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12/05/2021 | FRANCE | N°20-15.319

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 12 mai 2021, 20-15.319


COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 mai 2021




Rejet non spécialement motivé


Mme DARBOIS, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président



Décision n° 10236 F

Pourvoi n° Q 20-15.319







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE,

FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 MAI 2021

1°/ M. [U] [G], domicilié [Adresse 1],

2°/ Mme [S] [G], épouse [S], domiciliée [Adresse 2],

3°/ M. [D] [G], domicilié [Adresse 2],...

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 mai 2021




Rejet non spécialement motivé


Mme DARBOIS, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président



Décision n° 10236 F

Pourvoi n° Q 20-15.319







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 MAI 2021

1°/ M. [U] [G], domicilié [Adresse 1],

2°/ Mme [S] [G], épouse [S], domiciliée [Adresse 2],

3°/ M. [D] [G], domicilié [Adresse 2],

4°/ M. [F] [W], domicilié [Adresse 1],

5°/ Mme [K] [G], épouse [Z], domiciliée [Adresse 3],

6°/ M. [L] [G], domicilié [Adresse 4],

7°/ Mme [V] [G], domiciliée [Adresse 5],

ont formé le pourvoi n° Q 20-15.319 contre l'arrêt rendu le 11 février 2020 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige les opposant à la société Roger Martin, société anonyme, dont le siège est [Adresse 6], défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Le Prado, avocat de MM. [U], [D], [L] et Mmes [S], [K] et [N] et de M. [W], de la SCP Krivine et Viaud, avocat de la société Roger Martin, et l'avis de M. Douvreleur, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 mars 2021 où étaient présents Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, M. Douvreleur, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. [U], [D], [L] et Mmes [S], [K] et [V] [G] et M. [W] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. [U], [D], [L] et Mmes [S], [K] et [V] [G] et M. [W] et les condamne à payer à la société Roger Martin la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille vingt et un, et signé par lui et Mme Champalaune, conseiller qui en a délibéré, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour MM. [U], [D], [L] et Mmes [S], [K] et [V] [G] et M. [W].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :


LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué,

D'AVOIR dit qu'un dol affecte l'acte de cession de parts sociales souscrit le 12 décembre 2007 entre M. [U] [G], Mme [S] [G] épouse [S], M. [D] [G], M. [F] [W], Mme [K] [G] épouse [Z], M. [L] [G] et Mme [V] [G] d'une part, et la société Roger Martin d'autre part et condamné les consorts [G] à payer à la société Roger Martin la somme de 1 056 594 euros correspondant à l'excès de prix de cession des parts sociales,

AUX MOTIFS QUE « sur l'action engagée à titre principal par la société Roger Martin fondée sur le dol, aux termes de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme des contrats, tel qu'applicable au litige, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé ; (?) ; que le dol est constitué par une tromperie ayant pour effet de vicier le consentement d'une partie au contrat ; que son élément matériel est caractérisé soit par un acte positif soit par une abstention qui peut se matérialiser par une réticence dolosive, soit le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter ; que le dol doit avoir été déterminant du consentement du cocontractant ; que l'élément intentionnel du dol implique la démonstration que l'auteur de la réticence avait l'intention de tromper son cocontractant pour le conduire à conclure le contrat ; (?) ;

qu'il convient de rappeler qu'aux termes du protocole de cession du 12 décembre 2007, la société Roger Martin s'est engagée à acquérir l'intégralité des titres composant le capital social de la société [Personne physico-morale 1] sous la condition particulière et déterminante pour les cédants de conclure deux baux commerciaux, l'un avec la SCI Gasper, M. [U] [G], Mme [I] [G], M. [D] [G] et Mme [X] [G] et l'autre avec la société MB Verdure ; qu'il est donc inexact d'affirmer, comme le font les appelants, que la souscription de ces baux n'était pas essentielle dans le consentement de la société Roger Martin qui en a expressément fait, dans la transaction, une condition déterminante à la cession des parts sociales ;

qu'il convient d'écarter la portée de la décision pénale - d'ailleurs non produite - par laquelle le tribunal correctionnel de Lyon a prononcé une relaxe de la société De Gasperis du chef de l'infraction au droit de l'environnement pour laquelle elle était poursuivie, l'enquête pénale mise en oeuvre l'ayant été pour des faits commis à compter du 11 janvier 2008, qui sont postérieurs à la signature des baux commerciaux et par conséquent à l'acte de cession ;

