LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 janvier 2021
Cassation partielle
Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 46 F-D
Pourvoi n° U 19-12.099
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 JANVIER 2021
Mme L... U..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° U 19-12.099 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2018 par la cour d'appel d'Angers (chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Transports Ricou, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ à Pôle emploi de Saumur, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de Mme U..., de Me Occhipinti, avocat de la société Transports Ricou, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, Mme Marguerite, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 13 décembre 2018), Mme U..., engagée par la société Transports Ricou à compter du 6 avril 2010 en qualité d'employée administrative et comptable pour un horaire hebdomadaire de trente-cinq heures, a été licenciée pour faute grave le 20 février 2015.
2. Contestant son licenciement et réclamant le paiement d'heures supplémentaires, elle a saisi la juridiction prud'homale.
Examen des moyens
Sur le second moyen, ci-après annexé
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches
Enoncé du moyen
4. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, alors :
« 1°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'il ne peut, pour rejeter une demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié ; qu'en écartant, en l'espèce, les demandes formulées par la salariée au titre de l'accomplissement d'heures supplémentaires, comme n'étayant pas sa demande à ce titre par des éléments suffisamment sérieux et concordants, tout en constatant que Mme U... produisait aux débats un tableau synthétique selon lequel elle avait effectué des heures supplémentaires à raison de 35 heures en 2010, de 45 heures en 2011, de 46 heures en 2012, de 46 heures en 2013 et de 9 heures en 2014, ce qui constituait des éléments précis auxquels l'employeur était en mesure de répondre en fournissant tous éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les articles L. 3171-4 du code du travail, 1134, dans sa rédaction applicable à l'époque des faits, et 1315 du code civil ;
2°/ que les juges du fond ne peuvent rejeter une demande fondée sur l'accomplissement d'heures de travail impayées sans exiger de l'employeur qu'il fournisse des éléments précis de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; de sorte qu'en l'espèce, en rejetant la demande de rappel de salaire correspondant à l'accomplissement d'heures supplémentaires en se fondant exclusivement sur le caractère insuffisamment étayé de la demande de la salariée, tout en constatant la production de tableaux des heures u'elle prétendait avoir réalisées auquel l'employeur pouvait répondre, sans exiger de celui-ci qu'il fournisse, au-delà la seule production des bulletins de paie, des éléments de nature à justifier précisément les horaires effectivement réalisés par la salariée, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié et violé les dispositions de l'article 3171-4 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :
5. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
6. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
7. Pour débouter la salariée de sa demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, l'arrêt retient que le tableau présenté par la salariée est en contradiction flagrante avec ses écritures, a été établi pour les besoins de la cause et non au fur et à mesure de l'exécution du contrat de travail, comporte une erreur et qu'il est impossible de comprendre comment la demande s'articule avec les heures supplémentaires qui lui ont déjà été payées et qui sont mentionnées sur ses bulletins de salaire, de sorte que la salariée n'étaye pas suffisamment sa demande par des éléments sérieux et concordants de nature à permettre à l'employeur d'y répondre précisément.
8. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme U... de sa demande en paiement au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 13 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;
Condamne la société Transports Ricou aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Transports Ricou et la condamne à payer à Mme U... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour Mme L... U...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure
EN CE QU'IL a débouté Mme U... de ses demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE s'il résulte de l'article L.3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; Mme U... prétend avoir accompli 181 heures supplémentaires du 6 avril 2010 à février 2014 et communique un tableau synthétique (pièce n° 20) selon lequel elle a effectué des heures supplémentaires à raison de 35 heures en 2010, de 45 heures en 2011, de 46 heures en 2012, de 46 heures en 2013 et de 9 heures en 2014 ; qu'il est mentionné dans ce tableau que Mme U... effectuait selon les mois 3, 4 ou 5 heures supplémentaires ; Or ce tableau est en contradiction flagrante avec les écritures de la salariée qui font état en page 17 de l'accomplissement de 19 heures supplémentaires en juillet 2012, de 18 heures en décembre 2012, de 16 heures en septembre 2013 et de 18 heures en septembre 2014 ; que les conclusions font également état du fait que Mme U... terminait tous les vendredis à 17h30 au lieu de 16h30 ; que la société TRANSPORTS RICOU s'oppose aux demandes de Mme U... en soulignant que des heures supplémentaires lui ont été régulièrement payées et figurent sur ses bulletins de salaire, ce qui ressort effectivement de l'examen