CIV. 1
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 8 avril 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10305 F
Pourvoi n° U 19-20.977
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 AVRIL 2021
M. W... F..., domicilié chez Mme Y..., [...] , représenté par M. D... S..., mandataire ad hoc, a formé le pourvoi n° U 19-20.977 contre l'arrêt rendu le 23 mai 2019 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. I... L..., domicilié [...] ,
2°/ à M. R... N..., domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Darret-Courgeon, conseiller, les observations écrites de la SCP Boulloche, avocat de M. F..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. L... et de M. N..., et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 février 2021 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Darret-Courgeon, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. F... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. F... et le condamne à payer à M. L... la somme de 1 500 euros, ainsi que la même somme à M. N... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. F....
Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. F... de ses demandes indemnitaires dirigées contre Me I... L... ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur F... fait valoir que :
- Me L... a méconnu son obligation de veiller tant aux intérêts du failli qu'à ceux des créanciers dont les droits respectifs se trouvent obérés par une déclaration de créance qu'il avait initialement contestée,
- Me N... était tenu par une obligation de conseil et ne justifie pas de l'abandon de la contestation de créance qu'il avait initialement soutenue.
Me L... soutient n'avoir commis aucune faute car il avait demandé au conseil de Monsieur F..., dès le 23 juillet 2008, de saisir le tribunal de grande instance de Grasse. Mais Me N... l'a informé de ce que son client souhaitait en terminer avec la procédure l'opposant au crédit mutuel afin de voir rapidement mettre un terme à la procédure de divorce engagée avec Madame M... depuis plus de 13 ans. Me N... aurait également indiqué que l'ordonnance serait vraisemblablement confirmée et qu'en toute hypothèse le crédit mutuel avait droit, en dépit d'une annulation éventuelle du prêt, au remboursement du capital et qu'il disposait toujours d'une sûreté réelle sur le bien immobilier. C'est au regard des éléments avancés par Me N... et de l'accord de Monsieur F... formalisé par courriel, qu'il a acquiescé à la déclaration de créance du crédit mutuel.
Me L... relève en outre que Monsieur F... était partie à la procédure intentée devant le tribunal de grande instance de Grasse, ainsi que devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence et qu'il pouvait, s'il le souhaitait, s'opposer à l'acquiescement mais qu'il s'en est abstenu.
Me N... indique également qu'il n'était absolument pas acquis que les moyens de contestation de Monsieur W... F... prospérassent et que le tribunal de grande instance de Grasse considérât inopposable à ce dernier le prêt souscrit par Madame B... M... auprès du crédit mutuel. Dans la mesure où cette procédure aurait considérablement allongé les délais et par voie de conséquence retardé la détermination définitive du passif de M. W... F... ainsi que les opérations de liquidation du régime matrimonial dans le cadre de son divorce avec Madame B... M... , Me N... estime qu'il n'avait aucune raison légitime de dissuader son client d'acquiescer à la déclaration de créance puisqu'il voulait mettre un terme à la procédure de divorce au plus vite. Me N... verse aux débats au soutien de ses allégations un courrier électronique du 15 septembre 2009 dont l'authenticité n'est plus contestée par l'appelant.
Me L... a communiqué un courrier de Me N... du 24 juin 2008 aux termes duquel il demandait à pouvoir régulariser une assignation devant le tribunal de grande instance de Grasse en suite de l'arrêt rendu par la Cour. Me L..., par réponse rapide manuscrite au bas du même courrier l'autorisait à régulariser l'assignation et lui retournait sa réponse par fax du 23 juillet 2008. A cette époque, aucun délai de saisine du juge devant connaître de la discussion sur la créance déclarée n'était imposé par les textes et la cour d'appel n'avait pas énoncé de délai non plus.
Le 4 septembre 2009, Me L... interrogeait Me N... sur l'effectivité de la saisine du tribunal de grande instance.
Par courrier du 10 septembre 2009, Me L... écrivait à Me N... :
« j'ai également noté que contrairement à mes instructions, vous n'aviez pas saisi le TGI, dans l'attente d'un éventuel accord de Monsieur F... pour abandonner la contestation.
Un an s'est écoulé depuis que je vous ai demandé de saisir le tribunal sans que Monsieur F... ne vous formalise par écrit un accord sans condition.