que, par ailleurs, l'arrêt rendu par la cour d'appel de Lyon le 8 mars 2016 précédemment mentionné, qui ne concerne que les relations entre les consorts [G] et la SCI Gasper d'une part - les bailleurs - et la SAS [Personne physico-morale 1] d'autre part - le preneur -, ne peut avoir la portée que tentent de lui donner les appelants ; que la société Roger Martin, non partie à l'instance, est en effet extérieure à ce litige dont l'objet ne portait que sur le respect de l'obligation de délivrance des bailleurs alors que le présent litige porte sur les relations "vendeurs-acquéreur" dans le cadre de l'acte de cession de parts sociales au regard de la condition particulière et déterminante de conclusion des baux commerciaux ; qu'au surplus, la cour observe qu'il n'est évoqué par la cour d'appel de Lyon, dans sa motivation pour débouter le preneur de sa demande de dommages et intérêts pour réticence dolosive, aucun fait antérieur à la souscription du bail du 4 janvier 2008, élément déterminant qui sera étudié plus avant par la cour ; qu'ainsi, il ne peut être tiré aucune conséquence par les consorts [G] de cette décision quant à une autorité de chose jugée qu'elle ne peut avoir, s'agissant d'un litige qui n'oppose pas les mêmes parties et qui ne porte pas sur le même objet ;

que M. [U] [G] a, dans ce litige, une double qualité puisqu'il est à la fois le représentant par mandat de l'ensemble des consorts [G] - les cédants - à l'acte de cession litigieux et le représentant par mandat des consorts [G] en leur qualité de bailleurs dans l'acte du 4 janvier 2008 ; qu'il est également intervenu à l'acte réalisé le même jour constatant la réalisation des conditions suspensives - notamment la souscription des deux baux commerciaux - et du paiement partiel du prix provisoire de la cession, acte qui a rendu ferme et définitif l'engagement de cession ; qu'il peut donc lui être opposé, à n'importe quel titre qu'il soit intervenu, le fait qu'il avait connaissance que les terrains objet des baux n'étaient pas en règle au regard de la législation sur l'urbanisme, et ce, en se plaçant au moment où les conditions suspensives ont été levées suite à la souscription de ces baux, rendant ainsi ferme et définitif l'acte de cession des parts sociales de l'entreprise [Personne physico-morale 1] ; que seules les pièces antérieures au 4 janvier 2008 - les baux étant la condition essentielle et déterminante de l'acte de cession des parts sociales - peuvent être retenues à charge ; que les pièces postérieures seront écartées ;

qu'il ressort du diagnostic réalisé le 10 mai 2005 par le service public d'assainissement non collectif que les installations d'assainissement autonome de la société [G] ne sont pas conformes ; qu'après l'acquisition des parts sociales de cette entreprise par la société Roger Martin, il a été demandé par la commune de [Localité 1] le 11 mai 2009 de mettre en conformité les installations ; que la situation n'avait donc pas été régularisée entretemps ; que ce point a été tu par les consorts [G] lors de l'acquisition des parts sociales ; qu'il ne s'agit néanmoins pas d'un élément qui apparaît essentiel dans le consentement de la société Roger Martin ;

qu'il ressort en revanche de la pièce n° 20 produite par la société Roger Martin intitulée "procès-verbal de constatation d'infraction à la législation sur l'urbanisme" dressé le 23 novembre 2007 que la responsable du service urbanisme de la mairie de [Localité 1], agent assermenté, a constaté : - le long de la parcelle cadastrée section AW n° [Cadastre 1] (appartenant à la société MB Verdure), parcelle classée en zone A (agricole) au plan local d'urbanisme, la présence de nombreux tas de terre, graviers et déchets variés, - sur les parcelles cadastrées section AW n° [Cadastre 2], [Cadastre 2], [Cadastre 2] et [Cadastre 2] appartenant pour chacune à un membre de la famille [G] la présence notamment d'une véritable décharge de déchets en tous genres (notamment des matériaux de chantier), la présence de nombreuses carcasses de véhicules et un dépôt de matériaux de chantier ; que l'agent assermenté relève que les terrains sur lesquels ont été réalisées ses constatations sont classés en zone A (agricole) au plan local d'urbanisme, exceptée la parcelle AW n° [Cadastre 2], dans laquelle sont seules autorisées les extensions de constructions à usage de bureaux ; qu'il ajoute qu'en zone A, sont notamment interdits les dépôts et les décharges de matériaux ; qu'il en résulte que les dépôts de matériaux, les décharges et les dalles ne respectent pas le plan local d'urbanisme et constituent une infraction aux règles de l'urbanisme et plus particulièrement à l'alinéa 1er de l'article L. 160-1 du code de l'urbanisme ; qu'il ne s'agit par conséquent pas de simples troubles de voisinage comme le soutiennent les consorts [G] - ceux-ci n'ont été que le facteur déclenchant du contrôle - mais d'une interdiction solennelle d'entreposer des matériaux sur les parcelles louées en raison de manquements à une réglementation impérative ; que ce procès-verbal a été rédigé hors la présence d'un représentant de l'entreprise [Personne physico-morale 1] - en tout cas, le procès-verbal ne la mentionne pas - ;

