CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 8 décembre 2021
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10917 F
Pourvoi n° T 19-25.783
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 DÉCEMBRE 2021
La société Madivial, société coopérative agricole, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-25.783 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2019 par la cour d'appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige l'opposant à la société coopérative des éleveurs de bovins de la Martinique (CODEM), société coopérative agricole, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Vitse, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Madivial, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société coopérative des éleveurs de bovins de la Martinique, après débats en l'audience publique du 19 octobre 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Vitse, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Madivial aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Madivial.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir condamné la SCA MADIVIAL à payer à la CODEM les sommes de 498727,95 euros au titre des factures impayées pour la période du 11 janvier 2013 au 6 mai 2014 et de 31278,72 euros au titre des parts sociales appartenant à la CODEM au sein de la SCA MADIVIAL, d'avoir débouté la SCA MADIVIAL de ses demandes reconventionnelles et d'avoir condamné la SCA MADIVIAL à verser à la CODEM la somme de 20000 euros à titre de dommages et intérêts ;
aux motifs propres que « « 1- Sur la recevabilité :
Selon les dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
MADIVIAL soulève l'irrecevabilité de l'action de la CODEM en se fondant sur l'article 59 de ses statuts et sur les dispositions de l'article 56 du code de procédure civile.
Aux termes de l'article 59 des statuts de MADIVIAL, intitulé règlement des contestations :
1- toutes contestations s'élevant à raison des affaires sociales sont soumises à l'examen du conseil d'administration qui s'efforce de les régler à l'amiable.
2- L'union peut, au moment où elle contracte, convenir de soumettre à des arbitres les contestations qui viendraient à se produire en raison de ses opérations.
MADIVIAL prétend l'action de la CODEM irrecevable eu égard à la clause de conciliation préalable édictée par l'article 59 de ses statuts.
Selon les dispositions de l'article 1530 du code de procédure civile, la médiation et la conciliation conventionnelles s'entendent de tout processus structuré, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord, en dehors de toute procédure judiciaire en vue de la résolution amiable de leurs différends- avec l'aide d'un tiers choisi par elles qui accomplit sa mission avec impartialité, compétence et diligence.
Si la dernière jurisprudence en matière de clause de règlement amiable préalable des litiges admet l'efficacité de la clause même en l'absence de modalités précises de mise en oeuvre, l'article 59 des statuts de MADIVIAL est sujet à interrogation s'agissant de ce qu'il faut entendre par « toutes contestations s'élevant à raison des affaires sociales ». Le litige opposant la CODEM à MADIVIAL est principalement né de l'absence de paiement par la seconde de factures présentées par la première. Il ne s'agit pas d'une affaire sociale au sens de l'article 59 des statuts.
De plus, le conseil d'administration de MADIVIAL peut difficilement s'entendre comme un tiers aux parties, tiers impartial, comme prévu à l'article 1530 du code de procédure civile, le recours à ce conseil d'administration pour résoudre les contestations ne pouvant dès lors s'analyser en une conciliation conventionnelle.
Faute de clarté et de précision dans leur rédaction, il n'est pas démontré que les termes de l'article 59 des statuts de MADIVIAL instituent une clause de conciliation préalable obligatoire, fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent.
De plus, et à supposer que le litige en cause entre dans le champ des contestations spécifiées par l'article 59 des statuts de MADIVIAL, il est établi par la CODEM de ce qu'elle a tenté, à plusieurs reprises, de faire réunir le conseil d'administration de MADIVIAL à propos de ses factures restées impayées. En effet, et contrairement aux allégations non pertinentes de MADIVIAL, la CODEM a, par courrier du 10 juin 2013, sollicité du président de MADIVIAL qu'il réunisse le conseil d'administration au regard notamment de « la gravité de la situation de notre trésorerie en raison des délais de paiement de nos factures ». Cette demande a été réitérée- dans une lettre du 10 septembre 2013. Les tentatives de la CODEM pour réunir le conseil d'administration de MADIVIAL sont restées vaines du fait de l'Union des Coopératives elle-même. Celle-ci ne saurait dès lors reprocher à son adversaire de n'avoir pas respecté les termes de l'article 59 de ses statuts.
Selon les dispositions de l'article 56 in fine du code de procédure civile, sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, l'assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.
