CIV. 3
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 janvier 2021
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10002 F
Pourvoi n° T 19-17.020
Aide juridictionnelle totale en défense Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Monsieur I... M... au profit de Monsieur Q... M...
Admission du bureau d'aide juridictionnelle Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation près la Cour de cassation
en date du 12 septembre 2019. en date du 12 novembre 2019.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 7 JANVIER 2021
Mme S... V..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° T 19-17.020 contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-8), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. Y... P..., domicilié [...] ,
2°/ à M. I... M..., domicilié [...] ,
3°/ à M. G... M..., domicilié [...] ,
4°/ à M. Q... M..., domicilié [...] ,
5°/ à la société Dikran, société civile immobilière, dont le siège est [...] , et encore au [...] ,
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller rapporteur, les observations écrites de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de Mme V..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. M..., après débats en l'audience publique du 10 novembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Andrich, conseiller rapporteur, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme V... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme V... et la condamne à payer à M. G... M... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept janvier deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour Mme V....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi après cassation, d'avoir rejeté la demande de Mme V... tendant à voir prononcer la nullité pour erreur du contrat de cession du droit au bail du 13 mars 2010, et d'avoir, en conséquence :
- condamné M. P... et Mme V..., cessionnaires, à verser aux consorts M..., cédants, la somme de 25.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2010 au titre du reliquat du prix de vente ;
- ordonné l'enregistrement de l'acte de vente par M. P... et Mme V... ;
- débouté Mme V... de sa demande en remboursement de la somme de 5 000 euros versée lors de la conclusion du contrat de cession du droit au bail ;
AUX MOTIFS QUE « l'acte litigieux porte sur le rachat des parts du local. Il est donc acquis que la transaction portait sur les droits sur le local lesquels résultent du bail, il est indifférent pour la solution du litige de différencier vente du fonds et cession du droit au bail, ce dernier étant en droit partie intégrante du fonds.
Que s'agissant de l'erreur sur la substance, la cession de bail commercial consentie entre le cédant et le cessionnaire sans l'accord préalable du bailleur, requis dans le contrat de bail, n'est pas nulle mais inopposable aux tiers. La cession opère donc transfert du droit au bail entre les cédants et les cessionnaires, sauf aux premiers en cas d'action de la bailleresse à garantir les seconds contre l'éviction.
Que Mme V..., qui ne démontre pas avoir été empêchée d'exercer les droits qu'elle avait acquis, à savoir jouir des lieux loués, échoue à démonter l'erreur sur la substance ou l'absence d'objet » ;
1°/ ALORS QUE commet une erreur sur les qualités substantielles du bien qu'il acquiert de nature à justifier la nullité de la cession du droit au bail, l'acquéreur qui, ignorant la nécessité de l'aval préalable du propriétaire des murs, croit à tort qu'il pourra ainsi exercer la jouissance paisible des lieux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté (arrêt, p. 8 § 9) que la cession de droit au bail était inopposable à la SCI Dikran, ce dont il résultait que Mme V... ne pouvait, tout au plus, qu'être une occupante sans droit ni titre des locaux litigieux ; qu'en se bornant à retenir, pour écarter la nullité du contrat de cession pour erreur sur les qualités essentielles du droit au bail cédé, que Mme V... n'aurait pas démontré « avoir été empêchée d'exercer les droits qu'elle avait acquis, à savoir jouir des lieux loués » (arrêt, p. 9 § 6), sans rechercher, comme elle y était invitée, si Mme V... n'avait pas contracté dans l'ignorance de la nécessité de l'accord préalable du propriétaire des murs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1110 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ ALORS QU'en toute hypothèse, la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en affirmant tout à la fois « qu'eu égard aux stipulations contractuelles qui imposaient l'accord préalable et écrit de la bailleresse (
) à l'acte de cession du droit au bail, la cession est inopposable à la SCI Dikran » (arrêt, p. 8 § 9), ce dont il résultait que Mme V... ne pouvait devenir locataire de la société Dikran et ne pouvait être qu'une occupante sans droit ni titre du local litigieux, et que Mme V... n'aurait pas démontré « avoir été empêchée d'exercer les droits qu'elle avait acquis » (arrêt, p. 9 § 6), la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi après cassation, d'avoir débouté Mme V..., cessionnaire du droit au bail de locaux commerciaux, de ses demandes au titre de la garantie d'éviction et de dommages et intérêts formés à l'encontre des consorts M... ;
AUX MOTIFS QUE « Mme V... et M. P... demandent à bénéficier de la garantie due par les cédants aux cessionnaires en cas d'éviction et la condamnation à ce titre des consorts M... à leur payer la somme de 5.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2010.
Que la cession de bail commercial consentie entre le cédant et le cessionnaire sans l'accord préalable du bailleur, requis dans le contrat de bail, est inopposable aux tiers. La cession opère donc transfert du droit au bail entre les cédants et les cessionnaires, sauf aux premiers en cas d'action de la bailleresse à garantir les seconds contre l'éviction.
Que la bailleresse ayant poursuivi la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers, ce qui constitue une faute des locataires qui les prive de ladite garantie, Mme V... sera déboutée de sa demande » ;
1) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les éléments de la cause ; qu'en relevant que la garantie d'éviction n'aurait pas été due à Mme V..., motif pris que « la bailleresse (avait) poursuivi la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers, ce qui constitue une faute des locataires qui les prive de ladite garantie » (arrêt, p. 10 § 11), cependant qu'il était constant que contrairement à M. P..., Mme V... n'a jamais été locataire de la SCI Dikran, et n'a jamais été poursuivie en résiliation du contrat de bail, la cour d'appel a dénaturé les éléments de la cause, en violation du principe précité ;
2) ALORS QU'en toute hypothèse, la garantie d'éviction est due au cessionnaire nonobstant le fait que le cessionnaire ait commis une faute dans l'exécution de ses obligations contractuelles ; qu'en retenant, pour écarter toute garantie d'éviction, que « la bailleresse ayant poursuivi la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers, ce qui constitue une faute des locataires qui les prive de ladite garantie » (arrêt, p. 10 § 11), la cour d'appel, qui a ajouté une condition à la loi, a violé les articles 1625 et 1626 du code civil.