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31/03/2021 | FRANCE | N°18-26396;20-15372

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 31 mars 2021, 18-26396 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 mars 2021

Cassation partielle

Mme DARBOIS, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président

Arrêt n° 282 F-D

Pourvois n°
P 18-26.396
X 20-15.372 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCO

NOMIQUE, DU 31 MARS 2021

Mme R... L..., domiciliée [...] , a formé les pourvois n° P 18-26.396 et X 20-15.372 contre un arrêt rendu le 11 décemb...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 31 mars 2021

Cassation partielle

Mme DARBOIS, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président

Arrêt n° 282 F-D

Pourvois n°
P 18-26.396
X 20-15.372 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 31 MARS 2021

Mme R... L..., domiciliée [...] , a formé les pourvois n° P 18-26.396 et X 20-15.372 contre un arrêt rendu le 11 décembre 2018 par la cour d'appel de Poitiers (2e chambre civile), dans le litige l'opposant respectivement :

1°/ à M. Q... E..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur amiable de la société Expertise industrielle JMR médiation,

2°/ à la société Expertise industrielle JMR médiation, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , représentée par son liquidateur amiable, M. Q... E...,

3°/ à la société Expertise industrielle JMR médiation, société à responsabilité limitée, représentée par Mme D... U... M..., domiciliée [...] , prise en qualité de mandataire ad hoc,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse aux pourvois n° P 18-26.396 et X 20-15.372 invoque, à l'appui de ses recours, les trois moyens identiques de cassation annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Champalaune, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de Mme L..., de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. E..., ès qualités, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 février 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Champalaune, conseiller rapporteur, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° P 18-26.396 et X 20-15.372 sont joints.

Reprise d'instance

2. Il est donné acte à Mme L... de sa reprise d'instance dans le pourvoi n° P 18-26.396, en ce qu'il est dirigé contre la SARL société Expertise industrielle JMR médiation, représentée par Mme M..., désignée en qualité de mandataire ad hoc de cette société en raison de la clôture de sa liquidation amiable et de sa radiation du registre du commerce et des sociétés, intervenues après le dépôt du pourvoi.

Faits et procédure

3. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 11 décembre 2018), Mme L... et M. E..., mariés sous le régime de la séparation des biens, étaient associés à parts égales de la SCI Le Surier et de la SARL Le Moulin de Surier, la seconde exploitant le fonds de commerce situé dans les locaux appartenant à la première.

4. Le fonds de commerce et l'immeuble ont été cédés le 16 février 2011.

5. Le 5 mars 2011, les associés de la société Le Moulin de Surier ont décidé de changer son objet social et sa dénomination sociale, laquelle est devenue la SARL Expertise industrielle JMR médiation.

6. Mme L... et M. E... se sont séparés en mars 2014.

7. La dissolution de la SARL Expertise industrielle JMR médiation a été décidée le 9 janvier 2015, M. E... étant désigné en qualité de liquidateur.

8. Le 18 décembre 2015, Mme L... a assigné la SARL Expertise industrielle JMR médiation, représentée par M. E... son liquidateur amiable, et M. E..., pris en sa qualité de gérant puis liquidateur amiable de cette société, ainsi qu'à titre personnel, en paiement de sommes qu'elle estimait lui être dues au titre de la gestion et de la liquidation de la société Expertise industrielle JMR médiation et en paiement de dommages-intérêts.

9. Une autre instance, faisant l'objet d'une procédure distincte, a été introduite par Mme L... pour obtenir le paiement de certaines sommes au titre de la liquidation de la société Le Surier.

Examen des moyens

Sur les deuxièmes moyens des pourvois n° P 18-26.396 et X 20-15.372 rédigés en des termes identiques, réunis

10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur les premiers moyens des pourvois n° P 18-26.396 et X 20-15.372, pris en leur première branche, rédigés en des termes identiques, réunis