Je vous réitère mes instructions et vous demande de saisir à nouveau le TGI. En effet sauf erreur de ma part, nous pourrons solliciter la radiation en cours d'instance.
J'attire votre attention sur les conséquences que cette absence de saisine pourrait générer si Monsieur F... ne devait pas vous marquer son accord ».
Le 15 septembre 2009, Monsieur F... adressait un courriel à Me N... débutant par : « Cher Maître,
Suite à notre réunion semaine dernière et comme nous avons convenu, je vous confirme abandonner la procédure initiée auprès du Crédit Mutuel... ».
Me N... faisait part à Me L..., par courrier du 18 septembre 2009 de l'accord écrit de Monsieur F... concernant l'abandon de toute contestation contre le Crédit Mutuel et ce afin qu'il puisse être porté au passif de sa liquidation le montant de la créance.
L'appel contre l‘ordonnance d'admission de créance a été formé tant par le liquidateur judiciaire que par Monsieur F... et la cour d'appel a renvoyé les parties, sans autre précision, à saisir le tribunal de grande instance.
Force est de constater que Monsieur F... n'a pas pris l'initiative de saisir le tribunal de grande instance et a même renoncé à intenter toute procédure contré le Crédit Mutuel par courriel du 15 septembre 2009. Certes, M. F... conteste avoir donné cet accord mais il ressort en toutes lettres du courriel précité et il fait encore allusion à cette renonciation dans deux courriels adressés à Me N... les 7 février 2011 (nous repartirons sur un contentieux si nous n'avons aucune preuve du prêt ; je me remets (avec grand bonheur vous pouvez être certain) dans le dossier Crédit Mutuel. Malgré nos nombreux RV (avec ma belle-soeur U... F...) au cours desquels nous avons abordé ce sujet nous en sommes au même point qu'en septembre2009 (...) Je vous rappelle que c'est vous qui m'avez proposé ce renoncement et je vous ai suivi car c'est dans ma nature de faire confiance. Je me réserve le droit d'annuler purement et simplement ce renoncement ».
Monsieur F... a donc bien été consulté et a donné son accord contrairement à ce qu'il soutient.
Me L..., es qualité, pouvait lui aussi saisir le tribunal compétent et avait donné des consignes en ce sens à son conseil, Me N....
Mais il ne peut lui être reproché une faute que dans la mesure où la contestation de Monsieur F... était sérieuse et avait vocation à prospérer.
Or Me N... écrivait dès le 15 avril 2009 à Me L... que la contestation ne changeait rien pour M. F... puisque le Crédit Mutuel disposait d'une garantie réelle et que la banque était à tout le moins en droit de récupérer son capital assorti des intérêts au taux légal.
Il ressort également du courriel de Monsieur F... du 15 septembre 2009 qu'il avait rencontré son conseil la semaine précédant sa prise de décision en le « suppliant de faire ce qui peut l'être pour sortir de cette dramatique affaire entamée il y a 13 ans ».
M. F... faisait ainsi référence à une procédure de divorce intentée plus de 13 ans avant les faits litigieux. Au cours de cette procédure, Mme M... avait obtenu le 23 mars 1999, au visa de l'article 217 du code civil, l'autorisation judiciaire de signer seule un prêt contracté pour le compte de la communauté auprès du Crédit Mutuel pour un montant de 2 600 000 francs au taux maximum de 5,546 % l'an assurance comprise.
Le prêt a été contracté par acte notarié des 20 mai et 2 juin 1999 et par suite de la liquidation judiciaire de Monsieur F..., le Crédit Mutuel a déclaré sa créance (444 416,76 euros outre intérêts à échoir au taux de 5,50 % majorés de 3 % s'agissant des intérêts de retard), contestée par le débiteur et Me L... es qualités au motif que le prêt consenti ne correspondait pas aux conditions posées par la décision de justice.
Il est indéniable qu'au regard du montant de la créance déclarée, le Crédit Mutuel aurait exercé l'ensemble des voies de recours ordinaires et extraordinaires mises à sa disposition dans l'hypothèse d'une décision défavorable. Et Me N... invoque à juste titre l'allongement des délais qu'aurait provoqué cette procédure sur la détermination définitive du passif de Monsieur F... et sur les opérations de liquidation du régime matrimonial de la communauté universelle.