qu'il est antérieur à l'acte de cession du 12 décembre 2007 et il est justifié par la pièce n° 21 produite par l'intimée que ce procès-verbal d'infraction a été porté à la connaissance de la société [Personne physico-morale 1] et plus particulièrement de [U] [G] dont il a été dit précédemment qu'il avait une double qualité, par un envoi postal le 19 décembre 2007, soit après l'acte de cession mais avant la souscription des baux notée comme étant déterminante ; que l'accusé de réception de cette lettre d'information ne comporte aucune date mais il n'est pas contesté par les appelants dans leurs écritures - et ce alors que la société Roger Martin soutient que M. [G] avait connaissance de ce courrier lorsque les baux ont été souscrits - que celui-ci l'ait signé avant le 4 janvier 2008 (15 jours se sont écoulés entre la lettre et la signature des baux) ; qu'en effet, les appelants mettent seulement en évidence dans leurs conclusions en page 19 le fait que la notification du procès-verbal d'infraction est postérieure au protocole de cession ; qu'il en ressort que [U] [G], qui représentait également les bailleurs, savait, au moment de la souscription du bail (la SCI Gasper) que l'utilisation faite des parcelles n'était pas conforme aux règles de l'urbanisme et ce, alors que ce bail précisait expressément dans l'article intitulé "Destination des lieux loués" que les locaux, objet du bail, étaient exclusivement destinés à usage de bureaux, de stationnement et de stockage de matériaux et matériels ;

que, si la société Roger Martin, qui est une professionnelle des travaux publics et non une professionnelle de l'urbanisme, a pu avoir connaissance des documents d'urbanisme annexés aux baux, il n'en ressort pas expressément une classification qui interdirait l'activité envisagée, étant rappelé que l'entreprise [G][Personne physico-morale 1] y exerçait une activité de travaux publics depuis le 24 février 1982, l'ancienneté d'implantation sur le site pouvant lui laisser légitimement croire que cette activité était réalisée en toute légalité, et ce d'autant que les baux prévoyaient dans la destination des lieux loués la possibilité d'y entreposer des matériaux et des engins de chantier ; que c'est par ailleurs à juste titre que la société Roger Martin invoque le fait que dans le contrat de garantie du 4 janvier 2008 souscrit le même jour que les baux, les cédants concernés s'étaient engagés sur le fait que la société était en règle en matière d'environnement (paragraphe 5.12) et que les matériels et les Installations utilisés par la société étaient conformes aux prescriptions légales et réglementaires (paragraphe 5.13) alors que [U] [G], qui représentait les cédants, savait pertinemment à ce moment précis que tel n'était pas le cas, l'illégalité des conditions d'exploitation de la société cédée lui ayant été dénoncée ;

que, ce silence destiné à occulter la réalité - soit concrètement une impossibilité pour la société Roger Martin d'entreposer tout matériel, tout engin de chantier et tout matériau sur les parcelles concernées par le bail - ne peut qu'avoir été volontaire et n'avoir poursuivi d'autre but que celui de tromper l'acquéreur afin de le convaincre d'acquérir les parts sociales de l'entreprise [G][Personne physico-morale 1] ;