de ces documents ; que le tableau figurant en pièce n° 20 du dossier de la salariée a été établi pour les besoins de la cause et non au fur et à mesure de l'exécution du contrat de travail ; qu'il comporte d'ailleurs une erreur puisqu'il est mentionné que l'entretien préalable s'est déroulé le 16 février 2014, ce qui explique qu'aucune demande n'est formulée pour la période postérieure à février 2014, alors que l'entretien préalable a eu lieu un an plus tard ; qu'il est impossible, au vu de ce document et des conclusions de la salariée qui le contredisent au moins partiellement, de comprendre comment la demande s'articule avec les heures supplémentaires qui lui ont déjà été payées et qui sont mentionnées sur ses bulletins de salaire ; qu'il résulte de ces éléments que Mme U... n'étaye pas sa demande au titre des heures supplémentaires par des éléments suffisamment sérieux et concordants qui soient de nature à permettre à l'employeur d'y répondre précisément ;
ET AUX MOTIFS QUE s'agissant des heures supplémentaires, Mme U... produit un tableau des heures de travail qu'elle prétend avoir accomplies en janvier 2015 qui met notamment en évidence qu'elle aurait travaillé les matins des lundis 12, 19 et 26 janvier alors que l'employeur soutient qu'elle ne travaillait pas les lundis matin ; qu'aucun élément ne permet d'établir que l'employeur avait été préalablement informé et qu'il avait donné un accord au moins tacite ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Mme U... réclame la somme de 2 697,81 € au titre des heures supplémentaires ; qu'à la lecture des fiches de paye, il apparaît que Mme U... a été réglée régulièrement de ses heures supplémentaires ; que le tableau produit n'établit pas de corrélation entre les heures réglées et celles qui n'auraient pas été réglées ; que dans ces conditions, Mme U... n'apporte pas la preuve que l'employeur ne lui aurait pas réglé toutes les heures supplémentaires ;
ALORS QUE, premièrement, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'il ne peut, pour rejeter une demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié ; qu'en écartant, en l'espèce, les demandes formulées par la salariée au titre de l'accomplissement d'heures supplémentaires, comme n'étayant pas sa demande à ce titre par des éléments suffisamment sérieux et concordants, tout en constatant que Mme U... produisait aux débats un tableau synthétique (pièce n° 20) selon lequel elle avait effectué des heures supplémentaires à raison de 35 heures en 2010, de 45 heures en 2011, de 46 heures en 2012, de 46 heures en 2013 et de 9 heures en 2014, ce qui constituait des éléments précis auxquels l'employeur était en mesure de répondre en fournissant tous éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les articles L. 3171-4 du code du travail, 1134, dans sa rédaction applicable à l'époque des faits, et 1315 du code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement, les juges du fond ne peuvent rejeter une demande fondée sur l'accomplissement d'heures de travail impayées sans exiger de l'employeur qu'il fournisse des éléments précis de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; de sorte qu'en l'espèce, en rejetant la demande de rappel de salaire correspondant à l'accomplissement d'heures supplémentaires en se fondant exclusivement sur le caractère insuffisamment étayé de la demande de la salariée, tout en constatant la production de tableaux des heures qu'elle prétendait avoir réalisées auquel l'employeur pouvait répondre, sans exiger de celui-ci qu'il fournisse, au-delà la seule production des bulletins de paie, des éléments de nature à justifier précisément les horaires effectivement réalisés par la salariée, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié et violé les dispositions de l'article 3171-4 du code du travail ;
ALORS QUE, troisièmement, le salarié peut prétendre au paiement d'un rappel de salaire correspondant à l'accomplissement d'heures supplémentaires s'il a accompli, en sus de son horaire contractuel, un travail effectif exigé par sa charge de travail ; de sorte qu'en déboutant la salariée de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaire en retenant qu'aucun élément ne permet d'établir que l'employeur avait été préalablement informé et qu'il avait donné un accord au moins tacite sans rechercher si Mme U... n'avait pas accompli, en sus de son horaire contractuel, un travail effectif exigé par la charge de travail compte tenu des missions qu'elle devait accomplir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, devenu 1103, 1104 et 1193 du code civil, L. 3121-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et L. 3171-4 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure
EN CE QU'IL a décidé que le licenciement de Mme U... reposait sur une faute grave, rejetant, par conséquent, l'ensemble des demandes indemnitaires de la salariée au titre de la rupture de son contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit être suffisamment motivée et viser des faits et griefs matériellement vérifiables, sous peine de rendre le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ; que la faute grave privative du droit aux indemnités de rupture, qu'il appartient à l'employeur de démontrer, correspond à un fait ou un ensemble de faits qui, imputables au salarié, constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise ; que Mme U... conteste chacun des griefs invoqués dans la lettre de licenciement qui doivent par conséquent être examinés successivement ; 1) Sur le paiement des heures supplémentaires et des congés payés sans l'accord de l'employeur : Mme U... ne conteste pas qu'elle avait pour mission