Il est notable que ces dispositions ne sont pas prescrites à peine de nullité contrairement aux différentes mentions de l'acte énumérées par le même article dans ses alinéas précédents. Il n'est pas précisé non plus que l'absence dans l'assignation de précisions quant aux diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige constitue une fin de non-recevoir.
Mais surtout, ces dispositions, ajoutées en fin d'article, sont entrées en vigueur au 1er avril 2015. Or, l'assignation a été délivrée à MADIVIAL à l'initiative de la CODEM, le 25 mars 2015. Les dispositions en cause ne sont donc pas applicables à l'espèce.
La recevabilité de l'action de la CODEM est établie.
2- Sur la créance de la CODEM :
MADIVIAL conteste le bien fondé des factures de la CODEM en indiquant que la demande de son adversaire méconnaît les principes du droit coopératif et les statuts de MADIVIAL. Elle prétend ensuite que la prestation carcasse est inconnue et que la CODEM lui a d'ailleurs consenti des avoirs suite aux premières factures contestées.
La cour constate cependant d'emblée que MADIVIAL n'a pas contesté immédiatement ni le bien fondé des factures de son adversaire, ni le contenu des prestations de ce dernier. Ainsi, dans une lettre du 1er août 2013, MADIVIAL écrivait à la CODEM que « concernant le règlement des factures l'accord de règlement à soixante jours était respecté » ou dans un courrier du 20 novembre 2013, MADIVIAL refusait les factures et les tarifs de la CODEM simplement aux motifs de l'« augmentation exponentielle » des prix et de la mauvaise qualité des carcasses fournies. Il a fallu attendre une lettre du 26 janvier 2014 pour que l'appelante se plaigne des factures de la CODEM dépourvues de fondement, selon ses dires.
Il est, au contraire, démontré que les prestations de la CODEM ont été validées dès le 27 avril 2011 et payées sans difficultés jusqu'à décembre 2012. Il est ensuite justifié de l'existence de négociations et de ce que la CODEM a baissé ses tarifs. Il est encore établi que la CODEM a accepté d'effectuer des gestes commerciaux, lesquels se sont traduits par des avoirs, parce qu'elle a pu, de son côté, bénéficier de subventions européennes. Il n'est pas non plus démontré que les avoirs avaient été émis par la CODEM suite à des prestations non réalisées.
S'agissant en particulier de la prestation carcasse prétendument inconnue aux dires de l'Union des Coopératives, elle apparaît dans les grilles tarifaires dès le début des relations entre les deux coopératives.
L'ensemble de ces éléments factuels atteste en conséquence du respect des principes du droit coopératif et les pièces produites aux débats prouvent le caractère certain, liquide et exigible de la créance de la CODEM. La condamnation de MADIVIAL au paiement de la somme de 498 727,95 euros doit donc être confirmée.
3- Sur la décision d'exclusion de la CODEM :
Les relations contractuelles des parties s'analysaient en la fourniture de l'exclusivité de la production animale de ses membres par la CODEM à MADIVIAL qui devait, en contrepartie, en payer le prix.
Or, le refus de l'acquittement des factures présentées est une faute contractuelle grave de MADIVIAL, laquelle s'est abstenue d'exécuter son obligation principale au détriment de sa co-contractante, laquelle, en situation financière délicate, a dû revenir sur l'exclusivité de ses livraisons consentie à MADIVIAL afin d'apporter une réponse temporaire au comportement de l'appelante. MADIVIAL ne peut, dès lors, à juste titre, prétendre que l'attitude de la CODEM s'analyse en un retrait anticipé puisqu'il est amplement établi que seuls les retards de paiement de MADIVIAL ont contraint la CODEM à diversifier ses points de fourniture des animaux de ses membres producteurs.
Le tribunal a, en conséquence, parfaitement considéré que la rupture des relations contractuelles était survenue aux torts exclusifs de l'Union des coopératives. Dans ces circonstances, il a, à bon droit, débouté l'appelante de sa demande au titre de l'indemnité d'éviction et, au contraire, justement condamné celle-ci au remboursement à la CODEM de ses parts sociales.
4- Sur la demande de dommages intérêts de la CODEM :
Vu les dispositions de l'ancien article 1184 du code civil ;
Le préjudice subi par la CODEM a dépassé celui né de l'absence de paiement de ses factures. En effet, l'attitude déloyale de MADIVIAL, laquelle a d'abord reconnu le bien fondé des prestations de sa partenaire commerciale avant de le contester, a occasionné à la CODEM un dommage distinct, puisqu'elle s'est heurtée à l'immobilisme de MADIVIAL, laquelle s'est abstenue de convoquer le conseil d'administration par exemple, et à son absence de bonne foi dans le règlement du litige.
Ce préjudice sera intégralement réparé par l'octroi à la CODEM de la somme de 20 000,00 euros à titre de dommages intérêts » ;
et aux motifs adoptés que « Sur l'irrecevabilité des demandes de la CODEM ;
a) la saisine préalable du Conseil d'administration :
Attendu que l'examen des statuts de l'Union des Coopératives d'Elevage de Martinique, dénommé MADIVIAL, tels qu'élaborés et adoptés en assemblée générale le 3 janvier 2012 ne prévoit pas de réunion préalable dans le cadre d'un conflit entre un membre de la coopérative et celle-ci, avant toute action au fond ;
Que bien mieux le Vice-Président de MADIVIAL, M. [S] a sollicité à deux reprises les 10 juin et 10 septembre (cette dernière par lettre recommandée avec accusé de réception), la convocation d'une assemblée générale ordinaire a in de mettre au clair les dépenses de la coopérative, un état des pourparlers avec les clients, d'avoir des éclaircissements sur le fonctionnement de la structure et son état financier mais aussi traiter du retard de règlement envers la CODEM et les éleveurs ;
Qu'il ne semble pas que la coopérative MADIVIAL ait procédé à une telle convocation de ses membres.
Qu'il n'y avait lieu à saisine préalable du conseil d'administration et qu'en tout état de cause, les organes dirigeant de MADIVIAL n'ont pas donné suite à la demande du Vice-Président.
b) le non-respect des dispositions de l'article 56 du code de procédure civile :
Attendu que dans ses dernières dispositions l'article 56 du code de procédure civile dans son sixième alinéa, dispose que sauf en cas d'urgence, l'assignation doit faire apparaître les tentatives de conciliation préalables.
Que ces dispositions, qui ne sont pas reprises au même titre que les alinéas précédents (du 1° au 4°) ne sont pas prescrites à peine de nullité.
Qu'en outre, on peut considérer que le courrier en recommandé avec accusé de réception du 10 septembre 2013, de M. [S] pris en sa double qualité de président de la CODEM et de Vice-Président de MADIVIAL, vaut tentative de conciliation, lorsqu'il est exposé que MADIVIAL doit une somme de 571.351,76 euros dont 147.737,47 € échu à plus de trois mois.
Que cette exception sera rejetée.
Sur l'action contraire aux dispositions de l'article 59 des statuts :
Attendu que les statuts prévoient que "toutes contestations s'élevant à raison des affaires sociales sont soumises à l'examen du conseil d'administration qui s'efforce de les régler à l'amiable. " ;
Que cette formule est d'un flou particulier puisque la notion d'affaires sociales n'est nullement définie par les mêmes statuts ; que l'on peut comprendre par affaires sociales, celles qui intéressent la vie de la coopérative, mais qu'en aucun cas on ne saurait y intégrer les situations de conflits avec des tiers, dont la CODEM.
Attendu qu'en outre, MADIVIAL produit en pièce n 13 la preuve de l'exclusion de CODEM de la coopérative MADIVIAL ; que celle-ci a été notifiée le 11 juillet 2014 ; que dès lors la CODEM n'avait plus à respecter les dispositions de l'article 59 des statuts avant l'assignation qui est intervenue le 25 mars 2015.
Qu'en outre, cette décision avait déjà été prise par MADIVIAL le 17 décembre 2013 par le Président et notifié à la CODEM (pièce 8 de la demanderesse).
Que cette exception doit encore être rejetée.
Sur le fond :
Attendu que pour obtenir le paiement d'une créance, il faut en démontrer son caractère certain, liquide et exigible.
Que la prestation carcasse n'existe pas selon MADIVIAL.
