CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 3 février 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10114 F
Pourvoi n° V 19-23.002
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 3 FÉVRIER 2021
1°/ M. O... Q...,
2°/ Mme B... W..., épouse Q...,
domiciliés tous deux [...],
ont formé le pourvoi n° V 19-23.002 contre l'arrêt n° RG : 15/02524 rendu le 20 juin 2019 par la cour d'appel de Nîmes (1re chambre civile), dans le litige les opposant à la société Crédit immobilier de France développement, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Banque patrimoine immobilier, défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. et Mme Q..., de la SCP Gaschignard, avocat de la société Crédit immobilier de France développement, et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Q... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Q....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer, D'AVOIR confirmé le jugement ayant rejeté la demande de sursis à statuer, D'AVOIR dit n'y avoir lieu à l'application du code de la consommation au présent litige, D'AVOIR débouté les époux Q... de l'intégralité de leurs demandes, D'AVOIR condamné solidairement M. et Mme Q... à payer au CIFD au titre du prêt n° 2087471P la somme de 198 291,22 € avec intérêts au taux contractuel de 4,35% à compter du 25 octobre 2011,outre l'indemnité contractuelle de 13 880,38 € avec intérêts légaux à compter du 25 octobre 2011 et au titre du prêt n° 2088839B, la somme de 101632,75 € avec intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 25 octobre 2011, outre l'indemnité contractuelle de 7 104€ avec intérêts légaux à compter du 25 octobre 2011, D'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts par aimées entières conformément à l'article 1154 ancien du code civil à compter du 25 octobre 2011 ;
AUX MOTIFS QUE
« Les époux Q... demandent à la cour de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'intervienne une décision définitive dans la procédure pénale actuellement pendante devant le tribunal de grande instance de Marseille. Selon l'article 73 du code de procédure civile, constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. La décision de sursis à statuer qui, en vertu de l'article 378 du code de procédure civile, suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine, est une exception de procédure qui, en application de l'article 379 code de procédure civile doit être soulevée in limine litis avant toute défense au fond et toute fin de non-recevoir. Le dispositif des dernières écritures des appelants saisit la cour, en premier lieu et à titre principal, d'une fin de non-recevoir de l'action engagée par le CIFD puis d'une demande de rejet des prétentions du CIFD - demande qui s'analyse en une demande au fond - et enfin d'une demande subsidiaire de sursis à statuer.
Les appelants sont donc irrecevables en leur demande de sursis à statuer qui n'a pas été formée in limine litis devant la cour » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
« Selon les dispositions de l'article 4 du code de procédure pénale, la mise en mouvement de l'action publique n'impose le sursis que sur le seul jugement de l'action civile exercée devant la juridiction civile en réparation du dommage causé par l'infraction.
En l'espèce, le tribunal est saisi d'une action en paiement par la banque et il n'est pas établi que l'attente d'une décision pénale définitive ait une quelconque influence sur l'obligation en paiement.
Il n'est pas davantage établi que les droits de la défense imposent un tel sursis alors que la partie civile n'est pas tenue au secret de l'instruction et garde donc la faculté de produire par l'intermédiaire de son avocat les éléments de la procédure pénale nécessaires à sa défense.
Il s'en déduit que la demande de sursis à statuer doit être rejetée » ;
ALORS QU'excède ses pouvoirs la cour d'appel qui après avoir déclaré irrecevables les appelants en leurs demandes, les en déboute ; qu'en déclarant irrecevable la demande de sursis à statuer formée par les époux Q... tout en confirmant le jugement dans ses dispositions ayant rejeté leur demande de sursis à statuer, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et a violé l'article 122 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer, D'AVOIR confirmé le jugement ayant rejeté la demande de sursis à statuer, D'AVOIR dit n'y avoir lieu à l'application du code de consommation au présent litige, D'AVOIR débouté les époux Q... de l'intégralité de leurs demandes, D'AVOIR condamné solidairement M. et Mme Q... à payer au CIFD au titre du prêt n° 2087471P la somme de 198 291,22 € avec intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 25 octobre 2011,outre l'indemnité contractuelle de 13 880,38 euro avec intérêts légaux à compter du 25 octobre 2011 et au titre du prêt n° 2088839B, la somme de 101632,75 € avec intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 25 octobre 2011, outre l'indemnité contractuelle de 7 104€ avec intérêts légaux à compter du 25 octobre 2011, D'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts par aimées entières conformément à l'article 1154 ancien du code civil à compter du 25 octobre 2011 ;
AUX MOTIFS QUE
« Le CIFD se prévaut des dispositions de l'article L 312-3 du code de la consommation selon lesquelles : "sont exclus du champ d'application du présent chapitre
1° les prêts consentis à des personnes morales de droit public ;
2° ceux destinés (..) À financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, (.. ) procurent (..) Des immeubles ou fractions d'immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, en propriété ou en jouissance. ».