qu'il est au surplus relevé, même si ce fait est postérieur à la souscription des baux, que ce n'est qu'après le départ de la famille [G] début 2009, que la nouvelle direction de l'entreprise a découvert, par un courrier adressé par la police municipale de [Localité 1] le 26 mars 2009, que celle-ci avait été précédemment destinataire d'un arrêté préfectoral de mise en demeure le 8 février 2008, soit quelques jours seulement après la souscription des baux et qu'elle devait cesser toute activité de dépôt de matériaux de chantier, l'activité des parcelles étant exclusivement agricole ; qu'enfin, il est indiscutable que pouvoir entreposer pour une société de travaux publics du matériel de chantier, des engins et des matériaux sur les parcelles concernées par le bail fait partie intégrante de son activité et qu'il s'agit d'une condition essentielle et déterminante à son fonctionnement ; qu'or, il s'est avéré que sur les six parcelles louées, quatre d'entre elles (AW [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 2] et [Cadastre 2]) étaient classées en zone agricole et ne pouvaient recevoir ni constructions, ni parking, ni dépôts de matériaux et que la parcelle AW [Cadastre 2], réservée à une activité de bureaux, ne pouvait quant à elle pas recevoir de dépôt de matériaux de chantiers et qu'elle ne pouvait pas accueillir le stationnement d'engins de chantier ; qu'ainsi, il doit être considéré que la société Roger Martin n'aurait pas donné son consentement à l'acquisition des parts sociales si cette condition indispensable à l'exercice de l'activité qui est essentielle à la viabilité des baux eux-mêmes indivisibles du contrat de cession n'était pas remplie ;

que, compte tenu de ces éléments, il y a lieu d'infirmer la décision et de dire que les consorts [G] se sont rendus coupables d'un dol dans la cession des parts sociales à la société Roger Martin ;

que, sur les conséquences du dol, l'article 1117 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme des contrats, tel qu'applicable au litige, dispose que la convention contractée par erreur, violence ou dol, n'est point nulle de plein droit ; elle donne seulement lieu à une action en nullité ou en rescision dans les cas et de la manière expliqués à la section VII du chapitre V du présent titre ;

que, sur l'impossibilité de prononcer la nullité de la cession de parts sociales (?) ; qu'il n'est pas contestable et d'ailleurs pas réellement contesté par la société Roger Martin qu'il est impossible de prononcer la nullité de la cession, qui entraînerait la remise des choses dans l'état où elles se trouvaient avant le contrat, soit la restitution du prix d'acquisition des parts sociales, et ce compte tenu des restructurations et transferts d'activité intervenus depuis la cession du 12 décembre 2007, soit il y a plus de douze ans ; que la nullité de la convention n'étant donc pas juridiquement envisageable compte tenu de cet élément, il y a lieu d'examiner la demande formulée à titre dit "plus subsidiaire" par la société Roger Martin aux fins de voir réduire le prix d'acquisition des parts sociales ;

que, sur la réduction du prix, l'acquéreur victime d'un dol de la part de son vendeur peut former une action en nullité du contrat mais peut également engager une action en réduction du prix fondée elle aussi sur l'article 1116 du code civil, et ce par application du principe de réparation intégrale du préjudice causé par le dol ; qu'ainsi, la victime d'un dol peut faire réparer le préjudice que lui ont causé les manoeuvres de son cocontractant par une indemnisation pécuniaire prenant la forme d'une restitution de l'excès de prix qu'elle a été conduite à payer ;

(?) ;

