La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/09/2021 | FRANCE | N°20-14899

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 08 septembre 2021, 20-14899


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

NL4

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 septembre 2021

Cassation partielle

Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 529 F-D

Pourvoi n° G 20-14.899

Aides juridictionnelles totales en demande
au profit de Mme [U] et de M. [N].
Admissions du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 4 février 2020.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I

S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAM...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

NL4

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 septembre 2021

Cassation partielle

Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 529 F-D

Pourvoi n° G 20-14.899

Aides juridictionnelles totales en demande
au profit de Mme [U] et de M. [N].
Admissions du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 4 février 2020.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 SEPTEMBRE 2021

1°/ Mme [H] [U], veuve [N], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs, [S] [N], [Y] [N] et [Z] [N],

2°/ M. [T] [N],

agissant tous en qualité d'ayants droit de [C] [N],

tous domiciliés [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° G 20-14.899 contre l'arrêt rendu le 28 juin 2019 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à la société BNP Paribas Personal Finances, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Banque Solfea,

2°/ à la société BTSG, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], en la personne de M. [B] [R], pris en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Next génération France,

défenderesses à la cassation.

La société BNP Paribas Personal Finances a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Champ, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de Mme [U] et de M. [N], de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de la société BNP Paribas Personal Finances, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er juin 2021 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Champ, conseiller référendaire rapporteur, M. Girardet, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 28 juin 2019), [C] [N] et son épouse, Mme [H] [U] (les emprunteurs), démarchés à leur domicile, ont acquis de la société Next génération France (le vendeur) des panneaux photovoltaïques et un chauffe-eau thermodynamique et bénéficié d'un crédit souscrit auprès de la société Solfea, aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas Personal Finance (la banque). Les fonds ont été débloqués par la banque au profit du vendeur sur présentation d'un certificat de livraison signé par les emprunteurs le 6 mai 2013. Par jugement du 25 juin 2013, la liquidation judiciaire du vendeur a été prononcée et la société BTSG, prise en la personne de M. [R], a été désignée en qualité de liquidateur.

2. Les 27 et 28 février 2014, les emprunteurs, invoquant une falsification des signatures figurant dans l'offre de crédit et un défaut d'exécution des travaux de raccordement, ont assigné la banque et M. [R], es qualités, en nullité du contrat de prêt et subsidiairement en nullité des contrats de vente et de prêt. [C] [N] est décédé le [Date décès 1] 2017 et ses héritiers, M. [T] [N], Mme [H] [U] et [S], [Y] et [Z] [N], représentés par celle-ci, ont repris l'instance.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et quatrième moyens du pourvoi principal et sur le pourvoi incident, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

4. Mme [H] [U] et les héritiers de [C] [N] font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer la banque, alors :

« 2°/ que le prêteur qui verse les fonds sans vérifier préalablement la régularité et l'exécution du contrat de démarchage à domicile est privé de sa créance de restitution du capital emprunté ; qu'avant d'ouvrir un recours au profit de la banque, à raison du paiement de la dette d'autrui, les juges du fond devaient à tout le moins rechercher, comme les emprunteurs le demandaient formellement si une convention avait été régulièrement conclue avec le vendeur et que faute de se prononcer sur ce point, l'arrêt est à tout le moins entaché d'un défaut de base légale au regard des articles L. 121-21, L. 121-23 et L. 311-31 du code de la consommation dans sa version applicable à la cause, ensemble au regard des règles régissant le paiement de la dette d'autrui ainsi que des articles 1134 et 1326 anciens du code civil ;

3°/ qu'en tout cas, lorsqu'un contrat de crédit est souscrit accessoirement à contrat de vente et de prestation de service, l'organisme de crédit, qui débloque les fonds au profit du fournisseur, doit s'assurer de la réalisation complète du contrat ; que faute de se faire, l'organisme est privé des sommes dont il peut demander a priori restitution ; qu'avant de condamner les emprunteurs à rembourser les sommes prêtés, les juges du fond auraient dû rechercher, comme ceux-ci le demandaient formellement, si, au vu du certificat de livraison, la banque pouvait s'assurer de l'exécution complète du contrat comprenant notamment la mise en service du système photovoltaïque et son raccordement ; qu'en statuant de la sorte, les juges du fond ont violé les articles 1137 et 1147 anciens du code civil ensemble l'article L. 311-31 du code de la consommation dans sa version applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les articles L. 121-21 et L. 121-23 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 et l'article L. 311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

5. Il résulte de ces textes que, dans le cas d'un crédit affecté même informel, le prêteur est tenu, avant de verser les fonds, de s'assurer de la régularité formelle du contrat principal et de sa complète exécution.

