preuve de l'obligation de la société MACIF de prendre en charge lesdits frais n'est pas rapportée, Mme [H] se bornant à soutenir que la prise en charge des frais d'expertise incombait 'de toute évidence' à la société MACIF ;
Qu'il s'ensuit que Mme [H] ne rapporte pas la preuve d'une quelconque carence ou légèreté de la société MACIF à l'origine du préjudice moral qu'elle allègue ;
Que le jugement dont appel sera confirmé de ce chef » (arrêt p. 5 & 6) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DU JUGEMENT QUE « Mme [H] expose que les contrats tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et qu'en application de la garantie souscrite, l'assureur est tenu non seulement à l'indemnisation du dommage mais encore au remboursement des conséquences pécuniaires causés par ce dommage et notamment les frais d'expertise engagés par l'assuré ;
Que les relations entre Mme [H] et la MACIF sont en effet de nature contractuelle ;
Que cependant Mme [H] ne produit pas le contrat sur lequel elle se fonde et n'invoque aucune disposition contractuelle voire légale pour justifier l'obligation qu'elle met à la charge de son assureur et dont elle réclame l'exécution ;
Que la liberté pour l'assuré de choisir son expert, le caractère contradictoire de l'expertise diligentée par l'assuré ou l'indemnisation par l'assureur du préjudice subi tel qu'évalué par cette expertise ne sauraient davantage fonder une telle obligation et aucune carence ne peut être imputée à la MACIF dans la désignation d'un expert ;
Que par conséquent, Mme [H] qui ne justifie d'aucune obligation à la charge de la MACIF de lui rembourser les frais d'expertise qu'elle a engagés sera déboutée de sa demande à cette fin » ;
1°) ALORS QUE le principe de la réparation intégrale commande qu'il ne résulte ni perte ni profit pour la victime ; qu'en matière d'assurance de véhicule automobile, l'expertise étant obligatoire pour évaluer les dommages garantis par l'assurance, l'assureur qui mandate un expert pour examiner le véhicule doit payer ses honoraires, l'assuré n'ayant rien à régler ; que dès lors, si l'assuré fait diligenter une expertise contradictoire, l'assureur doit régler les honoraires de cet expert, spécialement dans l'hypothèse où il a validé ses conclusions, ce qui est le cas en l'espèce ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a méconnu le principe de la réparation intégrale et a ainsi violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;
2°) ALORS QUE le juge ne saurait statuer par voie de simple affirmation ; qu'en l'espèce, Mme [H] a, dans ses écritures d'appel, invoqué le droit pour tout assuré de mandater librement son conseil technique, un expert, afin de préserver l'indépendance et l'impartialité attachée à la mission de celui-ci (conclusions p. 6), l'exigence d'une expertise contradictoire imposée par l'assureur lui-même dans des affaires similaires (conclusions p. 9) et, enfin, la nécessité d'une expertise à la suite de l'accident (conclusions p. 9) ; que dès lors, en se bornant à retenir que « les moyens tirés du caractère légitime du libre choix de l'expert, du caractère contradictoire de la détermination du préjudice matériel et du lien de causalité entre l'accident et l'expertise ne justifient également pas la demande de Mme [H] tendant au remboursement des frais de l'expert qu'elle a librement engagé », sans nullement s'expliquer sur le bien ou le mal-fondé de ces moyens, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.