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05/05/2021 | FRANCE | N°19-20.595

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 05 mai 2021, 19-20.595


COMM.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 5 mai 2021




Rejet non spécialement motivé


M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10222 F

Pourvoi n° D 19-20.595




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQU

E, DU 5 MAI 2021

M. [B] P. [O], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 19-20.595 contre l'arrêt rendu le 14 mai 2019 par la cour d'appel de Versailles (1...

COMM.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 5 mai 2021




Rejet non spécialement motivé


M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10222 F

Pourvoi n° D 19-20.595




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 MAI 2021

M. [B] P. [O], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 19-20.595 contre l'arrêt rendu le 14 mai 2019 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société TBI, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], représentée par la société C Plus, en liquidation judiciaire, elle-même représentée par la société Prospheres, représentée par la société Prospheres, dont le siège est [Adresse 3],

2°/ à M. [O] [E], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société TBI,



3°/ au procureur général près la cour d'appel de Versailles, domicilié en son parquet général, 5 rue Carnot, 78000 Versailles,

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations écrites de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de M. P. [O], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [E], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 9 mars 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. P. [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. P. [O] et le condamne à payer à M. [E], en qualité de liquidateur judiciaire de la société TBI, la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. P. [O].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. [O] de sa demande de production de pièces ;

Aux motifs que « Sur la demande de production de pièces : qu'au motif qu'il n'a plus accès aux données comptables de l'entreprise et reprochant au liquidateur judiciaire d'inverser la charge de la preuve, M. [O] demande à la cour d'ordonner à ce dernier de produire l'ensemble des pièces comptables pertinentes, et en particulier le journal de banque et les relevés bancaires, permettant à la cour de constater les règlements (virements et chèques) réalisés par la société TBI au profit des caisses sociales sur la période du 1er janvier 2017 au 30 juin 2017 afin de compléter les éléments de preuve qu'il verse aux débats pour démontrer que les montants courants dus notamment à Pro BTP à compter du mois de janvier 2017 ont été payés ; qu'il ajoute que les déclarations de créance ne sont pas des éléments objectifs et incontestables ; que Me [E] réplique, d'une part, que M. [O], qui a été dirigeant de la société TBI et qui a donc été en possession des pièces comptables, doit être capable de prouver que la société s'est libérée de ses obligations en paiement ; qu'il considère que la demande de communication de "l'ensemble des pièces comptables", de par son caractère général, est purement dilatoire et vise en réalité à tenter de retarder cette procédure et d'inverser la charge de la preuve ; qu'en application de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; que s'il est exact qu'une créance déclarée peut être utilement contestée, il n'en reste pas moins que sa déclaration constitue un commencement de preuve de non-paiement, surtout lorsqu'elle n'est pas contestée dans son existence ou son exigibilité, élément que la société TBI, qui est présente à la procédure et qui ne verse aucune pièce comptable, est en capacité de rapporter ; que M. [O] a exercé les fonctions de président de la société C Plus et donc de la société TBI du 23 mai 2016 au 23 juin 2017, en sorte qu'il a eu accès aux documents, notamment comptables, de la société TBI durant cette période ; que, de fait, il verse aux débats des attestations établissant que la société TBI s'est partiellement acquittée de ses obligations en paiement durant sa présidence et la société TBI elle-même produit certaines copies de chèques adressés à CI BTP ; que la demande de communication de pièces, au surplus insuffisamment déterminée, qui n'est pas utile à la solution du litige, n'est par conséquent pas justifiée et doit être rejetée » ;

1) Alors que s'il appartient à celui qui formule un moyen de rapporter les éléments de preuve qui viennent à son soutien, la charge de la preuve ne peut peser sur la partie qui est dans l'impossibilité de produire les éléments de preuve nécessaires au soutien de sa prétention ; que la charge de la preuve doit au contraire être attribuée à celle des parties qui détient, entre ses mains, les éléments de preuve de nature à confirmer ou infirmer ses allégations ; que la cour d'appel pour écarter la demande de production de pièces formulée par M. [O], a fait peser sur ce dernier la charge de la preuve ; qu'en statuant ainsi, alors que Me [E], ès qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société TBI disposait de tous les documents comptables et était en mesure de les produire en vue de la résolution du litige, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile ;

