CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 juin 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10493 F
Pourvoi n° Z 19-23.098
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [B].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 15 janvier 2020.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUIN 2021
M. [M] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 19-23.098 contre l'arrêt rendu le 25 juillet 2019 par la cour d'appel de Versailles (2e chambre, 2e section), dans le litige l'opposant à Mme [P] [B], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Azar, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [F], de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de Mme [B], après débats en l'audience publique du 13 avril 2021 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Azar, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [F] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [F]
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué, ordonnant le maintien de l'interdiction de sortie du territoire français de [U] [F], né le [Date naissance 1] 2014, rappelant que les deux parents exercent en commun l'autorité parentale et maintenant la fixation de la résidence de l'enfant au domicile du père Monsieur [M] [F], d'AVOIR dit que la fréquence et la durée des périodes au cours desquelles Madame [P] [B] peut accueillir [U] sont déterminées à l'amiable entre les parents, et qu'à défaut d?un tel accord, Madame [P] [B] rencontrera [U] : Jusqu'au 31 mars 2018 inclus : a) en dehors des périodes de vacances scolaires : chaque samedi des semaines paires du calendrier de 9 h à 18 h ; b) pendant les périodes de vacances scolaires ou de congés : chaque samedi des semaines paires du calendrier durant la première moitié de toutes les vacances scolaires les années paires et chaque samedi des semaines paires du calendrier durant la seconde moitié de toutes les vacances scolaires les années impaires, de 9 h à 18 h ; Puis à compter du 1er avril 2018 : a) en dehors des périodes de vacances scolaires : chaque fin de semaine paire du calendrier du vendredi à la sortie des classes au dimanche 18 h ; b) pendant les périodes de vacances scolaires ou de congé : chaque fin de semaine paire du calendrier durant la première moitié de toutes les vacances scolaires les années paires et chaque fin de semaine paire du calendrier durant la seconde moitié de toutes les vacances scolaires les années impaires, du vendredi à la sortie des classes au dimanche 18 h ;
AUX MOTIFS QUE « seule la recherche du meilleur intérêt de [U], âgé de 4 ans, selon l'article 373-2-6 du code civil, doit guider la fixation du droit de visite et d'hébergement de la mère, étant rappelé que selon l'article 373-2 alinéa 2 du code civil, chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l'enfant et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent ; que lorsque le juge se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, et plus particulièrement sur le droit de visite et d'hébergement, il prend notamment en considération, selon l'article 373-2-11 du code civil : 1° la pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu'ils avaient pu antérieurement conclure, 2° les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1, 3°
l'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre, 4° le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l'âge de l'enfant, 5° les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l'article 373-2-12, 6° les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre ; que par des motifs dont les débats devant la Cour n'ont pas altéré la pertinence et qu'il convient d'adopter, le premier juge a fait une juste application des règles de droit, comme une exacte appréciation des faits et documents de l'espèce, en considérant qu'il est primordial pour l'équilibre et l'épanouissement de l'enfant qu'il ait des relations stables et sereines tant avec son père qu'avec sa mère et en organisant de manière très progressive un simple droit de visite durant six mois puis un droit de visite et d'hébergement au profit de la mère ; qu'il ressort en revanche des termes du rapport établi par le service d'assistance éducative en milieu ouvert le 23 juillet 2018 que M. [F], qui reproche la sporadicité des visites de la mère, a refusé depuis le mois de janvier 2018 de présenter l'enfant à cette dernière dont il rappelle qu'elle s'est radicalisée en juillet 2015 et mariée religieusement avec un homme de plus de 25 ans son aîné âgé de 47 ans, tous deux fichés « S » durant deux ans et demi jusqu'en 2018, date à laquelle la mesure de surveillance a été levée, et de respecter les droits de cette dernière ; que le juge des enfants après avoir rappelé à M. [F] sa responsabilité parentale et les conséquences pour [U] d'une rupture prolongée de liens avec sa mère, a ordonné la main levée de la mesure d'assistance éducative le 23 avril 2019 en raison de « l'ineffectivité » de la mesure, M. [F] faisant obstacle à l'exercice de la mesure et à une observation du lien mère/enfant et [U] étant privé de lien avec sa mère ; que le fait que Mme [B] ait partagé sur sa page « Facebook » la publication d'un livre répertoriant 40 invocations religieuses à destination d'enfants musulmans n'étant pas suffisant pour rapporter la preuve d'un risque de prosélytisme radical auquel l'enfant serait exposé en présence de la mère durant l'exercice de son droit de visite et d'hébergement ; qu'ainsi, l'intérêt de [U] étant d'entretenir des liens avec