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01/10/2020 | FRANCE | N°19-12.408

France | France, Cour de cassation, Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 01 octobre 2020, 19-12.408


CIV. 3

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 1er octobre 2020




Rejet non spécialement motivé


M. CHAUVIN, président



Décision n° 10394 F

Pourvoi n° E 19-12.408




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER OCTOBRE 2020

La société Lafargeholcim Bétons, société par actions simplifiÃ

©e, dont le siège est [...] , anciennement dénommée Lafarge Bétons France, a formé le pourvoi n° E 19-12.408 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Pr...

CIV. 3

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er octobre 2020

Rejet non spécialement motivé

M. CHAUVIN, président

Décision n° 10394 F

Pourvoi n° E 19-12.408

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER OCTOBRE 2020

La société Lafargeholcim Bétons, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , anciennement dénommée Lafarge Bétons France, a formé le pourvoi n° E 19-12.408 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (3e chambre A), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Demathieu Bard Construction, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société NGE Génie civil, société par actions simplifiée,

3°/ à la société Guintoli, société par actions simplifiée,

ayant toutes deux leur siège [...] ,

4°/ à la société Entreprise Malet, société anonyme, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Georget, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Lafargeholcim Bétons, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Entreprise Malet, de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société Demathieu Bard Construction, de la SCP Spinosi et Sureau, avocat des sociétés NGE Génie civil et Guintoli, après débats en l'audience publique du 7 juillet 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Georget, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Lafargeholcim bétons aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Lafargeholcim Bétons et la condamne à payer aux sociétés NGE Génie civil et Guintoli la somme globale de 3 000 euros, à la société Demathieu Bard Construction la somme de 3 000 euros et à la société Entreprise Malet la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Lafargeholcim Bétons, anciennement dénommée Lafarge Bétons France