Il résulte des éléments de l'espèce que les époux Q... ont souscrit les 7 novembre 2006 et 6 février 2007 deux prêts d'un montant respectif de 196 000 € et 101 500 € en vue de financer l'acquisition en vente en l'état futur d'achèvement de deux logements à usage locatif en meublé. Des explications que fournit le CIFD sans être démenti sur ce point par les époux Q..., ceux-ci ont souscrit des dizaines de prêts auprès de plusieurs établissements bancaires aux fins d'acquérir 16 logements destinés à la location, dont ceux objet du présent litige, pour un montant total de 2 058 941€.
Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que les prêts souscrits s'inscrivaient dans une opération d'investissement de grande ampleur pour laquelle M. O... Q... était inscrit au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueur en meublé professionnel à effet au 29 janvier 2007, que par suite les prêts étaient destinés à financer une activité professionnelle, fût-elle accessoire à l'activité principale d'enseignement exercée par les emprunteurs. Il importe peu que seul M. Q... bénéficie de l'inscription au registre du commerce et des sociétés, celle-ci ouvrant droit à un régime fiscal spécifique pour l'ensemble de l'opération immobilière financée à crédit.
En l'état de la méconnaissance par la banque des multiples opérations immobilières similaires réalisées par les époux Q... auprès d'établissements financiers différents la mention dans les offres de prêts litigieuses de dispositions du code de la consommation est insuffisante à démontrer une volonté non équivoque des parties, notamment de la banque, de soumettre expressément les contrats au code de la consommation.
Dans ces conditions les époux Q... ne peuvent se prévaloir de la qualité de consommateur telle que définie par le code de la consommation.
Ainsi ils ne peuvent valablement exciper d'un non-respect des dispositions du code de la consommation qui ne leur sont pas applicables et les demandes en nullité des prêts et en déchéance de la banque du droit aux intérêts contractuels sur le fondement des articles L 312-33, L 312-7 et L 312-10 alinéa 2 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure au 1er juillet 2016, ne peuvent prospérer » ;
1°) ALORS QU'est un consommateur au sens de la directive n° 2011.83 UE du 25 octobre 2011 et de la directive 2014.17 UE du 4 février 2014, reprenant les termes des directives antérieures, notamment de la directive 9313.CE du 5 avril 1993, une personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; que transposant cette directive, l'article 3 de la loi n° 2014.344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a inséré un article préliminaire dans le code de la consommation, d'application immédiate, aux termes duquel est considérée comme consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; que dans une décision n° 2017-689 QPC du 8 février 2018, le Conseil constitutionnel a précisé que l'activité de location de biens immeubles ne constituait pas une activité commerciale au sens de l'article L. 110-1 du code de commerce, que les personnes physiques exerçant cette activité ne pouvaient donc avoir la qualité de commerçant conférée exclusivement à « ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle » aux termes de l'article L. 121-1 du code de commerce, ni être inscrites au registre du commerce et des sociétés en application de l'article L. 123-1 du même code ; que dès lors n'agit pas dans le cadre d'une activité commerciale pas davantage qu'industrielle, artisanale ou libérale et est donc consommateur, la personne physique qui acquiert à l'aide de prêts des immeubles à des fins d'investissements locatifs accompagnés d'avantages fiscaux ; qu'en se fondant sur un motif inopérant tiré de l'ampleur des investissements réalisés par les époux Q... et l'inscription de M. Q... au registre du commerce en qualité de loueur en meublé pour leur refuser la qualité de consommateur et retenir que les prêts accordés par le CIFD étaient destinés à financer une activité professionnelle fût-elle « accessoire » à leur activité d'enseignants, la cour d'appel a violé les dispositions précitées de l'article liminaire du code de la consommation et des directives 2011-83 UE, 2014-17 UE et 9313 CE ainsi que des règlements de Bruxelles n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 portant refonte du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000, entrée en vigueur le 10 janvier 2015, et de Rome n° 598/2008 du 17 juin 2008 ;
2°) ALORS QU' en jugeant que M. et Mme Q..., tous deux enseignants, ne pouvaient être considérés comme des consommateurs car ils exerceraient une activité professionnelle « accessoire » de loueur en meublé, ce qui supposerait en droit qu'elle fût indissociable de leur activité « principale » ou du moins liée à cette activité, ce qui n'est pas le cas des époux Q..., pas plus que l'activité de location d'appartements meublés ne constitue nécessairement une activité professionnelle au sens de la loi, la Cour d'appel a violé l'article liminaire du code de la consommation transposant la directive 2011-83 UE et la directive 2014-17 UE, ainsi que la directive 9313 CE du 5 avril 1993 et l'article L. 312-3 du code de la consommation ;
3°) ALORS QUE la définition du consommateur en droit communautaire repose sur deux critères, un critère finaliste correspondant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de l'activité professionnelle de la personne concernée mais aussi une finalité personnelle du contrat permettant de savoir si on est en présence d'un consommateur nécessitant d'être protégé ou d'un professionnel avisé ; qu'en s'abstenant de rechercher si, dans les faits, les époux Q... pouvaient sérieusement être considérés comme des professionnels avisés de l'immobilier et non comme de simples consommateurs au sens du droit communautaire alors même que l'arrêt relève qu'ils étaient enseignants et n'étaient pas aguerris aux affaires, fussent-ils par ailleurs emprunteurs au titre d'emprunts immobiliers et que la banque était tenue d'un devoir de mise en garde à leur égard lors de la conclusion des prêts, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des dispositions précitées de l'article liminaire du code de la consommation et des directives 2011-83 UE, 2014-17 UE et 9313 CE ainsi que des règlements de Bruxelles n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 portant refonte du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000, entrée en vigueur le 10 janvier 2015, et de Rome n° 598/2008 du 17 juin 2008 ;
4° ALORS, en tout état de cause, QU' un établissement bancaire est libre de soumettre le prêt immobilier qu'il consent aux dispositions du code de la consommation ; que tel est le cas lorsque les offres de prêt mentionnent expressément qu'elles sont régies par les articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction applicable au litige, l'article préliminaire du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige et l'article 1134, alinéa 2 devenu 1193 du code civil .
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer, D'AVOIR confirmé le jugement ayant rejeté la demande de sursis à statuer, D'AVOIR dit n'y avoir lieu à l'application du code de consommation au présent litige, D'AVOIR débouté les époux Q... de l'intégralité de leurs demandes, D'AVOIR condamné solidairement M. et Mme Q... à payer au CIFD au titre du prêt n° 2087471P la somme de 198 291,22 € avec intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 25 octobre 2011,outre l'indemnité contractuelle de 13 880,38 euro avec intérêts légaux à compter du 25 octobre 2011 et au titre du prêt n° 2088839B, la somme de 101632,75 € avec intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 25 octobre 2011, outre l'indemnité contractuelle de 7 104€ avec intérêts légaux à compter du 25 octobre 2011, D'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts par aimées entières conformément à l'article 1154 ancien du code civil à compter du 25 octobre 2011 ;
AUX MOTIFS QUE
« Monsieur et Madame Q... excipent de la nullité des contrats de prêt sur le fondement du dol et soutiennent qu'ils ont été victimes de manoeuvres dolosives qui ont vicié leur consentement.
(
)
Le dol doit émaner du cocontractant et comporter un élément matériel ainsi qu'un élément intentionnel.
Alors que la procédure pénale est en cours depuis le 11 août 2009, date de dépôt de plainte des époux Q..., il n'est pas établi par les éléments versés aux débats que le CIFD , qui ne fait pas l'objet d'une mise en examen, a agi en concertation avec la société Apollonia , ni même qu'Apollonia ait été le représentant du CIFD, pour extorquer le consentement des époux Q..., ni même qu'elle ait eu connaissance des agissements et pratiques répréhensibles de celle-ci.
A défaut de démontrer l'existence de manoeuvres frauduleuses intentionnelles imputables au CIFD susceptibles de vicier leur consentement pour dol, les époux Q... seront déboutés de leur demande de nullité des actes de prêt pour dol » ;
ET AUX MOTIFS QUE
« En l'état d'une procédure pénale dans laquelle le CIFD n'est pas mis en examen, la preuve de faits frauduleux allégués par les emprunteurs et imputables au CIFD à raison d'agissements d'intermédiaires ou de préposés n'est pas justifiée. Ce grief ne saurait donc engager la responsabilité du CIFD sur le fondement des articles 1382 et 1384 anciens du code civil.
Quant aux dispositions de l'article L 341-4 du code monétaire et financier dont se prévalent les appelants au soutien de leur demande tendant à voir retenue la responsabilité du CIFD à raison des agissements d'Apollonia, des dispositions relatives à la responsabilité des établissements de crédit du fait des personnes physiques ou morales qu'elles ont mandatées, suppose que soit établie, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, l'existence d'un mandat entre le CIFD et Apollonia » ;
1°) ALORS QUE M. et Mme Q... ont versé aux débats la plainte déposée par la BPI contre la société Apollonia (pièce n° 37 ) aux termes de laquelle la BPI déclare avoir donné mandat à la société Apollonia le 25 mars 2005 d'établir les demandes de crédit et expose que « le suivi du mandat consenti à Apollonia était assuré par l'agence de Marseille de la banque qui faisait un point périodique avec le mandataire aux fins notamment d'en vérifier l'exécution », le courrier adressé par la BPI à la société Apollonia le 4 janvier 2008 (pièce 59), auquel est jointe une convention de mandat actualisée régie par les articles 1984 et suivants du code civil, L 519-1 et suivants du code monétaire et financier et 37 du règlement CRBF 97-02 modifié (pièce 60), qui exprime toute « satisfaction pour les excellentes relations commerciales (
) entretenues ces dernières années, avec le groupe Crédit immobilier de France, tant avec la BPI Marseille et M. I... (
) » et propose « de réactualiser » la convention de partenariat, l'audit interne de la BPI (pièce n° 62) qui fait état d'une convention signée par la BPI le 5 mai 2004 au profit de la société Apollonia pour gérer entièrement la relation client et l'arrêt de la chambre d'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 28 septembre 2017 (pièce 75) qui mentionne que la BPI travaillait en partenariat avec la société Apollonia depuis 2004 ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait sans examiner les pièces produites par M. et Mme Q..., lesquelles sont visées dans leurs conclusions d'appel (p.35 , 12 et 13), qui établissent que la BPI, auprès de laquelle les deux prêts litigieux ont été souscrits, avait donné mandat à la société Apollonia pour établir les demandes de crédit et gérer la relation client, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les manoeuvres dolosives et fautes du mandataire, même seulement apparent, sont opposables au mandant ; que pour rejeter la demande en nullité des contrats de prêts et écarter la responsabilité de l'établissement bancaire en raison des manoeuvres dolosives et fautes commises par la société Apollonia, la cour d'appel s'est bornée à retenir qu'il n'était pas établi que le CIFD était représenté par la société Apollonia, ni la preuve de faits frauduleux imputables au CIFD à raison d'intermédiaires ou de préposés ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, ainsi qu'elle était invitée à le faire, si les époux Q... n'avaient pas pu légitimement croire que la société Apollonia, dont ils soutiennent qu'elle avait été leur seule interlocutrice lors des démarches d'obtention des prêts, avait agi en qualité de mandataire de la BPI devenue CIFD, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1984, 1998 et 1116 devenu 1137 du code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer, D'AVOIR confirmé le jugement ayant rejeté la demande de sursis à statuer, D'AVOIR dit n'y avoir lieu à l'application du code de consommation au présent litige, D'AVOIR débouté les époux Q... de l'intégralité de leurs demandes, D'AVOIR condamné solidairement M. et Mme Q... à payer au CIFD au titre du prêt n° 2087471P la somme de 198 291,22 € avec intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 25 octobre 2011,outre l'indemnité contractuelle de 13 880,38 euro avec intérêts légaux à compter du 25 octobre 2011 et au titre du prêt n° 2088839B, la somme de 101632,75 € avec intérêts au taux contractuel de 4,35 % à compter du 25 octobre 2011, outre l'indemnité contractuelle de 7 104€ avec intérêts légaux à compter du 25 octobre 2011, D'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts par aimées entières conformément à l'article 1154 ancien du code civil à compter du 25 octobre 2011 ;
AUX MOTIFS QUE
« Sur le manquement au devoir de mise en garde
Les époux Q... font grief au CIFD d'avoir manqué à son obligation de mise en garde à leur égard.
Cette obligation s'impose à la banque à l'égard des emprunteurs non avertis.
L'emprunteur averti est celui qui possède les compétences et l'expérience pour appréhender les particularités et les risques propres au fonctionnement du prêt dans lequel il s'engage.
Cette qualité s'apprécie in concreto.
