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22/10/2020 | FRANCE | N°19-24.046

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 22 octobre 2020, 19-24.046


CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 octobre 2020




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10412 F

Pourvoi n° E 19-24.046




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 OCTOBRE 2020

La société Marti Grenoble, société civile immobilière, dont le s

iège est [...] , a formé le pourvoi n° E 19-24.046 contre l'arrêt rendu le 5 septembre 2019 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la so...

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 octobre 2020

Rejet non spécialement motivé

M. CHAUVIN, président

Décision n° 10412 F

Pourvoi n° E 19-24.046

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 OCTOBRE 2020

La société Marti Grenoble, société civile immobilière, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° E 19-24.046 contre l'arrêt rendu le 5 septembre 2019 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société Cap des arts, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Collomp, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Marti Grenoble, de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Cap des arts, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Collomp, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Marti Grenoble aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Marti Grenoble et la condamne à payer à la société Cap des arts la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Marti Grenoble.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à la somme de 61 230 euros hors taxes et hors charges et hors complément de loyer la valeur locative au 1er octobre 2012 et d'avoir condamné la SCI Marti Grenoble aux dépens d'appel ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « selon l'article L. 145-33 du code de commerce, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative qui, à défaut d'accord, est déterminée selon les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties, les facteurs locaux de commercialité, les prix couramment pratiqués dans le voisinage. Par dérogation à ce principe, et sauf à ce qu'il soit démontré une modification notable de ces éléments, l'article L. 145-34 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, impose le plafonnement de la variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler dont la durée n'est pas supérieure à neuf ans, à celle de l'indice trimestriel du coût de la construction ou, s'ils sont applicables, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou des loyers des activités tertiaires, publiés par l'INSEE. Le bail à renouveler ayant été conclu en septembre 2012 et s'étant poursuivi par tacite reconduction à son terme en septembre 2011, mais sa durée ne dépassant pas douze années, le loyer applicable lors de la prise d'effet du nouveau bail est soumis à la règle du plafonnement, sauf à ce que soit démontrée une modification notable des caractéristiques du local considéré, de la destination des lieux, des obligations respectives des parties et des facteurs locaux de commercialité. Il sera rappelé que la valeur du prix du bail renouvelé doit être fixée à la date du renouvellement et non sur des éléments postérieurs, ce qui conduira la cour à écarter les conclusions de l'expertise non contradictoire réalisée en janvier 2019 pour le compte de la bailleresse, l'expert missionné ayant indiqué avoir fixé la valeur locative à la date de la visite du bien effectuée le 3 janvier 2019. De la même manière, sont dépourvus de pertinence le constat d'huissier en date du 9 novembre 2016 produit par la SCI Marti et les éléments d'évolution de la zone de chalandise postérieurs au 1er octobre 2012. Au terme d'un travail d'investigation très précis, documenté et argumenté, l'expert Y... a conclu qu'au 1er octobre 2012, la valeur locative des locaux s'établissait à la somme annuelle principale de 61 230 euros hors taxes, hors charges et hors complément de loyer. L'expert a repris et détaillé les caractéristiques du local concerné prenant en compte son emplacement au sein de la zone commerciale dite « Cap des H », la situation, la visibilité et les aménagements offerts par cette dernière, comme les différentes enseignes présentes sur ce site. Il a notamment relevé que la zone de chalandise comprenait une quarantaine d'enseignes spécialisées dans l'aménagement et la décoration, qu'il s'agissait d'un environnement dynamique ayant peu évolué depuis la signature du bail. La pondération pratiquée par l'expert sur un local mesuré à une surface utile brute de 518,64 m2, en tenant compte de l'intérêt des différentes surfaces pour l'exploitation du local, se révèle parfaitement conforme aux usages appliqués en matière d'évaluation immobilière tels que notamment repris par la Charte de l'Expertise en Evaluations Immobilières. A ce titre, il apparaît cohérent de considérer que des locaux techniques comme une réserve, un vestiaire, des sanitaires, des dégagements, n'offrent pas à l'exploitant la même utilité commerciale que les autres surfaces du magasin directement vouées à l'accueil de la clientèle et la présentation des produits. Compte tenu de la nature de l'activité commerciale exercée, de vente d'équipements de la maison, d'outils, de couleurs et méthodes pour la pratique des Beaux-Arts et des arts plastiques, d'encadrements, de librairie spécialisée et technique, de démonstrations et loisirs récréatifs, la bailleresse ne peut être admise à exiger que l'exploitant du local supprime toute surface de stockage de marchandises, à laquelle l'application d'un coefficient de pondération de 0,4% n'apparaît pas excessif au regard des usages habituels en la matière. C'est à juste titre que le premier juge a considéré que la surface utile pondérée retenue à hauteur de 492 m2 par l'expert devait être validée. Il ressort de la lecture de l'acte notarié de cession du droit au bail intervenu le 27 septembre 2002 au profit de la société Cap des Arts que l'exercice de l'activité de cette dernière a nécessité la réalisation de travaux d'aménagement des locaux, notamment relatifs à la sécurité. Les parties critiquent les références de prix pratiqués dans le voisinage utilisées par l'expert alors que ce dernier a pu retenir cinq références différentes dans la même zone de chalandise, qu'il les a analysées avec précision en tenant compte des caractéristiques des locaux, des destinations contractuelles et des charges supportées par le preneur. Il sera observé que, conformément aux dispositions de l'article R. 145-2 du code de commerce, ces références peuvent être prises sur des locaux équivalents et non strictement identiques et qu'à défaut d'équivalence, elles peuvent être utilisées à titre indicatif pour la détermination des prix de base. Dans ces conditions, c'est à bon escient que l'expert a pu retenir des prix de locaux bruts comme aménagés et la référence « Cuisinella », bien que s'agissant d'un local livré neuf en 2011 alors que les locaux de la société Cap des Arts datent de 1990, puisque la détermination d'une moyenne a permis de corriger les différences relevées. L'expert a par ailleurs tenu compte de la clause du bail exorbitante de droit commun transférant au preneur la charge des grosses réparations prévues par l'article 606 du code civil, comme le complément de loyer constitué par la prise en charge par ce dernier de la taxe foncière. Le travail d'expertise de M. Y... se révélant conforme aux dispositions combinées des articles L. 145-33 et R. 145-2 du code de commerce, il a y lieu, à l'instar du premier juge, de retenir à la date du 1er octobre 2012, une valeur locative du local de 61 230 euros hors taxes, hors charges et hors complément de loyer. Selon le contrat de bail commercial, le loyer avait été fixé à 59 455 euros hors taxes et hors charges par an et stipulé indexé chaque année à la variation du taux de l'indice trimestriel du coût de la construction. Par l'effet de cette clause d'indexation, le montant du loyer s'élevait à la date du renouvellement du bail en 2012 à 82 950 euros hors taxes et hors charges, calculé sur la base du dernier indice publié au 1er octobre 2012, lequel correspond au loyer plafonné résultant des dispositions de l'article L. 145-34 du code de commerce. La valeur locative résultant de l'expertise est inférieure au montant du loyer plafonné et doit être retenue pour fixer le prix du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2012. » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' « aux termes de l'article L. 145-33 du code de commerce, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative. A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après : 1° les caractéristiques du local considéré, 2° la destination des lieux, 3° les obligations respectives des parties, 4° les facteurs locaux de commercialité, 5° les prix couramment pratiqués dans le voisinage. L'article L. 145-34 du même code précise que le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à 9 ans, ne peut excéder la variation intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré de l'indice national trimestriel mesurant le coût de la construction à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33. En cas de modification notable de ces éléments, la variation du loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures pour une année à 10% du loyer acquitté au cours de l'année précédente. En l'espèce, le bail conclu le 24 septembre 2002 entre les parties pour une durée de neuf années est arrivé à expiration le 30 septembre 2011. Par exploit d'huissier du 28 juin 2012, le preneur a sollicité le renouvellement du bail moyennant un loyer annuel de 51 300 euros, le bailleur a accepté le principe du renouvellement mais aucun accord n'est intervenu concernant le prix. La société Cap des Arts Color'i a notifié un mémoire introductif d'instance et assigné la société Marti par acte du 20 février 2013 aux fins de fixation du loyer à la somme de 51 300 euros à compter du 28 juin 2012. Le loyer, qui doit correspondre à la valeur locative, est cependant plafonné sauf à démontrer une modification notable des éléments visés à l'article L. 145-33. L'expert désigné a conclu qu'à la date de renouvellement du bail, la valeur locative des lieux loués était inférieure au montant contractuel du loyer (82 950 euros) et a fixé une valeur locative de 61 230 euros hors taxes et hors charges et hors complément de loyer. Les deux parties contestent cette valeur, le bailleur réclamant une somme de 84 027,11 euros et le preneur une somme de 52 800 euros. Le bailleur conteste le calcul de la surface pondérée. Il apparaît cependant que l'expert a utilisé les coefficients de pondération traditionnellement retenus dans la profession pour les surfaces de vente et notamment les coefficients de pondération retenus par la charte de l'expertise en évaluation immobilière. Il explique par ailleurs très pertinemment la méthode retenue en réponse au dire du bailleur sur ce point. La surface retenue par l'expert sera ainsi validée par le tribunal. Le bailleur conteste par ailleurs les références utilisées indiquant qu'aucune distinction n'est faite entre des locaux loués aménagés comme c'est le cas en l'espèce et des locaux livrés brut de béton. L'expert a cependant répondu que, cet argument lui ayant été opposé dès les opérations d'expertise, il a été au coeur de sa réflexion. Le preneur demande quant à lui à ce que la référence Cuisinella soit écartée s'agissant d'un local totalement neuf alors que les lieux loués en l'espèce sont vétustes, ce que conteste le bailleur qui soutient que les lieux, loués en parfait état, n'ont pas été entretenus par le preneur. L'expert a retenu 5 références correspondant pour certaines à des locaux aménagés pour d'autres à des locaux neufs et pour d'autres à des locaux livrés brut de béton et les a analysés suivant chaque point de comparaison en fonction des caractéristiques de chaque local, des différentes destinations contractuelles et des charges annuelles habituelles supportées par les parties. Ces références apparaissent pertinentes et seront retenues. En conséquence, il convient d'homologuer le rapport d'expertise et de fixer à 61 230 euros hors taxes et hors charges et hors complément de loyer la valeur locative au 1er octobre 2012. » ;