Que pourtant il résulte d'un mail émis le 18 mars 2013 par Mme [M] [F] à Mme [D] [O] pour SCAM COOP que « les factures de carcasses sont faites chaque semaine et correspondent aux carcasses abattues dans la semaine ; [...] les carcasses sont ensuite vendues par MADIVIAL aux clients finaux en une à trois semaines selon les cas. [...] Les carcasses deviennent la propriété de MADIVIAL dès leur livraison dans nos locaux il n'y a donc pas d'erreur de date. Effectivement sur les premières factures apparaissaient la prestation traitement carcasses - elle devra être isolée et devenir « stockage et maturation » comme nous en avions parlé lors de notre dernière rencontre - nous devons faire un avoir si cela n'a pas encore été fait. Cette nouvelle articulation avec un nouveau coût éventuel de la prestation et de la maturation doit passer en conseil d'administration CODEM début avril. »
Qu'en conséquence, il existe bien une notion de "prestation carcasse" contrairement à ce qui est contesté par MADIVIAL qui interrogeait la CODEM le 18 mars et a obtenu la réponse portée plus haut.
Que les parties ont d'ailleurs tenté un rapprochement sur les fixations des prix par mail, le 15 octobre 2013, avec des fichiers attachés sur la grille de prix du boeuf (y compris les veaux), pour les différentes qualités et poids, le prix des abats, le coût de la prestation maturation et le poids après stockage; que cependant la totalité des fichiers joints et notamment les grilles tarifaires n'ont pas été produites par MADIVIAL.
Attendu que s'il s'agit d'une preuve à elle-même, il n'en reste pas moins que la CODEM après vérification par son expert comptable parvient à une créance sur MADIVIAL pour la période du 11 janvier 2013 au 6 mai 2014 de la somme de 498.727,95 €.
Qu'au 10 juin 2013, la créance était déjà de 655.441,06 euros suivant extrait de compte et courrier de M. [S] président de la CODEM à MADIVIAL.
Que MADIVIAL dans son courrier de réponse du 1er août 2013 ne conteste pas la créance, mais indique seulement que pour une part de celle-ci, correspondant à la découpe, le règlement ne pourra intervenir qu'à réception des subventions.
Que dès lors, ne contestant pas le principe de la créance ni son montant, elle admet être débitrice vis à vis de la CODEM. Que la CODEM a versé en pièces 22 à 24, le détail de ses prestations et des coûts induits, pour les années 2011, 2012 et 2013 ;
Que les prix auraient été majorés de 33 % unilatéralement par la CODEM ; que cependant, par courrier du 2 août 2013, CODEM transmet de nouvelles tarifications établies à la suite d'un nouveau calcul sur la perte due à la maturation, sur les écarts de pesées et sur le fait surtout que MADIVIAL refuse désormais de prendre en charge les carcasses de certaines bêtes dont les poids seraient inférieurs pour des catégories déterminées (ex : moins de 190 kg pour les génisses et taurillons en 0, 0+ R et R+).
Attendu que la CODEM verse ensuite en pièce 43 la série de factures reprenant le décompte des sommes dues et pour certaines réglées par MADIVIAL :
Que dès lors MADIVIAL doit être condamnée au paiement de la somme de 498 727,95 euros en deniers ou quittances valables arrêtée à la date du 23 juin 2014, date de l'arrêté de compte de l'expert comptable,
Sur la demande reconventionnelle de MADIVIAL :
Attendu que MADIVIAL sollicite reconventionnellement le paiement d'une somme de 26.042.793 € au titre des quote-parts non livrées, des participations aux charges et du total du chiffre d'affaire non livré pour les 10 années de validité du contrat restant à courir, à titre de pénalités suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juillet 2014 ;
Que cependant, cette demande se heurte à une difficulté très sérieuse qui tient au fait que la CODEM, lorsqu'elle a sollicité des précisions sur le fonctionnement de MADIVIAL et réclamé la tenue d'une assemblée générale, a essuyé un silence de la coopérative MADIVIAL : que le désengagement de la CODEM au sein de MADIVIAL n'est que la conséquence des impayés qu'elle enregistrait et de la mise en péril de sa propre structure, alors que MADIVIAL continuait de bénéficier de la production et en assurait la distribution, encaissant les prix de vente, sans régler les sommes dues à son fournisseur principal.
Attendu surtout que MADIVIAL a procédé à l'exclusion de la CODEM ; que dès lors, elle ne peut venir solliciter le paiement de dommages-intérêts ou de pénalités, puisqu'elle est à l'initiative de la rupture contractuelle avec CODEM. Que MADIVIAL sera débouté de ses demandes reconventionnelles.
