CIV. 3
CM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 1er octobre 2020
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10387 F
Pourvoi n° X 19-19.462
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER OCTOBRE 2020
1°/ M. L... O...,
2°/ Mme H... O...,
3°/ Mme G... O...,
tous trois domiciliés [...] ,
ont formé le pourvoi n° X 19-19.462 contre l'arrêt rendu le 17 mai 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige les opposant à M. E... N..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Farrenq-Nési, conseiller, les observations écrites de la SCP Krivine et Viaud, avocat des consorts O..., de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. N..., et après débats en l'audience publique du 7 juillet 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Farrenq-Nési, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts O... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les consorts O... et les condamne à payer à M. N... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Krivine et Viaud, avocat aux Conseils, pour les consorts O...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté les consorts O... de leur action en résolution de la vente à M. N... de l'immeuble situé à [...] , D'AVOIR condamné les consorts O... à libérer l'immeuble sous astreinte, D'AVOIR condamné les consorts O... à payer à M. N... une somme de 15.000 € à titre de dommages-intérêts, D'AVOIR déclaré irrecevables les demandes des consorts O... tendant à la condamnation de M. N... à leur verser une indemnité d'occupation et D'AVOIR débouté les consorts O... de leurs autres demandes ;
AUX MOTIFS QUE sur le bien-fondé de l'action en résolution : qu'il est constant que le prix de vente du bien litigieux est de 290 000 euros ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que M. N... a réglé : - la somme de 14 500 euros réglée le 12 juillet 2006 entre les mains du notaire selon le relevé de compte établi par celui-ci ; - la somme de 140 000 euros réglée à M. L... O... selon une attestation établie par ce dernier le 28 septembre 2006 indiquant que cette somme a été réglée à titre d'acompte sur le prix de vente du bien litigieux ; - la somme de 60 000 euros réglée en espèces en trois fois entre le 15 juillet 2006 et le 15 septembre 2006 à M. L... O... selon une attestation établie par M. B..., qui a été l'intermédiaire dans la transaction et a déclaré avoir assisté à la remise de ces sommes à titre d'acompte sur le prix de vente du pavillon ; - la somme de 21 500 euros réglée le 21 mars 2007 entre les mains du notaire, dont 18 007,09 euros au titre du paiement du prix de vente, selon le relevé de compte établi par le notaire ; que le total de ces versements s'élève à la somme de 232 507,09 euros, de sorte qu'il reste dû par M. N... sur le prix de vente de 290 000 euros la somme de 57 492,91 euros ; que compte tenu de l'offre de paiement faite par M. N..., qui n'est pas tardive et doit être accueillie pour les motifs retenus par le tribunal, il apparaît que l'action en résolution de la vente n'est pas fondée ; que les consorts O... doivent en conséquence être déboutés de leurs demande en résolution de la vente, M. N... étant condamné à payer aux consorts O... le solde du prix ; qu'il y a lieu en outre de condamner ces derniers à libérer le bien objet de la vente ; qu'en réparation du préjudice causé par l'expulsion de M. N..., il convient de condamner les consorts O... à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts ; sur la demande en paiement d'une indemnité d'occupation : que le jugement du 30 juin 2009 condamne M. N... à verser aux consorts O... au titre de l'indemnité d'occupation la somme mensuelle de 2 314,82 euros à compter du mois d'octobre 2006 jusqu'à la date de signature de l'acte authentique de vente ; qu'il ajoute qu'à défaut de cette signature, le jugement vaut vente ; que la demande des consorts O... en paiement d'une indemnité d'occupation, qui se heurte à l'autorité de la chose jugée est irrecevable ; sur les autres demandes des consorts O... : que M. N... ayant acquis la propriété du bien litigieux depuis le 30 juin 2009, les consorts O... sont fondés à lui réclamer le remboursement de la taxe foncière qu'ils ont réglée au titre des périodes postérieures à cette date ; que les difficultés rencontrées par les consorts O... n'apparaissant pas imputables à M. N..., ceux-ci ne sont pas fondés à réclamer sa condamnation à les indemniser du préjudice matériel et du préjudice moral allégués ;