De plus, la procédure de contestation n'avait qu'un intérêt limité pour M. F... au regard de l'obligation hypothécaire prise sur la maison de Mougins -une procédure de saisie immobilière est d'ailleurs en cours- et de l'opposabilité à son égard de la créance du Crédit Mutuel sur les sommes dues en capital, la discussion portant d'ailleurs sur le taux d'intérêt conventionnel. Et sur ce point, on peut lire dans les conclusions du Crédit Mutuel déposées le 27 janvier 2015 dans l'instance en tierce opposition intentée par Mme M... contre l'arrêt du 4 novembre 2010 qu'elle a réglé lesdits intérêts.
L'article 217 du code civil rend en effet opposable l'acte autorisé judiciairement à l'époux dont le consentement a fait défaut, quand bien même il n'en résulte aucune obligation personnelle à son égard. Or, le prêt a été consenti pour régler des dettes de la communauté.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, Me L... justifie avoir fait toutes diligences en vue de la saisine du tribunal de grande instance de Grasse et n'a commis aucune faute en adhérant à la décision prise par le débiteur d'acquiescer à l'ordonnance du juge commissaire.
Me N... a quant à lui respecté son devoir de conseil en préconisant cette solution à son client, qui avait comme préoccupation première l'avancement de sa procédure de divorce. Le fait que le titre de créance de la banque n'était pas remis par la banque à ce stade - Monsieur F... en a eu connaissance avec la procédure de saisie immobilière – n'était pas de nature à remettre en cause le choix de célérité qui était celui de M. F... au regard des multiples procédures en cours et de leurs enjeux.
Monsieur F... invoque une autre faute du mandataire judiciaire et de son ancien conseil, à savoir l'absence de prise en compte de l'irrégularité des déclarations de créances de Madame M... qui portent sur une somme excédant les 3 millions d'euros.
Me L... et Me N... objectent que les déclarations de créances de Madame M... ont été certes adressées par la voie électronique mais également par actes d'huissier, dûment signées. De surcroit Monsieur F... avait émis des contestations quant à ces créances, sur lesquelles le juge-commissaire a sursis à statuer dans l'attente du jugement définitif du tribunal de grande instance de Grasse sur la liquidation du régime matrimonial, de sorte que l'irrégularité de ces déclarations de créances pourrait être soulevée lors de la reprise des débats.
Effectivement, Me L... produit (pièce 6) une signification de la déclaration de créance signée par Mme M... qui lui a été délivrée le 26 juillet 2004.
La faute relevée par Monsieur F... n'est donc pas caractérisée » (arrêt p. 7 à 11) ;
1/ Alors qu'il appartient au liquidateur judiciaire d'exercer toutes voies de droit afin de contester le principe ou le montant d'une créance déclarée si cette contestation est susceptible de prospérer et de conduire, dans l'intérêt du débiteur et des créanciers, à une réduction du passif ; que la non-conformité d'un prêt aux conditions auxquelles il a été judiciairement autorisé justifie son annulation, les intérêts conventionnels qui ont pu être payés au prêteur devant alors être restitués ou venir en déduction du capital dont il peut obtenir la remboursement ; qu'en l'espèce, pour rejeter l'action dirigée contre Me L..., la cour a retenu que si M. F... contestait la validité du prêt consenti par le Crédit Mutuel à Mme M... comme n'étant pas conforme aux conditions qui avaient été fixées dans le jugement ayant autorisé celle-ci à contracter ce crédit, une éventuelle annulation n'aurait pas empêché la banque de saisir l'immeuble sur lequel elle disposait d'une hypothèque et n'aurait d'effet que sur l'exigibilité des intérêts conventionnels, lesquels avaient déjà été payés par l'emprunteuse ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à exclure l'existence d'une faute de Me L... pour s'être abstenu d'exercer une action en nullité du prêt qui aurait permis, en cas de succès, de réduire le montant de la créance déclarée au moins à hauteur des intérêts, la cour d'appel a violé les articles L 621-22 III et L 621-39 du code de commerce, ensemble l'article 1382 du code civil ;
2/ Alors que dans ses conclusions d'appel, M. F... a soutenu que son préjudice était établi puisque sur le seul actif commun aux ex-époux, il était contraint de pourvoir au remboursement d'un prêt qu'il avait refusé de souscrire et dont la créance qui en résulte pour défaut de remboursement ne pouvait être imputée qu'à son ex épouse du fait qu'elle n'a pas respecté les limites fixées par le tribunal pour l'obtention de ce crédit ; qu'en rejetant l'action en responsabilité contre le liquidateur judiciaire, sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Le second moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. F... de ses demandes indemnitaires dirigées contre Me R... N... ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur F... fait valoir que :
- Me L... a méconnu son obligation de veiller tant aux intérêts du failli qu'à ceux des créanciers dont les droits respectifs se trouvent obérés par une déclaration de créance qu'il avait initialement contestée,
- Me N... était tenu par une obligation de conseil et ne justifie pas de l'abandon de la contestation de créance qu'il avait initialement soutenue.