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise et condamné la société LAFARGEHOLCIM BETONS à verser 936 119,31 euros aux sociétés DEMATHIEU BARD CONSTRUCTION et NGE GENIE CIVIL, 286 660,07 euros à la société GUINTOLI et 113 460,06 euros à la société ENTREPRISE MALET ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Pour asseoir son argumentation visant à voir déclarer nulles les opérations expertales, la SAS Lafarge Bétons France s'appuie sur une consultation qu'elle a sollicitée auprès de Mme E..., professeur agrégé de droit à l'université de Poitiers, pour savoir si les opérations et le rapport d'expertise sont entachés d'irrégularités justifiant leur annulation sur le fondement des articles 114 et 175 du code de procédure civile Cette consultation privée, datée du 2 novembre 2015, conclut à la nullité du rapport des experts pour dépassement ces limites de leur mission et pour violation du principe du contradictoire. Ce professeur, qui n' est pas expert, prétend à tort que l'expert a interprété et dénaturé le contrat de fourniture du béton fourni par la société Lafarge, alors que les experts ont seulement répondu, après avoir effectué des essais et recherches techniques (notamment par carottages) aux questions posées par le magistrat concernant la conformité ou la non-conformité du béton en classe C35/45 livré par cette société, et précisé que la société Lafarge devait garantir la résistance à 7 jours du béton, puisque cette résistance figure dans le rapport d'étude et de convenances et dans les recommandations du LCPC. Elle soutient également que sous couvert de chiffrer les éléments d'appréciation du préjudice éventuellement subi, le collège d'experts s'est prononcé en réalité sur un partage de responsabilité. La lecture du rapport fait apparaître que les experts ont fourni au magistrat tous les éléments techniques nécessaires pour vérifier la conformité du béton livré et se prononcer sur un partage de responsabilité, sans outrepasser leur mission. Enfin elle indique que les experts ont apprécié les préjudices des sociétés Guintoli et EHTP, qui n'entraient pas dans leur mission et reproche aux experts le non-respect du principe du contradictoire en ayant refusé de convoquer les parties pour un examen de la tromplaque. Or il appartient aux experts désignés de décider quels sont les éléments à étudier et les examens techniques à réaliser et la demande d'examen de la tromplaque leur est apparue inutile en l'état des éléments en leur possession. En tout état de cause, aucune disposition ne sanctionne de nullité l'inobservation des obligations imposées par l'article 238 du code de procédure civile au technicien commis. En outre, l'appréciation de la portée du rapport d'expertise relève du pouvoir souverain du juge du fonds, lequel est en droit de s'approprier l'avis d'un expert, même si celui-ci a exprimé une opinion d'ordre juridique excédant les limites de sa mission. Enfin il convient de relever que le magistrat de la cour d'appel délégué par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, par ordonnance du 26 mai 2016, statuant sur un recours contre une décision fixant la rémunération des experts, a ainsi motivé son refus : la lecture attentive du rapport d'expertise permet de vérifier que l'expertise a été réalisée au contradictoire des pailles, et que les experts ont procédé à une analyse objective des données de fait de la cause, à une étude complète et détaillée des questions-posées dans leurs missions, retenant des conclusions sérieusement motivées par des arguments techniques. » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU' « Attendu que la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS) produit aux débats une consultation établie par Madame R... E..., Professeur Agrégé des Universités, de nature à renforcer, selon elle, ses prétentions selon lesquelles les opérations expertales sont déroulées dans des conditions anormales, le collège expertal ayant manifestement été guidé par une « volonté de favoriser » ses contradicteurs, adoptant une « gestion calendaire manifestement guidée par une volonté » de lui nuire, dépassant les limites de sa mission et violant le principe du contradictoire ; Mais attendu qu'il appartient à ce Tribunal de rappeler que par ordonnance en date du 30 juin 2014, Monsieur G... V..., juge délégué par Monsieur le Président du tribunal de céans, chargé du contrôle des mesures d'instruction, saisi par la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS) aux fins notamment que soit ordonnée la mise en place d'un calendrier des opérations procédurales et l'examen du système « tromplaque », l'en a débouté aux motifs, d'une part, qu'il appartenait aux experts d'établir le calendrier de leurs opérations et des réunions nécessaires à l'accomplissement de leur mission et que, d'autre part, il appartenait aux experts de déterminer si l'examen du système « tromplaque » sollicité, ou toute autre investigation, leur apparaissaient opportuns dans l'accomplissement de leur mission et a invité les experts à reprendre leurs opérations ; Attendu que c'est à bon droit que la société ENTREPRISE MALET (SA) a fait plaider que dans le cadre des opérations d'expertise, lesquelles ont duré près de 4 ans, 80 dires ont pu être échangés par l'ensemble des parties, dont plus de 20 émanant de la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS), auxquels une réponse spécifique a été apportée par les experts dans leur rapport, lequel a été précédé de l'établissement d'un pré-rapport le 25 novembre 2014, permettant aux parties de faire valoir leurs observations avant le dépôt du rapport définitif ; Attendu qu'aucun élément de nature à remettre en cause l'objectivité, l'intégrité, l'impartialité et le bon déroulement des opérations expertales n'a été utilement produit aux débats par la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS) ; Attendu que les experts ont répondu aux chefs de leur mission concernant, d'une part, la conformité du béton fourni par la société LAFARGE BETONS SUD EST (SAS), et ce, en se basant sur des études de résistance et en recueillant l'avis de spécialistes indépendants et, d'autre part, le préjudice subi par les sociétés NGE GENIE CIVIL (SAS) et DEMATHIEU ET BARD (SAS) ; Qu'en formulant une évaluation des coûts induits concernant les sociétés GUINTOLI (SAS) et ENTREPRISE MALET (SA), membre du groupement d'entreprises solidaires, les experts n'ont fait que donner au Tribunal saisi du litige, tous éléments de nature à lui permettre de statuer, conformément à la mission confiée ; Attendu que c'est en outre à bon droit que les sociétés NGE GENIE CIVIL (SAS) et GUINTOLI (SAS) ont fait plaider qu'une juridiction peut prendre en compte l'avis de l'expert, même si celui-el a exprimé une opinion excédant les limites de sa mission ; Que concernant l'examen de la « tromplaque », c'est également à bon escient que lesdites sociétés ont rappelé que selon le rapport d'expertise, cet élément de mise en oeuvre sur ouvrage d'art, composant du procédé de précontrainte, n'a pas subi de rupture et qu'il n'est pas à l'origine des désordres ; Attendu que c'est également à bon droit que les sociétés NGE GENIE CIVIL (SAS) et GUINTOLI (SAS) ont rappelé les termes de l'ordonnance de Monsieur O... K..., délégué par ordonnance du Premier Président de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 26 mai 2016 produite aux débats, saisi d'une contestation de la rémunération des experts par la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS), d'où il résulte qu' « En l'espace, une lecture attentive du rapport d'expertise permet de vérifier que I'expertise a été réalisée au contradictoire des parties, et que les experts ont procédé à une analyse objective des données de la cause, à une étude complète et détaillée des questions posées dans leurs missions, retenant des conclusions sérieusement motivées par des arguments techniques » ;

ALORS QUE l'expert est tenu de respecter le principe du contradictoire ; qu'il est constant que les experts ont refusé d'organiser un réunion contradictoire pour rechercher si la tromplaque avait pu jouer un rôle dans les désordres ; que le rapport d'expertise affirme pourtant que la tromplaque était étrangère aux désordres ; qu'il en résulte que les experts ont procédé non contradictoirement à l'analyse de la tromplaque ; qu'en décidant pourtant que les opérations d'expertise s'étaient déroulées régulièrement, la cour d'appel a méconnu l'article 16 et 176 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a condamné la société LAFARGEHOLCIM BETONS à verser 936 119,31 euros aux sociétés DEMATHIEU BARD CONSTRUCTION et NGE GENIE CIVIL, 286 660,07 euros à la société GUINTOLI et 113 460,06 euros à la société ENTREPRISE MALET