1°) ALORS QUE la valeur locative est fixée en fonction des éléments limitativement énumérés par l'article L. 145-33 du code de commerce ; que les travaux exécutés par le preneur lors de son entrée dans les lieux déjà aménagés pour une activité commerciale, et ce à seule fin de les adapter à son activité commerciale spécifique, ne peuvent être pris en considération pour fixer la valeur locative du bien loué lors du renouvellement du bail ; qu'en l'espèce, la SCI Marti Grenoble faisait justement valoir que les locaux loués à la société Cap des Arts n'étaient pas bruts mais aménagés ainsi qu'en attestaient les mentions de l'acte de cession du droit au bail du 27 septembre 2002 desquelles il s'évinçait que cette société, à son entrée dans les lieux, déjà occupés par un commerçant accueillant du public, avait réalisé les travaux rendus nécessaires pour l'exploitation « dans le cadre de son objet social » ; que, de fait, dans ses écritures, la société Cap des Arts exposait que les travaux par elle réalisés étaient essentiellement justifiés par l'installation du « concept Color'i » et par sa décision de réaménager l'espace loué ; qu'en retenant, pour fixer le loyer de renouvellement à la date du 1er octobre 2012, qu'il ressortait de la lecture de l'acte notarié de cession du droit au bail intervenu le 27 septembre 2002 au profit de la société Cap des Arts que l'exercice de l'activité de cette dernière avait nécessité la réalisation de travaux d'aménagement des locaux, la cour d'appel a violé l'article L. 145-33 du code de commerce ;

2°) ALORS QUE la fixation du loyer de renouvellement d'un bail portant sur un local aménagé ne peut se faire par comparaison avec les prix pratiqués dans le voisinage pour des locaux bruts ; qu'ainsi, lorsque le local est aménagé, ni l'expert ni le juge ne peuvent fixer le loyer de renouvellement en faisant une moyenne des prix pratiqués dans le voisinage pour des locaux bruts et des locaux aménagés par cela seul que le preneur, lors de son entrée dans les lieux, a été conduit à effectuer des travaux de réaménagement afin d'y exercer son activité spécifique en fonction de son propre concept ; qu'en l'espèce, la société Marti Grenoble faisait justement valoir que, comme l'expert l'avait lui-même constaté, les locaux litigieux étaient aménagés, le fait que la société Cap des Arts y ait effectué des travaux nécessaires à l'exercice de son activité commerciale étant indifférent et ne permettant pas de dire que les locaux étaient « bruts de béton » ; qu'elle faisait également valoir que l'expert avait pris en compte cinq éléments de comparaison dont deux concernaient des locaux loués « brut de béton » et, ne faisant aucune distinction selon qu'il s'agissait de locaux aménagés ou loués brut de béton, mais entendant au contraire tenir compte de ces deux types de configurations (rapport d'expertise, p. 38, dernier §), avait cru devoir calculer la moyenne de ces cinq références ; qu'en validant une telle méthode consistant à retenir que les locaux litigieux, du fait des réaménagements réalisés par le preneur à son entrée dans les lieux, n'étaient ni totalement aménagés ni totalement bruts, au motif erroné que l'article R. 145-7 [et non R 145-2 comme mentionné par erreur] du code de commerce autorise l'utilisation à titre indicatif pour la détermination des prix de base de références sur des locaux équivalents et non strictement identiques, la cour d'appel a violé les articles L. 145-33 et R. 145-7 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 19-24.046
Date de la décision : 22/10/2020
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Troisième chambre civile, arrêt n°19-24.046 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble 07


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 22 oct. 2020, pourvoi n°19-24.046, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.24.046
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