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27/01/2021 | FRANCE | N°19-20.263

France | France, Cour de cassation, Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 27 janvier 2021, 19-20.263


CIV. 1

MY2



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 janvier 2021




Rejet non spécialement motivé


Mme BATUT, président



Décision n° 10084 F

Pourvoi n° T 19-20.263




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 27 JANVIER 2021

Mme D... I..., divorcée J..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi

n° T 19-20.263 contre l'arrêt rendu le 14 mai 2019 par la cour d'appel de Bordeaux (3e chambre civile), dans le litige l'opposant à M. Q... J..., domicilié [...] , défendeur à l...

CIV. 1

MY2

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 janvier 2021

Rejet non spécialement motivé

Mme BATUT, président

Décision n° 10084 F

Pourvoi n° T 19-20.263

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 27 JANVIER 2021

Mme D... I..., divorcée J..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° T 19-20.263 contre l'arrêt rendu le 14 mai 2019 par la cour d'appel de Bordeaux (3e chambre civile), dans le litige l'opposant à M. Q... J..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guihal, conseiller, les observations écrites de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de Mme I..., de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. J..., après débats en l'audience publique du 1er décembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Guihal, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme I... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme I... et la condamne à payer à M. J... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour Mme I....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement rendu le 30 novembre 2017 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux et d'avoir supprimé la prestation compensatoire viagère à la charge de M. J... en faveur de Mme I... résultant du jugement de divorce en date du 31 mai 1994 ;

AUX MOTIFS QUE l'article 276 du code civil stipule qu'à titre exceptionnel, le juge peut, par décision spécialement motivée, lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère ; qu'il prend en considération les éléments d'appréciation prévus à l'article 271 ; que le montant de la rente peut être minoré lorsque les circonstances l'imposent, par l'attribution d'une fraction en capital parmi les formes prévues à l'article 274 ; que l'article 276-3 du code civil dispose que la prestation compensatoire fixée sous forme de rente peut être révisée, suspendue ou supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties ; que la révision ne peut avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge ; que cette demande ne peut se fonder sur un chargement connu au moment du divorce et/ou pris en compte dans la fixation initiale ; que la rente ayant été consentie avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, ce sont les dispositions transitoires qui servent de fondement à la demande, plus précisément le VI de l'article 33 de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 ; que ces dispositions prévoient l'application immédiate de l'article 276-3 du code civil aux rentes en cours mais ajoutent à ce texte un nouveau fondement pour la révision des rentes qui peuvent être révisées, suspendues ou supprimées lorsque leur maintien en l'état procurerait au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil ; qu'à ce titre, il est tenu compte de la durée du versement de la rente et du montant déjà versé ;

Que sur le changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties, le divorce a été prononcé le 31 mai 1994 à une époque où l'époux n'était pas à la retraite mais gérant de société majoritaire de la société civile du [...] ; que c'est donc à tort que le jugement déféré à la cour a retenu que "le divorce a été prononcé en 1994 ; l'époux ne pouvait donc ignorer la diminution proche de ses revenus dans la mesure où il prenait sa retraite dès 1995, élément qui ne saurait pas conséquent constituer un élément nouveau'' alors même que le jugement de divorce ne fait nullement état de la retraite de l'époux et que le jugement de divorce n'a pas homologué un accord mais au contraire fixé une pension en dépit du désaccord du mari sur un quelconque versement au titre de pension et alors que l'épouse demandait une pension mensuelle de 6 000 francs ; qu'il est donc démontré qu'il existe un changement important dans les ressources de l'époux survenu un an après la décision fixant une prestation compensatoire viagère ; qu'il est constant qu'un an plus tard, M. J... a pris sa retraite puis a procédé le 31 mai 1995 à la vente pour 24 412 500 francs soit 3 721 661, 60 euros de ses parts dans la société ; que l'avis d'imposition 1995 fait mention d'un revenu agricole imposable de 2 381 800 francs et d'une imposition de 4 927 534 francs ; qu'il a été imposé sur la fortune de 2012 jusqu'2014 ; qu'il a enfin vendu deux immeubles, le premier lui appartenant avec son épouse pour 380 000 euros (Saint Aubin du Médoc, 8 janvier 2016) et le second lui appartenant en propre pour 240 000 euros (Vonnas, 10 mai 2017) ; qu'il soutient qu'il lui reste aujourd'hui 230 000 euros sur la vente de Vonnas ; qu'il détient en outre deux assurances vie de 278 951, 36 euros et 150 772, 91 euros au 3 mars 2018 ; qu'il perçoit en 2017 une retraite annuelle de 10 311 euros et son épouse de 7 066 euros et le couple, marié sous le régime de la séparation de biens, vit dans un immeuble acquis par l'épouse le 6 août 2013 (Saubion, [...] ) après qu'elle ait vendu un immeuble qui lui était propre le 5 août 2013 (Soorts-Hossegor [...]) ; que les pièces versées aux débats, s'agissant des avis d'imposition sur le revenu de M. J... des années 1995 à 2017, sont suffisantes pour établir l'absence d'autres ressources et il n'est, dans ces conditions, pas nécessaire, ainsi que l'appelant le propose, de faire procéder à une mesure d'enquête patrimoniale qui n'a pas à être ordonnée en vue de suppléer la carence de Mme I... dans l'administration de la preuve ;