Enoncé du moyen

11. Mme L... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'action engagée à l'encontre de M. E... pour tous les faits antérieurs au 8 (lire 18) décembre 2012 et celle tendant au versement de la somme de 20 000 euros au titre de la distribution des dividendes au titre des comptes clos le 30 septembre 2012 et de déclarer irrecevable la demande de condamnation de la SARL Expertise industrielle JMR médiation et de M. E... portant sur la somme de 100 960,58 euros au titre du transfert du solde de compte courant sur la SARL Expertise industrielle JMR médiation par la SCI Le Surier, alors « que la prescription ne court pas ou est suspendue entre époux ; qu'en déclarant irrecevables comme prescrites les demandes formées par Mme L... à l'encontre de M. E..., pris en son nom personnel, portant sur des faits datant de plus de trois avant son assignation, après avoir pourtant relevé que Mme L... et M. E... étaient mariés, de sorte que le délai de prescription ne pouvait commencer à courir qu'à compter de la date de dissolution de leur mariage, laquelle n'avait pas encore été prononcée à la date de l'assignation, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 2236 du code civil, L. 223-22 et L. 223-23 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

12. M. E..., en sa qualité de liquidateur de la SARL Expertise industrielle JMR médiation et en son nom personnel, conteste la recevabilité du moyen en ce que Mme L... ne s'est pas prévalue de la suspension de la prescription entre époux.

13. Cependant, la règle issue de l'article 2236 du code civil est de pur droit.

14. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 2236 du code civil :

15. Selon ce texte, la prescription ne court pas ou est suspendue entre époux.

16. Pour juger que l'action engagée contre M. E... pour tous les faits antérieurs au 18 décembre 2012 et la demande de condamnation solidaire de la SARL Expertise industrielle JMR médiation et de M. E..., à titre personnel, portant sur la somme de 100 960,58 euros au titre du transfert du solde de compte courant sur la SARL Expertise industrielle JMR médiation par la SCI Le Surier étaient prescrites, l'arrêt retient que l'assignation ayant été délivrée le 18 décembre 2015, Mme L... ne peut mettre en cause la responsabilité de M. E..., gérant, que pour les actes qui auraient été commis par lui à compter du 18 décembre 2012, l'action concernant les faits antérieurs, et notamment ceux ayant suivi la cession du fonds de commerce, étant prescrite et que, s'agissant de la demande de condamnation solidaire de la SARL Expertise industrielle JMR médiation, représentée par son liquidateur, et de M. E..., à titre personnel, au paiement d'une somme de 100 960,58 euros « au titre du transfert du solde de compte courant sur la SARL Expertise Industrielle JMR médiation par la SCI Le Surier » Mme L... indique dans ses écritures que la somme de 201 281,15 euros a été placée sur le compte courant de la SARL Expertise industrielle JMR médiation, avant la clôture de la liquidation de la SCI Le Surier le 17 mai 2012, soit plus de trois ans avant l'assignation du 18 décembre 2015.

17. En statuant ainsi, alors que la prescription ne court pas entre époux, la cour d'appel, qui a relevé que Mme L... et M. E... ont été mariés jusqu'en 2014, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations.

Et sur ces mêmes moyens, pris en leur troisième branche, réunis

Enoncé du moyen

18. Mme L... fait le même grief à l'arrêt, alors « que le dirigeant social doit rendre compte de toute somme portée à l'actif de la société ; qu'en relevant, pour déclarer irrecevable la demande en paiement de la somme de 100 960,58 euros, correspondant au transfert du boni de liquidation de la SCI Le Surier sur le compte de la SARL Expertise industrielle JMR médiation, que cette demande portait sur une créance des associés de la SCI Le Surier qui n'est pas en la cause, sans rechercher si cette somme n'avait pas effectivement été versée sur le compte de la SARL Expertise industrielle JMR médiation pour en devenir un élément d'actif, dont M. E... devait rendre compte, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 223-22 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'alinéa premier de l'article L. 223-22 du code de commerce :

19. Selon ce texte, les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.

20. Pour déclarer irrecevable la demande de condamnation solidaire de la SARL Expertise industrielle JMR médiation, représentée par son liquidateur, et de M. E..., à titre personnel, au paiement d'une somme de100 960,58 euros ,« au titre du transfert du solde de compte courant sur la SARL Expertise Industrielle JMR médiation par la SCI Le Surier », l'arrêt retient que Mme L... indique dans ses écritures que la somme de 201 281,15 euros a été placée sur le compte courant de la SARL Expertise industrielle JMR médiation et constitue une « créance des associés sur la SCI Le Surier », laquelle n'est pas à la cause, de sorte que cette action relève de l'autre procédure d'appel pendante devant la cour.

21. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure la recevabilité de l'action de Mme L... en responsabilité de M. E..., à titre personnel, en l'état de l'abondement, par une somme alors entrée dans son patrimoine, du compte courant de la SARL Expertise industrielle JMR médiation, invoqué lorsqu'il en était le gérant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

22. La cassation prononcée entraîne l'annulation des chefs de l'arrêt déclarant irrecevable l'action dirigée contre M. E... pour tous les faits antérieurs au 18 décembre 2012 et la demande de condamnation solidaire de la SARL Expertise industrielle JMR médiation et de M. E..., à titre personnel, en paiement de la somme de 100 960,58 euros au titre du transfert du solde de compte courant sur la société Expertise industrielle JMR médiation par la SCI Le Surier et s'étend, en application de l'article 624 du code de procédure civile, aux chefs de dispositif de l'arrêt par lesquels la cour d'appel a approuvé les comptes de liquidation de la SARL Expertise industrielle JMR médiation, ainsi que les opérations de liquidation telles que relatées dans le rapport du liquidateur, donné tous pouvoirs au liquidateur pour procéder au remboursement partiel et définitif entre les associés du montant du reliquat d'actif et donné quitus au liquidateur, le déchargeant de son mandat, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit irrecevable l'action engagée par Mme L... contre M. E... , à titre personnel, pour tous faits antérieurs au 18 décembre 2012 et la demande de condamnation solidaire de la SARL Expertise industrielle JMR médiation et de M. E..., à titre personnel, à lui payer la somme de 100 960,58 euros au titre du transfert du solde de compte courant sur la société Expertise industrielle JMR médiation par la SCI Le Surier et en ce qu'il approuve les comptes de liquidation de la SARL Expertise industrielle JMR médiation ainsi que les opérations de liquidation telles que relatées dans le rapport du liquidateur, donne tous pouvoirs au liquidateur pour procéder au remboursement partiel et définitif entre les associés du montant du reliquat d'actif et donne quitus au liquidateur, le déchargeant de son mandat, l'arrêt rendu le 11 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;

Condamne la société Expertise industrielle JMR médiation, représentée par Mme M..., mandataire ad hoc, et M. E..., en qualité de liquidateur de la société Expertise industrielle JMR médiation et à titre personnel, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme L... contre la société SARL Expertise industrielle JMR médiation et celle formée par M. E..., en sa qualité de liquidateur de la SARL Expertise industrielle JMR médiation et à titre personnel, et le condamne, en ces qualités, à payer à Mme L... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens identiques produits aux pourvois n° P 18-26.396 et X 20-15.372 par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme L....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable l'action engagée par Mme L... à l'encontre de M. E... pour tous les faits antérieurs au 8 décembre 2012 et celle tendant au versement de la somme de 20 000 euros au titre de la distribution des dividendes au titre des comptes clos le 30 septembre 2012 et D'AVOIR déclaré irrecevable la demande de condamnation de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation et de M. E... portant sur la somme de 100 960,58 euros au titre du transfert du solde de compte courant sur la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation par la SCI le Surier ;

AUX MOTIFS QUE l'action en responsabilité engagée par un associé contre le gérant de la société du fait de détournements de sommes versées sur le compte bancaire de la société ou appartenant à cette dernière, ne peut être fondée que sur l'article L. 233-22 du code de commerce et est soumise à la prescription triennale prévue par l'article L. 223-23 du même code (cf. pour exemple, Com., 10 juillet 2012, n° 11-22.146) ; que ce délai de trois ans court du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation ; que Mme L... n'invoque pas de manipulation comptable ou autre fait de nature à dissimuler le dommage et admet même en page 20 de ses dernières écritures que « du fait de leurs relations et des investissements qui devaient être indivis, elle ne réclamait pas, immédiatement après les ventes, sa part et ce même lorsque son associé et mari investissait pour son seul profit et celui de son fils dans l'acquisition d'un immeuble de Bergerac car elle pensait, légitimement, récupérer les sommes lui revenant à simple demande » ; que l'assignation ayant été délivrée le 18 décembre 2015, Mme L... ne peut mettre en cause la responsabilité de M. E..., gérant, que pour les actes qui auraient été commis par lui à compter du 18 décembre 2012, l'action concernant les faits antérieurs et notamment ceux ayant suivis la cession du fonds de commerce étant prescrite ; que s'agissant de la demande de condamnation solidaire de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation représentée par son liquidateur et de M. E... à titre personnel au paiement d'une somme de 100 960,58 euros « au titre du transfert du solde de compte courant sur la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation par la SCI le Surier », Mme L... indique elle-même dans ses écritures que la somme de 201 281,15 euros a été placée sur le compte courant de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation, avant la clôture de la liquidation de la SCI le Surier le 17 mai 2012 et que sa demande porte « sur sa part dans la créance des associés sur la SCI le Surier » ; que cette demande dirigée contre M. E... est donc prescrite et par suite irrecevable, le transfert litigieux étant intervenu plus de trois ans avant l'assignation du 18 décembre 2015 ; qu'en outre, ainsi que l'indique l'intimée, il s'agit d'une « créance des associés sur la SCI le Surier » qui n'est pas à la cause et cette action relève donc de l'autre procédure d'appel pendante devant la cour ;