2) Alors que s'il appartient à celui qui formule un moyen de rapporter les éléments de preuve qui viennent à son soutien, la charge de la preuve ne peut peser sur la partie qui est dans l'impossibilité de produire les éléments de preuve nécessaires au soutien de sa prétention ; que, pour écarter cette impossibilité pour M. [O] d'avoir accès aux documents comptables susceptibles d'établir ses allégations, la cour d'appel a retenu que « M. [O] [sic] a exercé les fonctions de président de la société C Plus et donc de la société TBI du 23 mai au 23 juin 2017, en sorte qu'il a eu accès aux documents, notamment comptables, de la société TBI durant cette période » ; qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne sont pas de nature à établir que M. [O] était, au cours de la procédure, en mesure de produire les documents comptables nécessaires au soutien de ses prétentions, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :


Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir fait droit à la demande de Me [E] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TBI de reporter la date de la cessation des paiements, initialement fixée au 1er juillet 2017, au 31 décembre 2016 ;

Aux motifs que « Sur le report de la date de cessation des paiements : qu'après avoir rappelé les dispositions de l'article L. 631-1 du code de commerce, la société TBI soutient que l'état de cessation des paiements doit être apprécié de façon dynamique, en conduisant une analyse précise des flux de trésorerie de l'entreprise, pour mettre en rapport les dates auxquelles les paiements sont dus avec la trésorerie disponible à ces dates, et non de façon bilantielle et donc statique comme retenue par le tribunal. Elle explique que le 15 décembre 2016 la CCSF lui a consenti un plan d'apurement d'une créance fiscale et sociale d'un montant de 9 209 713 euros, sur une période de trente-six mois, assortie d'une condition résolutoire consistant en l'obtention dans un délai de trois mois de moratoires de la part de ses autres créanciers publics ; que c'est à tort que le tribunal de commerce a considéré que cette condition n'avait pas été respectée ; que la CCSF n'a jamais dénoncé son échéancier ; que les accords de règlement qu'elle produit démontrent que les caisses CI BTP et Pro BTP lui ont accordé plusieurs moratoires par courriers des 19 et 28 décembre 2016 ; que les dettes ainsi moratoriées, pour un montant total de 9 943 241,22 euros, doivent donc être sorties de l'analyse du passif exigible ; que les échéances impayées pendant la conciliation doivent également être sorties de l'analyse du passif, car l'inverse aurait pour effet d'entrainer un report de la date de cessation des paiements qui invaliderait la quasi-totalité des conciliations ouvertes en France ; que le retard de paiement des échéances dues à Pro BTP et CI BTP, ultérieurement honorées, est insufflant à induire un état de cessation des paiements ; que, dans le cadre respectivement du mandat ad hoc puis de la conciliation, de la "new money" lui a été apportée en décembre 2016 et avril 2017, à hauteur de 8 et 12,5 millions d'euros, ces apports lui ayant permis de faire face à ses besoins de trésorerie jusqu'au 15 juin 2017, soit 45 jours avant la date de cessation des paiements axée dans le jugement d'ouverture ; qu'en conséquence, les éléments retenus par le tribunal de commerce sont insuffisants pour caractériser l'état de cessation des paiements au 31 décembre 2016 ; que M. [O] soutient pour l'essentiel que la société TBI a parfaitement respecté l'ensemble des engagements auxquels était subordonné le moratoire CCSF puisqu'il a obtenu, le 19 décembre 2016 un "moratoire CI BTP", puis les 23 et 28 décembre 2016, un "moratoire Pro BTP" et que c'est justement parce qu'elle était à jour de ses dettes exigibles qu'elle a pu obtenir le 21 avril 2017 l'ouverture d'une conciliation ; qu'il critique les montants retenus par le tribunal au titre du passif exigible et prétend que celui-ci ne pouvait pas prononcer la résolution de plein droit et rétroactive du moratoire CCSF, seule celle-ci pouvant le faire moyennant l'envoi préalable d'une mise en demeure ; que Me [E] rappelle en premier lieu que la société TBI connait des difficultés financières chroniques depuis 2012, que son activité était déficitaire en 2015 et 2016, qu'au 31 décembre 2016, ses capitaux propres étaient négatifs à hauteur de 21.739.411 euros, qu'elle cumulait alors près de 28 millions d'euros de pertes et un passif échu de 9 945 675 euros ; qu'il