Que sur l'avantage manifestement excessif apporté au crédirentier, Mme I... perçoit une prestation compensatoire depuis le divorce soit pendant 25 ans après avoir perçu, ce qu'elle ne conteste pas, une pension durant la séparation de corps de corps soit pendant 20 ans et alors que le mariage n'a duré que 16 ans jusqu'à la séparation de corps ; que depuis le divorce, elle a ainsi perçu, sans tenir compte de l'indexation, une somme d'environ 250 000 euros ; qu'elle perçoit pourtant des revenus fonciers importants par transmission par succession au décès de son père de différents biens immobiliers ; qu'ainsi, en 2016, elle a perçu un revenu foncier net imposable de 55 738 euros, soit 4 644 euros par mois outre 433 euros de retraite ; qu'elle supporte logiquement l'ensemble des charges afférentes à ces immeubles ; que dans ces conditions, le jugement déféré à la cour sera infirmé, la prestation compensatoire devant être supprimée dès lors que son maintien procurerait à la créancière un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil en tenant compte de la durée du versement de la rente et du montant déjà versé ;

1/ ALORS QU'il appartient à l'époux débiteur de la prestation compensatoire qui en demande la suppression de rapporter la preuve d'un changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties ; qu'en se fondant, pour supprimer la prestation compensatoire viagère à la charge de M. J... à la demande de ce dernier, sur « la carence de Mme I... dans l'administration de la preuve » pour établir l'absence d'autres ressources de M. J... en dehors de ses avis d'imposition sur le revenu des années 1995 à 2017, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 1315 devenu 1353, 276-3 du code civil et 33 VI de la loi n° 2004- 439 du 26 mai 2004 relative au divorce ;

2/ ALORS QUE ne constitue pas un changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties justifiant la suppression de la prestation compensatoire un élément connu ou prévisible au moment du divorce et, partant, nécessairement pris en considération pour la fixation de la prestation compensatoire ; que constitue un élément prévisible au moment du divorce pour un époux âgé de 64 ans une mise à la retraite prochaine ; qu'en se fondant, pour caractériser l'existence d'un changement important dans les ressources de M. J..., sur sa mise à la retraite le 31 mai 1995 quand le divorce avait été prononcé le 31 mai 1994, date à laquelle M. J... était âgé de 64 ans, la cour d'appel qui a pris en compte un élément prévisible au moment du prononcé du divorce et partant nécessairement pris en considération pour la fixation de la prestation compensatoire, a violé les articles 271, 276-3 du code civil et 33 VI de la loi n° 2004- 439 du 26 mai 2004 relative au divorce ;