Sur le remboursement des parts sociales dues à la CODEM ;
Attendu que la CODEM ayant été exclue de MADIVIAL, celle-ci lui est redevable des parts sociales à hauteur de 31.278,72 6, comme elle le reconnaît elle-même dans son courrier du 11 juillet 2014 » ;
alors 1°/ que l'article 1530 du code de procédure civile est issu du décret n°2012-66 du 20 janvier 2012 entrant en vigueur au lendemain de sa publication ; que les statuts de MADIVIAL et son règlement intérieur ont été adoptés le 3 janvier 2012 ; que la cour d'appel a constaté que le conseil d'administration de MADIVIAL pouvait difficilement s'entendre comme un tiers aux parties, tiers impartial, comme prévu à l'article 1530 du code de procédure civile, le recours à ce conseil d'administration pour résoudre les contestations ne pouvant dès lors s'analyser en une conciliation conventionnelle ; qu'en faisant application des dispositions de l'article 1530 du code de procédure civile issues du décret n°2012-66 du 20 janvier 2012, postérieur à l'adoption des statuts et du règlement intérieur de MADIVIAL et, partant, inapplicable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
alors 2°/ que la stipulation des statuts d'une union de coopérative agricole, intitulée « règlement des contestations », qui est issue des statuts types instaurés par voie réglementaire qui s'imposent aux unions de coopératives agricoles, et prévoyant que « toutes contestations s'élevant à raison des affaires sociales sont soumises à l'examen du conseil d'administration qui s'efforce de les régler à l'amiable », institue une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge dont le non-respect caractérise une fin de non-recevoir s'imposant à celui-ci ; qu'en déclarant, pour écarter la fin de non-recevoir tirée de l'article 59 des statuts, par des motifs inopérants, que le conseil d'administration de MADIVIAL pouvait difficilement s'entendre comme un tiers aux parties, tiers impartial, comme prévu à l'article 1530 du code de procédure civile, le recours à ce conseil d'administration pour résoudre les contestations ne pouvant dès lors s'analyser en une conciliation conventionnelle et que faute de clarté et de précision dans leur rédaction, il n'était pas démontré que les termes de l'article 59 des statuts de MADIVIAL instituaient une clause de conciliation préalable obligatoire, fin de non-recevoir qui s'imposait au juge si les parties l'invoquaient, la cour d'appel a violé l'ancien article 1134 du code civil devenu 1103 ensemble l'article 122 du code de procédure civile ;
alors 3°/ que le lien coopératif entre la coopérative adhérente et l'union de coopératives agricoles exclut tout lien d'obligation d'une autre nature entre elles ; qu'en relevant, pour refuser de faire application de l'article 59 des statuts de MADIVIAL issu des statuts types des unions de coopératives agricoles, que le litige opposant la CODEM, coopérative adhérente, à MADIVIAL, union de coopératives agricoles, était principalement né de l'absence de paiement par la seconde de factures présentées par la première et qu'il ne s'agissait pas d'une affaire sociale au sens de l'article 59 des statuts sans rechercher, comme elle y était invitée, si le litige entre une coopérative et une union de coopératives ne constituait pas nécessairement une affaire relative au rapport coopératif relevant de l'article 59 des statuts, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 521-3 du code rural et de la pêche maritime ;
alors 4°/ que la disposition des statuts d'une union de coopérative agricole, intitulée règlement des contestations, qui est issue des statuts types instaurés par voie réglementaire, et prévoyant que « toutes contestations s'élevant à raison des affaires sociales sont soumises à l'examen du conseil d'administration qui s'efforce de les régler à l'amiable », s'applique aux affaires sociales concernant tant les organes de la coopérative que les associés ; que le litige portant sur le non-paiement de factures par une union de coopératives à l'un de ses associés coopérateurs constitue une affaire sociale, en ce qu'il intéresse la vie de l'union de coopératives ; qu'en relevant, pour refuser de faire application de l'article 59 des statuts de MADIVIAL issus des statuts types des unions de coopératives agricoles, que le litige opposant la CODEM, coopérative adhérente, à MADIVIAL, union de coopérative agricole, était principalement né de l'absence de paiement par la seconde de factures présentées par la première et qu'il ne s'agissait pas d'une affaire sociale au sens de l'article 59 des statuts, la cour d'appel a violé l'ancien article 1134 du code civil devenu 1103 ;