ET AUX MOTIFS QUE s'agissant des faits reprochés à M. E... à titre personnel, il appartient à Mme L... qui prétend qu'il a détourné ces sommes appartenant à la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation d'en rapporter la preuve, ce à compter du 18 décembre 2012, la période antérieure étant couverte par la prescription ; qu'elle prétend sur ce point qu'il a investi la somme de 200 000 provenant de la cession du village de vacances dans la SCI C... B... constituée avec son fils Y... E... le 22 décembre 2011 ; que néanmoins il ressort des propres écritures de l'intimée (p. 20) que cette somme de 200 000 euros provenait de la cession de l'immeuble appartenant à la SCI le Surier, qui ne concerne donc pas la présente instance ; qu'elle soutient aussi qu'il a acquis à des fins personnelles un véhicule coupé Mercedes pour un montant de 50 000 euros, d'un véhicule Clio pour son fils de plus de 8 000 euros, d'un tracteur tondeuse de plus de 8 000 euros mais ne date pas ces achats et n'en rapporte par la preuve ; qu'il ressort de l'examen du grand livre de la Sarl (compte n° 455110 M. E... JM) un débit « chèque de banque achat voiture » de 29 900 euros le 15 février 2011 mais l'origine des fonds n'est pas démontrée et, en tout état de cause, ce fait est couvert par la prescription ; qu'il est exact que l'examen des extraits du grand livre du compte courant de M. E... produits par ce dernier révèle que de nombreuses sommes ont été débitées de ce compte, ce qui correspond à des décaissements de la société au profit de ce dernier, y compris à des dates non couvertes par la prescription ; que néanmoins, d'une part, en contrepartie de ces débits, le compte présente des crédits de montants au moins équivalents et même supérieurs, qui représentent des dettes de la société envers l'associé, sans qu'il soit démontré que ces crédits soient fictifs, d'autre part ces débits n'établissent pas qu'ils proviendraient de biens de la société détournés par le gérant ou liquidateur ; qu'en outre, les comptes de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation produits en pièces 3 à 5 pour la période allant du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2013 et qui ont été approuvés ainsi qu'il a été dit, mentionnent chaque année, entre autres éléments, le montant du compte courant d'associé au nom de M. E... (compte n° 455010), ainsi que le montant des disponibilités placées sur les comptes de la société ([...] et Crédit mutuel), que sur les derniers comptes approuvés, clôturés au 30 septembre 2013, le compte courant d'associé de M. E... était de 43 939 euros et le compte « disponibilités » de la société de 61 100 euros ; que ces montant ont été approuvés en même temps que les comptes et Mme L... ne peut les contester sans contester les délibérations adoptées en assemblée générale, ce qu'elle ne fait pas ; qu'elle doit être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 137 506,34 euros tant contre la société que contre M. E... en sa qualité de gérant, de liquidateur ou à titre personnel ; que sur la somme de 40 000 euros correspondant à des dividendes distribués et non perçus, Mme L... indique que la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation a distribué deux fois des dividendes, 40 000 euros à la suite de l'exercice clos au 30 septembre 2012 et la même somme à la suite de l'exercice clos au 30 septembre 2013 et qu'elle a droit à la somme de 40 000 euros, qu'elle n'a pas perçue ; que cette distribution de dividendes est confirmée par la rapport de gestion du liquidateur à l'assemblée générale du 19 février 2015 et par l'attestation établie par M. A..., expert-comptable, le 24 juin 2015 qui indique que le montant total des dividendes affectés en compte-courant sur la période du 30 septembre 2012 au 30 septembre 2013 s'élève à la somme de 80 000 euros (pièces 20, 27 et 18) ; qu'elle ressort aussi des extraits du grand livre concernant le compte courant d'associé de M. E... puisque la somme de 40 000 euros a été inscrite au crédit de ce compte à deux reprises le 30 septembre 2012 et le 30 septembre 2013, ce qu'il admet dans ses dernières écritures, précisant avoir voulu éviter un versement en une seule fois pouvant compromettre la trésorerie de la société et avoir reversé les sommes revenant à son épouse sur le compte joint des époux, à convenance ; qu'il appartient donc à M. E... de démontrer qu'il a reversé en sa qualité de gérant, à son épouse, la moitié des prélèvements distribués lui revenant, c'est-à-dire la somme de 20 000 euros dans les suites de la distribution effectuée le 30 septembre 2012 et la même somme dans les suites de celle effectuée le 30 septembre 2013 ; que la première distribution du 30 septembre 2012 est toutefois couverte par la prescription et la demande de Mme L... à ce titre est irrecevable ;