6. Pour condamner solidairement Mme [H] [U] et les héritiers de [C] [N] à rembourser le capital prêté, l'arrêt retient, d'une part, après avoir comparé les signatures des emprunteurs et celles figurant sur l'offre de prêt, qu'ils n'en sont pas les signataires et que l'offre de prêt leur est inopposable, d'autre part, que les fonds ont bien été versés au vendeur au titre du contrat principal en toute connaissance des emprunteurs.

7. En se déterminant ainsi, sans rechercher si, avant de débloquer les fonds, la banque s'était assurée de la régularité du contrat de démarchage à domicile et de sa complète exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare l'offre de prêt émise par la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solféa inopposable à Mme [N] et aux ayants-droit de [C] [N], l'arrêt rendu le 28 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Banque Solféa aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit septembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour Mme [U] et M. [N], demandeurs au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QUE, après avoir justement constaté que faute pour M. et Mme [N] d'avoir signé l'offre de prêt, celle-ci devait être déclarée inopposable aux consorts [N], il a condamné solidairement les consorts [N] à payer à la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCES, venant aux droits de la Banque SOLFEA, la somme de 18.000 € ;

AUX MOTIFS QU' « il ressort des pièces versées aux débats que les fonds, à savoir le capital de 18.000 €, ont bien été versés à la Société NEXT GENERATION dans le cadre du contrat principal et ce en toute connaissance des époux [N] (bon de commande mentionnant des modalités de paiement à crédit, signature de l'attestation de fin de travaux demandant à la société SOLFEA de payer la somme de 18.000 € représentant le montant du crédit à la Société NEXT GENERATION, courriel du 7 juin 2013 de l'un des époux [N] mentionnant la réception de l'échéancier fin mai, déclaration de créances) ; qu'aussi Mme [N] et les ayants-droit de M. [N] seront condamnés à rembourser le capital prêté de 18.000 € à la BNP PARIBAS PF, le cas échéant sous déduction des échéances déjà réglées conformément à la demande de l'appelante ; qu'en revanche, cette somme sera de droit assortie de l'intérêt au taux légal en application des dispositions de l'article 1231-7 du Code civil » ;

ALORS QUE, premièrement, dès lors qu'ils constataient l'absence de prêt, les juges du fond ne pouvaient entrer en voie de condamnation à l'égard des consorts [N] sans préciser le fondement juridique de cette condamnation ; qu'en se bornant à énoncer que les fonds avaient été remis à la Société NEXT GENERATION en toute connaissance des époux [N], constatation de pur fait, sans autre précision, les juges du fond ont laissé incertain le fondement juridique de leur condamnation ; que ce faisant, les juges du fond ont violé l'article 12 du Code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, dès lors qu'elle n'est pas rapprochée d'une règle de droit, la seule constatation que les fonds auraient été versés à la Société NEXT GENERATION en connaissance des époux [N] ne peut constituer un fondement juridique ; qu'en statuant de la sorte, les juges du fond ont violé l'article 12 du Code de procédure civile ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QUE, après avoir justement constaté que faute pour M. et Mme [N] d'avoir signé l'offre de prêt, celle-ci devait être déclarée inopposable aux consorts [N], il a condamné solidairement les consorts [N] à payer à BNP PARIBAS PERSONAL FINANCES, aux droits de la Banque SOLFEA, la somme de 18.000 € ;

AUX MOTIFS QU' « il ressort des pièces versées aux débats que les fonds, à savoir le capital de 18.000 €, ont bien été versés à la Société NEXT GENERATION dans le cadre du contrat principal et ce en toute connaissance des époux [N] (bon de commande mentionnant des modalités de paiement à crédit, signature de l'attestation de fin de travaux demandant à la société SOLFEA de payer la somme de 18.000 € représentant le montant du crédit à la Société NEXT GENERATION, courriel du 7 juin 2013 de l'un des époux [N] mentionnant la réception de l'échéancier fin mai, déclaration de créances) ; qu'aussi Mme [N] et les ayants-droit de M. [N] seront condamnés à rembourser le capital prêté de 18.000 € à la BNP PARIBAS PF, le cas échéant sous déduction des échéances déjà réglées conformément à la demande de l'appelante ; qu'en revanche, cette somme sera de droit assortie de l'intérêt au taux légal en application des dispositions de l'article 1231-7 du Code civil » ;

ALORS QU'à défaut d'une règle particulière, le paiement de la dette d'autrui n'ouvre aucun recours au profit de celui qui a payé à l'encontre de celui dont la dette a été éteinte ; qu'à supposer que la Cour d'appel ait fondé la condamnation sur la circonstance qu'il y avait eu paiement par la banque de la dette de M. et Mme [N] à l'égard de la Société NEXT GENERATION, de toute façon, à défaut d'une règle particulière, ce paiement n'ouvrait aucun droit au profit de la banque ; qu'à cet égard, l'arrêt a été rendu en violation des règles régissant le paiement de la dette d'autrui, des articles 1134 et 1326 ancien du code civil [1103 et 1376 nouveaux] et de l'article 12 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QUE, après avoir justement constaté que faute pour M. et Mme [N] d'avoir signé l'offre de prêt, celle-ci devait être déclarée inopposable aux consorts [N], il a condamné solidairement les consorts [N] à payer à BNP PARIBAS PERSONAL FINANCES, aux droits de la Banque SOLFEA, la somme de 18.000 € ;

AUX MOTIFS QU' « il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes subsidiaires en nullité du bon de commande et résolution de plein droit du contrat de prêt et leurs conséquences, le jugement étant infirmé de ces chefs ; que sur les conséquences de l'inopposabilité de l'offre de prêt, il ressort des pièces versées aux débats que les fonds, à savoir le capital de 18.000 €, ont bien été versés à la Société NEXT GENERATION dans le cadre du contrat principal et ce en toute connaissance des époux [N] (bon de commande mentionnant des modalités de paiement à crédit, signature de l'attestation de fin de travaux demandant à la société SOLFEA de payer la somme de 18.000 € représentant le montant du crédit à la Société NEXT GENERATION, courriel du 7 juin 2013 de l'un des époux [N] mentionnant la réception de l'échéancier fin mai, déclaration de créances) ; qu'aussi Mme [N] et les ayants-droit de M. [N] seront condamnés à rembourser le capital prêté de 18.000 € à la BNP PARIBAS PF, le cas échéant sous déduction des échéances déjà réglées conformément à la demande de l'appelante ; qu'en revanche, cette somme sera de droit assortie de l'intérêt au taux légal en application des dispositions de l'article 1231-7 du Code civil » ;

ALORS QUE, premièrement, le seul fait que M. et Mme [N] aient eu connaissance que des fonds aient été remis par la banque entre les mains de l'installateur ne peut constituer une faute ; que s'il fallait considérer que l'arrêt s'est fondé sur une règle à responsabilité quasi délictuelle, celui-ci devrait être censuré pour violation de l'article 1382 ancien du Code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, le prêteur qui verse les fonds sans vérifier préalablement la régularité et l'exécution du contrat de démarchage à domicile est privé de sa créance de restitution du capital emprunté ; qu'avant d'ouvrir un recours au profit de la banque, à raison du paiement de la dette d'autrui, les juges du fond devaient à tout le moins rechercher, comme M. et Mme [N] le demandaient formellement (conclusions du 6 décembre 2017, de la p. 7 in fine à la p. 9, avant-dernier §, et p. 10 § 4) si une convention avait été régulièrement conclue avec la Société NEXT GENERATION et que faute de se prononcer sur ce point, l'arrêt est à tout le moins entaché d'un défaut de base légale au regard des articles L.121-21,L.121-23 et L. 311-31 du Code de la consommation dans sa version applicable à la cause, ensemble au regard des règles régissant le paiement de la dette d'autrui ainsi que des articles 1134 et 1326 ancien du code civil [1103 et 1376 nouveaux] ;

ALORS QUE, troisièmement, et en tout cas, lorsqu'un contrat de crédit est souscrit accessoirement à contrat de vente et de prestation de service, l'organisme de crédit, qui débloque les fonds au profit du fournisseur, doit s'assurer de la réalisation complète du contrat ; que faute de se faire, l'organisme est privé des sommes dont il peut demander a priori restitution ; qu'avant de condamner les consorts [N] à rembourser les sommes prêtés, les juges du fond auraient dû rechercher, comme M. et Mme [N] le demandaient formellement (conclusions du 6 décembre 2017, p. 9 in fine et p. 10 § 1-4), si, au vu du certificat de livraison, le prêteur pouvait s'assurer de l'exécution complète du contrat comprenant notamment la mise en service du système photovoltaïque et son raccordement ; qu'en statuant de la sorte, les juges du fond ont violé les articles 1137 et 1147 anciens du Code civil ensemble l'article L. 311-31 du Code de la consommation dans sa version applicable à la cause ;

ET ALORS QUE, quatrièmement, les juges du second degré ont considéré que, les époux [N] n'ayant pas signé l'offre de prêt, elle leur était inopposable, puis ont considéré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les demandes subsidiaires en nullité du bon de commande et résolution de plein droit du contrat de prêt et leurs conséquences, et ont fait droit à la demande de la banque en condamnation des époux [N] au remboursement du capital prêté ; qu'en statuant de la sorte alors que ces derniers demandaient à titre principal de « débouter la Société BNP PARIBAS [?] de toutes ses demandes, fins et conclusions » (conclusions du 6 décembre 2017, p. 10 § 7), la Cour d'appel a dénaturé les conclusions des consorts [N] en violation de l'article 4 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(plus subsidiaire)

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QUE, après avoir justement constaté que faute pour M. et Mme [N] d'avoir signé l'offre de prêt, celle-ci devait être déclarée inopposable aux consorts [N], il a condamné solidairement les consorts [N] à payer à BNP PARIBAS PERSONAL FINANCES, aux droits de la Banque SOLFEA, la somme de 18.000 € ;

AUX MOTIFS QU' « il ressort des pièces versées aux débats que les fonds, à savoir le capital de 18.000 €, ont bien été versés à la Société NEXT GENERATION dans le cadre du contrat principal et ce en toute connaissance des époux [N] (bon de commande mentionnant des modalités de paiement à crédit, signature de l'attestation de fin de travaux demandant à la société SOLFEA de payer la somme de 18.000 € représentant le montant du crédit à la Société NEXT GENERATION, courriel du 7 juin 2013 de l'un des époux [N] mentionnant la réception de l'échéancier fin mai, déclaration de créances) ; qu'aussi Mme [N] et les ayants-droit de M. [N] seront condamnés à rembourser le capital prêté de 18.000 € à la BNP PARIBAS PF, le cas échéant sous déduction des échéances déjà réglées conformément à la demande de l'appelante ; qu'en revanche, cette somme sera de droit assortie de l'intérêt au taux légal en application des dispositions de l'article 1231-7 du Code civil » ;

ALORS QUE, premièrement, en application des articles 873 et 1309 du Code civil, les dettes du de cujus se divisent entre les héritiers ; qu'en condamnant solidairement les héritiers de M. [N] avec Mme [U], les juges du fond ont violé les articles 873 et 1309 du nouveaux du Code civil ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, et en tout état de cause, dès lors que la solidarité ne se présume pas, les juges du fond devaient préciser sur le fondement de quelle règle les consorts [N] pouvaient être considérés comme solidaires entre eux ; que l'arrêt souffre d'un défaut de base légale au regard de l'article 1202 et 1220 ancien du Code civil, devenu l'article 1310. Moyen produit par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société BNP Paribas Personal Finances, demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable l'action engagée par les consorts [N] ;

Aux motifs que « sur la recevabilité des demandes, la société Solféa soutenait en première instance l'irrecevabilité de l'action engagée par les époux [N] pour défaut de déclaration de leur créance auprès du mandataire liquidateur, moyen écarté par le tribunal au vu de la production d'une déclaration en date du 18 septembre 2013 ; que devant la cour la BNP Paribas PF, rappelant que la société Next Génération a été placée en liquidation judiciaire le 25 juin 2013, soutient désormais que l'action en nullité ou résolution du contrat principal, exercée postérieurement par les époux [N] par assignation du 27 février 2014, serait irrecevable comme se heurtant à la règle de l'interdiction des actions tendant au paiement d'une somme d'argent, dès lors que la demande en annulation ou de résolution du contrat principal emporte de plein droit des restitutions par équivalent, et dont l'inexécution se résout par des dommages-intérêts ; qu'il sera préalablement observé que la demande principale des époux [N] en première instance et de Mme [N] en son nom et ès qualités devant la cour est l'absence de créance de la société Solféa en raison de l'absence de prêt valablement signé, la demande de nullité du bon de commande et la résolution de plein droit du crédit affecté n'étant que subsidiaires ; que par ailleurs la règle de l'interdiction des poursuites individuelles énoncée par l'article L. 622-21 du code de commerce n'interdit pas d'agir en nullité ou résolution d'un contrat pour une cause autre que le défaut de paiement d'une somme d'argent ; qu'en outre, l'action en nullité ou résolution des contrats exercée par les époux [N] ne saurait être regardée comme tendant indirectement au paiement d'une somme d'argent, dès lors que la créance de restitution découlant de l'annulation ou la résolution d'un contrat ne naît qu'au jour où le juge prononce l'annulation ou sa résolution et qu'elle n'est donc pas née antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective ; qu'il convient donc pour ce motif d'écarter la fin de nonrecevoir opposée par la banque et de confirmer le jugement sur ce chef » (arrêt, § 1 et s) ;

Et aux motifs éventuellement adoptés que « pour soutenir l'irrecevabilité de l'action engagée par les époux [N], la banque Solfea soutient que les demandeurs ont appelé à la cause la mandataire liquidateur mais sans pour autant déclarer leur créance ; que toutefois, il résulte de la pièce numéro 17 du dossier des demandeurs que ceux-ci ont produit leur créance le 18 septembre 2013 dans la procédure collective de la société Next Generation » (jugement, p. 5, § 1 et s.) ;

1°) Alors, d'abord, que le jugement d'ouverture interdit toute action en justice de la part des créanciers dont la créance tend à la condamnation, même indirecte, du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; que cette interdiction s'applique aux actions en nullité ou en résolution d'un contrat de vente, les résolutions consécutives à l'anéantissement de ce contrat se traduisant notamment par l'obligation de remboursement du prix de vente par le vendeur faisant l'objet d'une procédure collective ; qu'en jugeant pourtant que l'action en anéantissement du contrat principal ne se heurtait pas à la règle de l'interdiction des poursuites individuelles, la cour d'appel a violé l'article L. 622-21 du code de commerce ;

2°) Alors, ensuite, que le jugement d'ouverture interdit toute action en justice de la part des créanciers, antérieurs ou postérieurs non privilégiés, dont la créance n'est pas née régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période ; qu'en déclarant recevable l'action des consorts [N], se fondant sur la seule circonstance que la créance de restitution découlant de l'anéantissement éventuel du contrat principal naîtrait au jour du jugement prononçant cet anéantissement et serait dès lors postérieure au jugement d'ouverture, sans rechercher si cette créance postérieure serait, en outre, née pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie par le débiteur durant cette période, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-17 et L. 622-21 du code de commerce ;

3°) Alors, enfin, que la déclaration de sa créance à la procédure par le créancier, si elle permet la reprise des instances interrompues par le jugement d'ouverture, est sans effet sur la règle de l'interdiction des poursuites individuelles ; qu'en jugeant, par des motifs éventuellement adoptés des premiers juges, que l'action des époux [N] était recevables dès lors que ces derniers avaient déclarés leur créance à la procédure collective, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 622-22 du code de commerce et, par refus d'application, l'article L. 622-21 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 20-14899
Date de la décision : 08/09/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 28 juin 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 08 sep. 2021, pourvoi n°20-14899


Composition du Tribunal
Président : Mme Duval-Arnould (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.14899
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award