3/ ALORS QUE les ressources du débiteur d'une prestation compensatoire fixée sous forme de rente viagère dont un changement important peut justifier la suppression de cette prestation sont constituées tant par les revenus que le capital de ce débiteur ; que la seule modification de la nature de ces ressources en l'absence de modification de leur montant ne constitue pas un changement important pouvant justifier une telle suppression ; qu'en se fondant, pour caractériser l'existence d'un changement important dans les ressources de M. J... justifiant la suppression de la prestation compensatoire, sur sa mise à la retraite et la cessation de ses fonctions de gérant au sein de la société civile du [...] , tout en constatant que M. J... a vendu ses parts dans cette société pour un montant de 3 721 661, 60 euros, qu'il a été imposé sur la fortune jusqu'en 2014, qu'il a vendu deux immeubles lui appartenant en 2016 et 2017 pour 380 000 euros et 240 000 euros, qu'il détenait au 3 mars 2018 deux assurances vie de 278 951, 36 euros et 150 772, 91 euros et qu'il perçoit une retraite annuelle de 10 311 euros et que sa nouvelle épouse perçoit une retraite de 7 066 euros, ce dont il résulte que si les ressources de M. J... ont changé de nature depuis son divorce, leur montant n'a pas connu de changement important, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 276-3 du code civil et 33 VI de la loi n° 2004- 439 du 26 mai 2004 relative au divorce ;

4/ ALORS QUE le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 31 mars 1994 (pièce n°1 du M. J...) précise que Mme I... et M. J... se sont mariés le 10 novembre 1958, que leur séparation de corps a été prononcée par un jugement du 18 février 1976 confirmé par un arrêt du 14 juin 1978, que cette séparation de corps est convertie en divorce à compter du 31 mars 1994 et que M. J... est condamné à verser à Mme I... une pension alimentaire mensuelle de 4 000 francs avec indexation à compter du divorce ; qu'il en résulte clairement et précisément que le mariage de Mme I... et M. J... a duré près de 20 ans ou à tout le moins 18 ans jusqu'à la séparation de corps et que du divorce au 14 mai 2019, date de l'arrêt attaqué, Mme I... a perçu, sans tenir compte de l'indexation, une somme de 1 200 000 francs, soit environ 183 000 euros ; qu'en affirmant, pour caractériser l'existence d'un avantage manifestement excessif apporté à Mme I... par la rente viagère, qu'elle a perçu depuis le divorce une somme d'environ 250 000 euros sans tenir compte de l'indexation et que le mariage n'a duré que 16 ans jusqu'à la séparation de corps, la cour d'appel a violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

5/ (Subsidiaire) ALORS QU'il appartient au juge de caractériser les éléments du calcul qu'il retient pour permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur la réalité de l'affirmation énoncée à la base de sa décision ; qu'en s'étant contentée d'affirmer que depuis le divorce Mme I... avait ainsi perçu, sans tenir compte de l'indexation, une somme de 250 000 euros, sans donner la moindre explication sur la justification de ce chiffre, au demeurant démenti par les conclusions de M. J... lui-même, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 33 VI de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce et 271 et 276 du code civil ;

6/ ALORS QUE pour supprimer une prestation compensatoire fixée sous forme de rente viagère accordée avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, les juges du fond doivent prendre en considération la situation du créancier au moment où ils statuent et notamment ses besoins et apprécier si, eu égard à son âge, son état de santé, la durée du versement de la rente et le montant déjà versé, ses ressources et celles du débiteur et les éléments visés à l'article 271 du code civil, le maintien en l'état de la rente lui procurerait un avantage manifestement excessif ; qu'en supprimant la prestation compensatoire viagère mise à la charge de M. J... en faveur de Mme I... sur le fondement de l'existence d'un avantage manifestement excessif apporté à la crédirentière, sans tenir compte, alors qu'elle y était invitée, de la variabilité des revenus fonciers de Mme I..., de ses charges étrangères aux immeubles dont elle tire des revenus fonciers et des ressources importantes de M. J... résultant notamment de la vente de ses parts dans la société Château de Pez à [...] , de deux contrats d'assurance vie et de la vente de deux immeubles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 33 VI, de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce et 271 et 276 du code civil.


Synthèse
Formation : Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 19-20.263
Date de la décision : 27/01/2021
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Première chambre civile, arrêt n°19-20.263 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux 06


Publications
Proposition de citation : Cass. Première chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 27 jan. 2021, pourvoi n°19-20.263, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.20.263
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