COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 27 mai 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10266 F
Pourvoi n° B 19-20.915
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 27 MAI 2021
La société Exterion media France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 19-20.915 contre l'arrêt rendu le 21 mai 2019 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [X] [P], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Exterion media France, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [P], et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 mars 2021 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Exterion media France aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Exterion media France et la condamne à payer à M. [P] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Exterion media France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société Exterion Media a, par restructurations successives, hérité de la dette constituée par les causes de la condamnation prononcée au profit de M. [P] à l'encontre de la société Stroer Cannes par le jugement du conseil de prud'hommes de Grasse du 8 février 2006, confirmé par les arrêts des 28 mai 2007 et 6 juin 2009 rendus par la cour d'appel d'Aix en Provence et par conséquent d'AVOIR condamné la société Extérion Média à payer à M. [P] la somme de 373 228,67 euros avec intérêt légal à compter du 8 février 2006.
AUX MOTIFS QUE « Le premier et le second alinéa de l'article L. 236-1 du code de commerce prévoit qu'une ou plusieurs sociétés peuvent, par voie de fusion, transmettre leur patrimoine à une société existante ou à une nouvelle société qu'elle constitue. Une société peut aussi par voie de scission, transmettre son patrimoine à plusieurs sociétés existantes ou à plusieurs sociétés nouvelles. Selon les termes de l'article L. 236-3 I du même code, la fusion ou la scission entraîne la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires, dans l'état où il se trouve à la date de réalisation définitive de l'opération. Elle entraîne simultanément l'acquisition, par les associés des sociétés qui disparaissent, la qualité d'associés des sociétés bénéficiaires, dans les conditions déterminées par le contrat de fusion ou de scission. L'article L.236-4 du code du commerce stipule que la fusion ou la scission prend effet : 1° en cas de création d'une ou plusieurs sociétés nouvelles, à la date d'immatriculation, au registre du commerce et des sociétés, de la nouvelle société ou de la dernière d'entre elles ; 2° dans les autres cas, à la date de la dernière assemblée générale ayant approuvé l'opération sauf si le contrat prévoit que l'opération prend effet à une autre date, laquelle date ne doit être ni postérieure à la date de clôture de l'exercice en cours de la ou des sociétés bénéficiaires, ni antérieure à la date de clôture du dernier exercice clos de la ou des sociétés qui transmettent leur patrimoine. En application de l'article L. 236-20 du code de commerce les sociétés bénéficiaires des apports résultant de la scission sont débitrices solidaires des créanciers obligataires et des créanciers non obligataires de la société scindée au lieu et place de celle-ci sans que cette substitution emporte novation à leur égard. Il ne résulte pas des pièces versées aux débats que la provision inscrite au passif des sociétés fusionnées corresponde exactement à la créance litigieuse. Toutefois, il n'est pas contesté que la société Stroer Cannes, employeur de M. [P] a, par voie de fusion-absorption, selon traité de fusion du 1er juillet 2006, approuvé par les actionnaires le 23 août 2006, transmis à la société Stroer France " l'ensemble de ses biens, droits et obligations, actifs et passifs tels qu'estimés à la date du 31 décembre 2005 avec effet rétroactif au 1er janvier 2006". En conséquence, la créance salariale née d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse notifié le 2 janvier 2004 par la société Stroer Cannes, fixée à la somme de 373'228,67 ? à l'issue du jugement du conseil de prud'hommes du 8 février 2006 confirmé par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a été transférée dans le patrimoine de la société Stroer France, société absorbante. Il n'est pas davantage contesté que la société Stroer France a cédé une partie de son activité au profit de la société Pass Affiches, par voie d'apport partiel d'actifs selon traité du 25 août 2006. Ce traité d'apport partiel mentionne en son article 2.1 ("Apport de la branche d'activité") que la société Stroer France "fait apport de son activité de publicité extérieure sous toutes ses formes, exercés sur le territoire français, à l'exception de son activité de conseil, à titre d'apport partiel d'actifs...., à la société Pass Affiches, ....de la propriété pleine et entière des biens énumérés au point 2.4.1 à 2.4.3 ... qui faisait partie des éléments d'actifs des sociétés Stroer France, Stroer Cannes et Stroer Nice... et qui forment ensemble une branche complète d'activité, y compris le bénéfice et la charge des résultats actifs et passifs des opérations accomplies