ALORS, 1°), QUE la prescription ne court pas ou est suspendue entre époux ; qu'en déclarant irrecevables comme prescrites les demandes formées par Mme L... à l'encontre de M. E..., pris en son nom personnel, portant sur des faits datant de plus de trois avant son assignation, après avoir pourtant relevé que Mme L... et M. E... étaient mariés, de sorte que le délai de prescription ne pouvait commencer à courir qu'à compter de la date de dissolution de leur mariage, laquelle n'avait pas encore été prononcée à la date de l'assignation, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 2236 du code civil, L. 223-22 et L. 223-23 du code de commerce ;

ALORS, 2°), QUE le dirigeant social doit rendre compte de toute somme portée à l'actif de la société ; qu'en relevant, pour déclarer irrecevable la demande en paiement de la somme de 100 960,58 euros, correspondant au transfert du boni de liquidation de la SCI le Surier sur le compte de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation, que cette demande portait sur une créance des associés de la SCI le Surier qui n'est pas en la cause, cependant que dès lors qu'un tel transfert avait été effectué, le boni de liquidation de la SCI Le Surier était devenu un actif de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation dont M. E..., en sa qualité de gérant, devait rendre compte, la cour d'appel a violé les articles L. 223-22 du code du commerce ;

ALORS, 3°), QUE le dirigeant social doit rendre compte de toute somme portée à l'actif de la société ; qu'en relevant, pour déclarer irrecevable la demande en paiement de la somme de 100 960,58 euros, correspondant au transfert du boni de liquidation de la SCI le Surier sur le compte de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation, que cette demande portait sur une créance des associés de la SCI le Surier qui n'est pas en la cause, sans rechercher si cette somme n'avait pas effectivement été versée sur le compte de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation pour en devenir un élément d'actif, dont M. E... devait rendre compte, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 223-22 du code de commerce.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté Mme L... de sa demande en paiement de la somme de 137 506,34 euros ;

