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23/09/2021 | FRANCE | N°20-17.786

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 23 septembre 2021, 20-17.786


CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 23 septembre 2021




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10434 F

Pourvoi n° W 20-17.786




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 SEPTEMBRE 2021

1°/ M. [R] [B],
> 2°/ Mme [W] [D], épouse [B],

tous deux domiciliés [Adresse 6],

ont formé le pourvoi n° W 20-17.786 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2019 par la cour d'appel de Versailles...

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 23 septembre 2021




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10434 F

Pourvoi n° W 20-17.786




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 SEPTEMBRE 2021

1°/ M. [R] [B],

2°/ Mme [W] [D], épouse [B],

tous deux domiciliés [Adresse 6],

ont formé le pourvoi n° W 20-17.786 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2019 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [V] [S], domicilié [Adresse 1],

2°/ à Mme [J] [S], épouse [I], domiciliée [Adresse 3],

3°/ à M. [T] [S], domicilié [Adresse 5] (Canada),

4°/ à M. [Q] [S],

5°/ à Mme [H] [U] épouse [S],

tous deux domiciliés [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. et Mme [B], de Me Bouthors, avocat des consorts [S], après débats en l'audience publique du 29 juin 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [B] ; les condamne à payer aux consorts [S] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [B]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :


L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a débouté M. et Mme [B] de leur demande visant à les dire propriétaires indivis du passage commun situé au [Adresse 1] ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la propriété indivise du passage commun

Considérant que l'acte notarié en date du 7 Juillet 1977 relatif à l'acquisition du bien immobilier par les époux [B] désignait ainsi, en caractères dactylographiques, le bien :

« Une propriété sise à [Adresse 1], sur la gauche de la façade retrait de la rue, avec passage commun portant sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 1] [Adresse 2] » ;

Considérant que la mention « passage commun » a été biffée et remplacée, à la main, par la mention : « droit de passage » de sorte que la désignation du bien est rédigée comme suit : ,

« Une propriété sise à [Adresse 1], sur la gauche de la façade retrait de la rue, avec un droit de passage sur la parcelle [Adresse 2] ..) ; au-(...)
dudit passage(...) » ;

Considérant que les actes notariés, relatifs au même bien, des 20 septembre 1944, 22 octobre 1946 et 26 mai 1952 font référence à un « passage commun avec le propriétaire du n° 14 » ;

Considérant que le titre des consorts [S]- et ceux de leurs auteurs- ne fait pas référence à un « passage commun » avec le propriétaire du 12 ou du 12 bis ;

Considérant que le titre même de M. et Mme [B] ne fait pas état d'un « passage commun » ;

Considérant qu'ils ne peuvent dès lors revendiquer, sur ce fondement, leur qualité de « propriétaire indivis du passage commun » ;

Considérant que la propriété du passage peut, toutefois, être acquise par l'effet de la prescription trentenaire ;

Considérant que l'article 2261 du code civil précise que la possession doit être continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire Considérant qu'il appartient aux appelants de rapporter la preuve qu'ils ont possédé, dans ces conditions, ce passage durant 30 ans ;

Considérant que l'implantation d'un compteur électrique, un intitulé postal ou la présence d'une boîte à lettre et d'un interphone ne constituent pas des actes de possession au sens de l'article 2261 du code civil ;

Considérant qu'il ne peut résulter de la présence de canalisations souterraines desservant le bien des époux [B] que ceux-ci sont propriétaires indivis du passage lui-même ;

Considérant que le financement, partiel, par eux de travaux de maçonnerie ou d'installation d'un portail ne caractérise pas des actes de possession permettant d'acquérir la propriété même du bien ;

Considérant que le « puits mitoyen », à supposer qu'il puisse constituer un acte de possession du passage, a été abandonné ;

Considérant que l'autorisation de travaux donnée à M. et Mme [B] par la commune de Montesson- dont M. [Q] [S] est le maire- et la réalisation de ceux-ci en empruntant le passage est sans incidence sur la « possession » de ce passage ;

Considérant, enfin, qu'il ne résulte pas de la superficie du bien des consorts [S] que le passage litigieux est indivis ;

Considérant, par conséquent, que M. et Mme [B] ne rapportent pas la preuve d'une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire pendant 30 ans du passage litigieux ;

Considérant que M. et Mme [B] ne peuvent donc, ni par titre ni par prescription, revendiquer leur qualité de propriétaire indivis du passage commun » ;

