CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 8 décembre 2021
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10910 F
Pourvoi n° D 20-14.826
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 DÉCEMBRE 2021
La société Crédit immobilier de France développement (CIFD), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 20-14.826 contre l'arrêt n° RG : 18/00568 rendu le 28 janvier 2020 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [M] [D],
2°/ à Mme [L] [J], épouse [D],
domiciliés tous deux [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
M. et Mme [D] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Avel, conseiller, les observations écrites de la SCP Gaschignard, avocat de la société Crédit immobilier de France développement, de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de M. et Mme [D], après débats en l'audience publique du 19 octobre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Avel, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation du pourvoi principal et le moyen unique de cassation du pourvoi incident annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Crédit immobilier de France développement aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Crédit immobilier de France développement, demanderesse au pourvoi principal.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Crédit immobilier de France Développement à payer à M. et Mme [D] une somme de 250.000 euros à titre de dommages et intérêts,
AUX MOTIFS QUE les époux [D] sont bien fondés à faire valoir que la banque a manqué à son devoir de mise en garde ;
1° ALORS QUE le jugement, relevant d'office une exception de litispendance, avait dit qu'il appartiendra au tribunal de grande instance de Marseille de connaître de l'action en responsabilité dirigée par les époux [D] à l'encontre de l'établissement bancaire ; qu'en se prononçant elle-même sur cette action, sans infirmer le jugement sur ce point, la cour d'appel a violé les article 480 et 617 du code de procédure civile ;
2° ALORS, subsidiairement, QU'à supposer que la cour ait entendu infirmer le chef du jugement qui avait dit qu'il appartiendra au tribunal de grande instance de Marseille de connaître de l'action en responsabilité dirigée par les époux [D] contre la banque, il lui appartenait de donner un motif à sa décision sur ce point ; qu'en s'abstenant de toute motivation à cet égard, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Crédit Immobilier de France Développement (CIFD), aux droits du Cifraa, à payer à M. et Mme [D] une somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts,
AUX MOTIFS QUE les époux [D] reprochent à la banque d'avoir manqué à son devoir de mise en garde en leur consentant les prêts litigieux sans les rencontrer et sans s'assurer de leur situation financière ; que l'établissement bancaire qui consent un crédit est tenu envers un emprunteur non averti d'une obligation de mise en garde au regard de ses capacités financières et du risque de l'endettement né de l'octroi du prêt ; que l'obligation de mise en garde est ainsi subordonnée à deux conditions, la qualité d'emprunteur non averti et l'existence d'un risque d'endettement ; que la qualité de médecin de [M] [D] ne fait pas ipso facto des appelants des emprunteurs avertis ; qu'en l'absence de preuve apportée par la société CIFD, les époux [D] sont des emprunteurs non avertis et il convient de rechercher si les emprunts contractés étaient adaptés leur capacités financières, ainsi que le soutient la société CIFD ; qu'au soutien de cette affirmation, elle invoque la fiche de renseignements qu'elle dit produire en pièce 36 ; mais qu'aucun document n'est produit en pièce 36 et la cour ne peut considérer que les éléments chiffrés donnés par le Crédit Immobilier de France Développement en page 35 de ses conclusions concernent une fiche de renseignements qui aurait été établie avant la souscription des deux prêts litigieux ; qu'il doit être considéré au vu de ces éléments, que préalablement à la souscription des deux prêts n° 39900 et 39902, le Cifraa n'a pas vérifié les capacités financières des époux [D], manquant en cela à son obligation de mise en garde ; qu'il a ce faisant causé aux époux [D] un préjudice résultant de la perte de chance de ne pas contracter ; que sur la base d'une perte de chance moyenne, il sera alloué aux époux [D] la somme de 40.000 euros à titre de dommages intérêts ;
1° ALORS QUE la société CIFD faisait valoir dans ses conclusions d'appel (pp. 36-37) que M. et Mme [D] devaient se voir reconnaître la qualité d'emprunteurs avertis dès lors qu'avant de saisir la société Cifraa, ils avaient déjà souscrits de nombreux emprunts aux fins de défiscalisation, étaient propriétaires de plusieurs biens immobiliers et maîtrisaient parfaitement les rouages financiers des contrats de prêt immobilier ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE la société CIFD indiquait dans ses conclusions que les deux prêts litigieux, sollicités au même moment, avaient été octroyés sur la base des informations énoncées dans une fiche de renseignement signée par les emprunteurs et produite sous le n° 36 selon le bordereau de communication de pièces ; que les époux [D], qui ne reprochaient pas à la banque de n'avoir pas fait établir une telle fiche, soulignant au contraire que « la Cour se reportera à la fiche de renseignements bancaires produite par la Banque pour le prêt » (page 67) et encore « elle constatera plus avant que la banque ne verse qu'une seule fiche de renseignement bancaire » (page 91) ; qu'ils ne contestaient pas davantage que les éléments reportés dans les conclusions de la société CIFD étaient ceux mentionnés sur la fiche produite en pièce 16 ; qu'en affirmant qu'aucun document n'avait été produit en pièce 36 et qu'elle ne pouvait donc considérer que les éléments énoncés en page 35 des conclusions avaient bien été recueillis sur une fiche établie avant la souscription des deux prêts litigieux, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3°- ALORS au surplus QUE le juge ne peut fonder sa décision sur l'absence au dossier d'une pièce invoquée par une partie, qui figurait au bordereau des pièces annexé à ses dernières conclusions et dont la communication n'avait pas été contestée, sans inviter les parties à s'en expliquer ; qu'en affirmant qu'aucun document n'était produit en pièce 36, sans inviter au préalable les parties à s'en expliquer et, en tant que de besoin, la société CIFD à lui communiquer à nouveau cette pièce à la cour, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile Moyen produit par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [D], demandeurs au pourvoi incident.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée par les époux [D] de la cession de créance et de les avoir condamnés à payer au CIFD, les sommes de 183.456,48 euros outre intérêts au taux contractuel à compter du 29 avril 2010 au titre du prêt n° 39900 et 92.280,07 euros outre intérêts au taux contractuel à compter du 29 avril 2010 au titre du prêt 39902 ;
AUX MOTIFS QU'ils font valoir que le Crédit Immobilier de France Développement n'a pas d'intérêt à agir en l'état de la cession des créances du CIFRAA à un fonds commun de créances ; QU'ils ne rapportent pas la preuve de la cession de créance invoquée, contestée par la banque ; que le moyen ne peut prospérer ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le CIFRAA avait effectivement cédé les créances mais qu'il est cependant établi aux débats que les parties ont convenu de prononcer la résolution de ce contrat de cession ;
ALORS QU'il appartenait au CIFD, demandeur, d'établir qu'il avait intérêt à agir, ce qui supposait de démontrer que les créances litigieuses n'avaient pas fait l'objet d'une titrisation ; qu'en mettant à la charge des époux [D] la preuve de l'absence de cession de créance, la cour d'appel a violé les articles 31 du code de procédure civile et 1353 du code civil.