AUX MOTIFS QUE s'agissant des faits reprochés à M. E... à titre personnel, il appartient à Mme L... qui prétend qu'il a détourné ces sommes appartenant à la Sarl Expertise industrielle JMR médiation d'en rapporter la preuve, ce à compter du 18 décembre 2012, la période antérieure étant couverte par la prescription ; qu'elle prétend sur ce point qu'il a investi la somme de 200 000 euros provenant de la cession du village de vacances dans la SCI C... B... constituée avec son fils Y... E... le 22 décembre 2011 ; que néanmoins il ressort des propres écritures de l'intimée (p. 20) que cette somme de 200 000 euros provenait de la cession de l'immeuble appartenant à la SCI le Surier, qui ne concerne donc pas la présente instance ; qu'elle soutient aussi qu'il a acquis à des fins personnelles un véhicule coupé Mercedes pour un montant de 50 000 euros, d'un véhicule Clio pour son fils de plus de 8 000 euros, d'un tracteur tondeuse de plus de 8 000 euros mais ne date pas ces achats et n'en rapporte par la preuve ; qu'il ressort de l'examen du grand livre de la Sarl (compte n° 455110 M. E... JM) un débit « chèque de banque achat voiture » de 29 900 euros le 15 février 2011 mais l'origine des fonds n'est pas démontrée et en tout état de cause, ce fait est couvert par la prescription ; qu'il est exact que l'examen des extraits du grand livre du compte courant de M. E... produits par ce dernier révèlent que de nombreuses sommes ont été débitées de ce compte, ce qui correspond à des décaissements de la société au profit de ce dernier, y compris à des dates non couvertes par la prescription ; que néanmoins, d'une part, en contrepartie de ces débits, le compte présente des crédits de montants au moins équivalents et même supérieurs, qui représentent des dettes de la société envers l'associé, sans qu'il soit démontré que ces crédits soient fictifs, d'autre part ces débits n'établissent pas qu'ils proviendraient de biens de la société détournés par le gérant ou liquidateur ; qu'en outre, les comptes de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation produits en pièces 3 à 5 pour la période allant du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2013 et qui ont été approuvés ainsi qu'il a été dit, mentionnent chaque année, entre autres éléments, le montant du compte courant d'associé au nom de M. E... (compte n° 455010), ainsi que le montant des disponibilités placées sur les comptes de la société ([...] et Crédit mutuel), que sur les derniers comptes approuvés, clôturés au 30 septembre 2013, le compte courant d'associé de M. E... était de 43 939 euros et le compte « disponibilités » de la société de 61 100 euros ; que ces montants ont été approuvés en même temps que les comptes et Mme L... ne peut les contester sans contester les délibérations adoptées en assemblée générale, ce qu'elle ne fait pas ;

ALORS, 1°), QU'il appartient au dirigeant social de rendre compte à la société et aux associés en justifiant des dépenses faites par lui au moyen des fonds sociaux ; qu'en relevant, pour rejeter la demande en paiement de la somme de 137 506,34 euros correspondant à une partie du prix de vente de cession du fonds de commerce appartenant à la Sarl le Moulin le Surier, devenue la société Expertise industrielle JMR Médiation, qu'il appartenait à Mme L... de rapporter la preuve des détournements qu'elle imputait au gérant, après avoir pourtant relevé que le prix de cession du fonds de commerce avait été crédité sur le compte de la société de sorte qu'il appartenait au gérant de justifier de l'utilisation des fonds qui ne figuraient plus à l'actif de la société, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les articles 1315, devenu 1353, du code civil et L. 223-22 du code de commerce ;

ALORS, 2°), QU'il appartient au dirigeant social de rendre compte à la société et aux associés en justifiant des dépenses faites par lui au moyen des fonds sociaux ; qu'en se fondant sur des extraits du grand livre du compte courant de M. E... pour dire que la preuve des détournements reprochés à ce dernier n'était pas rapportée, quand ces extraits étaient inopérants à faire la preuve de l'emploi des fonds figurant sur les comptes de la société, la cour d'appel a violé les articles 1315, devenu 1353, du code civil et L. 223-22 du code de commerce ;

ALORS, 3°), QU'il appartient au dirigeant social de rendre compte à la société et aux associés en justifiant des dépenses faites par lui au moyen des fonds sociaux ; qu'en se fondant sur le fait que les comptes approuvés faisaient apparaître le montant du compte d'associé au nom de M. E... ainsi que le montant des disponibilités de la société, qui n'avaient pas été contestés par Mme L..., quand l'approbation des comptes, qui a pour seul objet de décider de l'affectation des résultats, ne peut pas faire obstacle à une action tendant à la constatations de détournements commis par le gérant, la cour d'appel a violé les articles 1315, devenu 1353, du code civil et L. 223-22 du code de commerce ;

ALORS, 4°), QU'il appartient au dirigeant social de rendre compte à la société et aux associés en justifiant des dépenses faites par lui au moyen des fonds sociaux ; qu'en se fondant sur le fait que les comptes approuvés faisaient apparaître le montant du compte d'associé au nom de M. E... ainsi que le montant des disponibilités de la société qui n'avaient pas été contestés par Mme L..., quand ces documents étaient inopérants à justifier par la gérant de l'emploi des fonds de la société, la cour d'appel a violé les articles 1315, devenu 1353, du code civil et L. 223-22 du code de commerce ;