ALORS QUE la possession suppose, pour prescrire la propriété, de réaliser des actes matériels à titre de propriétaire de façon continue, paisible, publique et non équivoque ; qu'à le fait d'installer un compteur électrique, une boîte aux lettres et un interphone et de participer à la réalisation de travaux peuvent constituer des actes matériels de nature à établir l'existence d'une possession au sens de l'article 2261 du code civil ; qu'en retenant qu'il ne s'agissait pas là d'actes de possession au sens de cette disposition, la cour d'appel a violé l'article 2261 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a jugé que M. et Mme [B] ne bénéficient d'aucune servitude de passage sur la parcelle voisine [Cadastre 1] appartenant aux consorts [S], et a débouté M. et Mme [B] de toutes leurs demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur l'existence d'une enclave Considérant que l'article 682 du code civil dispose que « le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner » ;

Considérant que M. et Mme [B] peuvent donc, si leur fonds est enclavé, solliciter un tel passage ;

Considérant qu'ils font état, dans leurs conclusions, de l'état d'enclave des appartements, en fond de cour, situés au deuxième étage voire, dans une autre partie de celles-ci, des appartements situés au premier et au deuxième étage ;

Considérant qu'il leur appartient de démontrer que ces biens sont enclavés et que cet état n'est pas la conséquence d'un fait volontaire de leur part ;

Considérant qu'il ressort d'un procès-verbal de constat d'huissier établi le 3 mars 2016, à la demande des époux [B], que le rez-de-chaussée de l'immeuble situé [Adresse 1] dont ils sont propriétaires, est loué et occupé par la Banque Populaire Val de France et que l'accès aux étages n'est possible que par un passage appartenant au propriétaire du numéro 14 ;

Considérant que la banque confirme que la salle de réunion du premier étage est accessible par un escalier intérieur mais que l'appartement du deuxième étage n'est accessible que par le passage puis par un escalier extérieur ;

Considérant que ces énonciations démontrent que l'immeuble lui-même n'est pas enclavé et que l'impossibilité d'accéder aux appartements situés à l'étage résulte de l'aménagement de celui-ci par ses propriétaires soit d'un acte volontaire ;

Considérant, par ailleurs, que l'état d'enclave d'un fonds résulte de l'absence d'issue ou d'une issue insuffisante du fonds sur la voie publique ;

Considérant que le local situé au rez de chaussée dispose d'une issue suffisante sur la voie publique ;

Considérant que la parcelle sur laquelle le bâtiment de M. et Mme [B] est bâti dispose ainsi d'un accès suffisant à la voie publique ; que le fonds lui-même dispose d'une issue ;

Considérant qu'un aménagement de leur propre propriété permettrait donc aux appartements d'avoir accès à la voie publique ;

Considérant que M. et Mme [B] ne démontrent pas que les appartements situés au-dessus du local du rez-de-chaussée ne peuvent bénéficier, fût-ce avec des aménagements non disproportionnés, de cette issue ;

Considérant que M. et Mme [B] ne justifient donc pas, concernant ces appartements, d'un état d'enclave défini par l'article 682 du code civil ;

Considérant qu'ils ne peuvent, en conséquence, solliciter l'établissement d'une servitude de passage pour y accéder » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « Sur l'existence de l'enclave telle qu'invoquée par les époux [B]

L'article 662 du code civil dispose que le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur le fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.

Les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain pour apprécier, d'après l'état des lieux et les circonstances de la cause, si un fonds est ou non enclavé ; de même ils apprécient si l'issue dont dispose le fonds sur la voie publique pour son exploitation est suffisante, et si l'enclave est ou non le résultat d'opérations Volontaires.

Le propriétaire qui a lui-même obstrué l'issue donnant accès à la voie publique ne peut se prévaloir d'un droit de passage pour cause d'enclave.

Il ressort d'un procès-verbal de constat d'huissier établi le 3 mars 2016, à la demande des époux [B], que le rez-de-chaussée de l'immeuble situé [Adresse 1] dont M. [B] est propriétaire, est « loué et occupé par la Banque Populaire Val de France et que l'accès aux étages n'est possible que par un passage appartenant au, propriétaire du numéro 14 et pour lequel il détient un droit de passage ». ;

Il résulte d'un courrier adresse par M. [V] [S] à M. [B] le 12 octobre 2013 les éléments suivants : « (…) puisque vous disposez actuellement des clefs de ce passage et que vous entendez vous en servir pour accéder à l'appartement nouvellement créé dans votre bien du [Adresse 1], je vous remettrai un double des clefs de la nouvelle serrure dès son installation.