alors 5°/ que les juges ne sauraient dénaturer les documents de la cause ; que l'article 59 des statuts de MADIVIAL indiquait clairement et précisément que « toutes contestations s'élevant en raison des affaires sociales sont soumises à l'examen du conseil d'administration, qui s'efforce de les régler à l'amiable » ; qu'il en résultait que tout litige coopératif opposant la coopérative adhérente, CODEM, à l'union de coopératives agricoles, MADIVIAL, relevait nécessairement d'une affaire sociale au sens de l'article 59 ; qu'en affirmant que l'article 59 était sujet à interrogation s'agissant de ce qu'il fallait entendre par " toutes contestations s'élevant à raison des affaires sociales" et que le litige opposant la CODEM à MADIVIAL, né principalement de l'absence de paiement par la seconde de factures présentées par la première, ne relevait pas d'une affaire sociale au sens de l'article 59 des statuts, la cour d'appel a dénaturé lesdits statuts violant ainsi l'ancien article 1134 du code civil devenu 1103 ;
alors 6°/ que le contrat fait la loi des parties ; que la mise en oeuvre de l'article 59 des statuts de MADIVIAL qui prévoit que « toutes contestations s'élevant à raison des affaires sociales sont soumises à l'examen du conseil d'administration qui s'efforce de les régler à l'amiable » suppose donc un courrier formel de saisine du conseil d'administration en vue de lui soumettre les différentes contestations ; qu'en relevant, pour dire que l'action de la CODEM était recevable, qu'il était établi par la CODEM qu'elle avait tenté, à plusieurs reprises, de faire réunir le conseil d'administration de MADIVIAL à propos de ses factures restées impayées, qu'en effet elle avait, par courrier du 10 juin 2013, sollicité du président de MADIVIAL qu'il réunisse le conseil d'administration au regard notamment de « la gravité de la situation de notre trésorerie en raison des délais de paiement de nos factures » réitérant cette demande dans une lettre du 10 septembre 2013 et que les tentatives de la CODEM pour réunir le conseil d'administration de MADIVIAL étaient restées vaines du fait de l'Union des Coopératives elle-même de sorte que celle-ci ne saurait dès lors reprocher à son adversaire de n'avoir pas respecté les termes de l'article 59 de ses statuts sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces correspondances adressées par la CODEM, non en son nom propre, mais en sa qualité d'administrateur ou de vice-président de l'union, demandaient formellement à MADIVIAL la tenue d'un conseil d'administration dans le cadre de l'article 59 en indiquant bien toutes les demandes reprises par la suite par la CODEM dans son assignation, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'ancien article 1134 du code civil devenu 1103 du même code.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir condamné la SCA MADIVIAL à payer à la CODEM les sommes de 498727,95 euros au titre des factures impayées pour la période du 11 janvier 2013 au 6 mai 2014 et de 31278,72 euros au titre des parts sociales appartenant à la CODEM au sein de la SCA MADIVIAL, d'avoir débouté la SCA MADIVIAL de ses demandes reconventionnelles et d'avoir condamné la SCA MADIVIAL à verser à la CODEM la somme de 20000 euros à titre de dommages et intérêts ;
aux motifs propres que « 2- Sur la créance de la CODEM :
MADIVIAL conteste le bien fondé des factures de la CODEM en indiquant que la demande de son adversaire méconnaît les principes du droit coopératif et les statuts de MADIVIAL. Elle prétend ensuite que la prestation carcasse est inconnue et que la CODEM lui a d'ailleurs consenti des avoirs suite aux premières factures contestées.
La cour constate cependant d'emblée que MADIVIAL n'a pas contesté immédiatement ni le bien fondé des factures de son adversaire, ni le contenu des prestations de ce dernier. Ainsi, dans une lettre du 1er août 2013, MADIVIAL écrivait à la CODEM que « concernant le règlement des factures l'accord de règlement à soixante jours était respecté » ou dans un courrier du 20 novembre 2013, MADIVIAL refusait les factures et les tarifs de la CODEM simplement aux motifs de l'« augmentation exponentielle » des prix et de la mauvaise qualité des carcasses fournies. Il a fallu attendre une lettre du 26 janvier 2014 pour que l'appelante se plaigne des factures de la CODEM dépourvues de fondement, selon ses dires.
Il est, au contraire, démontré que les prestations de la CODEM ont été validées dès le 27 avril 2011 et payées sans difficultés jusqu'à décembre 2012. Il est ensuite justifié de l'existence de négociations et de ce que la CODEM a baissé ses tarifs. Il est encore établi que la CODEM a accepté d'effectuer des gestes commerciaux, lesquels se sont traduits par des avoirs, parce qu'elle a pu, de son côté, bénéficier de subventions européennes. Il n'est pas non plus démontré que les avoirs avaient été émis par la CODEM suite à des prestations non réalisées.
S'agissant en particulier de la prestation carcasse prétendument inconnue aux dires de l'Union des Coopératives, elle apparaît dans les grilles tarifaires dès le début des relations entre les deux coopératives.
L'ensemble de ces éléments factuels atteste en conséquence du respect des principes du droit coopératif et les pièces produites aux débats prouvent le caractère certain, liquide et exigible de la créance de la CODEM. La condamnation de MADIVIAL au paiement de la somme de 498 727,95 euros doit donc être confirmée.
3- Sur la décision d'exclusion de la CODEM :
Les relations contractuelles des parties s'analysaient en la fourniture de l'exclusivité de la production animale de ses membres par la CODEM à MADIVIAL qui devait, en contrepartie, en payer le prix.
Or, le refus de l'acquittement des factures présentées est une faute contractuelle grave de MADIVIAL, laquelle s'est abstenue d'exécuter son obligation principale au détriment de sa co-contractante, laquelle, en situation financière délicate, a dû revenir sur l'exclusivité de ses livraisons consentie à MADIVIAL afin d'apporter une réponse temporaire au comportement de l'appelante. MADIVIAL ne peut, dès lors, à juste titre, prétendre que l'attitude de la CODEM s'analyse en un retrait anticipé puisqu'il est amplement établi que seuls les retards de paiement de MADIVIAL ont contraint la CODEM à diversifier ses points de fourniture des animaux de ses membres producteurs.
Le tribunal a, en conséquence, parfaitement considéré que la rupture des relations contractuelles était survenue aux torts exclusifs de l'Union des coopératives. Dans ces circonstances, il a, à bon droit, débouté l'appelante de sa demande au titre de l'indemnité d'éviction et, au contraire, justement condamné celle-ci au remboursement à la CODEM de ses parts sociales.
4- Sur la demande de dommages intérêts de la CODEM :
Vu les dispositions de l'ancien article 1184 du code civil ;
Le préjudice subi par la CODEM a dépassé celui né de l'absence de paiement de ses factures. En effet, l'attitude déloyale de MADIVIAL, laquelle a d'abord reconnu le bien fondé des prestations de sa partenaire commerciale avant de le contester, a occasionné à la CODEM un dommage distinct, puisqu'elle s'est heurtée à l'immobilisme de MADIVIAL, laquelle s'est abstenue de convoquer le conseil d'administration par exemple, et à son absence de bonne foi dans le règlement du litige.
Ce préjudice sera intégralement réparé par l'octroi à la CODEM de la somme de 20 000,00 euros à titre de dommages intérêts » ;
et aux motifs adoptés que « Sur le fond :
Attendu que pour obtenir le paiement d'une créance, il faut en démontrer son caractère certain, liquide et exigible.
Que la prestation carcasse n'existe pas selon MADIVIAL.
Que pourtant il résulte d'un mail émis le 18 mars 2013 par Mme [M] [F] à Mme [D] [O] pour SCAM COOP que « les factures de carcasses sont faites chaque semaine et correspondent aux carcasses abattues dans la semaine ; [...] les carcasses sont ensuite vendues par MADIVIAL aux clients finaux en une à trois semaines selon les cas. [...] Les carcasses deviennent la propriété de MADIVIAL dès leur livraison dans nos locaux il n'y a donc pas d'erreur de date. Effectivement sur les premières factures apparaissaient la prestation traitement carcasses - elle devra être isolée et devenir « stockage et maturation » comme nous en avions parlé lors de notre dernière rencontre - nous devons faire un avoir si cela n'a pas encore été fait. Cette nouvelle articulation avec un nouveau coût éventuel de la prestation et de la maturation doit passer en conseil d'administration CODEM début avril. »
Qu'en conséquence, il existe bien une notion de "prestation carcasse" contrairement à ce qui est contesté par MADIVIAL qui interrogeait la CODEM le 18 mars et a obtenu la réponse portée plus haut.
Que les parties ont d'ailleurs tenté un rapprochement sur les fixations des prix par mail, le 15 octobre 2013, avec des fichiers attachés sur la grille de prix du boeuf (y compris les veaux), pour les différentes qualités et poids, le prix des abats, le coût de la prestation maturation et le poids après stockage ; que cependant la totalité des fichiers joints et notamment les grilles tarifaires n'ont pas été produites par MADIVIAL.
Attendu que s'il s'agit d'une preuve à elle-même, il n'en reste pas moins que la CODEM après vérification par son expert comptable parvient à une créance sur MADIVIAL pour la période du 11 janvier 2013 au 6 mai 2014 de la somme de 498.727,95 €.
Qu'au 10 juin 2013, la créance était déjà de 655.441,06 euros suivant extrait de compte et courrier de M. [S] président de la CODEM à MADIVIAL.
Que MADIVIAL dans son courrier de réponse du 1er août 2013 ne conteste pas la créance, mais indique seulement que pour une part de celle-ci, correspondant à la découpe, le règlement ne pourra intervenir qu'à réception des subventions.
Que dès lors, ne contestant pas le principe de la créance ni son montant, elle admet être débitrice vis à vis de la CODEM. Que la CODEM a versé en pièces 22 à 24, le détail de ses prestations et des coûts induits, pour les années 2011, 2012 et 2013 ;
Que les prix auraient été majorés de 33 % unilatéralement par la CODEM ; que cependant, par courrier du 2 août 2013, CODEM transmet de nouvelles tarifications établies à la suite d'un nouveau calcul sur la perte due à la maturation, sur les écarts de pesées et sur le fait surtout que MADIVIAL refuse désormais de prendre en charge les carcasses de certaines bêtes dont les poids seraient inférieurs pour des catégories déterminées (ex : moins de 190 kg pour les génisses et taurillons en 0, 0+ R et R+).
Attendu que la CODEM verse ensuite en pièce 43 la série de factures reprenant le décompte des sommes dues et pour certaines réglées par MADIVIAL :
Que dès lors MADIVIAL doit être condamnée au paiement de la somme de 498 727,95 euros en deniers ou quittances valables arrêtée à la date du 23 juin 2014, date de l'arrêté de compte de l'expert comptable, Sur la demande reconventionnelle de MADIVIAL :
Attendu que MADIVIAL sollicite reconventionnellement le paiement d'une somme de 26.042.793 € au titre des quote-parts non livrées, des participations aux charges et du total du chiffre d'affaire non livré pour les 10 années de validité du contrat restant à courir, à titre de pénalités suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juillet 2014 ;
Que cependant, cette demande se heurte à une difficulté très sérieuse qui tient au fait que la CODEM, lorsqu'elle a sollicité des précisions sur le fonctionnement de MADIVIAL et réclamé la tenue d'une assemblée générale, a essuyé un silence de la coopérative MADIVIAL : que le désengagement de la CODEM au sein de MADIVIAL n'est que la conséquence des impayés qu'elle enregistrait et de la mise en péril de sa propre structure, alors que MADIVIAL continuait de bénéficier de la production et en assurait la distribution, encaissant les prix de vente, sans régler les sommes dues à son fournisseur principal.
Attendu surtout que MADIVIAL a procédé à l'exclusion de la CODEM ; que dès lors, elle ne peut venir solliciter le paiement de dommages-intérêts ou de pénalités, puisqu'elle est à l'initiative de la rupture contractuelle avec CODEM.
Que MADIVIAL sera débouté de ses demandes reconventionnelles.
Sur le remboursement des parts sociales dues à la CODEM ;
Attendu que la CODEM ayant été exclue de MADIVIAL, celle-ci lui est redevable des parts sociales à hauteur de 31.278,72 6, comme elle le reconnaît elle même dans son courrier du 11 juillet 2014 » ;
alors que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même ; qu'après avoir constaté, par des motifs adoptés, que la CODEM se constituait une preuve à elle-même, la cour d'appel, pour juger que le montant de la créance devait être fixé à la somme de 498.727,95 €, a considéré qu'il n'en restait pas moins que la CODEM, après vérification par son expert-comptable, parvenait à une créance sur MADIVIAL pour la période du 11 janvier 2013 au 6 mai 2014 de la somme de 498.727,95 € ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations, la cour d'appel a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil.