CIV. 1
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 mars 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10237 F
Pourvoi n° H 19-12.157
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 17 MARS 2021
1°/ Mme D... W..., domiciliée [...] ,
2°/ M. F... R..., domicilié [...] ,
3°/ Mme O... V..., domiciliée [...] , agissant en qualité d'administrateur ad hoc d'B... R...,
ont formé le pourvoi n° H 19-12.157 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2018 par la cour d'appel de Nancy (3e chambre civile), dans le litige les opposant à M. L... G..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Azar, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme W..., M. R... et de Mme V..., ès qualités, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. G..., après débats en l'audience publique du 26 janvier 2021 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Azar, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme W..., M. R... et Mme V... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme W..., M. R... et Mme V... et les condamne in solidum à payer à M. G... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme W..., M. R... et Mme V....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable l'action de M. G... et ordonné une expertise biologique aux fins de déterminer si M. G... ou si M. R... est le père de l'enfant B... R... ;
SANS AVOIR respecté la formalité de communication au ministère public ;
ALORS QUE le ministère public doit avoir communication des affaires relatives à la filiation et que cette règle est d'ordre public ; qu'il ne résulte ni des mentions de l'arrêt, ni des pièces de la procédure, que la cause ait été communiquée au ministère public ; que la cour d'appel, qui a statué sur une affaire relative à la filiation d'B... R... sans l'avoir communiquée au ministère public, a excédé ses pouvoirs au regard de l'article 425 1° du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable l'action de M. G... et ordonné une expertise biologique, en donnant pour mission à l'expert désigné de procéder à tous les examens utiles sur M. G..., Mme W..., M. R... et B... R... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'expertise biologique est de droit en matière de filiation, sauf s'il existe un motif légitime de na pas y procéder ; que la charge de la preuve de ce motif légitime incombe à M. et Mme R... ; que la tardiveté de l'action entreprise par M. G... est un motif inopérant et ne constitue pas un motif légitime de refus de procéder par voie d'expertise biologique ; que de même, l'intérêt supérieur de l'enfant n'est pas en soi un motif légitime de refus de l'expertise biologique, étant observé qu'il est, en réalité, de l'intérêt de B... de connaître en l'occurrence la vérité biologique de sa filiation et de mettre un terme à une incertitude, longue de plusieurs années, pouvant à terme devenir déstabilisante pour l'enfant ; que la possession d'état conforme au titre ne constitue pas davantage un tel motif légitime ; que s'agissant du désintérêt imputé à M. G..., cette assertion est contredite par son action en contestation de paternité ; que de plus ce dernier soutient que seule l'attitude de la mère l'a tenu éloigné de l'enfant ; qu'enfin, pour que le désintérêt puisse constituer un motif légitime il ne saurait être caractérisé par le seul fait que l'enfant ne connaît pas M. G... et par le fait que l'enfant ne le souhaite pas ; que Mme W... ne prouve pas que M. G... souhaite régler ses comptes avec elle et que ce motif serait en tout état de cause inopérant ; que M. R... ne prouve pas davantage que M. G... serait mû par une volonté dénuée de bienveillance ; que s'agissant des conséquences sur l'enfant, il ne saurait en soi constituer un motif légitime, la preuve de la filiation, dans le cadre d'une procédure judiciaire, étant par définition contentieuse et difficile ; que les assertions de violences et de harcèlement imputés à M. G... ne sont étayées par aucun élément de preuve ; que de la même manière, il n'est pas démontré que M. G... n'a pas la volonté de restaurer des liens avec l'enfant, celui-là dément cette assertion contredite par son action et sa détermination procédurale ; que de la même manière, le fait que l'expertise biologique et la vérité en découlant puissent perturber l'équilibre familial et affectif de l'enfant ne saurait constituer un motif légitime de refus d'expertise ; que l'absence de preuve de relations sexuelles pendant la période légale de conception n'et pas davantage un motif légitime, l'expertise ayant justement pour but d'établir ou non la vérité biologique ; qu'en l'état des moyens et des éléments invoqués par les intimés, la preuve d'un motif légitime de refus de l'expertise n'est pas rapportée » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU' « en application de l'article 310-3 du code civil, si une action en recherche ou en contestation d'un lien de filiation est engagée, la filiation se prouve et se conteste par tous moyens, sous réserve de la recevabilité de l'action ; qu'il est rappelé que l'expertise biologique est de droit en matière de filiation, sauf s'il existe un motif légitime de ne pas y procéder ; qu'il en est ainsi, par exemple, lorsqu'il est impossible de localiser le père, ou encore lorsqu'aucune des pièces produites ne permet de rapporter la preuve de relations intimes, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que comme le remarquent à juste titre M. R... et Mme W..., l'existence de la relation entre cette dernière et M. G... ne peut conduire automatiquement à considérer le demandeur comme père de l'enfant ; mais que c'est précisément pour cette raison que l'expertise présente un intérêt ; que M. R... et Mme W... ne démontrant pas l'existence d'un motif légitime de ne pas y procéder, il convient d'ordonner, avant dire droit, une expertise biologique » ;
1°/ALORS QU'en matière d'état des personnes, les fins de nonrecevoir ont un caractère d'ordre public ; qu'en s'abstenant de relever la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de toute autre personne que l'enfant à agir en recherche de paternité et en déclarant recevable l'action formée par M. G... aux fins d'établir sa filiation sur B... R..., outre celle tendant à la contestation de la filiation de celle-ci à l'égard de M. R..., la cour d'appel a excédé ses pouvoirs au regard de l'article 125 du code de procédure civile et;
2°/ALORS QU' une demande d'expertise génétique susceptible de révéler un lien de filiation entre un enfant et un tiers suppose, pour être déclarée recevable, l'engagement par cet enfant d'une action en recherche de paternité, qu'il a seul qualité à exercer ; qu'en faisant droit à la demande d'expertise de M. G... et en confiant pour mission à l'expert désigné de procéder à tous examens utiles sur sa personne, lorsque l'action tendant à établir le lien de filiation d'B... R... à son égard était irrecevable, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs au regard des articles 16-11 et 327, alinéa 2, du code civil et;
3°/ALORS QUE l'intérêt de l'enfant à connaître ses origines est distinct de celui qu'il trouve au maintien ou à l'établissement d'un lien de filiation qui découle nécessairement d'une expertise biologique ; qu'en retenant qu'il est, en réalité, de l'intérêt d'B... R... de connaître la vérité biologique de sa filiation, pour justifier une mesure d'instruction ordonnée à l'occasion d'une action en contestation de la filiation et donc destinée à remettre en cause le lien de filiation paternelle de l'enfant, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs au regard des articles 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 de la Convention de New York relative aux droits de l'enfants du 26 janvier 1990.