explique en deuxième lieu que le tribunal de commerce n'a pas eu recours à une analyse « bilantielle », mais qu'il a opéré une comparaison entre l'actif disponible et le passif exigible de la société TBI au 31 décembre 2016 pour conclure à son état de cessation des paiements ; qu'indiquant que les dettes fiscales et sociales s'élevaient, courant décembre 2016, à la somme totale de 9.677.238 euros, dont 8.207.922 euros au titre de créances fiscales, 1.342.021 euros au titre de cotisations dues à l'Urssaf et 127 295 euros au titre de cotisations dues au RSI, il prétend que dès le mois de janvier 2017, la société TBI n'a pas respecté les conditions résolutoires du moratoire qui lui avait été accordé par la CCSF le 15 décembre 2016, en ce qu'elle n'a pas respecté l'échéancier obtenu auprès de la caisse Pro BTP, lui-même assorti d'une condition résolutoire au premier défaut de règlement des cotisations courantes, ce qui a été le cas entre janvier et août 2017, de sorte que l'accord est devenu caduc, ajoutant que le passif impayé auprès de la caisse Pro BTP a augmenté de près de 900 000 euros à cette période, qu'en juin et juillet 2017, les cotisations dues à l'Urssaf n'ont pas été réglées comme les échéances de TVA du mois de juin 2017 ; qu'il considère que le non-respect du moratoire consenti par la CCSF ne fait pas obstacle au report rétroactif de la date de cessation des paiements à la date d'exigibilité initiale, soit le 31 décembre 2016, peu important son absence de dénonciation dès lors qu'il n'y a pas à rechercher si le passif exigible a été effectivement exigé ; qu'il soutient, en troisième lieu, que l'ouverture d'une procédure de conciliation n'a pas pour effet d'autoriser la société débitrice à ne pas régler son passif, n'est pas exonératoire de responsabilité si elle échoue et ne fait pas obstacle au report de la date de cessation des paiements à une date antérieure à l'ouverture de la conciliation ou d'un mandat ad hoc, étant souligné qu'en l'espèce l'accord de conciliation n'a pas été homologué ; que Me [E], ès qualités, expose enfin qu'au 31 décembre 2016 l'actif disponible de la société TBI s'élevait à la somme de 4.155.300 euros, étant précisé que l'apport de fonds de 8 millions d'euros intervenu le 16 décembre précédent, en partie consommé, est compris dans ce montant, et que l'apport de 12,5 millions d'euros à compter d'avril 2017, par paiements échelonnés, était destiné exclusivement à couvrir les charges courantes durant la conciliation pour permettre une cession de l'activité et non à régler le passif accumulé ; que selon les articles L. 63l-8 et L. 641-1 1V du code de commerce, la date de cessation des paiements peut être reportée une ou plusieurs fois, sans pouvoir être antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d'ouverture de la procédure ; que sauf cas de fraude, elle ne peut être reportée à une date antérieure à la décision définitive ayant homologué un accord amiable en application du II de l'article L. 611-8 ; que le tribunal est saisi par l'administrateur, le mandataire judiciaire ou le ministère public ; qu'il se prononce après avoir entendu ou dument appelé le débiteur ; que la demande de modification de date doit être présentée au tribunal dans le délai d'un an à compter du jugement d'ouverture de la procédure ; que la recevabilité de la demande présentée par le liquidateur judiciaire dans le délai susvisé n'est pas critiquée ; qu'aux termes de l'article L. 63l-l du code de commerce tout débiteur dans l'impossibilité de faire face an passif exigible avec son actif disponible est en cessation des paiements ; que le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face an passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements ; qu'il appartient au liquidateur judiciaire, demandeur du report, d'établir qu'au 31 décembre 2016 la société TBI se trouvait déjà en état de cessation des paiements ; qu'il convient de rappeler également que la décision ouvrant la procédure de conciliation n'a pas, en cas d'échec comme en l'espèce, autorité de chose jugée quant à la date de cessation des paiements et que cette procédure ne dispense pas la débitrice du paiement de ses charges courantes avant d'avoir obtenu un accord en ce sens de la part de ses créanciers ; * Sur l 'actif disponible : que les états financiers de la société TBI au 31 décembre 2016 font état de capitaux propres négatifs de 21.739.411 euros, de dettes à hauteur de 64.702.354 euros dont 22.793.763 euros de dettes fiscales et sociales, de pertes à hauteur de 20 404 380 euros et de disponibilités à hauteur de 4 155 300 euros ; que ni la société TBI ni M. [O] ne justifient d'autres actifs disponibles, étant souligné que l'apport de 8 millions d'euros a été effectué par la société KBC le 16 décembre 2016, en sorte qu'il est compris dans les disponibilités figurant à l'actif du bilan ; * Sur le passif exigible : qu'il est justifié que : - le 15 décembre 2016, la CCSF a consenti à la société TBI un plan d'apurement échelonné pour le règlement de l'ensemble de ses dettes fiscales et sociales d'un montant global de 9 209 713 euros en principal, par mensualités de 255 826 euros à compter du 22 décembre 2016, sous trois conditions résolutoires dont un apport de 8 millions d'euros de la part de l'actionnaire pour financer l‘exploitation et l'obtention de moratoire(s) avec les créanciers publics hors CCSF de durées de remboursement au moins égales à celles des créanciers publics (36 mois) ; qu'il y est précisé que "la CCSF constatera la résolution du plan, et les poursuites seront reprises par les créanciers publics par route voie de droit dans les cas suivants : non-paiement d 'une échéance du plan d'apurement échelonné, infraction à la réglementation fiscale, de celle de la Sécurité sociale ou de l 'assurance chômage : non-dépôt de déclarations courantes, non-paiement des sommes dues... ". L'état des dettes incluses dans ce plan mentionne notamment la TVA des mois de mars 2016 à juin 2016, les cotisations Urssaf des mois d'avril 2016 à juillet 2016 et les cotisations C3S dues au Rsi pour l'année 2016 ; - le 19 décembre 2016, la caisse CI BTP de l'ile de France a accordé à la société TBI deux échéanciers pour le paiement des sommes de 712 606,13 euros et 20 922,22, soit 32 échéances de 26 000 euros et de 7 100 euros le 30 de chaque mois de décembre 2016 à février 2017 et juillet 2019. Ces accords précisent que "le défaut de paiement de l'une des échéances de cet accord, comme le non-paiement de sommes devenues exigibles depuis lors rendrait cet accord caduc avec toutes conséquences de droit. La caisse serait alors dans l'obligation de poursuivre le recouvrement des sommes dues sans autre avis " ; que les 23 et 28 décembre 2016, la société TBI a reconnu devoir à la caisse Pro BTP les sommes de 199 395,92 euros x 4 et 74 773,47 euros au titre de cotisations, majorations et pénalités, laquelle lui a consenti des accords de règlement en 32 billets à ordre de 24 924,49 euros payables chaque mois à compter du 31 janvier 2017, pour les premières et en trois billets à ordre de 24.924,49 euros payables chaque mois de septembre à novembre 2019, pour la seconde ; que ces accords prévoient que "Pour la bonne exécution de l 'accord, tout manquement à cet engagement vis-à-vis de l'arriéré comme des cotisations courantes le rendrait caduc et aurait pour effet l'exigibilité immédiate de l'ensemble de la dette par voie judiciaire" ; que la société TBI rapporte la preuve de l'envoi de chèques à la caisse CI BTP soit 7 100 euros le 2 janvier 2017 et le 27 janvier 2017, 7 029,59 euros le 24 février 2017, 26 000 euros les 27 janvier 2017, 24 février 2017, 30 mars 2017, 29 mai 2017 et 29 juin 2017 ; qu'il est également versé aux débats une attestation de CI BTP, datée du 2 juin 2017, informant que la société TBI a réglé en janvier 2017 ses cotisations au titre des congés payés et du chômage-intempéries et que les cotisations de février 21 avril 2017 font l'objet d'un accord de paiement qui est respecté, qu'il n'est toutefois pas justifié du versement des mensualités dues à Pro BTP et à la CCSF sur la même période dès lors que les documents établis par le cabinet [Q] ne font état que des paiements réalisés entre le 3 avril et le 22 mai 2017 pour les moratoires CCSF et BTP, étant relevé en outre qu'il y est mentionné qu'un paiement de 25 000 euros y afférent n'a pas été encaissé ; que les moratoires fiscaux et sociaux ne suspendent l'exigibilité du passif échu qu'à la condition d'être respectés en même temps que sont payées les nouvelles échéances ; que la déclaration de cessation des paiements déposée par le représentant légal de la société Prospères, présidente de la société C Plus, elle-même présidente de la société TBI, datée du 31 juillet 2017 mentionne différentes dettes dont : l'échéance de juin de l'Urssaf (334 814 euros), l'échéance courante de Pro BTP (384 320 euros), la dette moratoriée de Pro BTP (715 420 euros), l'échéance de TVA de juin (544 363 euros), la dette moratoriée du Trésor public (7 886 456 euros), démontrant ainsi le non-respect des moratoires accordés ; que, par ailleurs, il résulte des déclarations de créance que : - le PRS de Versailles a déclaré le 13 septembre 2017 une créance de 13 185 652 euros dont 6 180 652 euros à titre privilégié et définitif correspondant à la TVA due de mars à juin 2016 ; - l'Urssaf a déclaré le 13 février 2018 une créance de l 286 301,20 euros correspondant aux cotisations dues de mai 21 juillet 2016 (996 881 euros) puis de juin à octobre 2017 ; - Pro BTP a notamment déclaré le 29 août 2017 les créances suivantes : * CNRBPPIG et BTP Prévoyance (cadre) : 164 327 euros correspondant à 43 508 euros dus au 31 décembre 2016 ainsi qu'aux cotisations dues du 1er janvier au 4 août 2017 ; * BTP Retraite et Prévoyance (ouvrier) : 985 799 euros correspondant à 372 384 euros dus au 31 décembre 2016 ainsi qu'aux cotisations dues du 1er janvier au 4 août 2017 ; * BTP Retraite et Prévoyance (Etam) : 444 242 euros correspondant à 144 176 euros dus au 31 décembre 2016 ainsi qu'aux cotisations dues du 1er janvier au 4 août 2017 ; * Constructys OPCA : 79 966 euros dont 13 988 euros dus au 31 janvier 2017 et 65 978 euros dus entre le 1er février et le 4 août 2017 ; que différentes créances chirographaires ([Z], [G] [M], SAS AAD Phenix II, Ounot, Kat, Hays BTP, SARL La Touraine, SAS Algeco, Entreprise [A] [I], Colas, CBM Securité), non contestées, restaient dues au 31 décembre 2016 a hauteur de 175 894,32 euros ; que ces déclarations de créance démontrent que nombre de cotisations courantes n'ont pas été réglées entre les mois de janvier et juin 2017 et que le passif fiscal et social 3 augmenté durant l'exécution des moratoires ; que l'attestation établie par Pro BTP indiquant "qu'en tenant compte des éléments connus à cette date et sous réserve du paiement de la totalité des échéances du plan d'échelonnement, [la société TBI] est à jour des cotisations au 30.12.2016" est totalement inopérante à rapporter la preuve de l'absence d'état de cessation des paiements au 31 décembre 2016 compte tenu de la date à laquelle elle a été établie, le 20 janvier 2017, et de la durée du plan d'apurement consenti moins d'un mois auparavant ; que les documents établis par le cabinet [Q] en mai et juin 2017, versés aux débats en anglais et non traduits, qui constituent une mise à jour des estimations faites sur une période d'observation, démontrent seulement le paiement des moratoires CCSF et des caisses BTP, outre les cotisations courantes de l'Urssaf, entre le 3 avril et le 22 mai 2017, étant souligné qu'il y est également précisé qu'un versement de 25 000 euros n'a pas été encaissé et que les paiements en retard ont augmenté par rapport aux estimations initiales ; que si les apports effectués par l'actionnaire ne sont pas contestés, il ressort, d'une part, des termes mêmes de la requête aux fins d'ouverture d'une conciliation en date du 18 avril 2017, signée par M. [O], président des sociétés C Plus et TBI, que le besoin de trésorerie de 12,5 millions d'euros n'est pas destiné à financer le passif mais à "assurer le financement de l 'activité pendant une période de trois mois, s 'étendant du 16 avril au 15 juillet 2017, de sorte que TBI puisse lancer un appel à candidature pour la cession totale ou partielle de l'entreprise" et, d'autre part, de l'ordonnance y faisant droit que le paiement de cette somme est échelonné du 16 avril au 15 juillet 2017 ; qu'il se déduit de ces éléments que le passif échu exigible de la société TBI à la date du 31 décembre 2016 s'élevait à tout le moins à la somme de 7.913.495,32 euros (6.180.652 + 996.881+ 43.508 + 372.384 + 144.176 + 175.894,32), et qu'il était donc supérieur à l'actif disponible ; qu'ainsi ni les apports de l'actionnaire ni les moratoires accordés en décembre 2016, devenus caducs du fait de leur inexécution partielle et du non-paiement des charges courantes conformément aux clauses qu'ils contiennent, n'ont mis fin a un état de cessation des paiements acquis dès le 31 décembre 2016, peu important que les moratoires n'aient pas été dénoncés et le passif échu exigé avant que la société TBI ne déclare son état de cessation des paiements le 31 juillet 2017 ; que, dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande du liquidateur judiciaire et de reporter la date de cessation des paiements de la société TBI au 31 décembre 2016 ; qu'il ne peut pas y avoir recouvrement direct des dépens par l'avocat de l'intimé compte tenu de l'ouverture de la procédure collective » (arrêt attaqué, p. 5-11) ;

Et aux motifs éventuellement adoptés qu'« un état de cessation des paiements est caractérisé par l'impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible, y compris une éventuelle réserve de crédit ; que les moratoires fiscaux constituent une réserve de crédit à la condition qu'ils soient respectés ; qu'en date du 15 décembre 2016, la Direction Générale des Finances Publiques a notifié à la société TBI la décision de la Commission des Chefs des Services Financiers et des Représentants des Organismes de Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et l'Assurance Chômage (CCSF) arrêtant un plan d'apurement des dettes de l'entreprise SASU TBI ; que cette décision précise : « ce plan comporte également trois conditions résolutoires, lesquelles devront être mise en oeuvre dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente lettre : Obtention de moratoire (s) avec les créanciers publics hors CCSF de durée de remboursement au moins égales à celles des créanciers publics dans le cadre de la CCSF (36 mois) » et « Je vous précise également que la CCSF constatera la résolution du plan, ..., dans les cas suivants : infraction à la réglementation fiscale, à celle de sécurité sociale ou de l'assurance chômage, non-dépôts des déclarations courantes, non-paiement de sommes dues » ; que dans ce cadre et conditions résolutoires, la CCSF a accordé à la société TBI un plan d'apurement échelonné pour le règlement de l'ensemble des dettes fiscales, dont le montant global s'élève à 9.209.713 € en principal ; que, d'une part, la société TBI ne justifie pas d'avoir obtenu et/ou conclu un moratoire avec les autres caisses de sécurité sociale dont elle dépendait ; que, par correspondance en date du 24 août 2017, la caisse de retraite et de prévoyance PRO BTP a déclaré au passif de la société TBI une créance totale d'un montant de 1.594.578 € comportant en particulier un montant de 372.384 € impayé arrêté au 31 décembre 2016, au titre des créances de BTP-Retraite (ouvrier) et BTP-Prévoyance (ouvrier), 144.176 € arrêté à la même date an titre de BTP-Retraite (ETAM) et BTP-Prévoyance (ETAM) et 43.508 € au titre de CNRBTPIG et BTP-Prévoyance (cadre) ; que, il ressort des pièces versées aux débats, que la société TBI n'a pas réglé ses cotisations URSSAF pour les mois de juin et juillet 2017, ses différentes cotisations dues 21 PRO BTP depuis janvier 2017 et l'échéance fiscale de TVA de juin 2017 ; qu'ainsi, la société TBI n'a pas respecté deux conditions, résolutoires, du plan d'apurement de ses dettes daté du 15 décembre 2016, à savoir l'obtention de moratoire (s) et le paiement des sommes dues à bonne date ; qu'en conséquence, le plan d'apurement accordé par la CCSF étant résolu, les passifs fiscaux et créances URSSAF, objet du dit plan, à savoir 9.209.713 €, étaient exigibles au 31 décembre 2016 et ne peuvent constituer une réserve de crédit ; que, de plus, au 31 décembre 2016, la société TBI était débitrice, vis-à-vis, de PRO BTP de la somme globale de 560.068 € (372.384 € à la caisse ouvrier, 144.176 € à la caisse BTAM et 45.508 € a la caisse cadre) ; que l'état de synthèse du passif et la liste des créances chirographaires déclarées fait ressortir un passif échu pour un montant 175.894 € ; qu'en conséquence, le passif arrêté au 31 décembre 2016 s'élevait à 9.945.675 € (9.209.713 € + 560.068 € + 175.894 €) ; Sur l'actif au 31 décembre 2016 ; que le bilan de la société TBI, arrêté au 31 décembre 2016, présente des disponibilités pour un montant de 4.155.300 € ; qu'en conclusion, à la date du 31 décembre 2016, le passif exigible de la société TBI était de 9.945.675 € face à un actif disponible de 4.155.300 € ; qu'ainsi la société TBI, à cette date, était dans l'impossibilité de faire face an passif exigible avec l'actif disponible ; qu'en conséquence, le tribunal reportera la date de cessation des paiements de la société TBI du 1er juillet 2017 au 31 décembre 2016 » (jugement, p. 4-5) ;

1) Alors que la condition est un événement futur et incertain ; que la condition permet aux parties de gérer contractuellement un risque extérieur au contrat, si bien que l'événement futur et incertain ne peut consister en l'inexécution des obligations contractuelles ; que l'inexécution des obligations, si elle est envisagée par le contrat, ne peut faire l'objet que d'une clause résolutoire et non d'une condition ; que la cour d'appel a toutefois retenu que les moratoires fiscaux ne suspendent l'exigibilité du passif échu qu'à la condition d'être respectés en même temps que sont payées les nouvelles échéances ; qu'en statuant ainsi, en qualifiant de condition l'inexécution d'une obligation contractuelle, la cour d'appel a violé l'article 1304-1 du code civil, par fausse application, et 1225 du code civil, par refus d'application ;

2) Alors que, à défaut de stipulation contraire, la clause résolutoire ne produit pas son effet de plein droit en cas d'inexécution de l'obligation et suppose d'être déclenchée par son bénéficiaire ; que la cour d'appel a néanmoins retenu que les moratoires accordés en décembre 2016 étaient devenus caducs du fait de leur inexécution partielle et du non-paiement des charges courantes ; qu'en statuant ainsi, en constatant la caducité de plein droit des moratoires, la cour d'appel, qui n'a pas recherché ainsi qu'il lui était demandé, si la résolution avait été mise en oeuvre par le créancier, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1225 du code civil ;

3) Alors, enfin, que, à défaut de stipulation contraire, la clause résolutoire ne produit pas son effet de plein droit en cas d'inexécution de l'obligation et suppose d'être déclenchée par son bénéficiaire ; que cette mise en oeuvre de la clause résolutoire doit être précédée par une mise en demeure préalable du débiteur de s'exécuter ; que la cour d'appel a néanmoins retenu que les moratoires accordés en décembre 2016 étaient devenus caducs du fait de leur inexécution partielle et du non-paiement des charges courantes ; qu'en statuant ainsi, sans constater le respect de l'exigence de mise en demeure préalable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1225 du code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 19-20.595
Date de la décision : 05/05/2021
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, arrêt n°19-20.595 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles 13


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 05 mai. 2021, pourvoi n°19-20.595, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.20.595
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