CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 février 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10148 F
Pourvoi n° Q 20-14.330
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 10 FÉVRIER 2021
M. K... Y..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Q 20-14.330 contre l'arrêt rendu le 10 décembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 7), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme W... B..., domiciliée [...] ,
2°/ à Mme C... N..., domiciliée [...] , prise en qualité de curatrice de Mme B...,
défenderesses à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Cotty, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Occhipinti, avocat de M. Y..., de Me Le Prado, avocat de Mme B... et de Mme N..., ès qualités, après débats en l'audience publique du 15 décembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Le Cotty, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. Y... et le condamne à payer à Mme B... et Mme N..., ès qualités de curatrice de Mme B..., la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, signé par Mme Auroy, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me Occhipinti, avocat aux Conseils, pour M. K... Y...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR autorisé Mme N..., agissant en qualité de curatrice, à représenter Mme W... B... pour vendre à l'amiable le logement dont celle-ci est propriétaire [...] (lots 3, 10, 15, 16, 19 à 21) au prix minimum net vendeur de 4 500 000 €, à libérer ledit bien des meubles le garnissant, à mettre en garde-meubles les meubles que Mme B... souhaite garder et débarrasser les autres, et d'AVOIR dit que le capital revenant à Mme B... serait placé sur un compte ouvert au nom de celle-ci, le représentant légal devant présenter une requête pour leur placement dans les trois mois ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte des débats que Mme W... B..., qui est dans une situation anxiogène du fait de sa situation économique et de son endettement, a clairement exprimé devant la Cour qu'elle acceptait l'idée de vendre l'appartement qu'elle occupe actuellement avec son fils M. K... Y... mais, dont elle est seule propriétaire ; Il est clairement établi au vu des pièces du dossier que les frais engagés par M. K... Y... dans les nombreuses procédures ayant pour but de récupérer des oeuvres d'art dont sa famille aurait été spoliées pendant la deuxième guerre mondiale, et auxquelles il a associé sa mère, sont à l'origine de la ruine de celle-ci. Mme W... B... n'a plus aucun capitaux, et ses faibles revenus de 1000 euros par mois ne lui permettent pas de faire face à ses charges courantes. Elle est notamment dans l'incapacité de payer les charges de copropriété, étant précisé que par jugement du 15 mars 2019, le Syndicat des copropriétaires a obtenu un titre pour une créance de 78 564,81 euros et qu'au mois de juillet 2019 la créance s'élevait à plus de 100 000 euros. Il est par ailleurs établi que Mme W... B... est tenue au remboursement d'un prêt notarié consenti par la Banque Neuflize OBC pour financer des frais liés aux procédures engagées par son fils et que ladite banque qui bénéficie d'un prêt hypothécaire sur le logement, lui a délivré un commandement aux fins de saisie vente pour une créance fixée à 649 923,79 euros. Il existe également une dette fiscale pour un montant actualisé en août 2019 à environ 33000 euros. Toutes les dettes ci-dessus énumérées sont exigibles et bénéficient de titre exécutoire. La vente forcée du logement de Mme W... B... n'est donc pas hypothétique, notamment du fait de la dette de copropriété qui ne peut que s'aggraver. Dès lors, peu importe que l'existence de la créance du Crédit Foncier soit contestée par M. K... Y.... Ce dernier qui est responsable de la situation financière obérée de sa mère, qui ne semble avoir aucune activité et aucun revenu, et occupe l'appartement sans justifier de la moindre participation aux charges, n'a jamais fait aucune proposition sérieuse pour participer au règlement des dettes. Il a par contre fait obstruction à toutes les démarches de la curatrice, l'obligeant à solliciter les services de police et un huissier pour pouvoir effectuer les diagnostics et le métrage de l'appartement ; Devant la Cour, il fait état de la possibilité de rembourser les dettes grâce à la mise en vente de sa propriété de Séguret et à celle d'objets d'art lui appartenant. Ces solutions alternatives tardives sont hypothétiques et ne donnent concrètement aucune perspective d'avenir à Mme W... B.... De même, la seule proposition de limiter la vente aux annexes du logement est insuffisante pour sortir Mme W... B... de l'impasse financière dans laquelle elle se trouve, une telle solution ne permettant pas de dégager des revenus et des capitaux suffisants pour permettre de continuer à faire face aux charges du logement. Au vu de l'ensemble de ces constatations et afin d'éviter toute vente forcée qui serait à la fois une catastrophe financière et un traumatisme moral, la vente de son logement est conforme aux intérêts de Mme B.... Compte tenu de sa valeur, il lui permettra en effet à la fois de régler l'ensemble de ses dettes et de racheter un nouvel appartement plus petit mais d'un confort équivalent. Mme W... B... a d'ailleurs pris clairement conscience des enjeux de cette vente en exprimant devant la Cour sa volonté de vendre son appartement. Si son indécision relevée par le juge des tutelles a donc évolué, l'obstruction de son fils à ce projet et les risques de