ALORS, 5°) et en tout état de cause, QUE même si la nullité n'en a pas été prononcée, une décision d'assemblée générale ne peut être régulièrement opposée à un associé qui n'y a pas été convoqué et qui n'a pas reçu notification du procès-verbal d'assemblée ; qu'en opposant à la demande en paiement formée par Mme L..., les délibérations d'assemblées générales d'approbation des comptes pour les années 2011 et suivantes quand il n'était pas contesté que Mme L... n'avait pas été convoquée à ces assemblées, ni n'avait reçu notification du procès-verbal de ces assemblées, la cour d'appel a violé l'articles L. 223-22, L. 223-27 et L. 223-28 du code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué infirmatif D'AVOIR approuvé les comptes de la liquidation de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation ainsi que les opérations de liquidation, donné tous pouvoirs au liquidateur pour procéder au remboursement partiel et définitif entre les associés du montant du reliquat de l'actif et donné quitus au liquidateur et décharge de son mandat ;

AUX MOTIFS QU'au terme de l'article L. 237-10 du code de commerce, si l'assemblée de clôture prévue à l'article L. 237-9 ne peut délibérer ou si elle refuse d'approuver les comptes du liquidateur, il est statué par décision de justice à la demande de celui-ci ou de tout intéressé ; que lors de l'assemblée générale extraordinaire du 9 janvier 2015, les deux associés ont accepté la décision de dissoudre la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation et de désigner M. E... en qualité de liquidateur ; que M. E... justifie avoir établi un rapport du liquidateur et avoir convoqué en sa qualité de liquidateur Mme L... à une assemblée générale le 19 février 2015 (pièces 21 et 22) ; que cette dernière a sollicité des explications sur les comptes et M. E... a adressé sa réponse le 10 mars 2015 ; que lors de l'assemblée de clôture de liquidation du 16 septembre 2015, les résolutions concernant l'approbation des opérations de liquidation, le remboursement à chaque associé de la somme de 365,15 euros par part sociale et le quitus de décharge du mandat de liquidateur n'ont pu être adoptés, Mme L... ayant voté contre ; qu'il ressort des comptes de liquidation produits en pièce 26 par M. E... que le chiffre d'affaires pour la période en cause a été de 1 515 euros, le résultat déficitaire à hauteur de 6 604 euros ; que les disponibilités sont de 11 055 euros ; qu'un reliquat de 365,16 euros reste à partager ; que Mme L... se borne à indiquer dans ses écritures que « dans ces conditions », les comptes de clôture ne peuvent être approuvés, sans autre critique particulière autre que les moyens déjà traités ; qu'en l'absence d'anomalie démontrée, il convient d'approuver les comptes de liquidation, ainsi que les opérations de liquidation telles que relatées dans le rapport du liquidateur, de décharger ce dernier de son mandat, de lui donner quitus de sa gestion, et de lui donner tous pouvoirs pour procéder au remboursement partiel et définitif entre les associés du montant du reliquat d'actif ;

ALORS QUE la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que pour approuver les comptes de liquidation, ainsi que les opérations de liquidation telles que relatées dans le rapport du liquidateur, décharger ce dernier de son mandat, lui donner quitus de sa gestion et lui donner tous pouvoirs pour procéder au remboursement partiel et définitif entre les associés du montant du reliquat d'actif, la cour d'appel s'est fondée sur le rejet des anomalies de gestion dénoncées par Mme L... ; que, dès lors, la cassation à intervenir sur l'un ou l'autre des deux premiers moyens de cassation entraînera par voie de conséquence, en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, celle des chefs de l'arrêt ayant approuvé les comptes de la liquidation de la Sarl Expertise industrielle JMR Médiation ainsi que les opérations de liquidation, donné tous pouvoirs au liquidateur pour procéder au remboursement partiel et définitif entre les associés du montant du reliquat de l'actif et donné quitus au liquidateur et décharge de son mandat.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-26396;20-15372
Date de la décision : 31/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 11 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 31 mar. 2021, pourvoi n°18-26396;20-15372


Composition du Tribunal
Président : Mme Darbois (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:18.26396
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