sa mère dont il n'est pas prouvé qu'elle constitue un danger pour lui et qui a bénéficié d'un droit de visite médiatisé pour une durée de six mois auquel M. [F] a mis unilatéralement fin, ce dernier sera donc débouté de sa demande et le jugement confirmé du chef du droit de visite et d'hébergement accordé à la mère » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DU JUGEMENT QUE « en l'espèce, il est constant que les parents sont séparés depuis mai 2015 dans un climat très conflictuel où il est argué de violence également et ce alors que [U] n'était âgé que de six mois et que l'enfant est demeuré au domicile de la grand-mère paternelle où résidait avant le couple ; que suite à la saisine en urgence en la forme des référés par le Procureur de la République de [Localité 1] aux fins d'interdiction pour l'enfant de quitter le territoire national, le Juge aux affaires familiales a maintenu la résidence de [U] chez son père où il bénéficie de la présence de la grand-mère paternelle, fixé un simple droit de visite hebdomadaire au profit de Madame [P] [B] et ordonné l'inscription de l'enfant s'agissant de l'interdiction de quitter le territoire national ; que parallèlement, le Juge des enfants du Tribunal de Grande Instance de Chartres a été saisi et depuis le jugement du 7 septembre 2016 une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert est ordonnée, outre l'interdiction provisoire de sortie du territoire français ; que la situation revient suite à la nouvelle saisine de Madame [P] [B] afin de solliciter initialement le transfert de la résidence de [U] à son domicile, demande qu'elle abandonne pour le moment, conduisant à la décision en date du 14 février 2017 qui, dans l'attente de retour de l'enquête sociale, maintenait la résidence de l'enfant au domicile de son père et organisait un droit de visite médiatisé durant 6 mois pour Madame [P] [B] ; qu'à l'issue de l'audience, le maintien de la résidence de [U] auprès de son père, lequel vit de nouveau avec l'enfant au domicile de la grand-mère paternelle, est sollicité par les deux parents, en l'état s'agissant de Madame [P] [B] qui a pris en compte les conclusions de l'enquête sociale ; que les parents demeurent en désaccord quant aux modalités de rencontres mère-fils et aux éléments portant restriction des droits maternels, Madame [P] [B] contestant toute radicalisation et velléité de départ avec l'enfant à l'étranger alors que Monsieur [M] [F] rappelle avoir été contacté de multiples reprises par les services généraux et souhaite protéger son fils ; que le compte-rendu de l'Espace Rencontres a été déposé le 23 août 2017 et il mentionne que la situation s'est mise en place tardivement en juillet que quatre rencontres ont été programmées et que Madame [P] [B] a pu voir son enfant de février à juin avant l'intervention du service, de sorte qu'il appartient aux parents de proposer ce meilleur accord en audience ; qu'en effet, Madame [P] [B] a pu en accord avec Monsieur [M] [F] voir [U] au domicile de la grand-mère paternelle ; que le rapport d'enquête sociale en date du 23 juillet 2017 a été déposé le 8 août 2017 au greffe du juge aux affaires familiales ; qu'il conclut que « Il apparaît deux parents qui se sont connus très jeunes et qui n'ont pas réellement vécu de vie de couple puisqu'ils étaient hébergés chez les parents de Monsieur et ne partageaient rien ; ce dernier travaillait ou sortait de son côté pendant que Madame restait seule à la maison. [U] est arrivé dans ce contexte, sans réflexion préalable de leur part. Ils sont aujourd'hui tous deux dépendants soit de parents, soit d'un conjoint, sans charges fixes pour l'un ni l'autre. Leurs fragilités respectives relèvent d'un processus attardé d'adolescence et impliquent le maintien de la mesure éducative mise en place lors du dernier jugement. Il apparaît une mère qui dit avoir voulu retrouver ses origines musulmanes du côté de son père et s'être tournée volontairement vers la religion islamique avant de rencontrer son compagnon. Ce dernier et elle-même sont aujourd'hui fichés S et on peut comprendre les inquiétudes de Monsieur quant aux incertitudes que représente cette radicalisation. Elle semble toutefois attachée à son enfant et s'est montrée jusque-là volontaire pour maintenir le lien et traverser l'[Localité 2] toutes les deux ou trois semaines. Toutefois le contexte de visites ne peut rester en l'état et sa demande de voir son fils en dehors de la famille paternelle est compréhensible. Les visites médiatisées pourraient être élargies à deux heures par quinzaine. Il apparaît un père qui n'a pas encore su couper le lien parental et qui retrouve la sécurité du nid familial à chaque difficulté de sa vie. Pourtant, il a souligné avoir grandi depuis la naissance de son fils et on ne peut que l'encourager sur cette voie de l'autonomie. Ses inquiétudes sont à prendre en compte par rapport à l'avertissement des renseignements généraux sur la protection de son garçonnet. Il nous semble important que les visites restent encadrées pour le moment et que l'interdiction de sortie du territoire soit maintenue. Il apparait un petit garçon qui a besoin de ses deux parents pour grandir, et quels que soient les engagements de sa mère, sa construction passe aussi par les rapports privilégiés qu'il aura avec elle. Devant l'incertitude de l'orientation de Madame et de son compagnon, il semble préférable que cette relation reste encadrée pour le moment. La figure référente de [U] depuis sa naissance est celle de sa grand-mère, qui