entre le 1er janvier 2006 et la date de réalisation définitive des présents apports, dans la mesure où lesdites opérations actives et passives concernent les biens apportés et que leur prise en charge par la société Pass Affiches est prévue dans la présente convention. En contrepartie de l'apport de ces éléments d'actifs, la société Pass Affiches prendra en charge le passif énuméré au point 2.5 ci-après. Il est précisé que tous autres éléments d'actifs et passifs de la société apporteuse, non expressément visés ci-après, sont exclus des apports.". L'article 2.5 intitulé "Passif pris en charge" mentionne l'existence d'une annexe 4 qui reprendrait les éléments de passif ainsi qu'une annexe 6 faisant état de l'actif net apporté. Ces annexes ne sont pas versées aux débats. Il convient de savoir si la créance de M. [P] a été transférée ou non à la société absorbante Pass Affiches. Dans la mesure où elle n'est pas expressément visée au traité elle pourrait être considérée comme exclue des apports. Toutefois, le commissaire aux apports précise, dans son rapport, que cet apport partiel d'actifs sous le régime des scissions est indispensable pour sauvegarder la compétitivité de la société Stroer France en apportant "à une entité distincte [la société Pass Affiches] la branche d'activité consistant à réaliser de la publicité extérieure sur le territoire français, la société Stroer France conservant toute forme d'activité de publicité extérieure hors de France ainsi que l'activité de conseil pour la France.", cet apport formant "une branche complète d'activité, y compris le bénéfice et la charge des résultats actifs et passifs des opérations accomplies entre le 1er janvier 2006 et la date de réalisation définitive des présents apports....". La cour observe que M. [P] dans le cadre de son contrat de travail avec la société Stroer Cannes, a occupé la fonction de responsable commercial (article 1: objet) avec un territoire de prospection (article 4 : lieu de travail) s'entendant : « principalement sur les départements des [Localité 1] et du [Localité 2], la modification du dit secteur et en l'occurrence du lieu de travail, ne saurait être engagée sans constituer un changement substantiel du présent contrat portant ainsi préjudice au salarié, lequel contrat s'entendrait alors rompu de la seule initiative de l'employeur.... ». Il s'en déduit que l'activité salariée de M. [P] dont la rupture est cause de la créance litigieuse, relève de la branche d'activité apportée à la société Pass Affiches. Il résulte d'attestations de représentants d'un client de la société Stroer France (Zoo de [Localité 3]) que la campagne d'affichages de l'été 2006 initialement commandée auprès de la société Stroer France a été réglée entre les mains de la société Pass Affiches (attestation M. [O]). Par ailleurs ce client (attestation M. [G]) a été destinataire d'une lettre du 20 octobre 2006 (jointe à l'attestation) sous la signature conjointe de la société Pass Affiches (M. [E]) et de la société Viacom-Outdoor (devenue Extérion Média) l'informant que cette dernière s'est portée acquéreur de la société Pass Affiches le 3 octobre 2006 qui "regroupe les activités d'affichage en France de la société Stroer, implantée principalement dans les régions [Localité 4] et [Localité 5]"...." c'est une excellente nouvelle pour les clients et partenaires de Pass Affiches, et l'assurance d'une continuité et d'un développement dans le futur. Soyez certains que nous mettons tout en oeuvre pour que la transition entre nos deux sociétés se passe dans les meilleures conditions, et qu'elle n'ait aucun effet négatif pour vous." En conséquence, au delà d'une simple acquisition des actions de la société Pass Affiches, l'activité même de cette dernière a été transférée, dans les faits, à la société Extérion Média dès le mois d'octobre 2006. Si la cour d'appel dans son arrêt du 28 mai 2007 a mis hors de cause la société Pass Affiches à défaut pour M. [P] d'avoir fourni des éléments probants justifiant d'un lien entre cette dernière et la société Stroer France, elle n'a pas pour autant tranché la question qui ne lui était d'ailleurs pas soumise, du transfert à la société Pass Affiches de la dette dûe à M. [P] à l'occasion de l'apport partiel d'actifs. Au delà des constations qui précèdent, la cour ne peut manquer de relever certains éléments : - l'incohérence à soutenir que l'objectif poursuivi par l'apport partiel d'actifs vise à apporter une branche d'activité complète relative à la publicité extérieure sur le territoire français et à exclure néanmoins de l'apport, la prise en charge d'un passif consécutif au licenciement qui relève de cette branche d'activité, - la signature d'un traité d'apport partiel d'actifs par une seule et même personne (M. [E]) représentant à la fois la société apporteuse et la société bénéficiaire, laissant ainsi, dans les faits, la liberté de ne retenir que les éléments "choisis" d'actif et de passif qui conviennent à la société bénéficiaire remettant ainsi en cause le principe même de la transmission complète de la branche d'activité avec l'intégralité de