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27/05/2021 | FRANCE | N°19-24.242

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na, 27 mai 2021, 19-24.242


SOC.

MA



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 mai 2021




Rejet non spécialement motivé


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10506 F

Pourvoi n° T 19-24.242




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2021

M. [J] [

B], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-24.242 contre l'arrêt rendu le 11 septembre 2019 par la cour d'appel de Versailles (17e chambre), dans le litige ...

SOC.

MA



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 mai 2021




Rejet non spécialement motivé


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10506 F

Pourvoi n° T 19-24.242




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2021

M. [J] [B], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-24.242 contre l'arrêt rendu le 11 septembre 2019 par la cour d'appel de Versailles (17e chambre), dans le litige l'opposant à la société Elf exploration production, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [B], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Elf exploration production, après débats en l'audience publique du 31 mars 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. [B]

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a dit que les demandes formulées par M. [B] sont prescrites et débouté M. [B] de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE « L'examen des moyens de M. [B] - au fond - détermine la règle de prescription applicable à sa demande indemnitaire.

Si, au soutien de son argumentation relative à la prescription, il invoque les règles de prescription relatives à la discrimination, il demeure qu'au fond, sa demande ne repose pas sur une discrimination. Elle repose en effet sur deux moyens : sur l'article L. 1222-1 du code du travail (« Le contrat de travail est exécuté de bonne foi ») et sur le principe jurisprudentiel « à travail égal, salaire égal », c'est-à-dire des moyens portant sur l'exécution du contrat de travail à l'exclusion de la discrimination.
En considération des fondements de sa demande, la règle de prescription ne découle pas de l'article L. 1134-5 du code du travail - applicable en matière de discrimination si et seulement si elle est invoquée - mais de l'article L. 1471-1 de ce code.
L'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, dispose : « Toute action portant sur l 'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait 'dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit
Le premier alinéa n'est toutefois pas applicable aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L. 1233-67, L. 1234-20, L. 1235-7 et L. 1237-14, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L. 1134-5. »
Ainsi qu'il a été dit plus haut, M. [B] invoque en l'espèce le principe « à travail égal, salaire égal ». Il compare sa situation à celle de M. [D] dont il prétend n'avoir eu connaissance que le 12 novembre 2015 comme en témoigne sa pièce 50. Il ressort de cette pièce que M. [D] (classé au groupe 10) peut prétendre à une retraite mensuelle de 3 279 euros nets alors que M. [B] (classé dernièrement au groupe 9) jouit d'une retraite mensuelle de 2 863,97 euros nets. Il invoque en outre une exécution de mauvaise foi, par l'employeur, de son contrat de travail caractérisée en substance par :
? des demandes de mobilité refusées entre 1978 et 1984,
? une différence de traitement entre lui et M. [D] qu'il remplaçait en 1989 avec un classement indiciaire inférieur à celui qu'il remplaçait alors,
? une stagnation de sa carrière en dépit de la satisfaction de son employeur et de ses interlocuteurs relativement à son travail.
Il ressort de la pièce 29 du salarié (courriel de M. [B] à son directeur du personnel en date du 22 mai 2013 évoquant un entretien du 30 avril 2013) les éléments suivants : « Monsieur, je tiens tout d'abord à vous remercier de l'accueil que vous m'avez réservé le 30 avril dernier en votre bureau. Vous m'avez, lors de nos échanges, fait comprendre que ma mise à disposition du personnel de février 1982 au mois de janvier 1985 pouvait s'interpréter comme une « mise au placard » ce que semblent confirmer les éléments d'information que vous m'avez par ailleurs communiqués. Il est plus probable en e effet, que s'expliquerait ainsi l'étonnante absence de promotion dont j'ai été victime durant 14 années ».

M. [B] n'a cependant pas découvert le 30 avril 2013 ce qu'il considère comme une « mise au placard », pour reprendre ses propos. La stagnation de sa carrière lui est en effet connue depuis plus longtemps :
Il s'en est manifestement plaint à compter de l'année 2003 puisqu'il produit en pièce 22 le texte de l'intervention de M. [M], du syndicat CFTC, lors de la commission paritaire de 2003 dont il ressort : « La requête de [J] [B] semble être la justification même de l'existence des commissions paritaires. C'est le cas typique d'un agent [à propos de qui les interlocuteurs] ne tarissent pas d'éloge (...) mais qui pourtant poursuit une carrière sans relief. Depuis 1988, en 11 ans, il n'a obtenu qu'un groupe (en commission paritaire) et deux échelons. (...) Quel diplôme n 'aurait-il pas qui justifie le maintien durant toute sa carrière au groupe 7? (...) quelles tâches ne saurait-il pas accomplir pour justifier un tel écrasement (par sa hiérarchie actuelle) de tout espoir de progrès professionnel ? ». Il s'en est encore manifestement plaint de nouveau en 2009 puisqu'il produit en pièce 23 les échanges de courriels entre M. [T] et une responsable des ressources humaines en juillet et août 2009 dont il ressort : « Je viens vers vous pour vous faire part du cas de M. [J] [B] qui a soumis un dossier à la Commission paritaire et qui a reçu un courrier dans lequel vous lui notifiez un refus à sa demande de revoir sa situation. Il s'agit d'un dossier que j'ai défendu à la dernière CPC et dont c'était la cinquième présentation à cette instance. (...) M. [B] est resté bloqué 14 ans à l'échelle 7. (...) Il reste non seulement sous classé, mais il se voit dépassé par des collègues plus jeunes avec moins d'expérience et qu'il a parfois lui-même formés (...). M [B] devrait être au GE 10 et non en 8. Ce dossier que je connais bien n'a pas eu toute l'objectivité nécessaire pour sa défense auprès des membres de la Commission paritaire (...). »
Tous ces éléments montrent en définitive que M. [B] s'est plaint de façon continue de sa stagnation professionnelle depuis au moins l'année 2003.
C'est donc à l'année 2003 qu'il convient de situer le moment où M. [B] a connu les faits lui permettant d'exercer son droit.