Cependant, je vous avise que la remise de ces clefs ne vaut en aucun cas reconnaissance de l'existence d'une servitude de passage, thèse que vous soutenez sans pour autant l'étayer et contre laquelle nous nous élevons depuis l'acquisition de mes parents en 1990. »

En tout état de cause, il convient de relever que l'enclave d'un fonds résulte de l'absence d'issue ou de l'insuffisance d'issue sur la voie publique dudit fonds.

L'état l'enclave ne peut donc pas concerner des appartements, situés aux étages d'un bien immobilier, ceux-ci étant nécessairement dépourvus d'issue sur la voie publique.

En conséquence de quoi, les époux [B] ne peuvent donc pas se prévaloir d'un quelconque état d'enclave de leur appartement situé au 2ème étage du bien immobilier sis [Adresse 1] pour justifier de reconnaissance d'un droit de passage. » ;

ALORS QUE, premièrement, le propriétaire dont le fonds n'a sur la voie publique aucune issue suffisante est fondé à réclamer le bénéfice d'une servitude légale de passage sur le fonds voisin à l'effet de faire cesser l'état d'enclave ; que si le caractère volontaire de l'enclavement fait obstacle à la revendication de cette servitude, il appartient au propriétaire du fonds servant de rapporter la preuve de ce que cet état résulte de la volonté du propriétaire du fonds dominant ou de son auteur ; qu'en affirmant en l'espèce qu'il appartenait à M. et Mme [B] de démontrer que l'état d'enclave ne résultait pas d'un fait volontaire de leur part, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation des articles 1353 et 682 du code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, n'est pas enclavé le fonds qui dispose d'un passage sur le fonds voisin, fût-ce au titre d'une simple tolérance ; qu'en affirmant que l'état d'enclave résultait en l'espèce de l'aménagement des étages par M. et Mme [B], quand l'utilisation du passage existant jusqu'alors sur le fonds des consorts [S] empêchait tout enclavement jusqu'à ce que ces derniers décident d'en faire cesser l'usage, la cour d'appel a violé l'article 682 du code civil ;

ALORS QUE, troisièmement, l'état d'enclave peut concerner aussi bien le fonds dans son ensemble qu'une partie de celui-ci ; qu'en l'espèce, les juges ont eux-mêmes constaté qu'il ne pouvait être accédé au deuxième étage du bâtiment de M. et Mme [B] que par un escalier extérieur et le passage existant sur le fonds voisin, le rez-de-chaussée et le premier étage étant occupés par un établissement bancaire ; qu'en excluant néanmoins l'état d'enclave au motif que le local du rez-de-chaussée disposait d'une issue suffisante sur la voie publique, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 682 du code civil ;

ET ALORS QUE, quatrièmement, l'état d'enclave peut concerner aussi bien le fonds dans son ensemble qu'une partie de celui-ci ; qu'en affirmant en l'espèce, par motif éventuellement adopté des premiers juges, que l'état d'enclave ne pouvait concerner les étages supérieurs d'un même bâtiment, la cour d'appel a violé l'article 682 du code civil.

ET ALORS QUE, cinquièmement, l'état d'enclave peut ne concerner qu'une partie seulement du fonds si la création d'une voie de communication avec la partie disposant d'un accès à la voie publique se heurte à un obstacle matériel ou juridique ; qu'en l'espèce, les juges ont eux-mêmes relevé que le rez-de-chaussée et le premier étage étaient occupés par un établissement bancaire qui avait seul un accès à la voie publique, cependant que le logement situé au deuxième étage, donné en location à un tiers, n'était accessible que par un escalier extérieur et le passage litigieux ; qu'en retenant malgré tout que M. et Mme [B] ne démontraient pas que les appartements situés au-dessus du local commercial ne pouvaient bénéficier de l'accès de l'établissement bancaire au moyen d'aménagements non disproportionnés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 682 du code civil.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 20-17.786
Date de la décision : 23/09/2021
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Troisième chambre civile, arrêt n°20-17.786 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles 1A


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 23 sep. 2021, pourvoi n°20-17.786, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.17.786
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