est dans la réalité des besoins d'un enfant et attentive à l'évolution et au bon développement de son petit-fils. Peut-être qu'il serait bon pour [U], le temps que la situation de ses parents se stabilise, du côté de Madame dans un choix d'engagement de sa religion, et du côté de Monsieur dans son accès à l'autonomie et sa gestion adulte et responsable du quotidien, qu'il reste dans son univers actuel stable et centré autour de lui, c'est-à-dire chez ses grands-parents. Sa rentrée prochaine à l'école va représenter un changement important dans sa vie de petit garçon et on peut s'interroger sur un changement de lieu de vie et un éloignement de celle qui a toujours su être présente à ses yeux d'enfant. Dans l'intérêt de chacun, il est primordial que les parents arrivent à communiquer autour de leur enfant, et que Madame qui ne se dit pas radicalisée, arrive à le prouver à Monsieur. Celui-ci pourrait alors petit à petit reprendre confiance dans ses qualités de mère qui devraient primer sur son orientation fondamentale. L'autorité parentale peut continuer à être exercée par les deux parents, soucieux l'un et l'autre du bien-être de leur enfant. » ; qu'il résulte des éléments de l'affaire que les liens mère-fils se sont mis en place que très difficilement, du fait de la séparation parentale aux 6 mois de [U] et de l'irrégularité de Madame [P] [B] dans les visites amiables envisagées au domicile de la grand-mère paternelle puis par suite des inquiétudes du père eu égard à la conversion religieuse de la mère et ses répercussions ; qu'à ce jour, il est manifeste que Madame [P] [B] entend être présente dans la vie de son fils et qu'elle s'investit auprès de lui et dans les mesures mises en place ; que toutefois, le contexte de la conversion religieuse de la mère et les informations communiquées au père ont cristallisé un contentieux entre les parents et des craintes persistantes se sont ajoutées aux liens maternels déjà distendus avec l'enfant ; que dans ce contexte, alors qu'il ressort des éléments du dossier que la grand-mère paternelle est une personne ressource et l'élément de stabilité dans la vie de ce petit garçon, il est évident qu'il convient de maintenir la résidence de [U] au domicile de son père ; que la mise en place parallèlement de mesure d'assistance éducative permettant à chacun des père et mère de trouver sa place auprès de l'enfant ; qu'il est en effet primordial pour l'équilibre et l'épanouissement de [U] qu'il ait des relations stables et sereines tant avec son père qu'avec sa mère ; que cependant, le droit de visite et d'hébergement maternel apparaît comme étant prématuré eu égard aux incertitudes qui entourent la situation de Madame [P] [B] et qu'il est nécessaire de mettre en place dans un premier temps des relations régulières selon des modalités progressives et sûres, la mesure d'interdiction de quitter le territoire national étant parallèlement maintenue ; qu'ainsi, il convient d'organiser de manière très progressive un simple droit de visite puis un droit de visite et d'hébergement de la mère durant les samedis des semaines paires de 9 heures à 18 heures jusqu'au 31 mars 2018 inclus puis chaque fin de semaine paire du calendrier du vendredi à la sortie des classes au dimanche 18 heure, y compris durant la moitié des vacances scolaires comme il sera précisé au dispositif ; qu'il appartiendra ensuite à la partie la plus diligente, en fonction du déroulement et de la mise en place des liens mère-fils ainsi que du déroulement des mesures éducatives, de ressaisir le juge aux affaires familiales aux fins de mettre en place, le cas échéant d'autres modalités du droit d'accueil maternel ; qu'il convient de rappeler que la présente décision s'applique à défaut de meilleur accord des parents et que ces derniers pourront convenir librement d'autres modalités d'exercice de la vie de leur enfant » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en retenant, pour débouter Monsieur [F] de sa demande tendant à l'instauration dans un premier temps, d'un droit de visite médiatisé au profit de la mère, que celle-ci avait bénéficié d'un droit de visite médiatisé pour une durée de six mois auquel Monsieur [F] aurait mis unilatéralement fin (arrêt, page 5, § 6), cependant qu'aux termes des motifs du jugement (page 4, § 5) qu'elle déclare expressément adopter, le compte rendu de l'Espace Rencontre déposé le 23 août 2017 mentionne que la situation s'est mise en place tardivement en juillet, de sorte que quatre rencontre seulement ont été programmées, que Madame [B] a pu, en accord avec Monsieur [F], voir son enfant de février à juin au domicile de la grand-mère paternelle avant l'intervention du service, « de sorte qu'il appartient aux parents de proposer ce meilleur accord à l'audience », la Cour d'appel s'est contredite et a, partant, violé l'article 455 du Code de procédure Civile ;
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en affirmant, pour rejeter la demande de Monsieur [F] tendant à l'instauration, dans un premier temps, d'un droit de visite médiatisé au profit de Madame [B], que celle-ci avait bénéficié d'un droit de visite médiatisé pour une durée de six mois auquel Monsieur [F] aurait unilatéralement mis fin, sans même indiquer les éléments de preuve sur lesquels elle se serait appuyée pour retenir un tel fait, tiré de ce que le père aurait unilatéralement mis fin au droit de visite médiatisé de six mois prévu au bénéfice de la mère et de l'enfant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure Civile.