son actif et de son passif, - la déclaration, dans le cadre du traité du 25 août 2006, par la société apporteuse Stroer France selon laquelle son fonds de commerce n'est grevé d'aucune inscription de créanciers nantis alors que M. [P] avait inscrit un nantissement le 11 juillet 2006, dénoncé le 19 juillet 2006 (lettre du greffe du tribunal de commerce de Grasse du 26 juillet 2007), sur le fonds de commerce de la société Stroer Cannes absorbée depuis le 23 août 2006 par la société apporteuse Stroer France, - la concomitance pour ne pas dire la précipitation, des opérations d'absorption des sociétés Stroer Cannes et Nice par la société Stroer France le 23 août 2006, la signature du traité d'apport partiel entre la société Stroer France et la société Pass Affiches le 25 août 2006 et l'acquisition de la société Pass Affiches le 3 octobre 2006 par la société Extérion Média traduisant la concertation entre l'ensemble de ces acteurs dans la réalisation des opérations de restructuration, peu de temps après le jugement du conseil de prud'hommes du 8 février 2006, notifié le même jour aux parties, et à l'inscription du nantissement sur fonds de commerce du 11 juillet 2006. Il ressort de ce qui précède que la créance litigieuse a été transférée, dans les faits, avec le passif attaché à la branche d'activité complète, à la société Pass Affiches, peu important que les parties au contrat, représentées par la même personne, aient convenu que les éléments d'actif et de passif de la société apporteuse, non expressément visés au traité devaient en être exclus. Le traité (art 2.6 : Propriété. Jouissance) précise que "la société bénéficiaire de l'apport sera, enfin, subrogée purement et simplement d'une façon générale dans tous les droits, actions, obligations et engagements divers, se rapportant aux biens faisant l'objet du présent apport. À ce titre elle se trouvera notamment et en conformité des dispositions de l'article L. 236'20 du code de commerce, débitrice des créanciers de la société apporteuse, au lieu et place de celle-ci, sans que cette subrogation entraîne novation à l'égards desdits créanciers." Il en résulte que la société Pass Affiches a été subrogée à compter du 25 août 2006. dans les obligations de la société Stroer France débitrice de la créance litigieuse à la suite de l'absorption de la société Stroer Cannes à effet rétroactif au 1er janvier 2006. La société Pass Affiches a fait l'objet d'une dissolution en vertu de l'article 1844-5 du code civil, à la suite de la réunion de ses actions en une seule main le 28 avril 2008, la transmission universelle de son patrimoine ayant été réalisée le 31 mai 2008 au profit de la société CPS Outdoor dénommée désormais Extérion Média. La transmission universelle de patrimoine entraînant la transmission de l'ensemble du patrimoine de la société absorbée à la société absorbante, la créance de Monsieur [P] à l'encontre de la société Pass Affiches a été transférée à la société Extérion Média. La cour infirmera le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de condamnation de la société Exterion Média et condamnera cette dernière à lui verser la somme de 373 228,67 euros, correspondant à la somme de 344 934,37 euros, selon la condamnation prononcée par le jugement du conseil de prud'hommes du 8 février 2006, confirmé par l'arrêt du 28 mai 2007, somme à laquelle il convient d'ajouter la somme de 28 294,30 euros conformément au dispositif de l'arrêt rectificatif du 6 avril 2009 de la cour d'appel d'Aix en Provence. En application de l'article 1153-1 ancien, cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 8 février 2006 date de la notification du jugement du conseil de prud'hommes de Grasse » ;
1) ALORS QUE sauf dérogation expresse prévue par les parties dans le traité d'apport, l'apport partiel d'actif, placé sous le régime des scissions, n'entraine la transmission, de la société apporteuse à la société bénéficiaire, que des biens, droits et obligations qui dépendent de la branche d'activité qui fait l'objet de l'apport ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Stroer France avait cédé une partie de son activité à la société Pass Affiches par accord partiel d'actifs selon un traité du 25 août 2006 ; que la cour d'appel a relevé qu'aux termes de l'article 2.1 du traité d'apport, la société Stroer France faisait « apport de son activité de publicité extérieure sous toutes ses formes, exercée sur le territoire français, à l'exception de son activité de conseil, à titre d'apport partiel d'actif » ; que la cour d'appel a affirmé que l'activité salariée de M. [P] relevait de la branche d'activité apportée à la société Pass Affiches, après avoir seulement constaté que M. [P] occupait la fonction de responsable commercial avec un territoire de prospection principalement dans les [Localité 1] et le [Localité 2] ; qu'en se déterminant ainsi, sans constater que les fonctions de M. [P] étaient liées à l'activité de publicité extérieure de la société Stroer France, qui faisait l'objet de l'apport, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.236-3 du code de commerce.