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur les responsabilités encourues. La SAS Lafarge Bétons France critique le rapport d'expertise en ce qu'il n'a retenu pour seule cause des désordres, qu'un non-respect de la formule béton, alors qu'il était sollicité l'examen contradictoire de la tromplaque, notamment dans un dire du 20 janvier 2015 auquel les experts n'ont jamais donné suite, et que ces derniers ont omis de répondre à certaines questions qui leur ont été posées, La SAS Lafarge Bétons France conteste ensuite sa responsabilité dans la survenance des désordres, en faisant valoir que le béton livré était conforme, que le sinistre provient d'une ou de plusieurs causes étrangères, à savoir un défaut de mise en place des armatures à proximité de la pièce d'appui (tromplaque), par les sociétés Demathieu Bard et/ou NGE Génie Civil, ou un défaut d'exécution lors la mise en précontrainte effectuée par l'entreprise sprE. A l'appui de son argumentation elle produit une note technique du cabinet MIE en date du 30 mai 2016. Elle ajoute qu'à l'exception de la société NGE Génie Civil, la mise en oeuvre de sa responsabilité ne peut reposer sur un fondement contractuel, et que faute de démontrer l'existence d'une faute extracontractuelle distincte de la non-conformité alléguée, sa responsabilité ne peut être recherchée. Elle indique encore que pour s'opposer à indemniser les sociétés Demathieu Bard Construction et NGE Génie Civil du montant des sommes réclamées, elle est fondée à se prévaloir des conditions générales de vente qui prévoient que toute réclamation sur la qualité des marchandises doit être formulée sur le champ et confirmée expressément par écrit dans les 24 heures suivant enlèvement ou la livraison, que la garantie est limitée soit au remplacement des marchandises reconnues défectueuses, soit au remboursement de leur valeur avant emploi sans indemnité ni dommages et intérêts d'aucune sorte. Elle affirme qu'avant la mise en précontrainte défectueuse, le groupement d'entreprises avait l'obligation normative de vérifier que le béton avait une résistance à la compression de 30 MPa, ce qu'il n'a pas fait. La société Demathieu Bard Construction reprend les conclusions expertales qui imputent à un défaut de résistance du béton l'apparition des désordres, le béton livré dont la formule d'origine a été modifiée à plusieurs reprises par la société Lafarge, n'étant pas conforme à ses engagements contractuels, Elle soutient que l'absence de cause étrangère permet de retenir la faute commise par la SAS Lafarge Bétons France et d'engager la responsabilité de la SAS Lafarge Bétons France. La société NGE Génie Civil s'associe aux conclusions retenues par le collège d'experts et critique l'avis technique du cabinet CME, La société Entreprise Malet conclut à la responsabilité exclusive de la société Lafarge Bétons France dans la fourniture du béton défectueux. Il convient de relever que les opérations expertales ont bien été conduites au contradictoire de toutes les parties, lesquelles ont été amenées à faire de nombreux dires, dont 22 émanant du conseil de la SAS Lafarge Bétons France ; et que le collège d'expert y a toujours répondu, notamment : - le 2/11/2011 : qu'en qui concerne la tromplaque, elle était à disposition des parties depuis le 02/11/2011 à BALIGNY. Il n'y avait pas urgence pour déplacer l'ensemble des parties à BALIGNY afin de constater l'état d'une plaque d'acier de 275 mm de côté, 90 mm d'épaisseur et d'un tube cylindrique de 127 mm et 433 mm de longueur. Par la suite, les documents reçus par dire du 05/05/2014 de SETEC sont suffisamment commentés. Nous avions constaté lors de notre accédit du 08/08/2011 que la plaque de la trompette n'avait pas reculé. - le 20/06/2013 : qu'il n'y a pas eu rupture de la tromplaque et ce n'est pas elle qui est à l'origine des désordres. - le 25/06/2013 : que lors des travaux de réfection de l'ancrage, aucune anomalie n'a été relevée, au niveau des armatures et du béton. Les fissures sont apparues après l'enlèvement du vérin et lentement, marquées au bout de 10 mn pour atteindre 2 mm de large au bout de 2 heures. Il n'y a pas eu d'enfoncement brutal de l'ancrage consécutif au vide derrière l'ancrage. Ce désordre est dû à un défaut de résistance du béton derrière l'ancrage. La mise en tension a été conforme et l'apparition des fissures lors du transfert de l'effort du vérin au bloc d'ancrage est révélateur d'un défaut de résistance du béton et non la cause d'un défaut d'exécution de la mise en précontrainte. - le 16/12/2013 : que sur la fabrication et en particulier la variation du dosage de l'entraîneur d'air, il est inexact d'écrire que « la variation du dosage en entraîneur d'air pour satisfaire aux critères normatifs (norme NF EN 2064) ne peut être interprétée comme un défaut de fabrication », et a répondu très longuement de la page 55 à la page 59 au dernier dire du 20101/2015, précisant qu'ils « ne confondent pas dosage en entraîneur à air et teneur en air occlus. Le second est en effet produit par le premier
