CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 juillet 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme AUROY, conseiller doyen faisant fonction de président
Décision n° 10594 F
Pourvoi n° A 20-10.683
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 7 JUILLET 2021
M. [S] [L], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 20-10.683 contre l'arrêt rendu le 24 octobre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-1), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [G] [V], domiciliée [Adresse 2], prise en qualité de représentante légale de [F] [L],
2°/ au procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Azar, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. [L], de la SCP Ghestin, avocat de Mme [V], après débats en l'audience publique du 26 mai 2021 où étaient présents Mme Auroy, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Azar, conseiller référendaire rapporteur, M. Hascher, conseiller, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [L] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [L] et le condamne à payer à Mme [V] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour M. [L]
M. [S] [L] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé l'irrecevabilité de son action en contestation de paternité.
AUX MOTIFS QUE «sur la recevabilité de l'action de M. [S] [L] : Dans le cadre de la section relative aux contestations de la filiation, il résulte de l'article 333 du code civil que lorsque la possession d'état est conforme au titre, seul peuvent agir l'nfant, | un des père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable ; qu'il est précisé que I 'action se prescrit par cinq ans à compter du jour où la possession d'état a cessé ou du décès du parent dont le lien de filiation est contesté ; que le second alinéa ajoute que nul, à l'exception du ministère public, ne peut contester la filiation lorsque la possession d'état conforme au tiffe a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance si elle a été faite ultérieurement ; que sur ce fondement juridique le parquet général et Mme [G] [V] demandent que l'action de M. [S] [L] soit déclarée irrecevable ; que tous deux rappellent que la paternité de M. [S] [L] résulte de la reconnaissance prénatale en date du 31 Août 2004, qu'il a habité avec l'enfant et Mme [G] [V] jusqu'en 2008 et que par la suite, les modalités de l'exercice de l'autorité parentale ont été judiciairement fixées par jugement en date du 23 mars 2012 ; que l' arrêt en date du 21 mai 2013 a confirmé le dit jugement non sans rejeter les demandes de sursis à statuer formulées au nom d'une démarche de M. [S] [L] auprès du Procureur de la République en vue de contester sa paternité ; qu'il y est explicitement fait référence à un courrier daté du 17 janvier 2012 dans lequel il réclamait la saisine du Tribunal de Grande Instance pour rétablir la vérité sur la filiation de [F] ; que ces extraits de décision judiciaire confirment a contrario qu'aucune remise en cause de la paternité n'était de mise avant 2012 - avec donc bien plus de cinq ans de possession d'état opposable à M. [S] [L] ; que Mme [G] [V] prend soin d'ajouter des attestations en vertu desquelles M. [S] [L] a choisi le parrain de [F], ramenait [F] auprès des grands-parents après la séparation d'avec Mme [G] [V], était présent avec Madame [G] [V] et [F] pour l'arbre de Noël - autant d'éléments qui confortent la possession d'état ; qu'en réponse, M. [S] [L] dément avoir eu une place de père vis à vis de [F] après la séparation datée précisément de septembre 2008 selon l'attestation du bailleur produite ; qu'il communique une attestation d'une voisine selon laquelle il n'a jamais été vu avec un enfant ; qu'il rappelle que dès le jugement de mars 2012 il avait pu verbaliser ses doutes sur sa paternité doute à l'origine de l'exercice exclusif de l'autorité parentale ; qu'il verse plusieurs pièces médicales relatives à ses troubles mnésiques en suite de son accident de travail subi en 1995 (certificat d'un neurologue en 2011, compte rendu de consultation neurologique d'octobre 2012, synthèse d'évaluation clinique datée d'octobre 2014, certificat de son psychiatre de décembre 2014) et une attestation d'un hypnothérapeute selon laquelle son mal être pourrait être - entre autres causes ? lié au rejet d'une paternité non désirée par lui outre la quasi-certitude de ne pas en être l'auteur ; qu'au-delà de la difficulté pour M. [S] [L] de se concevoir père de [F] alors que sa stérilité est aujourd'hui médicalement constatée, difficulté profonde qui le conduit à mettre en doute la fiabilité d'une expertise génétique, il convient de rappeler les règles juridiques applicables en la matière, conçues par le législateur pour protéger les enfants des actions relatives à leur filiation, quelle que soit la vérité biologique ; que tel est précisément l'objet de la prescription instituée par l'article 333 du code civil selon laquelle aucune action en contestation de paternité ne saurait être intentée si le titre est corroboré pat la possession d'état pendant cinq ans ; que même si M. [S] [L] a pu exprimer des doutes devant le juge aux affaires familiales en 2012, ce qui résulte du jugement produit aux débats aucun élément antérieur permet de retenir une possession dû état de moins de cinq ans de sorte que l'action en contestation de paternité ne peut qu'être déclarée irrecevable.
1°) ALORS QUE l'ordonnance n°2005-759 du 4 juillet 2005 est entrée en vigueur le 1er juillet 2006, de sorte que le délai de cinq ans, prévu par l'article 333 alinéa 2 du code civil, durant lequel la possession d'état, conforme au titre, doit être caractérisée, afin de faire obstacle à l'action en contestation de paternité, court à compter de cette date, lorsque la naissance de l'enfant lui est antérieure ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que l'enfant [F] est né le [Date naissance 1] 2004 ; qu'en faisant application de la règle, instaurée par la loi n°2005-759 du 4 juillet 2005, suivant laquelle lorsque la possession d'état conforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance de l'enfant, pour considérer que « bien plus de cinq ans de possession d'état « était » opposable à Monsieur [S] [L] », sans tenir compte de ce que, l'enfant étant né et ayant été reconnu en 2004, le délai de cinq ans ne pouvait courir qu'à compter du 1er juillet 2006, la cour d'appel a violé l'article 2 du code civil, ensemble l'article 333, alinéa 2, du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 ;
2°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'ordonnance n°2005-759 du 4 juillet 2005 substituant le délai de prescription quinquennale au délai de prescription trentenaire est entrée en vigueur le 1er juillet 2006, de sorte que le délai de cinq ans prévu par l'alinéa 2 de l'article 333 du code civil ne court, pour les enfants nés ou reconnus antérieurement, qu'à compter de cette date ; que l'irrecevabilité de l'action en contestation de paternité tirée d'une possession d'état de cinq ans, conforme à un titre antérieur au 1er juillet 2006, suppose donc que soit caractérisée une possession d'état couvrant la période comprise entre le 1er juillet 2006 et le 1er juillet 2011 ; qu'en retenant, pour déclarer l'action de M. [S] [L] irrecevable, une possession d'état de plus de cinq années, sans déterminer précisément la période au cours de laquelle elle considérait qu'était caractérisée cette possession d'état, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de vérifier que la possession d'état retenue avait duré au moins jusqu'au 1er juillet 2011, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 du code civil, ensemble l'article 333, alinéa 2, du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 ;
3°) ALORS QUE en toute hypothèse, la possession d'état de cinq années, prévue par l'article 333 du code civil, qui doit être continue, paisible, publique et non équivoque, est caractérisée par une réunion suffisante de faits établissant que l'enfant porte le nom de celui dont on le dit issu, qu'il est traité comme son propre enfant et qu'il apparaît comme tel aux yeux des tiers ; qu'elle cesse dès que l'auteur de la contestation cesse de se comporter comme le père de l'enfant ; qu'en relevant que M. [L] n'avait pas expressément contesté la paternité de l'enfant [F] avant 2012, qu'il avait habité avec l'enfant jusqu'en 2008, que les modalités de l'exercice de l'autorité parentale avaient été judiciairement fixées par jugement du 23 mars 2012, confirmé par un arrêt du 21 mai 2013 faisant référence à un courrier de M. [L] dans lequel il réclamait la saisine du tribunal de grande instance pour rétablir la vérité sur la filiation de [F], qu'il résultait des attestations produites que M. [L] avait choisi le parrain de [F], qu'il ramenait [F] auprès des grands parents « après la séparation », était présent avec la mère de l'enfant et ce dernier pour l'arbre de Noël, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une possession d'état de cinq ans durant la période du 1er juillet 2006 au 1er juillet 2011, a violé les articles 311-1 et 333 alinéa 2 du code civil.
4°) ALORS QU'en affirmant que l'enfant [F] avait la possession d'état de fils de M. [S] [L] sans évoquer, même sommairement, la vision interne et réciproque du lien de parenté entre l'enfant et le père, et ainsi, sans procéder à une recherche sur ce point qui lui était demandée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 311-1 et 333 du code civil ;
5°) ALORS QU'en retenant qu'aucun élément antérieur à sa contestation de paternité ne permet de retenir une possession d'état de moins de cinq ans, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le fait que l'enfant se présentait sur les réseaux sociaux comme étant [F] [H] et non pas [F] [L] n'excluait pas l'existence d'une possession d'état non équivoque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 311-1 et 333 du code civil.