2) ALORS QUE l'apport partiel d'actif, placé sous le régime des scissions, n'emporte pas transmission des biens, droits et obligations qui sont visés par une dérogation expresse prévue par les parties dans le traité d'apport ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Stroer France avait cédé une partie de son activité à la société Pass Affiches par accord partiel d'actifs selon un traité du 25 août 2006 ; que la cour d'appel a relevé qu'aux termes de l'article 2.1 du traité d'apport, « la société Pass Affiches prendra en charge le passif énuméré au point 2.5 ci-après. Il est précisé que tous autres éléments d'actifs et passifs de la société apporteuse, non expressément visés ci-après, sont exclus des apports » ; qu'en jugeant néanmoins que la créance litigieuse de M. [P] envers la société Stroer France avait été transférée à la société Pass Affiches, peu important que les parties au contrat d'apport partiel d'actif aient convenu que les éléments d'actif et de passif de la société apporteuse non expressément visés au traité devaient en être exclus, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.
3) ALORS QU'un jugement de mise hors de cause peut avoir autorité de chose jugée ; que l'autorité de chose jugée a lieu à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement, dès lors que la chose demandée est la même, fondée sur la même cause et formée entre les mêmes parties ; qu'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci ; qu'en l'espèce, il ressortait des énonciations de l'arrêt du 28 mai 2007 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, rendu dans le litige prud'homal engagé par M. [P], que ce dernier demandait la condamnation de la société Stroer France et de la société Pass Affiches à lui payer des sommes identiques au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail ; que cet arrêt a, dans son dispositif, prononcé la mise hors de cause de la société Pass Affiches ; que, dans l'arrêt attaqué, la cour d'appel a affirmé que l'arrêt du 28 mai 2007 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, qui a mis hors de cause la société Pass Affiches à défaut pour M. [P] d'avoir fourni des éléments probants justifiant d'un lien entre cette dernière et la société Stroer France, n'avait pas pour autant tranché la question du transfert à la société Pass Affiches de la dette due à M. [P] à l'occasion de l'apport partiel d'actifs ; qu'en statuant ainsi, quand la question du transfert à la société Pass Affiches de la dette due à M. [P] à l'occasion de l'apport partiel d'actifs n'était qu'un moyen à l'appui de la demande de M. [P] en paiement des mêmes sommes, fondées sur la même cause, dirigée contre la société Exterion Media en tant qu'ayant-cause à titre universel de la société Pass Affiches, de sorte que cette demande se heurtait à l'autorité de chose jugée de la décision de mise hors de cause rendue par l'arrêt du 28 mai 2007 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, la cour d'appel a violé l'article 1351, devenu 1355, du code civil.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR débouté la société Exterion Média de sa demande de nullité de l'inscription provisoire du 11 juillet 2006 et celle définitive du 20 juillet 2007 de nantissement du fonds de commerce au bénéfice de M. [P].
AUX MOTIFS QUE « La société Exterion Média soutient, au visa de l'article R.532-5 du code des procédures civiles d'exécution, que l'inscription provisoire de nantissement sur le fonds de commerce de la société le 11 juillet 2006 est caduc au motif que la décision judiciaire motivant cette inscription de nantissement n'était pas jointe à l'acte de dénonce signifié par voie d'huissier et qu'en conséquence l'inscription définitive prise le 25 juillet 2007 est entachée de caducité et donc de nullité. M. [P] fait valoir pour l'essentiel, au visa de l'article 114 du code de procédure civile, que la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour la société Extérion Média de prouver le grief que lui cause l'irrégularité. Sur ce : Les dispositions de l'article 255 issu du décret numéro 92-755 du 31 juillet 1992 alors applicables à la date de l'inscription de nantissement provisoire ont été abrogées au 1er juin 2012 et reprises, dans les mêmes termes, par l'article R 532-5 du code des procédures civiles d'exécution. L'article 255 disposait : « à peine de caducité, huit jours au plus tard après le dépôt des bordereaux d'inscription ou la signification du nantissement, le débiteur en est informé par acte d'huissier de justice. Cet acte contient à peine de nullité : I° une copie de l'ordonnance du juge ou du titre en vertu duquel la sûreté a été prise ; toutefois, s'il s'agit d'une obligation notariée, d'une créance de l'État, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, il n'est fait mention que de la date, de la nature du titre et du montant de la dette ; 2° l'indication de caractères très apparents que le débiteur peut demander la mainlevée de la sûreté comme il est dit à l'article 217 [ désormais R. 512-1]; 3° la reproduction des articles 210 à 219 et 256 [ désormais R. 511-1 à R. 512-3 et R. 532-6 ]. Il résulte des dispositions de l'article 114 du code de procédure civile qu'aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme, si la nullité n'est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qu'il l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit une formalité substantielle d'ordre public. Il résulte de l'acte de dénonce qu'il n'a pas été signifié avec copie de la décision judiciaire en l'espèce la décision du conseil de prud'hommes de Grasse du 8 février 2006. La société Exterion Média fait valoir que cette absence de production lui ferait grief au motif que le débiteur notifié pouvait s'interroger sur la décision à l'origine de l'inscription sans certitude que le jugement était celui du conseil de prud'hommes de Grasse du 8 février 2006 avançant même l'hypothèse que plusieurs jugements pouvaient avoir été rendus ce jour-là à l'encontre de la société Stroer France de sorte que cette absence de transmission créait un doute chez le débiteur à l'origine du grief. Le bordereau d'inscription de nantissement du 11 juillet 2006 se réfère expressément à M. [P] et au jugement du conseil de prud'hommes du 8 février 2006. Ce jugement avait été également notifié le 8 février 2006 à la société Stroer France ainsi que le greffe du conseil de prud'hommes le confirme (lettre du 14 octobre 2016) de sorte que le débiteur ne pouvait se méprendre sur le jugement à l'origine de l'inscription d'autant que le montant de la créance figurant au bordereau correspond aux causes de la condamnation prononcée par le conseil de prud'hommes. Dès lors, la société Exterion Media ne rapporte pas la preuve du grief qui lui aurait été causé du fait de l'absence de copie jointe à l'acte de dénonce d'inscription provisoire du nantissement. Le nantissement provisoire n'étant en conséquence pas entaché de nullité, le nantissement définitif ne l'est pas davantage. La cour relève que les premiers juges n'ont pas repris dans leur dispositif le constat de la validité du nantissement pris par M. [P] retenu dans les motifs, ni débouté la société Exterion Media de sa demande de nullité du nantissement. Dans ces conditions, y ajoutant, la cour déboutera la société Exterion Media de sa demande de nullité de nantissement » ;
1) ALORS QUE l'article 255 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 prévoit que les formalités qu'il prescrit sont imposées à peine de caducité de la publicité provisoire ; que cette sanction de caducité n'est pas soumise à la nécessité de prouver un grief causé par l'irrégularité ; qu'en l'espèce, en décidant que le nantissement provisoire n'était pas entaché de nullité faute pour la société Exterion Media de rapporter la preuve d'un grief qui lui aurait été causé du fait de l'absence de copie de la décision, en vertu de laquelle la sûreté a été prise, jointe à l'acte de dénonce d'inscription provisoire du nantissement, la cour d'appel a violé l'article 114 du code de procédure civile et l'article 255 du décret n°92-755 du 31 juillet 1992.