En 2003, la prescription de l'action portant sur l'exécution du contrat de travail était de 30 ans en application du droit commun.
Alors que la prescription était toujours en cours, est intervenue la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ayant réduit à cinq ans le délai de prescription applicable aux actions personnelles et mobilières comme il résulte de l'article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de cette loi.
En application de l'article 2222 alinéa 2 du code civil, « en cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. »
La loi du 17 juin 2008, publiée au journal officiel le 18 juin est entrée en vigueur un jour franc après cette publication, soit le 19 juin 2008.
Ainsi, à compter du 19 juin 2008, l'action de M. [B] a-t-elle été affectée par le nouveau délai qui s'est, à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, appliqué immédiatement à sa situation de telle sorte que son action était prescrite le 19 juin 2013.
Alors que cette prescription était toujours en cours, a été adopté le 14 juin 2013 un nouveau délai de prescription de deux ans codifié à l'article L. 1471-1 du code du travail, reproduit supra.
Cette disposition est issue de l'article 21 -III de la loi du 14 juin 2013. L'article 21-III de cette loi prévoit : « Les dispositions du code du travail prévues aux III et IV du présent article s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. »
Appliqué immédiatement, à compter de la promulgation de la loi du 14 juin 2013, le nouveau délai de 2 ans à la demande de M. [B] (prescrite, sous l'empire de la loi antérieure au 19 juin 2013) porterait au 17 juin 2015 le nouveau délai de prescription. Cela aurait donc pour effet d'augmenter le délai de prescription prévu par la loi antérieure, ce qui est proscrit par la loi elle- même.
Ainsi, en dépit de l'entrée en vigueur de la loi du 14 juin 2013, l'action de M. [B] est-elle demeurée fixée au 19 juin 2013. Peu importe que la situation que M. [B] dénonce ait perduré au-delà du 19 juin 2013, dès lors que le moment auquel M. [B] a connu les faits lui permettant d'exercer son action a été situé à l'année 2003.
M. [B] n'a agi que le 27 mars 2014. Son action est donc prescrite de sorte que le jugement sera confirmé ».

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la prescription soulevée par la partie défenderesse
Attendu que l'article L. 1471-1 du code du travail dispose que « toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
Le premier alinéa n'est toutefois pas applicable aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L. 1233-67, L. 1234-20, L. 1235-7 et L. 1237-14, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L. 1134-5 ».
En l'espèce, M. [B] a saisi le conseil de céans le 27 mars 2014 alors que tous les manquements reprochés à l'employeur dans le cadre des présentes écritures sont antérieures au 27 mars 2012 et de ce fait couverts par la prescription biennale comme édicté à l'article ci-dessus visé.
Qu'en conséquence, les manquements reprochés par M. [B] à son employeur étant tous antérieurs au 27 mars 2012, et de ce fait couverts par la prescription, il y a lieu de déclarer les demandes de M. [B] prescrites ».

1°) ALORS QUE tout jugement ou arrêt doit être motivé à peine de nullité ; qu'en se bornant à affirmer, pour déterminer la règle de prescription applicable à la demande de de dommages et intérêts de M. [B], que « si au soutien de son argumentation relative à la prescription, il invoque les règles de prescription relatives à la discrimination, il demeure qu'au fond, sa demande ne repose pas sur une discrimination. Elle repose en effet sur deux moyens : sur l'article L. 122-1 du code du travail (« le contrat de travail est exécuté de bonne foi ») et sur le principe jurisprudentiel « à travail égal, salaire égal » sans expliquer pourquoi, la cour a violé les article 455 et 458 du code de procédure civile.

2°) ALORS QU'en retenant, pour fixer le point de départ de la prescription applicable à la demande de dommages et intérêts de M. [B], sa connaissance, dès 2003, de faits de stagnation de sa carrière qui lui auraient permis d'exercer ses droits sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, s'il n'avait pas été seulement en mesure de connaître avec précision les faits à l'origine de sa demande d'indemnisation qu'à compter de novembre 2015, date à laquelle M. [D] lui avait transmis les montants de sa retraite et ainsi donné des éléments matériels précis de comparaison, la cour a statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1471-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 19-24.242
Date de la décision : 27/05/2021
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre sociale, arrêt n°19-24.242 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles 17


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc. - formation restreinte rnsm/na, 27 mai. 2021, pourvoi n°19-24.242, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.24.242
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