». Le collège d'experts, a pu distinguer deux parties du tablier du pont : en ce qui concerne la première, il a conclu à la conformité du béton en classe C351115 et en ce qui concerne la seconde, en revanche, les experts relèvent en s'appuyant sur l'ensemble des essais menés et des carottages réalisés après le sinistre, que le béton ne présentait pas les qualités de résistance requise, ce qui constitue la seule cause de l'apparition des fissures. Il était contractuellement prévu la fourniture de béton de classe C35/45 prêt à l'emploi; or il a été démontré par l'expertise que la formule utilisée a été modifiée à sept reprises et que le dosage par entraîneur d'air n'a pas été maîtrisé, ayant pour conséquence de diminuer la résistance moyenne du béton. Une partie du béton livré n'avait donc plus les caractéristiques de la classe C35/45 et la résistance caractéristique du béton du tablier dans sa partie PI/C2 n'était pas conforme à celle prescrite de 35 MPa à 28 jours. Les experts ont conclu que : « Le tablier de pont a été justifié avec un béton de résistance moindre C30/37, au lieu de C35145 prévu. Ce défaut de résistance a été démontré dans les pages précédentes. Il ressort de l'étude des pièces versées par les parties, que : - la société Lafarge a livré un béton non-conforme à ses engagements contractuels de livrer un béton selon la Formule 3 : C35/45 XF3 XD3 respectant la composition prescrite par les épreuves d'étude et de convenance ; - la société Lafarge a fait évoluer cette composition en dehors des tolérances de fabrication fixée par la norme NF EN 206-1 et le fascicule 65 concernant le dosage en entraîneur d'air ; - conformément à la norme et au fascicule précités, la formule finalisée doit être exécutée sans modification et toute modification hors tolérance doit faire l'objet d'une nouvelle étude ; - Les meilleurs spécialistes du réseau scientifique et technique du ministère de l'économie et du Développement durable et de l'Energie, sous Direction de la Gestion du Réseau Autoroutier Concédé, ont conclu à la nécessité de déclasser le béton livré par Lafarge en c30/37. L'avis technique du Cabinet Méditerranéen d'Expertises (CME) émis le 30 mai 2016, qui prétend que le béton livré était exempt de non-conformité en ce qu'il satisfaisait à l'exigence de résistance de 35 MPa à 28 jours, et que la teneur en air variant entre 4 et 8 % a été respectée suries bétons litigieux, s'oppose aux conclusions des experts et des autres techniciens consultés, En effet, les notes techniques produites par la société NGE Génie Civil en réponse sont les suivantes * M. F..., consultant, fait état des règles de l'art à appliquer la NF EN 206-1, le fascicule 65 et ses recommandations pour le gel, le protocole d'accord SNBPE-FNTP. Il répond que passer d'une teneur en air de 4 % à 8 % a fait chuter la résistance de 22 %, soit une résistance moyenne de 31 MPa et une résistance caractéristique de 26-27 MPa, très largement inférieure à la résistance caractéristique de 35 MPa exigée par la NF EN 206-1 et le fascicule 65, La société Lafarge ne pouvait donc s'amuser à modifier la quantité d'air entraîné sans une nouvelle épreuve d'études justifiant la résistance avec une quantité d'air entraîné supérieure. Il ajoute que Lafarge ne pouvait ni modifier la valeur initialement retenue dans la fabrication du béton, ni la quantité de ciment sans diminuer la résistance du béton, * L'Assistance Technique Construction Matériaux (ATCM) rappelle que le document de Lafarge fait référence au fascicule 65 qui définit d'après les indications fournies, les études et les convenances ayant été réalisées sur la base d'une formule dosée à 385 Kg/m3, que la formule nominale affichée sur les bons de pesées doit être rigoureusement identique, et que sans essais préalablement réalisés, aucune variation de dosage n'est possible, ce qui démontre que la société Lafarge n'était pas autorisée à modifier unilatéralement, sans essais préalables, la formule du béton, sous peine d'en amoindrir la résistance. Le CME évoque comme causes étrangères de prétendus défauts de mise en oeuvre des armatures et des bétons, qu'il n'a pas pu vérifier puisque les travaux de reprise de l'ancrage défectueux avaient été réalisés et/ou un défaut d'exécution lors la mise en précontrainte effectuée par l'entreprise SP1E, dont il ne rapporte nullement la preuve. En conséquence, la responsabilité contractuelle de la SAS Lafarge Holcim Bétons doit être retenue en ce qu'elle a modifié la formule du béton prêt à l'emploi, et n'a donc pas fourni le matériau conforme au contrat de fourniture signé avec la société NGE Génie Civil. L'article 4,4,4 des annexes au contrat signées par les parties, stipule que « Dans le cas d'une non conformité de la livraison à la commande, le fournisseur doit prendre toutes les dispositions pour mettre fin à cette situation dès les livraisons futures. Les essais complémentaires et réparations des conséquences éventuelles seront prises en charge par la partie défaillante ». La SAS Lafarge Holcim Bétons doit en conséquence être condamnée à prendre en charge la réparation des préjudices subis par son cocontractant. Sur les préjudices. 