1. ALORS QUE l'autorité de la chose jugée s'attache non seulement aux énonciations expresses du dispositif de la décision de justice, mais encore aux points litigieux implicitement tranchés pour être des antécédents logiques nécessaires du chef de dispositif considéré ; qu'au cas d'espèce, le jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 30 juin 2009, devenu irrévocable, avait énoncé dans son dispositif (p. 5) que la somme de 109.500 € versée par M. N... aux consorts O... serait imputée sur le prix de la vente, après avoir, dans ses motifs (p. 4, al. 7 et 8), retenu que M. N... ne démontrait pas avoir payé, comme il le soutenait, la somme de 125.000 €, de sorte que c'est la seule somme de 109.500 € qui avait été versée ; qu'il en résultait qu'en tant qu'étaient concernés les versements que M. N... prétendait avoir effectués antérieurement au jugement du 30 juin 2009, il avait été irrévocablement jugé que seule la somme de 109.500 € avait été payée ; qu'en décidant au contraire, au visa de versements prétendument intervenus entre le 15 juillet 2006 et le 21 mars 2007, soit antérieurement au jugement du 30 juin 2009, que M. N... ne restait plus devoir que la somme de 57.492,91 € sur le prix de vente total de 290.000 €, de sorte que la demande de résolution du contrat de vente pour inexécution devait être rejetée, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil ;
2. ALORS, subsidiairement, QU'en s'abstenant de s'expliquer, comme elle y était invitée (conclusions O..., p. 16-17), et comme l'avait retenu le jugement entrepris (p. 6, al. 2 et 3), dont la confirmation était poursuivie, sur l'autorité de chose jugée attachée au jugement irrévocable du 30 juin 2009 relativement aux sommes déjà versées à cette date par M. N..., dans les circonstances exposées à la branche précédente, avant de décider, au visa de versements prétendument intervenus entre le 15 juillet 2006 et le 21 mars 2007, soit antérieurement au jugement du 30 juin 2009, que M. N... ne restait plus devoir que la somme de 57.492,91 € sur le prix de vente total de 290.000 €, de sorte que la demande de résolution du contrat de vente pour inexécution devait être rejetée, la cour d'appel n'a en tout cas pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1355 du code civil ;
3. ALORS QU'il incombe à chaque partie de se prévaloir dès l'instance au cours de laquelle est tranché un point litigieux de l'ensemble des faits et éléments de preuve de nature à justifier sa prétention ; qu'en l'espèce, dès lors que M. N... ne s'était pas prévalu, lors de l'instance ayant conduit au jugement irrévocable du 30 juin 2009 – qui avait considéré que seule la somme de 109.500 € avait, à cette date, été réglée –, des versements prétendument intervenus entre le 15 juillet 2006 et le 21 mars 2007, soit antérieurement audit jugement, il n'était plus recevable à s'en prévaloir dans le cadre de la présente instance et relativement à la même question litigieuse, soit celle du paiement du prix de la vente ; qu'en retenant, au visa de ces versements, que M. N... ne restait plus devoir que la somme de 57.492,91 € sur le prix de vente total de 290.000 €, de sorte que la demande de résolution du contrat de vente pour inexécution devait être rejetée, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil, ensemble l'article 122 du code de procédure civile ;
4. ALORS QUE les parties sont tenues d'un devoir de loyauté procédurale et ne peuvent se contredire au détriment de leur adversaire ; qu'au cas d'espèce, à supposer même, pour les besoins du raisonnement, que M. N... eût procédé, antérieurement au jugement du 30 juin 2009, à des versements en sus de la somme de 109.500 € retenue par cette décision, il lui appartenait d'en faire état dès cette instance sans pouvoir, sauf à faire preuve de déloyauté procédurale et de contradiction au détriment de ses adversaires, s'en prévaloir pour la première fois dans la présente procédure ; qu'en jugeant dans ces circonstances, au visa de versements prétendument intervenus entre le 15 juillet 2006 et le 21 mars 2007, soit antérieurement au jugement du 30 juin 2009, que M. N... ne restait plus devoir que la somme de 57.492,91 € sur le prix de vente total de 290.000 €, de sorte que la demande de résolution du contrat de vente pour inexécution devait être rejetée, la cour d'appel a violé les articles 2 et 15 du code de procédure civile et le principe de la loyauté procédurale, ensemble le principe selon lequel nul ne doit se contredire au détriment d'autrui ;
5. ALORS, subsidiairement, QUE le paiement du prix est l'obligation essentielle de l'acheteur dans le contrat de vente ; que l'inexécution même partielle de cette obligation peut justifier la résolution de la vente dès lors qu'elle révèle un manquement suffisamment grave ; qu'en l'espèce, en se bornant, pour repousser la demande de résolution de la vente, à retenir que l'offre de paiement de M. N... n'était pas tardive, sans s'expliquer sur la gravité de l'inexécution de l'obligation de paiement du prix qui lui était imputée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1654 et 1184 du code civil (ce dernier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016).
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire au premier)Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré irrecevables les demandes des consorts O... tendant à la condamnation de M. N... à leur verser une indemnité d'occupation ;
AUX MOTIFS QUE sur la demande en paiement d'une indemnité d'occupation : que le jugement du 30 juin 2009 condamne M. N... à verser aux consorts O... au titre de l'indemnité d'occupation la somme mensuelle de 2 314,82 euros à compter du mois d'octobre 2006 jusqu'à la date de signature de l'acte authentique de vente ; qu'il ajoute qu'à défaut de cette signature, le jugement vaut vente ; que la demande des consorts O... en paiement d'une indemnité d'occupation, qui se heurte à l'autorité de la chose jugée est irrecevable ;
1. ALORS QUE l'indemnité d'occupation est due par l'occupant des lieux jusqu'à ce que la propriété de l'immeuble lui soit transférée ; qu'en l'espèce, les consorts O... (conclusions p. 15 et p. 18), faisaient valoir qu'aux termes de la promesse de vente du 12 juillet 2006, à laquelle le dispositif du jugement du 30 juin 2009 avait entendu se conformer quant à l'existence d'un accord de volontés des parties (p. 5, dispositif, al. 1er), le transfert de propriété était subordonné au paiement du prix ; qu'il en résultait que même si le jugement du 30 juin 2009 avait prévu qu'il vaudrait vente en l'absence de conclusion de la vente par acte authentique, la propriété de l'immeuble n'avait pas pu être transférée à l'acquéreur avant que le prix ne fût payé, de sorte que M. N... devait une indemnité d'occupation pour la période postérieure au jugement du 30 juin 2009, puisqu'il était constant que le prix n'avait pas été payé ; qu'en déclarant la demande d'indemnité d'occupation irrecevable, en tant qu'elle concernait la période postérieure au jugement du 30 juin 2009, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil, ensemble les articles 544 et 1134 du même code (ce dernier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016) ;
2. ALORS, subsidiairement, QU'une partie ne peut voir son droit affecté tant que la décision de justice statuant définitivement sur ce droit ne lui a pas été notifiée ; qu'en l'espèce, le jugement du 30 juin 2009, constatant que la vente était parfaite, avait été remis en cause par l'appel formé par M. N..., ayant conduit à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 25 novembre 2010, lequel avait été cassé en toutes ses dispositions par l'arrêt de la Cour de cassation du 7 février 2012 ; que seule la notification de l'arrêt de cassation, non suivie de la saisine de la juridiction de renvoi dans le délai de quatre mois alors en vigueur, avait rendu irrévocable le jugement du 30 juin 2009 par extinction de l'instance d'appel, et affecté en conséquence le droit de propriété des consorts O... sur l'immeuble ; qu'aussi, l'indemnité d'occupation était à tout le moins due par M. N... pour la période ayant séparé le jugement du 30 juin 2009 de la notification de l'arrêt de cassation du 7 février 2012 ; qu'en déclarant la demande d'indemnité d'occupation irrecevable pour cette période, la cour d'appel a violé les articles 1355 du code civil et 503 du code de procédure civile, ensemble les articles 562 et 1034 du code de procédure civile, ensemble l'article 544 du code civil.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
(également subsidiaire au premier)Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné les consorts O... à payer à M. N... une somme de 15.000 € à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE compte tenu de l'offre de paiement faite par M. N..., qui n'est pas tardive et doit être accueillie pour les motifs retenus par le tribunal, il apparaît que l'action en résolution de la vente n'est pas fondée ; que les consorts O... doivent en conséquence être déboutés de leurs demande en résolution de la vente, M. N... étant condamné à payer aux consorts O... le solde du prix ; qu'il y a lieu en outre de condamner ces derniers à libérer le bien objet de la vente ; qu'en réparation du préjudice causé par l'expulsion de M. N..., il convient de condamner les consorts O... à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
ALORS QUE si l'exécution provisoire est mise en oeuvre aux risques et périls du créancier, en l'espèce, en s'abstenant de donner quelque précision que ce soit sur le préjudice prétendument subi par M. N... du fait de l'exécution provisoire du jugement entrepris et les éléments lui ayant permis de le chiffrer, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 515 du code de procédure civile et L. 111-10 du code des procédures civiles d'exécution.