qu'il est avéré que l'entreprise [Personne physico-morale 1] a été contrainte de déménager du fait de l'impossibilité pour elle de stocker ses matériaux et engins de chantier sur les parcelles louées ; qu'il est relevé à cet égard : - que le bail "SCI Gasper" comprenait une superficie de locaux loués s'établissant comme suit : *une parcelle de terrain cadastrée AW [Cadastre 2] de 762 m² * une parcelle de terrain cadastrée AW [Cadastre 2] de 2180 m² * une parcelle cadastrée AW [Cadastre 2] de 1900 m2 * une parcelle cadastrée AW [Cadastre 1] de 83 m² * une parcelle cadastrée AW [Cadastre 2] d 2304 m² - que le bail "MB Verdure" comprenait une parcelle de terrain cadastrée AW [Cadastre 1] de 1500 m² environ ; qu'il a été fait injonction à l'entreprise [Personne physico-morale 1] par la commune de [Localité 1] le 20 mars 2009 - faisant suite à un arrêté de mise en demeure du 8 février 2008 - de cesser toute activité de chantier sur les parcelles ayant un caractère agricole, ce qui l'a contrainte de trouver en urgence un nouveau site pour accueillir ses véhicules de chantier et pour entreposer son matériel (seuls ses bureaux ont été conservés quelque temps sur l'ancien site) ; que l'entreprise [Personne physico-morale 1] a signé une convention d'occupation précaire avec la SCI A4 Invest le 17 juin 2009 pour lui permettre de poursuivre son activité de stockage ; qu'il ressort du bail que la superficie de l'immeuble loué s'est trouvée de fait considérablement réduite par rapport à celle dont elle disposait auparavant (réduction à un local d'environ 250 m² avec un terrain attenant de 1 000 m²) et que ce déménagement ayant généré des frais l'a obligée à effectuer des transferts journaliers d'équipes des locaux à usage de bureaux conservés aux terrains nouvellement loués - et ce, jusqu'aux congés délivrés à effet du 31 décembre 2010 - ; que, compte tenu de la diminution avérée du chiffre d'affaires de l'entreprise entre le 31 décembre 2007 (7 491 576 euros) et le 31 mars 2010 (2 966 909 euros) mais en prenant en compte le fait que cette diminution, si elle a un lien avec l'impossibilité de stocker les matériaux, n'en est pas la cause exclusive puisque l'interdiction à ce titre ne s'est pas appliquée immédiatement après la souscription des baux, que la distance entre les deux sites était relativement réduite - 4,2 kms - limitant ainsi les inconvénients du transfert, mais également que l'entreprise continue actuellement son activité, la cour appréciera souverainement à 25 % le pourcentage correspondant à l'excès de prix qu'il convient d'affecter à la cession des parts sociales ; qu'en revanche, la perte de résultats bénéficiaires cumulés s'établissant au 31 décembre 2015 à 3 129 662 euros invoquée par la société Roger Martin pour voir majorer la réduction de prix ne peut être prise en compte à défaut de lien de causalité avéré entre la faute civile et le dommage ;

que, dès lors, [U] [G], [S] [G] épouse [S], [D] [G], [F] [W], [K] [G] épouse [Z], [L] [G] et [V] [G]) seront condamnés solidairement à payer à la société Roger Martin la somme de 1 056 594 euros (4 226 375 euros x 25 %) correspondant à l'excès de prix payé pour l'acquisition des parts sociales de la société [Personne physico-morale 1]. Compte tenu des développements précédents, il n'y a pas lieu d'étudier la garantie d'actif et de passif, question devenue sans objet par l'effet de la reconnaissance d'un vice du consentement ; que la décision sera par conséquent infirmée en ce qu'elle a statué sur la mise en oeuvre de cette garantie et alloué des dommages et intérêts à la société Roger Martin dans ce cadre » ;

1°/ ALORS QUE le dol doit être apprécié au moment de la formation du contrat ; qu'en se fondant, pour retenir le dol, sur un procès-verbal d'infraction, notifié par lettre recommandée, le 19 décembre 2007, et donc après la date de conclusion de la cession litigieuse, le 12 décembre 2007, la cour d'appel, qui n'a pas apprécié le dol au moment de la formation du contrat, a violé l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ ALORS QUE le dol doit être apprécié au moment de la formation du contrat ; qu'en se fondant, pour retenir le dol, sur la circonstance que la société [Personne physico-morale 1] avait « été destinataire d'un arrêté préfectoral de mise en demeure le 8 février 2008, soit quelques jours seulement après la souscription des baux et qu'elle devait cesser toute activité de dépôt de matériaux de chantier, l'activité des parcelles étant exclusivement agricole », la cour d'appel, qui n'a pas apprécié le dol au moment de la formation du contrat, a violé l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ ALORS, en toute hypothèse, QUE les faits allégués par une partie ne peuvent être tenus pour constants au seul motif qu'ils ne sont pas expressément contestés par la partie adverse ; qu'en se fondant, pour retenir le dol, sur un procès-verbal d'infraction, notifié par lettre recommandée, le 19 décembre 2007, dont elle relevait que l'accusé de réception « ne comporte aucune date mais (qu') il n'est pas contesté par les appelants dans leurs écritures - et ce alors que la société Roger Martin soutient que M. [G] avait connaissance de ce courrier lorsque les baux ont été souscrits - que celui-ci l'ait signé avant le 4 janvier 2008 (15 jours se sont écoulés entre la lettre et la signature des baux) », la cour d'appel qui a tenu pour constant que M. [U] [G] a signé l'accusé de réception avant le 4 janvier 2008 sur la seule considération que ce fait, invoqué par la société Roger Martin, sur laquelle pesait la charge de la preuve du dol qu'elle invoquait, n'a pas été contesté par les cédants, a violé l'article 6 du code de procédure civile ;