Me L... soutient n'avoir commis aucune faute car il avait demandé au conseil de Monsieur F..., dès le 23 juillet 2008, de saisir le tribunal de grande instance de Grasse. Mais Me N... l'a informé de ce que son client souhaitait en terminer avec la procédure l'opposant au crédit mutuel afin de voir rapidement mettre un terme à la procédure de divorce engagée avec Madame M... depuis plus de 13 ans. Me N... aurait également indiqué que l'ordonnance serait vraisemblablement confirmée et qu'en toute hypothèse le crédit mutuel avait droit, en dépit d'une annulation éventuelle du prêt, au remboursement du capital et qu'il disposait toujours d'une sûreté réelle sur le bien immobilier. C'est au regard des éléments avancés par Me N... et de l'accord de Monsieur F... formalisé par courriel, qu'il a acquiescé à la déclaration de créance du crédit mutuel.
Me L... relève en outre que Monsieur F... était partie à la procédure intentée devant le tribunal de grande instance de Grasse, ainsi que devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence et qu'il pouvait, s'il le souhaitait, s'opposer à l'acquiescement mais qu'il s'en est abstenu.
Me N... indique également qu'il n'était absolument pas acquis que les moyens de contestation de Monsieur W... F... prospérassent et que le tribunal de grande instance de Grasse considérât inopposable à ce dernier le prêt souscrit par Madame B... M... auprès du crédit mutuel. Dans la mesure où cette procédure aurait considérablement allongé les délais et par voie de conséquence retardé la détermination définitive du passif de M. W... F... ainsi que les opérations de liquidation du régime matrimonial dans le cadre de son divorce avec Madame B... M... , Me N... estime qu'il n'avait aucune raison légitime de dissuader son client d'acquiescer à la déclaration de créance puisqu'il voulait mettre un terme à la procédure de divorce au plus vite. Me N... verse aux débats au soutien de ses allégations un courrier électronique du 15 septembre 2009 dont l'authenticité n'est plus contestée par l'appelant.
Me L... a communiqué un courrier de Me N... du 24 juin 2008 aux termes duquel il demandait à pouvoir régulariser une assignation devant le tribunal de grande instance de Grasse en suite de l'arrêt rendu par la Cour. Me L..., par réponse rapide manuscrite au bas du même courrier l'autorisait à régulariser l'assignation et lui retournait sa réponse par fax du 23 juillet 2008. A cette époque, aucun délai de saisine du juge devant connaître de la discussion sur la créance déclarée n'était imposé par les textes et la cour d'appel n'avait pas énoncé de délai non plus.
Le 4 septembre 2009, Me L... interrogeait Me N... sur l'effectivité de la saisine du tribunal de grande instance.
Par courrier du 10 septembre 2009, Me L... écrivait à Me N... :
« j'ai également noté que contrairement à mes instructions, vous n'aviez pas saisi le TGI, dans l'attente d'un éventuel accord de Monsieur F... pour abandonner la contestation.
Un an s'est écoulé depuis que je vous ai demandé de saisir le tribunal sans que Monsieur F... ne vous formalise par écrit un accord sans condition.
Je vous réitère mes instructions et vous demande de saisir à nouveau le TGI. En effet sauf erreur de ma part, nous pourrons solliciter la radiation en cours d'instance.
J'attire votre attention sur les conséquences que cette absence de saisine pourrait générer si Monsieur F... ne devait pas vous marquer son accord ».
Le 15 septembre 2009, Monsieur F... adressait un courriel à Me N... débutant par : « Cher Maître,
Suite à notre réunion semaine dernière et comme nous avons convenu, je vous confirme abandonner la procédure initiée auprès du Crédit Mutuel... ».