1. La société NGE Génie Civil et la société Demathieu Bard. La société Lafarge Holcim Bétons s'oppose à indemniser la société Demathieu Bard dont elle conteste la qualité de cocontractant, puisque l'existence du groupement d'entreprises solidaire adjudicataire du marché n'est pas mentionnée dans le contrat qu'elle a signé avec la société NGE Génie Civil, que la convention constituant un groupement d'entreprises solidaires est datée du mois de septembre 2009, soit postérieurement à la conclusion du contrat de fourniture de béton, et que l'article 1872-1 du code civil ne saurait trouver ici application. La société Demathieu Bard réplique que le contrat de fourniture de béton est bien un document commun puisqu'il comporte le logo des deux sociétés. Elle rappelle que ces deux sociétés font partie d'un groupement d'entreprises et ont toutes deux été utilisatrices du béton litigieux, intervenant sur les mêmes ouvrages. A titre subsidiaire, elle s'estime bien fondée à solliciter la réparation de son préjudice sur le fondement délictuel. Le contrat de fourniture de béton litigieux a été signé entre la société NGE Génie Civil et la SAS Lafarge Bétons Sud Est, Il n'est pas daté mais indique que les prix du marché sont révisables mensuellement en fonction du mois de référence de base marché de juin 2009, Il comporte en haut de chaque page les logos des deux sociétés NGE Génie Civil et Demathieu Bard, 1871 du code civil définit la société en participation comme la constitution d'une société non immatriculée, dont l'objet, le fonctionnement et les conditions sont librement convenus par les associés. L'article 1872-1 du même code prévoit que « Chaque associé contracte en son nom personnel et est seul engagea l'égard des tiers. Toutefois, si les participants agissent en qualité d'associés au vu et au su des tiers, chacun d'eux est tenu à l'égard de ceux-ci des obligations nées des actes accomplis en cette qualité par l'un des autres, avec solidarité, si la société cg commerciale, sans solidarité dans les autres cas. Il en est de même de l'associé qui, par son immixtion, a laissé croire au cocontractant qu'il entendait s'engager à son égard, ou dont il est prouvé que l'engagement a tourné à son profit ». La convention de groupement momentané d'entreprises solidaires signé entre la SAS Guintoli nommée mandataire, la SAS EIITP, la SAS NGE Génie Civil, la société Demathieu Bard et la SA Malet TP, qui s'apparente à une société en participation, a été conclue le 22 septembre 2009, soit postérieurement à l'engagement de la seule société NGE Génie Civil du mois de juin 2009, et faute pour ce groupement d'indiquer dans la convention qu'il reprend à son compte tous les marchés de travaux Signés antérieurement, cette convention n'est pas opposable à la SAS Lafarge Holcim Bétons Néanmoins la société Demathieu Bard Construction, titulaire du marché des ouvrages de génie civil aux côtés de la société NGE Génie Civil, qui est un tiers au contrat signé entre la société NGE Génie Civil et la société Lafarge Holcim Bétons, est bien fondée à se prévaloir de la responsabilité délictuelle de la société Lafarge Holcim Bétons. En modifiant unilatéralement la composition du béton, sans essais préalables, et en amoindrissant ainsi sa résistance, la SAS Lafarge Holcim Bétons a commis une faute à l'égard des entreprises chargées des divers lots de chantier, et la société Demathieu Bard Construction est en droit de prétendre à être indemnisée du dommage qu'elle a subi du fait du manquement contractuel commis par la SAS Lafarge Holcim Bétons. Le collège d'experts ayant évalué le, préjudice subi par les sociétés Génie Civil et Demathieu Bard Construction à la somme de 936 119,31 € HT, il y a lieu de leur allouer cette somme. 2. La SAS Guintoli. La SAS Guintoli, en charge des travaux de terrassement et d'assainissement du chantier, qui est un tiers au contrat signé entre la société ME Génie Civil et la société Lafarge Holcim Bétons, est elle aussi bien fondée à se prévaloir de la responsabilité délictuelle de la société Lafarge holcim Bétons, en l'état du dommage qu'elle a subi du fait du manquement contractuel commis par cette société, et sera indemnisée de son préjudice. Même s'il n'entrait pas dans la mission des experts de déterminer leur préjudice, ils ont évalué les coûts induits pour les sociétés Guintoli et Entreprise Malet. Le chiffrage des postes de ces préjudices a pu être contradictoirement discuté dans le cadre des opérations expertales et la cour estime que, faute pour la SAS Lafarge Holcim Bétons d'apporter des éléments techniques et comptables contraires, il convient de retenir le coût des travaux de remise en état à la somme de 282 660,07 £ HT. 3. La SA Entreprise Malet. Il en est de même pour la SA Entreprise Malet, chargée des travaux de chaussées, qui est fondée à se prévaloir de la responsabilité délictuelle de la société Lafarge Holcim Bétons, en l'état du dommage qu'elle a subi du fait du manquement contractuel commis par cette société. Elle sera indemnisée de son préjudice évalué par les experts à la somme de 113 460,06 € HT. »

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « Attendu qu'il apparaît à ce Tribunal que les experts se sont livrés à un travail minutieux et rigoureux dont il convient d'homologuer les conclusions ; Que vainement la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS) fait état d'une conformité du béton fourni et émet l'hypothèse de l'existence d'une ou plusieurs causes étrangères à l'origine du sinistre, liées à un défaut de mise en oeuvre des armatures et dos bétons par la société DEMATHIEU BARD CONSTRUCTION (SAS) ou par la société NGE GENTE CIVIL (SAS) ou un défaut d'exécution lors de mise en précontrainte du béton ; Attendu qu'il ressort des conclusions du rapport des experts, lesquels ont écarté tout défaut de mise en oeuvre ou d'exécution de la procédure de précontrainte, que : « Le tablier de pont a été justifié avec un béton de résistance Moindre C30/37, au lieu de C35-45 prévu. Ce défaut de résistance a été démontré dans les pages précédentes. Il ressort de l'étude des pièces versées par les parties que : LAFARGE a livré un béton non conforme à ses engagements contractuels, de livrer un béton C35/45 S3 X F4 G-I-S respectant la composition prescrites par les épreuves d'étude et de convenances LAFARGE a fait évoluer cette composition en dehors des tolérances de fabrication fixée par la norme NF EN 206-1 et le fascicule 65 concernant le dosage en entraîneur d'air, - Conformément à la norme et fascicules précités, la formule finalisée doit être exécutée sans modification. Toute modification hors tolérance doit faire l'objet d'une nouvelle étude. – Les meilleurs spécialistes du réseau scientifiques et technique du Ministère de l'Economie, du développement durable et de l'Energie, sou direction du Réseau Autoroutier Concédé ont conclu à la nécessité de déclasser le béton livré par LAFARGE en C30/37 ; Attendu qu'il appartient à ce Tribunat de fixer la réparation des préjudices subis par les sociétés membres du groupement d'entreprises solidaires concernées par le litige, consécutivement à l'arrêt du chantier pour la période du 26 mai 2011 au 27 octobre 2011, lequel a entraîne une modification du planning d'exécution et généré des frais liés, selon le rapport d'expertise, à l'« Arrêt des travaux autoroutiers aux abords de l'ouvrage - Mise en place d'une déviation provisoire de la RD27 - Investigations complémentaires, analyses, laboratoires, études - Immobilisation matériel, amortissements, frais généraux - Réparations, rétablissement circulation sur ouvrage, démolition déviation et reprise travaux autoroutiers » ; Qu'il y a lieu d'homologuer les données retenues par les experts et de condamner, en conséquence, la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS) à payer : - Au titre de sa responsabilité contractuelle, aux sociétés DEMATHIEU BARD CONSTRUCTION (SAS) et NGE GENIE CIVIL (SAS), solidairement, la somme de 936,119,31 euros, - Au titre de sa responsabilité délictuelle : - à la société GUINTOLI (SAS) : la somme de 282.660,07 euros, - à la société ENTREPRISE MALET (SA) : la somme de 113,460,06 euros ; Qu'il appartient en outre à ce Tribunal de rappeler que le caractère indemnitaire attaché à la nature des sommes attribuées les exclut du champ d'application de la TVA ; Que les moyens soulevés par la société ENTREPRISE MALET (SA) aux fins de voir fixer la réparation de son préjudice à raison de la somme de 192,100 euros seront rejetés, le Tribunal faisant sien l'avis des experts selon lesquels, d'une part, au titre de la plus-value « transport pour contournement », le tonnage transporté et le nombre de jours ne sont pas justifiés, sans, au surplus, que la réalité du préjudice invoqué puisse être établie et, d'autre part, au titre des « jours supplémentaires d'atelier », de réaliser la grave bitume en deux journées n'était pas démontrée par la société ENTREPRISE MALET (SA) » ;

ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que dans ses conclusions d'appel, la société LAFARGEHOLCIM a fait valoir que les conditions générales prévoyaient que toute réclamation sur la qualité des marchandises devait être formulée dans les 24h suivant l'enlèvement ou livraison et que la garantie était limitée soit au remplacement des marchandises reconnues défectueuses soit au remplacement de leur valeur avant emploi sans indemnité ni dommages et intérêts d'aucune sorte (p. 32, derniers §) ; qu'elle en déduisait que l'application des conditions générales faisait obstacle à ce qu'il soit fait droit aux prétentions formulées à son encontre (p. 33 § 1) ; qu'en retenant la responsabilité de la société LAFARGEHOLCIM sans s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a condamné la société LAFARGEHOLCIM BETONS à verser 936 119,31 euros aux sociétés DEMATHIEU BARD CONSTRUCTION et NGE GENIE CIVIL, 286 660,07 euros à la société GUINTOLI et 113 460,06 euros à la société ENTREPRISE MALET ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur les responsabilités encourues. La SAS Lafarge Bétons France critique le rapport d'expertise en ce qu'il n'a retenu pour seule cause des désordres, qu'un non-respect de la formule béton, alors qu'il était sollicité l'examen contradictoire de la tromplaque, notamment dans un dire du 20 janvier 2015 auquel les experts n'ont jamais donné suite, et que ces derniers ont omis de répondre à certaines questions qui leur ont été posées, La SAS Lafarge Bétons France conteste ensuite sa responsabilité dans la survenance des désordres, en faisant valoir que le béton livré était conforme, que le sinistre provient d'une ou de plusieurs causes étrangères, à savoir un défaut de mise en place des armatures à proximité de la pièce d'appui (tromplaque), par les sociétés Demathieu Bard et/ou NGE Génie Civil, ou un défaut d'exécution lors la mise en précontrainte effectuée par l'entreprise sprE. A l'appui de son argumentation elle produit une note technique du cabinet MIE en date du 30 mai 2016. Elle ajoute qu'à l'exception de la société NGE Génie Civil, la mise en oeuvre de sa responsabilité ne peut reposer sur un fondement contractuel, et que faute de démontrer l'existence d'une faute extracontractuelle distincte de la non-conformité alléguée, sa responsabilité ne peut être recherchée. Elle indique encore que pour s'opposer à indemniser les sociétés Demathieu Bard Construction et NGE Génie Civil du montant des sommes réclamées, elle est fondée à se prévaloir des conditions générales de vente qui prévoient que toute réclamation sur la qualité des marchandises doit être formulée sur le champ et confirmée expressément par écrit dans les 24 heures suivant enlèvement ou la livraison, que la garantie est limitée soit au remplacement des marchandises reconnues défectueuses, soit au remboursement de leur valeur avant emploi sans indemnité ni dommages et intérêts d'aucune sorte. Elle affirme qu'avant la mise en précontrainte défectueuse, le groupement d'entreprises avait l'obligation normative de vérifier que le béton avait une résistance à la compression de 30 MPa, ce qu'il n'a pas fait. La société Demathieu Bard Construction reprend les conclusions expertales qui imputent à un défaut de résistance du béton l'apparition des désordres, le béton livré dont la formule d'origine a été modifiée à plusieurs reprises par la société Lafarge, n'étant pas conforme à ses engagements contractuels, Elle soutient que l'absence de cause étrangère permet de retenir la faute commise par la SAS Lafarge Bétons France et d'engager la responsabilité de la SAS Lafarge Bétons France. La société NGE Génie Civil s'associe aux conclusions retenues par le collège d'experts et critique l'avis technique du cabinet CME, La société Entreprise Malet conclut à la responsabilité exclusive de la société Lafarge Bétons France dans la fourniture du béton défectueux. Il convient de relever que les opérations expertales ont bien été conduites au contradictoire de toutes les parties, lesquelles ont été amenées à faire de nombreux dires, dont 22 émanant du conseil de la SAS Lafarge Bêlons Franc; et que le collège d'expert y a toujours répondu, notamment : - le 2/11/2011 : qu'en qui concerne la tromplaque, elle était à disposition des parties depuis le 02/11/2011 à BALIGNY. Il n'y avait pas urgence pour déplacer l'ensemble des parties à BALIGNY afin de constater l'état d'une plaque d'acier de 275 mm de côté, 90 mm d'épaisseur et d'un tube cylindrique de 127 mm et 433 mm de longueur. Par la suite, les documents reçus par dire du 05/05/2014 de SETEC sont suffisamment commentés. Nous avions constaté lors de notre accédit du 08/08/2011 que la plaque de la trompette n'avait pas reculé. - le 20/06/2013 : qu'il n'y a pas eu rupture de la tromplaque et ce n'est pas elle qui est à l'origine des désordres. - le 25/06/2013: que lors des travaux de réfection de l'ancrage, aucune anomalie n'a été relevée, au niveau des armatures et du béton. Les fissures sont apparues après l'enlèvement du vérin et lentement, marquées au bout de 10 mn pour atteindre 2 mm de large au bout de 2 heures. Il n'y a pas eu d'enfoncement brutal de l'ancrage consécutif au vide derrière l'ancrage. Ce désordre est dû à un défaut de résistance du béton derrière l'ancrage. La mise en tension a été conforme et l'apparition des fissures lors du transfert de l'effort du vérin au bloc d'ancrage est révélateur d'un défaut de résistance du béton et non la cause d'un défaut d'exécution de la mise en précontrainte. - le 16/12/2013 que sur la fabrication et en particulier la variation du dosage de l'entraîneur d'air, il est inexact d'écrire que « la variation du dosage en entraîneur d'air pour satisfaire aux critères normatifs (norme NF EN 2064) ne peut être interprétée comme un défaut de fabrication », et a répondu très longuement de la page 55 à la page 59 au dernier dire du 20101/2015, précisant qu'ils « ne confondent pas dosage en entraîneur à air et teneur en air occlus. Le second est en effet produit par le premier