d'établir les bulletins de salaire de l'ensemble des salariés de l'entreprise, y compris le sien, même si elle était aidée dans cette tâche par Mme S... ; que le bulletin de salaire de Mme U... pour le mois de janvier 2015 fait apparaître, en sus du salaire de base de 2 059,60 € correspondant à 152 heures de travail au taux horaire de 13,55 €, 18 heures supplémentaires pour un montant de 304,92 € et une indemnité compensatrice de congés payés de 472,91 € ; que Mme U... ne discute pas la matérialité des faits mais affirme que le paiement de ses heures supplémentaires ne lui avait jamais été refusé auparavant et qu'il existait une pratique au sein de l'entreprise consistant à monétiser les jours de congés payés non pris ; que s'agissant des heures supplémentaires, Mme U... produit un tableau des heures de travail qu'elle prétend avoir accomplies en janvier 2015 qui met notamment en évidence qu'elle aurait travaillé les matins des lundis 12, 19 et 26 janvier alors que l'employeur soutient qu'elle ne travaillait pas les lundis matin ; que toutefois, indépendamment de la question de savoir si des heures supplémentaires ont effectivement été accomplies, le grief invoqué par l'employeur consiste avant tout dans le fait pour Mme U... d'avoir profité de ses fonctions d'employée administrative et comptable pour mentionner de sa propre autorité sur son bulletin de salaire des heures supplémentaires et en obtenir le paiement, alors qu'elle ne rapporte pas la preuve selon laquelle elle avait informé l'employeur de cette démarche et avait obtenu son autorisation ; qu'aucun élément ne permet d'établir que l'employeur avait été préalablement informé et qu'il avait donné un accord au moins tacite ; que s'agissant de la monétisation des jours de congés payés, Mme U... produit aux débats la copie d'un document manuscrit daté du 30 janvier 2015, revêtu du cachet de l'entreprise, par lequel elle demandait « de payer 5 jours de congés payés sur le mois de janvier pour raison financière » ; que la société TRANSPORTS RICOU fait toutefois valoir qu'elle n'a jamais reçu l'original de ce document et que le fait qu'il comporte le cachet de l'entreprise ne prouve pas sa remise dès lors que Mme U... avait elle-même la disposition du tampon ; qu'elle affirme qu'il s'agit d'un faux établi pour les besoins de la procédure ; qu'elle ajoute, sans être contredite sur ce point, que les paies du mois de janvier 2015 ont été établies le 29 janvier (cette date étant d'ailleurs bien celle mentionnée dans la lettre de licenciement) et que ce document daté du lendemain ne permettrait même pas d'établir la preuve d'un accord préalable de sa part ; que Mme U... invoque l'existence de précédents par lesquels des chauffeurs de l'entreprise ont pu bénéficier du versement d'indemnités pour des congés payés non pris et l'employeur ne conteste pas ce fait, en faisant valoir cependant qu'il avait été mis fin à cette pratique ; que Mme U... ne rapporte pas la preuve selon laquelle elle avait obtenu l'accord de l'employeur pour procéder de cette façon, alors qu'elle ne pouvait ignorer, en raison de ses fonctions de comptable chargée de la paie, qu'il n'est pas possible de monétiser les jours de congés payés, sauf si ces jours n'ont pu être pris par la faute de l'employeur ; qu'en l'occurrence, Mme U... ne soutient pas que l'employeur l'ait empêchée de prendre les congés payés auxquels elle pouvait prétendre, étant au surplus observé que dans le document du 30 janvier 2015 qu'elle invoque, sa demande est motivée par des raisons financières et non par l'impossibilité de pouvoir prendre ses congés du fait de l'employeur ;
ALORS QUE, premièrement, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution de la décision cassée ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation du chef du dispositif de l'arrêt attaqué à intervenir sur le premier moyen de cassation relatif à l'accomplissement d'heures supplémentaires impayées par Mme U..., entraînera par voie de conséquence l'annulation du chef du dispositif de l'arrêt relatif au licenciement, en ce que la cour d'appel s'appuie notamment, pour justifier le rejet des demandes indemnitaires, sur l'absence d'accomplissement des heures supplémentaires qu'elle a ajouté sur son bulletin de paie, ce en application de l'article 625 du code de procédure civile
ALORS QUE, deuxièmement, la faute grave n'est caractérisée qu'en présence d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que ne constitue pas une telle faute le fait, pour un comptable ayant notamment pour mission d'établir les bulletins de salaire de l'ensemble des salariés de l'entreprise, y compris le sien, d'établir un unique bulletin de paie le concernant intégrant des heures supplémentaires dont l'accomplissement était discuté ainsi que des jours de congés acquis et non pris, en l'absence de volonté, par celui-ci, d'obtenir des avantages indus ; de sorte qu'en décidant, en l'espèce, que Mme U... avait commis une faute grave en mentionnant de son propre chef sur son bulletin de salaire des heures supplémentaires dont l'accomplissement était discuté par la société TRANSPORT RICOU ainsi qu'une somme correspondant à des congés payés acquis et non pris, en présence d'une pratique au sein de l'entreprise, non contestée par l'employeur mais à laquelle il aurait été mis fin, consistant à monétiser les jours de congés payés non pris, sans constater la volonté, par Mme U..., d'obtenir des avantages indus au titre des heures supplémentaires ni préciser à quelle date et dans quelles conditions il aurait été mis à la pratique de la monétisation des congés payés acquis et non pris, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail.