CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 8 avril 2021
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10212 F
Pourvoi n° P 19-24.123
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 AVRIL 2021
1°/ M. M... P..., domicilié [...] ,
2°/ Mme W... C..., domiciliée chez M. G... , [...] ,
3°/ la société Les Minots de Marseille, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° P 19-24.123 contre l'arrêt rendu le 12 septembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-8), dans le litige les opposant :
1°/ à M. R... U..., domicilié [...] (États-Unis),
2°/ à M. L... U..., domicilié [...] (États-Unis),
3°/ à M. K... A..., domicilié [...] ,
4°/ à Mme J... Y... , domiciliée [...] ,
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller, les observations écrites de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de M. P..., Mme C... et de la société Les Minots de Marseille, de la SCP Spinosi, avocat de MM. U..., M. A... et de Mme Y... , après débats en l'audience publique du 9 mars 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Andrich, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. P..., Mme C... et la société Les Minots de Marseille aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. P..., Mme C... et la société Les Minots de Marseille et les condamne à payer MM. U..., M. A... et Mme Y... la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour M. P..., Mme C... et la société Les Minots de Marseille.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 27 juin 2017 ayant constaté la nullité absolue du bail commercial conclu le 1er mai 2003 entre la SCI du Parking et la sarl Les Minots de Marseille en raison du défaut de capacité du bailleur et mis à néant ce bail et tous les actes postérieurs pris sur le fondement de celui-ci et, statuant à nouveau, d'AVOIR déclaré irrecevable l'exception de nullité du bail commercial conclu le 1er mai 2003, renouvelé le 28 décembre 2012 ;
AUX MOTIFS QUE sur la nullité des baux : la sarl Les Minots de Marseille et les cautions excipent de la nullité des baux ; qu'ils soutiennent que la SCI du Parking étant dépourvue de personnalité morale depuis le 1er novembre 2002 par application de la loi du 15 mai 2001 qui a supprimé le régime dérogatoire consenti par la loi du 4 janvier 1978 aux sociétés civiles non immatriculées ; que les consorts U... se prévalent préalablement de la prescription, ils font valoir que l'exception de nullité ne peut être accueillie que pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique non exécuté ; qu'ils soutiennent que les statuts de la société ne stipulaient pas la volonté expresse des associés de se soustraire à l'immatriculation laquelle n'implique pas l'inexistence des actes, les associés en application de l'article 1872-1 du code civil étant gérants des biens indivis et capables d'agir en exécution d'un contrat conclu au nom de la société ; que le bail initial a été signé par la société Guis mandaté par Mme N... U... Q... associé majoritaire et le bail renouvelé par le mandataire mais aussi M. X... U... et R... U..., que le mandat de la société Guis consenti alors que la SCI était dotée de la personnalité morale ne peut être remis en cause outre que l'exécution par la sarl Les Minots de Marseille (paiement des loyers) couvre l'éventuelle nullité des contrats ; que si en application de l'article 1304, alinéa 1er, du code civil : « dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans », l'exception de nullité est au contraire perpétuelle mais sous certaines conditions, ainsi qu'elle peut faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique mais seulement s'il n'a pas encore été exécuté, à charge pour les juges de vérifier cette exécution, et ce quelle que soit la nature de la nullité relative ou absolue ; que la nullité encourue ne pouvait être ignorée des locataires pour résulter de la loi du 15 mai 2001, outre que la consultation du registre du commerce et des sociétés ou Boddac lors de la conclusions des deux baux leur aurait permis d'être utilement renseignés ; que n'étant pas contesté que les deux baux du 18 mai 2003 et 28 décembre 2012 aient été exécutés, l'exception de nullité formée par la sarl Les Minots de Marseille et les époux P... est irrecevable, le jugement déféré sera infirmé de ce chef ;
ALORS QUE la partie à un contrat est en droit d'invoquer la nullité du contrat contre le tiers qui se prévaut du contrat et que le contrat conclu par une société dépourvue de personnalité juridique est nul de nullité absolue ; que la cour d'appel constate que la SCI du Parking était dépourvue de personnalité morale par application des dispositions combinées des articles 1842 du code civil, 4 de la loi n° 78-9 du 4 janvier 1978, 44 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001, de sorte que les baux des 18 mai 2003 et 28 décembre 2012 étaient nuls de nullité absolue pour voir été souscrits par une société dépourvue d'existence juridique ; qu'ainsi, la sarl Les Minots de Marseille était en droit d'opposer la nullité de ces baux à MM. R... et L... U..., K... A... et Mme J... Y... , tiers à ces conventions et qu'en décidant le contraire pour la raison que l'exception de nullité ne pouvait plus être invoquée dès lors que les baux avaient été exécutés quand l'exception peut seulement être excipée à l'encontre du cocontractant, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, outres les textes ci-dessus visés.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la sarl Les Minots de Marseille à payer la somme de 51.014 €, ce en deniers ou quittances, comptes arrêtés au 31 décembre 2016, outre à compter de cette date la somme mensuelle de 5.552 €, ce jusqu'à son départ effectif des lieux ;
AUX MOTIFS QUE les appelants demandent condamnation de la locataire et des cautions à payer la dette locative qu'ils chiffrent à 63.344 € comptes arrêtés au 31 décembre 2016, sans précision du créancier ; que la sarl Les Minots de Marseille justifie par la production de quittances délivrées par le mandataire la société Guis s'être acquittée des loyers et charges jusqu'en décembre 2015, que si elle soutient avoir versé 65.018 € sur l'exercice 2015-2016 et 49.971 € sur l'exercice 2016-2017, elle n'en rapporte pas la preuve ; que le commandement délivré le 19 avril 2017 par les bailleurs visent trois versements les 17 mai 2016, 18 juillet 2016 et 17 août 2016 pour un total de 5.500 € qui figurent sur le décompte établi par le mandataire ; qu'en conséquence de quoi la sarl Les Minots sera condamnée à payer la somme de 62.447,67 € figurant au décompte établi à la date du 31 décembre 2016, de laquelle il sera déduit le dépôt de garantie de 11.433,67 € stipulé au contrat initial soit au total la somme de 51.014, ce en deniers ou quittances, outre la somme mensuelle de 5.552 € à compter du 31 décembre 2016 et jusqu'à son départ effectif des lieux le 16 avril 2018 ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, de sorte qu'est irrecevable toute demande de condamnation du défendeur au paiement d'une somme d'argent sans indication du créancier devant la recevoir ; que, dès lors, viole l'article 31 du code de procédure civile la cour d'appel qui prononce une condamnation de la sarl Les Minots de Marseille à payer la somme de 51.014 €, en deniers ou quittances, comptes arrêtés au 31 décembre 2016, outre à compter de cette date la somme mensuelle de 5.552 €, ce jusqu'à son départ effectif des lieux, sans indiquer le nom du créancier, après avoir expressément constaté que les appelants ne donnaient aucune précision quant à celui-ci ;
ALORS, D'AUTRE PART et en toute hypothèse, QUE est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir ; qu'il était constant en l'espèce que les demandeurs, MM. R... et L... U..., M. K... A... et Mme J... Y... , n'étaient pas le bailleur de la sarl les Minots de Marseille, le contrat ayant été conclu avec la SCI du Parking dont la cour d'appel constate que la nullité encourue pour défaut de personnalité juridique de celle-ci est prescrite et déclare dans le dispositif de son arrêt qu'est irrecevable l'exception de nullité du bail commercial conclu le 1er mai 2003, renouvelé le 28 décembre 2012 ; qu'ainsi, MM. R... et L... U..., M. K... A... et Mme J... Y... , tiers aux contrat de bail, étaient dépourvus de toute qualité à agir en exécution de ce dernier, si bien qu'en statuant comme elle le fait, la cour d'appel viole les articles 32 du code de procédure civile et 1134 et 1165 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, transposés dans les articles 1103 et 1199 du code civil, dans leur rédaction issue de ladite ordonnance.