4°/ ALORS, en toute hypothèse, QUE le dol par réticence est exclu si la partie qui l'invoque était à même de prendre connaissance de l'information qui ne lui aurait pas été transmise ; que, pour prononcer la nullité de la cession pour dol, la cour d'appel s'est fondée sur la circonstance que les cédants auraient caché à la société Roger Martin que partie des parcelles données à bail à la société cédée étaient situées en zone agricole, cette dernière, du fait de la présence de dépôts de matériaux, de décharges et de dalles sur ces parcelles, exerçant ainsi son activité en infraction avec les règles d'urbanisme et de protection de l'environnement ; qu'en statuant ainsi, cependant que, le plan local d'urbanisme étant public, le cessionnaire ne pouvait ignorer le classement des parcelles en zone agricole, et que la présence sur ces parcelles de dépôts de matériaux, décharges et dalles était apparente, de sorte qu'était exclue toute manoeuvre dolosive des cédants, la cour d'appel a violé l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

5°/ ALORS, en toute hypothèse, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motivation ; que, dans leurs écritures d'appel, les exposants ont invoqué l'arrêt du 8 mars 2016 rendu par la cour d'appel de Lyon pour conclure, à partir de ses motifs, à l'absence de dol pouvant leur être imputé (concl., p. 15) ; qu'en se bornant à opposer à ces chefs de conclusions l'absence d'autorité de chose jugée dudit arrêt, lequel valait pourtant comme fait juridique, sans procéder à l'analyse de ses motifs, invoqués par les exposants, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

LE MOYEN reproche à l'arrêt infirmatif attaqué,

D'AVOIR condamné solidairement M. [U] [G], Mme [S] [G] épouse [S], M. [D] [G], M. [F] [W], Mme [K] [G] épouse [Z], M. [L] [G] et Mme [V] [G] à payer à la société Roger Martin la somme de 1 056 594 euros correspondant à l'excès de prix de cession des parts sociales

AUX MOTIFS QUE « sur les conséquences du dol, l'article 1117 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme des contrats, tel qu'applicable au litige, dispose que la convention contractée par erreur, violence ou dol, n'est point nulle de plein droit ; elle donne seulement lieu à une action en nullité ou en rescision dans les cas et de la manière expliqués à la section VII du chapitre V du présent titre ;

que, sur l'impossibilité de prononcer la nullité de la cession de parts sociales (?) ; qu'il n'est pas contestable et d'ailleurs pas réellement contesté par la société Roger Martin qu'il est impossible de prononcer la nullité de la cession, qui entraînerait la remise des choses dans l'état où elles se trouvaient avant le contrat, soit la restitution du prix d'acquisition des parts sociales, et ce compte tenu des restructurations et transferts d'activité intervenus depuis la cession du 12 décembre 2007, soit il y a plus de douze ans ; que la nullité de la convention n'étant donc pas juridiquement envisageable compte tenu de cet élément, il y a lieu d'examiner la demande formulée à titre dit "plus subsidiaire" par la société Roger Martin aux fins de voir réduire le prix d'acquisition des parts sociales ;

que, sur la réduction du prix, l'acquéreur victime d'un dol de la part de son vendeur peut former une action en nullité du contrat mais peut également engager une action en réduction du prix fondée elle aussi sur l'article 1116 du code civil, et ce par application du principe de réparation intégrale du préjudice causé par le dol ; qu'ainsi, la victime d'un dol peut faire réparer le préjudice que lui ont causé les manoeuvres de son cocontractant par une indemnisation pécuniaire prenant la forme d'une restitution de l'excès de prix qu'elle a été conduite à payer ;