pression psychologique qui demeurent, ne permettent pas de s'assurer que Mme W... B... sera à même de signer tous les actes nécessaires à la vente. Il est donc justifié de maintenir la possibilité pour la curatrice en application de l'article 469 al 2 du code civil de signer seule tous les actes nécessaires à la vente, étant précisé qu'elle devra tout mettre en oeuvre pour que Mme W... B... soit signataire ; Le juge des tutelles a statué en conformité à l'évaluation faite par l'Immobilière du Dôme le 9 novembre 2018 et celle faite par l'Administrateur de biens Le Home de France le 25 avril 2019 ; Ces évaluations sont confortées par celle établie le 26 septembre 2019, par le département immobilier expertises de Paris notaires services, organisme non intéressé à la vente du bien, qui est particulièrement précise et objective et, tient compte de l'état du bien et de sa situation juridique ; M. K... Y... produit 3 estimations faites par des agences immobilières en septembre et octobre 2019 pour des montants de 5.900 000 euros, 6.240 000 euros et 6.500 000 et retient cette dernière estimation. Or ces estimations proviennent d'agences immobilières, qui non seulement ont intérêt à obtenir un mandat de vente, et donc à proposer un prix fort mais en sus, ne tiennent pas compte ni de l'état de l'appartement ni du fait que l'acquéreur risque de se trouver dans l'obligation d'engager une procédure d'expulsion à l'encontre de M. K... Y..., celui-ci refusant d'accepter le principe même de la vente et espérant, en fixant un prix très élevé, y faire obstacle. Mme W... B... qui est apparue lassée de toutes les procédures engagées par son fils, a d'ailleurs clairement indiqué qu'elle refusait toute nouvelle évaluation, et notamment toute nouvelle expertise immobilière souhaitant conclure une vente dans les meilleurs délais. Il convient d'observer s'agissant de la demande d'expertise que M. K... Y... ne propose nullement de la prendre financièrement en charge, préférant une fois encore en laisser supporter les frais à sa mère. Eu égard au sérieux de la dernière évaluation immobilière de Paris notaires services produite par la curatrice et de la situation personnelle dramatique de Mme B..., une nouvelle expertise immobilière qui ne ferait que retarder le processus de vente, est inutile. Au vu des observations ci-dessus il convient donc de confirmer le prix de vente minimum retenu par le juge des tutelles, celui-ci étant conforme aux intérêts de Mme B... ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le principe de la vente du logement et de ses annexes a été arrêté par ordonnance du 15 février 2019 (
) la vente amiable du logement de la majeure protégé permettrait de liquider l'intégralité de ses dettes tout en laissant la possibilité à Mme B... d'acquérir un nouvel appartement adapté à ses besoins et qu'un il apparaît indispensable à la protection de sa personne et de ses intérêts de Mme B... qu'il doit procédé rapidement à la vente amiable du logement dont elle est propriétaire ; l'indécision de Mme B... n'a pas évolué ces derniers mois malgré les différentes démarches (
) s'agissant du prix de vente, les différentes estimations sont concordantes : le 9 novembre 2018, l'Immobilière du Dôme a évalué l'ensemble à 4 500 000 €, le Home de France, le 25 avril 2019, à 4 300 000 € pour l'appartement et la cave, 180 000 € pour le parking, et chacune des chambres entre 90 000 et 100 000 € ; l'opération envisagée est conforme à l'intérêt de la personne protégée et il convient d'autoriser Mme N... à vendre seule le logement de la majeure protégée pour 4 500 000 € ;
1°) - ALORS QUE la vente du logement de la personne protégée n'est autorisée que si elle est nécessaire ou si elle est dans l'intérêt de la personne ; qu'en estimant nécessaire la vente de l'appartement de Mme B... en raison de ses dettes, dont un prêt contracté auprès de la banque Neuflize, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il n'était pas exact que le contrat de prêt n'avait jamais été produit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 426 du code civil ;
2°) - ALORS QUE la vente de l'appartement du majeur protégé doit être évitée autant que possible ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la vente d'un objet d'art rare n'était pas déjà programmée par l'intermédiaire de la société Christie's, et si l'évaluation de cet objet par cette société ne permettait pas de rembourser une partie substantielle des dettes de Mme B... en évitant de vendre son appartement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 426 du code civil ;
3°) – ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas se prononcer en fonction de pièces qui n'ont pas été communiquées ; qu'en se fondant sur les estimations de valeur établies par les agences Immobilière du Dôme et Home de France, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, s'il n'était pas exact qu'elles n'avaient pas été communiquées, étant souligné qu'elles ne sont pas mentionnées dans le bordereau de pièces de Mme N..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme et 16 et 132 du code de procédure civile ;
4°) - ALORS QU'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas d'une annonce de vente d'un appartement dans le même immeuble que celui de Mme B..., et d'une vente effectivement réalisée dans un immeuble tout à fait comparable que le prix de 4,5 millions d'euros retenu pour la mise en vente était bien trop faible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 426 du code civil.