Me N... faisait part à Me L..., par courrier du 18 septembre 2009 de l'accord écrit de Monsieur F... concernant l'abandon de toute contestation contre le Crédit Mutuel et ce afin qu'il puisse être porté au passif de sa liquidation le montant de la créance.
L'appel contre l‘ordonnance d'admission de créance a été formé tant par le liquidateur judiciaire que par Monsieur F... et la cour d'appel a renvoyé les parties, sans autre précision, à saisir le tribunal de grande instance.
Force est de constater que Monsieur F... n'a pas pris l'initiative de saisir le tribunal de grande instance et a même renoncé à intenter toute procédure contré le Crédit Mutuel par courriel du 15 septembre 2009. Certes, M. F... conteste avoir donné cet accord mais il ressort en toutes lettres du courriel précité et il fait encore allusion à cette renonciation dans deux courriels adressés à Me N... les 7 février 2011 (nous repartirons sur un contentieux si nous n'avons aucune preuve du prêt ; je me remets (avec grand bonheur vous pouvez être certain) dans le dossier Crédit Mutuel. Malgré nos nombreux RV (avec ma belle-soeur U... F...) au cours desquels nous avons abordé ce sujet nous en sommes au même point qu'en septembre2009 (...) Je vous rappelle que c'est vous qui m'avez proposé ce renoncement et je vous ai suivi car c'est dans ma nature de faire confiance. Je me réserve le droit d'annuler purement et simplement ce renoncement ».
Monsieur F... a donc bien été consulté et a donné son accord contrairement à ce qu'il soutient.
Me L..., es qualité, pouvait lui aussi saisir le tribunal compétent et avait donné des consignes en ce sens à son conseil, Me N....
Mais il ne peut lui être reproché une faute que dans la mesure où la contestation de Monsieur F... était sérieuse et avait vocation à prospérer.
Or Me N... écrivait dès le 15 avril 2009 à Me L... que la contestation ne changeait rien pour M. F... puisque le Crédit Mutuel disposait d'une garantie réelle et que la banque était à tout le moins en droit de récupérer son capital assorti des intérêts au taux légal.
Il ressort également du courriel de Monsieur F... du 15 septembre 2009 qu'il avait rencontré son conseil la semaine précédant sa prise de décision en le « suppliant de faire ce qui peut l'être pour sortir de cette dramatique affaire entamée il y a 13 ans ».
M. F... faisait ainsi référence à une procédure de divorce intentée plus de 13 ans avant les faits litigieux. Au cours de cette procédure, Mme M... avait obtenu le 23 mars 1999, au visa de l'article 217 du code civil, l'autorisation judiciaire de signer seule un prêt contracté pour le compte de la communauté auprès du Crédit Mutuel pour un montant de 2 600 000 francs au taux maximum de 5,546 % l'an assurance comprise.
Le prêt a été contracté par acte notarié des 20 mai et 2 juin 1999 et par suite de la liquidation judiciaire de Monsieur F..., le Crédit Mutuel a déclaré sa créance (444 416,76 euros outre intérêts à échoir au taux de 5,50 % majorés de 3 % s'agissant des intérêts de retard), contestée par le débiteur et Me L... es qualités au motif que le prêt consenti ne correspondait pas aux conditions posées par la décision de justice.
Il est indéniable qu'au regard du montant de la créance déclarée, le Crédit Mutuel aurait exercé l'ensemble des voies de recours ordinaires et extraordinaires mises à sa disposition dans l'hypothèse d'une décision défavorable. Et Me N... invoque à juste titre l'allongement des délais qu'aurait provoqué cette procédure sur la détermination définitive du passif de Monsieur F... et sur les opérations de liquidation du régime matrimonial de la communauté universelle.
De plus, la procédure de contestation n'avait qu'un intérêt limité pour M. F... au regard de l'obligation hypothécaire prise sur la maison de Mougins -une procédure de saisie immobilière est d'ailleurs en cours- et de l'opposabilité à son égard de la créance du Crédit Mutuel sur les sommes dues en capital, la discussion portant d'ailleurs sur le taux d'intérêt conventionnel. Et sur ce point, on peut lire dans les conclusions du Crédit Mutuel déposées le 27 janvier 2015 dans l'instance en tierce opposition intentée par Mme M... contre l'arrêt du 4 novembre 2010 qu'elle a réglé lesdits intérêts.