(?) ;

qu'il est avéré que l'entreprise [G] a été contrainte de déménager du fait de l'impossibilité pour elle de stocker ses matériaux et engins de chantier sur les parcelles louées ; qu'il est relevé à cet égard : - que le bail "SCI Gasper" comprenait une superficie de locaux loués s'établissant comme suit : *une parcelle de terrain cadastrée AW [Cadastre 2] de 762 m² * une parcelle de terrain cadastrée AW [Cadastre 2] de 2180 m² * une parcelle cadastrée AW [Cadastre 2] de 1900 m2 * une parcelle cadastrée AW [Cadastre 1] de 83 m² * une parcelle cadastrée AW [Cadastre 2] d 2304 m² - que le bail "MB Verdure" comprenait une parcelle de terrain cadastrée AW [Cadastre 1] de 1500 m² environ ; qu'il a été fait injonction à l'entreprise [G] par la commune de [Localité 1] le 20 mars 2009 - faisant suite à un arrêté de mise en demeure du 8 février 2008 - de cesser toute activité de chantier sur les parcelles ayant un caractère agricole, ce qui l'a contrainte de trouver en urgence un nouveau site pour accueillir ses véhicules de chantier et pour entreposer son matériel (seuls ses bureaux ont été conservés quelque temps sur l'ancien site) ; que l'entreprise [G] a signé une convention d'occupation précaire avec la SCI A4 Invest le 17 juin 2009 pour lui permettre de poursuivre son activité de stockage ; qu'il ressort du bail que la superficie de l'immeuble loué s'est trouvée de fait considérablement réduite par rapport à celle dont elle disposait auparavant (réduction à un local d'environ 250 m² avec un terrain attenant de 1 000 m²) et que ce déménagement ayant généré des frais l'a obligée à effectuer des transferts journaliers d'équipes des locaux à usage de bureaux conservés aux terrains nouvellement loués - et ce, jusqu'aux congés délivrés à effet du 31 décembre 2010 - ; que, compte tenu de la diminution avérée du chiffre d'affaires de l'entreprise entre le 31 décembre 2007 (7 491 576 euros) et le 31 mars 2010 (2 966 909 euros) mais en prenant en compte le fait que cette diminution, si elle a un lien avec l'impossibilité de stocker les matériaux, n'en est pas la cause exclusive puisque l'interdiction à ce titre ne s'est pas appliquée immédiatement après la souscription des baux, que la distance entre les deux sites était relativement réduite - 4,2 kms - limitant ainsi les inconvénients du transfert, mais également que l'entreprise continue actuellement son activité, la cour appréciera souverainement à 25 % le pourcentage correspondant à l'excès de prix qu'il convient d'affecter à la cession des parts sociales ; qu'en revanche, la perte de résultats bénéficiaires cumulés s'établissant au 31 décembre 2015 à 3 129 662 euros invoquée par la société Roger Martin pour voir majorer la réduction de prix ne peut être prise en compte à défaut de lien de causalité avéré entre la faute civile et le dommage ;

que, dès lors, [U] [G], [S] [G] épouse [S], [D] [G], [F] [W], [K] [G] épouse [Z], [L] [G] et [V] [G]) seront condamnés solidairement à payer à la société Roger Martin la somme de 1 056 594 euros (4 [Cadastre 2] 375 euros x 25 %) correspondant à l'excès de prix payé pour l'acquisition des parts sociales de la société [Personne physico-morale 1] ; que, compte tenu des développements précédents, il n'y a pas lieu d'étudier la garantie d'actif et de passif, question devenue sans objet par l'effet de la reconnaissance d'un vice du consentement ; que la décision sera par conséquent infirmée en ce qu'elle a statué sur la mise en oeuvre de cette garantie et alloué des dommages et intérêts à la société Roger Martin dans ce cadre » ;

ALORS QUE le préjudice réparable de la victime d'un dol, si le contrat n'est pas annulé, correspond uniquement à la perte de la chance d'avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses ; qu'en condamnant cependant les cédants à payer à la société Roger Martin la somme de 1 056 594 euros correspondant à l'excès de prix payé pour l'acquisition des parts sociales de la société [Personne physico-morale 1], après avoir pourtant décidé de ne pas annuler le contrat, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient du maintien de la cession de parts sociales, d'où il résultait que le cessionnaire ne pouvait avoir réparation que de la chance d'avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses, a violé l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 1382, devenu 1240, du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 20-15.319
Date de la décision : 12/05/2021
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, arrêt n°20-15.319 : Rejet

Décision attaquée : Chambre civile de la cour d'appel de Reims


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 12 mai. 2021, pourvoi n°20-15.319, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.15.319
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