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13/01/2021 | FRANCE | N°19-86982

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 janvier 2021, 19-86982


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° P 19-86.982 F-D

N° 00071

GM
13 JANVIER 2021

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 13 JANVIER 2021

Mme X... V... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7ème chambre, en date du 18 octobre 2019, qui, pour fraude aux prestations sociales, l'a

condamnée à trois mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils.

Un mémoire a été produit.

Sur l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° P 19-86.982 F-D

N° 00071

GM
13 JANVIER 2021

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 13 JANVIER 2021

Mme X... V... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7ème chambre, en date du 18 octobre 2019, qui, pour fraude aux prestations sociales, l'a condamnée à trois mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Barbé, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de Mme X... V..., et les conclusions de Mme Philippe, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 2 décembre 2020 où étaient présents M. Soulard président, Mme Barbé, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par jugement du 22 juin 2017, le tribunal correctionnel a déclaré Mme V... coupable de fraude aux prestations sociales, en l'espèce du revenu de solidarité active (RSA) pour un montant de 10 591,18 euros, à Condrieu du 1er juin 2013 au 31 mai 2016.

3. Mme V... a fait appel le 27 juin 2017 à titre principal et le ministère public à titre incident.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré Mme V... coupable du délit de fourniture d'une déclaration fausse ou incomplète en vue d'obtenir d'une personne publique ou d'un organisme chargé d'une mission de service public une allocation, une prestation, un paiement ou un avantage indu, commis du 1er juin 2013 au 31 mai 2016 à Condrieu, alors :

« 1°/ que le délit de fourniture d'une fausse déclaration pour l'obtention de prestation ou allocation indue versée par un organisme de protection sociale suppose l'édiction d'un acte matériel déclaratif délibérément mensonger établi en vue d'obtenir un tel avantage ; qu'en l'espèce, en déclarant l'exposante coupable de ce délit tout en constatant que celle-ci avait simplement omis de déclarer des sommes, et ce d'autant plus sans même rechercher si lesdites sommes devaient être considérées comme des ressources nécessitant de faire l'objet d'une déclaration, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'élément matériel du délit en violation des articles 441-6 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;

2°/ qu' en se bornant, pour déclarer l'exposante coupable du délit de fourniture d'une déclaration fausse ou incomplète pour l'obtention d'une prestation ou allocation indue versée par un organisme de protection sociale, à relever que celle-ci n'avait pas signalé à la Caisse d'allocations familiales les revenus de ses enfants ainsi qu'une partie de ses indemnités, sans rechercher si l'absence de déclaration d'une partie de ses ressources résultait d'une volonté d'obtenir des indemnités indues, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'élément moral de l'infraction qu'elle constatait, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 121-3, 441-6 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;

3°/ que le délit de fourniture d'une déclaration mensongère pour l'obtention d'allocations versées par un organisme de protection sociale n'est caractérisé que si celles-ci ne sont pas dues ; que le caractère indu des allocations ne peut se déduire de la seule fausseté de la déclaration effectuée par le prévenu ou de son seul caractère incomplet ; que pour déclarer l'exposante coupable des faits de déclaration inexacte ou incomplète pour obtenir de l'Etat ou d'un organisme public un paiement indu, la cour d'appel s'est bornée à constater que « les déclarations faites sont fausses ou à tout le moins incomplètes » ; qu'en statuant ainsi, sans constater que ces prestations n'étaient pas dues, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles 441-6 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;

4°/ que, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que, dans les conclusions déposées, il était soutenu que contrairement à ce que le rapport d'enquête avait pu affirmer, aucune information n'était disponible et que les sites internet concernés « ne font jamais mention de l'obligation de déclarer un prêt au titre des ressources devant figurer sur la déclaration trimestrielle RSA » ; ce chef péremptoire était d'ailleurs repris dans le dispositif des conclusions demandant de « constater l'absence de tout fondement textuel sur l'obligation déclarative des prêts accordés à Mme V... » ; qu'en s'abstenant de répondre à cette articulation essentielle des conclusions et en se bornant à affirmer de façon péremptoire que « eu égard aux explications figurant sur le site de la CAF, les montants concernés comme la durée de déclarations sincères et exactes, témoignent du caractère délibéré des déclarations mensongères ou incomplètes » sans rechercher si, ainsi que le soutenait les conclusions régulièrement déposées, les manquements aux déclarations critiquées résultait uniquement d'une erreur, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 441-6 alinéa 2 du code pénal et 593 du code de procédure pénale :

5. Il résulte du premier de ces textes qu'est réprimé le fait de fournir sciemment une fausse déclaration ou une déclaration incomplète en vue d'obtenir ou de tenter d'obtenir, de faire obtenir ou de tenter de faire obtenir d'une personne publique ou d'un organisme de protection sociale une allocation, une prestation, un paiement ou un avantage indu.

6. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

7. Pour répondre aux conclusions déposées qui faisaient valoir, en substance, que l'omission de déclaration de certaines ressources, telles que des prêts, ne pouvait constituer la fourniture d'une déclaration fausse ou incomplète ni manifester la volonté d'obtenir le paiement d'indemnités indues au titre du RSA, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte de la note de la Caisse primaire d'assurance maladie du Rhône en date du 1er mars 2016 et de l'étude, par un enquêteur de la Caisse d'allocations familiales, des relevés de compte de Mme V..., que cette dernière, ayant été en arrêt maladie du 12 avril 2011 au 11 avril 2014, a perçu, entre le 1er février 2013 et le 16 avril 2014, diverses sommes de montants variables qui n'ont pas été déclarées comme ressources dans leur totalité.

8. Les juges relèvent d'abord que Mme V... n'a pas déclaré les rémunérations de ses enfants, fussent-elles faibles.

9. Ils ajoutent qu'entre février 2013 et décembre 2015, et à tout le moins depuis juin 2013, de nombreux virements, remises de chèques et dépôts d'espèces, pour des montants variables mais non négligeables, ont été effectués sur ses comptes, ces sommes étant constitutives d'autant de ressources non déclarées pour ne pas figurer dans les déclarations trimestrielles faites au titre du RSA.

10. Ils en déduisent que les déclarations faites sont fausses ou à tout le moins incomplètes.

11. Ils concluent qu'eu égard aux explications figurant sur le site internet de la CAF, les montants concernés comme la durée de l'absence de déclarations sincères et exactes, témoignent du caractère délibéré des déclarations mensongères ou incomplètes qui lui sont reprochées pour indiquer faussement l'absence de tout revenu.

12. En se déterminant ainsi, sans autrement rechercher, d'une part, si Mme V... avait conscience, au vu des informations délivrées par l'organisme public concernant la liste des ressources à déclarer, que des prêts familiaux ou amicaux, réalisés de manière ponctuelle et à charge pour elle de les rembourser, devaient être considérés comme des ressources nécessitant leur déclaration, d'autre part, si la totalité des montants perçus était de nature à lui ôter, en tout état de cause, son droit à percevoir un revenu de solidarité active, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les deuxième et troisième moyens, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, en date du 18 octobre 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le treize janvier deux mille vingt et un.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 19-86982
Date de la décision : 13/01/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 18 octobre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 jan. 2021, pourvoi n°19-86982


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.86982
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