L'article 217 du code civil rend en effet opposable l'acte autorisé judiciairement à l'époux dont le consentement a fait défaut, quand bien même il n'en résulte aucune obligation personnelle à son égard. Or, le prêt a été consenti pour régler des dettes de la communauté.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, Me L... justifie avoir fait toutes diligences en vue de la saisine du tribunal de grande instance de Grasse et n'a commis aucune faute en adhérant à la décision prise par le débiteur d'acquiescer à l'ordonnance du juge commissaire.
Me N... a quant à lui respecté son devoir de conseil en préconisant cette solution à son client, qui avait comme préoccupation première l'avancement de sa procédure de divorce. Le fait que le titre de créance de la banque n'était pas remis par la banque à ce stade - Monsieur F... en a eu connaissance avec la procédure de saisie immobilière – n'était pas de nature à remettre en cause le choix de célérité qui était celui de M. F... au regard des multiples procédures en cours et de leurs enjeux.
Monsieur F... invoque une autre faute du mandataire judiciaire et de son ancien conseil, à savoir l'absence de prise en compte de l'irrégularité des déclarations de créances de Madame M... qui portent sur une somme excédant les 3 millions d'euros.
Me L... et Me N... objectent que les déclarations de créances de Madame M... ont été certes adressées par la voie électronique mais également par actes d'huissier, dûment signées. De surcroit Monsieur F... avait émis des contestations quant à ces créances, sur lesquelles le juge-commissaire a sursis à statuer dans l'attente du jugement définitif du tribunal de grande instance de Grasse sur la liquidation du régime matrimonial, de sorte que l'irrégularité de ces déclarations de créances pourrait être soulevée lors de la reprise des débats.
Effectivement, Me L... produit (pièce 6) une signification de la déclaration de créance signée par Mme M... qui lui a été délivrée le 26 juillet 2004.
La faute relevée par Monsieur F... n'est donc pas caractérisée » (arrêt p. 7 à 11) ;
1/ Alors qu'il appartient à l'avocat à qui son client confie la défense de ses intérêts de se faire communiquer par celui-ci, ou d'obtenir au besoin auprès de tiers, toutes pièces, documents ou actes lui permettant de connaître les droits de son client et de lui délivrer un conseil utile ; qu'en l'espèce, M. F... a fait valoir que Me N... s'était abstenu, avant de l'inciter à renoncer à la contestation dirigée contre la décision d'admission de la créance du Crédit Mutuel, de se faire communiquer le contrat de prêt que Mme M... avait conclu, se privant ainsi de toute possibilité d'apprécier la conformité de ce contrat aux conditions fixées par le jugement ayant autorisé Mme M... à le souscrire, et d'éclairer M. F... sur l'opportunité de poursuivre l'action visant à obtenir sa nullité, ou au contraire de renoncer au recours qu'il avait formé contre la décision d'admission de la banque ; qu'en se bornant à retenir que Me N... avait respecté son devoir de conseil en préconisant une renonciation de son client à la procédure qu'il avait introduite à l'égard de la banque, ce qui constituait une solution conforme à l'intérêt de M. F... dont la préoccupation première était l'avancement de sa procédure de divorce, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, et alors qu'elle relevait que M. F... n'avait pas eu connaissance du « titre de créance de la banque » au moment de sa renonciation, si son avocat avait exercé son devoir conseil qui lui imposait, avant d'acquiescer aux demandes de la banque, de se faire communiquer le contrat de prêt sur le fondement duquel elle avait déclaré sa créance, afin d'apprécier sa régularité et de conseiller ainsi son client, en connaissance de l'étendue de ses droits, sur l'opportunité de renoncer à contester le titre en vertu duquel la banque agissait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
2/ Alors que dans ses conclusions d'appel, M. F... a soutenu que son préjudice était établi puisque sur le seul actif commun aux ex-époux, il était contraint de pourvoir au remboursement d'un prêt qu'il avait refusé de souscrire et dont la créance qui en résulte pour défaut de remboursement ne pouvait être imputée qu'à son ex épouse du fait qu'elle n'a pas respecté les limites fixées par le tribunal pour l'obtention de ce crédit ; qu'en rejetant l'action en responsabilité contre le liquidateur judiciaire, sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.