Elle résulte des diplômes, de la qualification et de la responsabilité professionnelle spécifique mais aussi de la pratique que peut avoir l'emprunteur de ce type d'opération de crédit.
En l'espèce, il résulte des éléments du dossier que M et R... Q... sont enseignants et ne sont pas aguerris aux affaires, fussent-ils par ailleurs emprunteurs au titre d'emprunts immobiliers dont le CIFD ne précise pas la date de souscription, de sorte qu'il n'est pas établi par la banque que les intéressés mesuraient les risques accompagnant les opérations ainsi réalisées. Ils ne peuvent donc être considérés comme emprunteurs avertis en matière d'emprunts bancaires, s'agissant notamment d'emprunts multiples à des fins locatives avec un statut de loueur en meublé professionnel, relevant d'opérations plus sophistiquées qu'un simple prêt immobilier.
Le CIFD était donc tenu lors de la conclusion des contrats de prêt d'un devoir de mise en garde à l'égard des époux Q... à raison des leurs capacités financières si un risque d'endettement résultait de l'octroi des prêts.
D'après les informations portées sur les fiches de renseignements établies par les emprunteurs, qu'il n'appartenait à la banque de vérifier, les revenus et charges des époux Q... s' établissaient comme suit le 14 octobre 2006 :
- revenus mensuels nets de M.Q...: 5 446 € +474,45 €+256 €,
- revenus mensuels nets de Mme Q...: 1108 €,
total mensuel de 7 284,45 €.
Les emprunteurs déclaraient posséder un immeuble d'une valeur de 228 000 € outre des placements mobiliers de 12 000 €.
Leur charge d'emprunts immobiliers était déclarée à hauteur de la somme globale de 826,51 € par mois outre 335,54 € au titre d'un prêt véhicule remboursé en août 2007.
Il s'en déduit que les échéances mensuelles de 1 180,38 € résultant du prêt n°2087471P consenti le 7 novembre 2006 étaient adaptées aux capacités financières des emprunteurs et ne généraient pas un risque d'endettement pour ces derniers ; que la banque n'était donc pas tenue d'une obligation de mise en garde au titre de ce prêt.
Lors de la souscription l'emprunt suivant n° 2088839B, suivant offre de prêt acceptée le 6 février 2007 les revenus et charges des époux Q... tels que déclarés dans la fiche de renseignement établie le 11 janvier 2007 s'établissaient ainsi:
- revenus de M. Q...: 4832,72 € + 540,66 € + 256 €
- revenus de Mme Q...: 1273,91 €
total 6 903,29 €
Les emprunteurs déclaraient posséder deux immeubles d'une valeur de 228 0000 € et 196 000 € outre des placements mobiliers de 12 000 €.
-charges mensuelles déclarées : 1162,05€.
Le CIFD ne pouvait ignorer les mensualités de 1 180,38 € supportées par les époux Q... au titre du prêt qu'elle leur avait consenti le 7 novembre 2007, ce qui portait les charges à la somme mensuelle globale de 2 342,43 €.
Les mensualités du prêt consenti le 2 mars 2007 s'élevaient à 632,79 €, ce qui portait les charges d'emprunts à la somme mensuelle globale de 2 975,22 € qui, au regard des revenus des emprunteurs de 6 903 € auxquels s'ajoutaient les loyers procurés par les biens loués et de leur patrimoine immobilier et mobilier n'impliquait pas un risque de surendettement, étant précisé que les époux Q... n'avaient pas informé le CIFD des autres emprunts souscrits auprès d'autres établissements de crédit et qu'il n'appartenait pas au CIFD de vérifier les informations fournies par les emprunteurs.
A défaut de risque d'endettement établi, la responsabilité du CIFD ne saurait être engagée à l'égard des emprunteurs au titre d'un manquement à l'obligation de mise en garde.
Sur les autres manquements
En l'état d'une procédure pénale dans laquelle le CIFD n'est pas mis en examen, la preuve de faits frauduleux allégués par les emprunteurs et imputables au CIFD à raison d'agissements d'intermédiaires ou de préposés n'est pas justifiée. Ce grief ne saurait donc engager la responsabilité du CIFD sur le fondement des articles 1382 et 1384 anciens du code civil.
Quant aux dispositions de l'article L 341-4 du code monétaire et financier dont se prévalent les appelants au soutien de leur demande tendant à voir retenue la responsabilité du CIFD à raison des agissements d'Apollonia, des dispositions relatives à la responsabilité des établissements de crédit du fait des personnes physiques ou morales qu'elles ont mandatées, suppose que soit établie, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, l'existence d'un mandat entre le CIFD et Apollonia » ;
1°) ALORS QU' en affirmant péremptoirement, pour écarter tout manquement de la banque à son devoir de vigilance et de mise en garde, que les fiches de renseignement avaient été remplies par les époux Q... sans répondre à leurs conclusions (p.41) qui faisaient valoir que ces fiches avaient été établies sur des formulaires types par la société Apollonia qui a porté des renseignements inexacts et incomplets et sans examiner le rapport d'expertise réalisé dans le cadre de l'instruction, produit aux débats(prod n° 39 du bordereau de communication de pièces), qui relève expressément que « dans le cadre de la préparation des demandes de financement et afin d'obtenir rapidement des réponses positives, les préposés d'Apollonia ont commis des irrégularités en portant de fausses informations sur les demandes de crédit, notamment en dissimulant l'endettement réel de l'investisseur », la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les règles prudentielles impliquent que le banquier dispensateur de crédit rencontre les futurs emprunteurs avant l'octroi d'un prêt destiné à financer une opération complexe de défiscalisation ; qu'en se bornant à affirmer qu'il n'appartenait pas à la banque de vérifier les fiches de renseignement établies par les emprunteurs sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'en s'abstenant de rechercher si la banque n'avait pas manqué à son devoir de vigilance et n'aurait pas dû être alertée du caractère frauduleux des fiches de renseignements dès lors que la fiche du 11 janvier 2007 relative au second prêt ne mentionnait pas le premier crédit accordé par la BPI en novembre 2006 pour l'acquisition d'un bien à Belleville, ce qui résulte d'ailleurs des constatations de l'arrêt (p. 10, dernier §), la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;
4°) ALORS QUE les règles prudentielles imposent que le taux d'endettement de l'emprunteur ne dépasse pas 30 % de ses revenus nets ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que suite à l'octroi du second prêt par la BPI, les charges d'emprunts du couple s'élevait à la somme de mensuelle globale de 2 975,22 € tandis que leurs revenus, revenus locatifs compris, s'élevaient à la somme de 6 903 €, soit un taux d'endettement de 43,1 % ; qu'en jugeant néanmoins que l'octroi du second prêt n'impliquait pas un risque de surendettement, la cour d'appel a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;
5°) ALORS QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions d'appel de M. et Mme Q... (p. 40) qui faisaient valoir que la société My Money Bank avait manqué à son devoir de prudence en finançant des biens locatifs incluant la TVA à 100 %, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts par années entières conformément à l'article 1154 ancien du code civil à compter du 25 octobre 2011 ;
SUR LA CONSTATATION QUE
« Par acte du 2 janvier 2012, la Sa Banque Patrimoine et Immobilier devenue la Sa Crédit immobilier de France Développement (CIFD) a assigné Monsieur O... Q... et Madame B... W... épouse Q... devant le tribunal de grande instance de Nîmes défaillants dans le remboursement d'emprunts immobiliers destinés à financer l'acquisition de deux appartements sis à Belleville et à Blois afin de les voir condamnés au paiement des sommes suivantes :
-192.105,14 € au titre d'un prêt n° 2087471P, suivant offre de prêt acceptée le 7 novembre 2006,
- 99.794,52 € au titre d'un prêt n° 2088839B, suivant offre de prêt acceptée le 6 février 2007,
- 27.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, exposant que les débiteurs étaient contractés » ;
ET AUX MOTIFS QUE
« Il est constant que la capitalisation des intérêts est de droit, en application des dispositions de l'article 1154 ancien du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, dès lors qu'elle fait l'objet d'une demande en justice et que les intérêts sont dus pour une année entière, le juge ne disposant d'aucun pouvoir d'appréciation en la matière.
C'est à tort que les appelants s'opposent à la capitalisation des intérêts sollicitée par la banque en se prévalant de dispositions du code de la consommation qui sont inapplicables à la présente espèce ainsi qu'il résulte des développements qui précèdent » ;
ALORS QU' à défaut de convention spéciale, les intérêts échus des capitaux ne peuvent eux-mêmes produire des intérêts que moyennant une demande en justice et à compter de la date de celle-ci ; qu'en ordonnant la capitalisation des intérêts par année entière à compter du 25 octobre 2011 après avoir pourtant constaté que la BPI avait assigné les époux Q... en paiement du solde des prêts par acte du 2 janvier 2012, la cour d'appel a violé l'article 1154 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.