CIV. 3
VB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 27 mai 2021
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10298 F
Pourvoi n° V 19-16.677
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 MAI 2021
1°/ M. [U] [Y], domicilié [Adresse 1],
2°/ la société [Personne géo-morale 1], société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° V 19-16.677 contre l'arrêt rendu le 19 mars 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 1), dans le litige les opposant à Mme [V] [H], épouse [O], domiciliée [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Georget, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Laurent Goldman, avocat de M. [Y] et de la société [Personne géo-morale 1], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme [H], après débats en l'audience publique du 13 avril 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Georget, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [Y] et la société [Personne géo-morale 1] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me Laurent Goldman, avocat aux Conseils, pour M. [Y] et la société [Personne géo-morale 1]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
La société [Personne géo-morale 1] et M. [Y] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir écarté les fins de non-recevoir et d'avoir dit que Mme [H] était propriétaire de 25 parts de la première cédées par le second le 1erjuillet 2004 et qu'elle était associée de la société, d'avoir fait injonction à la société de mettre à jour ses statuts et d'avoir dit qu'à défaut la décision pourrait être déposée au greffe du tribunal de commerce de Bobigny aux fins de modification de l'extrait Kbis;
AUX MOTIFS QUE :
M. [Y] invoque l'application de la prescription acquisitive au cas où les actes de cession seraient reconnues valables, ce qu'il conteste se disant le véritable propriétaire des parts sociales.
Mme [H] s'y oppose et évoque l'absence de bonne foi de M. [Y] dans sa possession en ce qu'il est l'auteur et le signataire des actes de cession en 2004 et connaissait sa contestation depuis 2007, de sorte que seule une usucapion trentenaire serait susceptible de lui être opposée. Mme [H] justifie aux débats avoir écrit à M. [Y], gérant de la Sci, par courrier recommandé du 12 avril 2007 dont l'avis de réception est revenu signé le 05 mai 2007, en ces termes : "Conformément aux dispositions de l'article 1690 du code civil, je vous transmets une copie des actes de cession des 50 parts sociales enregistrés par les services de l'administration fiscale du Raincy afin que vous engagiez la procédure légale relative à la modification des statuts..."
Il est constant que M. [Y] n'a accompli aucune des formalités demandées. Or, le cédant, qui a une obligation de délivrance, et qui doit sa garantie à l'acquéreur, ne peut l'évincer lui-même en invoquant la prescription acquisitive pour se faire reconnaître propriétaire de la chose vendue dont il a gardé la possession, l'acquéreur étant toujours recevable à lui opposer l'exception de garantie, qui est perpétuelle. Dans ce contexte, la prescription acquisitive évoquée par M. [Y] ne peut utilement être opposée à Mme [H]. Ce moyen sera dès lors écarté.
ALORS QU'en se fondant d'elle-même, pour écarter la prescription acquisitive invoquée par M. [Y], sur une lettre du 12 avril 2007qui aurait été adressée à ce dernier par Mme [H], dont cette dernière ne se prévalait pas pour faire obstacle à l'usucapion, la cour d'appel, qui a relevé d'office cet élément sans inviter les parties à présenter leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
La société [Personne géo-morale 1] et M. [Y] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Mme [H] était propriétaire de 25 parts de la première cédées par le second le 1erjuillet 2004 et qu'elle était associée de la société, d'avoir fait injonction à la société de mettre à jour ses statuts et d'avoir dit qu'à défaut la décision pourrait être déposée au greffe du tribunal de commerce de Bobigny aux fins de modification de l'extrait Kbis;
AUX MOTIFS QUE:
S'agissant de l'absence d'agrément préalable à cette cession, l'article 1861 du code civil mentionne qu'une cession de parts doit recueillir celui de tous les associés mais que les statuts peuvent convenir d'une majorité qu'ils déterminent ou qu'il soit accordé par les gérants. En l'espèce, les statuts prévoient en leurs articles 7 et 8 que l'agrément sera obtenu par décision des associés représentant les trois quarts du capital social.
Cependant, à la date de cette cession (juillet 2004), M. [Y] était le seul associé par l'effet du rachat des parts de sa s?ur intervenu en décembre 2000. En effet, dans les rapports entre le cédant et le cessionnaire, la cession est parfaite dès la signature du contrat.
En outre, quand la société devient unipersonnelle en cours de vie sociale, c'est alors l'associé unique qui remplit les fonctions assignées aux organes sociaux et peut accomplir seul tous les actes qui sont de leur compétence. Il est de même tenu de respecter toutes les formalités imposées dans l'intérêt des tiers. Si la cession de parts entre Mme [B] et son frère n'a pas été notifiée à la société, celle-ci ne peut se prévaloir du défaut d'accomplissement des formalités si elle a su la cession et l'a acceptée de manière certaine et non équivoque ; en l'espèce, M. [Y] constituant à lui tout seul la société, cette cession de parts à son profit est par essence connue et acceptée de la société.
Dès lors, la cession de parts intervenue entre sa s?ur et M. [Y] est opposable tant à ce dernier qu'à la société dès cette date, de sorte que, M. [Y] étant seul associé et cédant en juillet 2004, aucun défaut d'agrément ne peut être opposé à Mme [H]. Il convient également d'écarter l'argument tiré du non paiement du prix alors qu'il est mentionné dans l'acte de cession qu'il est donné quittance du paiement comptant des parts.
S'agissant de la vileté du prix, M. [Y] peut l'opposer à Mme [H], l'exception de nullité étant perpétuelle et non pas soumise à la prescription de droit commun. Au fond, M. [Y] ne l'établit pas alors qu'il acquis les parts de sa s?ur, au même prix en 2000 ; que s'il a versé d'autres sommes à sa s?ur, les causes étaient différents ainsi qu'il résulte du constat d'accord établi entre eux le 12 janvier 2005 et qu'il a vendu ses parts à ses filles en décembre 2014 au même prix. En outre, M. [Y] ne produit aux débats aucune expertise comptable de la Sci mais des pages volantes, en copie, de déclarations fiscales. Il produit des estimations immobilières de l'immeuble que la Sci occupe, alors que, en 2004, celle-ci fait toujours face au paiement de la rente viagère. Enfin, il est justifié aux débats, qu'à l'époque, M. [Y] et M. et Mme [H] entretenaient des liens d'amitié, que M. [Y] et M. [O] étant tous deux associés gérant d'une autre société, laquelle était locataire de la Sci depuis le 19 mai 2000.
Ainsi, il résulte de ce qui précède, que la validité de la cession de juillet de 2004 et du protocole d'accord doit être retenue, ce dernier, signé de M. [Y], étant pour les mêmes motifs que la cession, opposable à la société, M. [Y] étant seul associé à cette époque de la Sci.
1°) ALORS QUE la cession de parts sociales n'est opposable à la société qu'à compter de sa signification à elle; que la cour d'appel qui, après avoir constaté que la cession de parts intervenue le 1er décembre 2000 entre Mme [B], cédante, et M. [Y], cessionnaire, n'avait pas été notifiée à la société, ce dont il résultait qu'à la date de la prétendue cession intervenue au profit de Mme [H] le 1erjuillet 2004, Mme [B] était toujours associée et devait en cette qualité donner son agrément, s'est néanmoins fondée, pour écarter la nullité de la cession pour défaut d'agrément, sur la circonstance inopérante que par l'effet de la cession de décembre2000 M. [Y] était devenu seul associé de la société de sorte que cette cession lui était opposable dès sa signature et qu'aucun agrément n'était donc nécessaire en juillet 2004, la cour d'appel a violé les articles 1861 et1865 du code civil;
2°) ALORS QUE, en tout état de cause, la cession de parts sociales peut être résolue par la vileté du prix ; qu ?en se fondant, pour écarter la vileté du prix fixé à 381 euros, sur les circonstances inopérantes que, d'une part, ce prix correspondait à celui auquel M. [Y] avait acquis les parts de sa s?ur et en avait données à ses filles et, d'autre part, M. [Y] et Mme [H] entretenaient au moment de la cession des liens d'amitiés, ce qui était sans incidence sur la valeur réelle des parts, qui seule devait être prise en compte comme élément de comparaison avec le prix fixé dans l'acte litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1591 et 1658 du code civil;
3°) ALORS QUE la cour d'appel qui, pour écarter la vileté du prix ,a relevé d'office, sans inviter les parties à présenter leurs observations, la circonstance, non invoquée à cet égard par Mme [H], qu'en 2004 la société faisait toujours face au paiement d'une rente viagère, a violé l'article 16 du code de procédure civile;
4°) ALORS QUE, en tout état de cause, en se contentant de faire référence à la circonstance qu'en 2004 la société faisait toujours face au paiement d'une rente viagère, sans s'expliquer autrement sur les raisons pour lesquelles le paiement de cette rente réduirait à presque rien la valeur de l'immeuble détenu par la société, pour lequel des estimations à hauteur de 370.000 euros avaient été produites, la cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile;
5°) ALORS QUE, plus subsidiairement, si l'acheteur ne paie pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente; que la cour d'appel qui après avoir relevé que les modalités de paiement précisées dans l'acte de cession daté du 1erjuillet 2004 avaient été complétées après la signature de celui-ci, ce dont il résultait que M. [Y] ne pouvait avoir valablement donné quittance du paiement, s'est néanmoins fondée, pour écarter la résolution, sur la mention de quittance figurant à l'acte, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 1654 du code civil.