2) ALORS subsidiairement QUE le défaut de la formalité, qui exige que l'acte d'huissier de justice informant le débiteur du dépôt d'un bordereau d'inscription provisoire de nantissement contienne une copie de l'ordonnance du juge ou du titre en vertu duquel la sûreté a été prise, cause nécessairement un grief au débiteur, qui n'a pas pu prendre connaissance de la source de la sûreté, affectant son droit à demander la mainlevée ; qu'en l'espèce, en affirmant que la société Exterion Media ne rapporte pas la preuve du grief qui lui aurait été causé du fait de l'absence de copie de la décision, en vertu de laquelle la sûreté a été prise, jointe à l'acte de dénonce d'inscription provisoire du nantissement, la cour d'appel a violé l'article 114 du code de procédure civile et l'article 255 du décret n°92-755 du 31 juillet 1992.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR débouté la société Exterion Media de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
AUX MOTIFS QUE « La société Extérion Média sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive. Elle fait valoir que depuis l'inscription définitive du 20 juillet 2007, M. [P] n'a engagé aucune mesure d'exécution contre la société Pass Affiches qu'il ne considérait pas comme sa débitrice, ou contre la société Extérion Média, qu'il a fait preuve ainsi d'une inertie coupable pendant plus de 10 ans démontrant un acharnement qui lui causerait "nécessairement" un préjudice. M. [P] réplique que son droit n'est pas prescrit et que la société Extérion Média était informée de ses demandes depuis longtemps. Sur ce : L'exercice d'une action en justice ne dégénère en faute susceptible d'entraîner une condamnation à des dommages-intérêts que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi. M. [P] bénéficie d'un décision judiciaire confirmée par arrêt de la cour d'Aix en Provence du 28 mai 2007.Il cherche à en obtenir l'exécution à l'encontre de son ancien employeur dont l'activité par l'effet de restructurations successives sous forme de fusion, d'apport partiel d'actifs puis de dissolution avec transfert universel de patrimoine, a été intégrée au sein de la société Exterion Média. Il n'y a aucune malice ou mauvaise foi démontrée de la part de M. [P] à poursuivre cet objectif alors que la société Exterion Média a été mise en demeure depuis le 24 juin 2008 (lettre du cabinet Jurex de même date), et à plusieurs reprises depuis (lettre du conseil de M. [P] du 25 mars 2014) d'avoir à payer les causes de la condamnation. La cour confirmera le jugement en ce qu'il a débouté la société Extérion Média de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Attendu que la société EXTERION MEDIA fait valoir que depuis le 25 juillet 2007, date de l'inscription définitive de nantissement sur le fonds de commerce de la société STROER CANNES, Monsieur [X] [P] n'a engagé aucune mesure d'exécution à l'encontre des sociétés PASS AFFICHE ou EXTERION MEDIA. Que des sommes lui ont été payées tant par un Cabinet d'avocats Berlinois pour le compte de Cosmopolitan Media (anciennement STROER FRANCE) le 29/08/2008 à hauteur de 15 000 ? que par le liquidateur judiciaire de la société Cosmopolitan Media, Maître [A], le 6/07/2009 à hauteur de 29 408,77 ?, et que depuis il n'a intenté aucune action. Qu'en conséquence, elle demande qu'il lui soit alloué 10 000 ? à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et tardive. Attendu que les demandes de Monsieur [X] [P] n'ont pour objet que de tenter d'obtenir les sommes qui lui ont été allouées par la cour d'appel d'Aix-en-Provence. Attendu enfin que la société EXTERION MEDIA ne justifie pas du quantum de sa demande. En conséquence, le Tribunal déboutera la société EXTERION MEDIA de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et tardive » ;
1) ALORS QUE la cassation sur le fondement du premier moyen entrainera par voie de conséquence cassation du chef de dispositif déboutant la société Exterion Media de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, par application de l'article 624 du code de procédure civile.
2) ALORS QUE l'abus du droit d'ester en justice cause nécessairement un préjudice, serait-ce moral, à la personne abusivement attraite en justice ; qu'en affirmant que la société Exterion Media ne justifie pas du quantum de sa demande, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code.