». Le collège d'experts, a pu distinguer deux parties du tablier du pont : en ce qui concerne la première, il a conclu à la conformité du béton en classe C351115 et en ce qui concerne la seconde, en revanche, les experts relèvent en s'appuyant sur l'ensemble des essais menés et des carottages réalisés après le sinistre, que le béton ne présentait pas les qualités de résistance requise, ce qui constitue la seule cause de l'apparition des fissures. Il était contractuellement prévu la fourniture de béton de classe C35/45 prêt à l'emploi ; or il a été démontré par l'expertise que la formule utilisée a été modifiée à sept reprises et que le dosage par entraîneur d'air n'a pas été maîtrisé, ayant pour conséquence de diminuer la résistance moyenne du béton. Une partie du béton livré n'avait donc plus les caractéristiques de la classe C35/45 et la résistance caractéristique du béton du tablier dans sa partie PI/C2 n'était pas conforme à celle prescrite de 35 MPa à 28 jours. Les experts ont conclu que : « Le tablier de pont a été justifié avec un béton de résistance moindre C30/37, au lieu de C35145 prévu. Ce défaut de résistance a été démontré dans les pages précédentes. Il ressort de l'étude des pièces versées par les parties, que : - la société Lafarge a livré un béton non-conforme à ses engagements contractuels de livrer un béton selon la Formule 3 : C35/45 XF3 XD3 respectant la composition prescrite par les épreuves d'étude et de convenance ; - la société Lafarge a fait évoluer cette composition en dehors des tolérances de fabrication fixée par la norme NF EN 206-1 et le fascicule 65 concernant le dosage en entraîneur d'air ; - conformément à la norme et au fascicule précités, la formule finalisée doit être exécutée sans modification et toute modification hors tolérance doit faire l'objet d'une nouvelle étude ; - Les meilleurs spécialistes du réseau scientifique et technique du ministère de 1'économie et du Développement durable et de l'Energie, sous Direction de la Gestion du Réseau Autoroutier Concédé, ont conclu à la nécessité de déclasser le béton livré par Lafarge en c30/37. L'avis technique du Cabinet Méditerranéen d'Expertises (CME) émis le 30 mai 2016, qui prétend que le béton livré était exempt de non-conformité en ce qu'il satisfaisait à l'exigence de résistance de 35 MPa à 28 jours, et que la teneur en air variant entre 4 et 8 % a été respectée suries bétons litigieux, s'oppose aux conclusions des experts et des autres techniciens consultés, En effet, les notes techniques produites par la société NGE Génie Civil en réponse sont les suivantes * M. F..., consultant, fait état des règles de l'art à appliquer la NF EN 206-1, le fascicule 65 et ses recommandations pour le gel, le protocole d'accord SNBPE-FNTP. Il répond que passer d'une teneur en air de 4 % à 8 % a fait chuter la résistance de 22 %, soit une résistance moyenne de 31 MPa et une résistance caractéristique de 26-27 MPa, très largement inférieure à la résistance caractéristique de 35 MPa exigée par la NF EN 206-1 et le fascicule 65, La société Lafarge ne pouvait donc s'amuser à modifier la quantité d'air entraîné sans une nouvelle épreuve d'études justifiant la résistance avec une quantité d'air entraîné supérieure. Il ajoute que Lafarge ne pouvait ni modifier la valeur initialement retenue dans la fabrication du béton, ni la quantité de ciment sans diminuer la résistance du béton, * L'Assistance Technique Construction Matériaux (ATCM) rappelle que le document de Lafarge fait référence au fascicule 65 qui définit d'après les indications fournies, les études et les convenances ayant été réalisées sur la base d'une formule dosée à 385 Kg/m3, que la formule nominale affichée sur les bons de pesées doit être rigoureusement identique, et que sans essais préalablement réalisés, aucune variation de dosage n'est possible, ce qui démontre que la société Lafarge n'était pas autorisée à modifier unilatéralement, sans essais préalables, la formule du béton, sous peine d'en amoindrir la résistance. Le CME évoque comme causes étrangères de prétendus défauts de mise en oeuvre des armatures et des bétons, qu'il n'a pas pu vérifier puisque les travaux de reprise de l'ancrage défectueux avaient été réalisés et/ou un défaut d'exécution lors la mise en précontrainte effectuée par l'entreprise SP1E, dont il ne rapporte nullement la preuve. En conséquence, la responsabilité contractuelle de la SAS Lafarge Holcim Bétons doit être retenue en ce qu'elle a modifié la formule du béton prêt à l'emploi, et n'a donc pas fourni le matériau conforme au contrat de fourniture signé avec la société NGE Génie Civil. L'article 4,4,4 des annexes au contrat signées par les parties, stipule que « Dans le cas d'une non conformité de la livraison à la commande, le fournisseur doit prendre toutes les dispositions pour mettre fin à cette situation dès les livraisons futures. Les essais complémentaires et réparations des conséquences éventuelles seront prises en charge par la partie défaillante ». La SAS Lafarge Holcim Bétons doit en conséquence être condamnée à prendre en charge la réparation des préjudices subis par son cocontractant. Sur les préjudices. 1. La société NGE Génie Civil et la société Demathieu Bard. La société Lafarge Holcim Bétons s'oppose à indemniser la société Demathieu Bard dont elle conteste la qualité de cocontractant, puisque l'existence du groupement d'entreprises solidaire adjudicataire du marché n'est pas mentionnée dans le contrat qu'elle a signé avec la société NGE Génie Civil, que la convention constituant un groupement d'entreprises solidaires est datée du mois de septembre 2009, soit postérieurement à la conclusion du contrat de fourniture de béton, et que l'article 1872-1 du code civil ne saurait trouver ici application. La société Demathieu Bard réplique que le contrat de fourniture de béton est bien un document commun puisqu'il comporte le logo des deux sociétés. Elle rappelle que ces deux sociétés font partie d'un groupement d'entreprises et ont toutes deux été utilisatrices du béton litigieux, intervenant sur les mêmes ouvrages. A titre subsidiaire, elle s'estime bien fondée à solliciter la réparation de son préjudice sur le fondement délictuel. Le contrat de fourniture de béton litigieux a été signé entre la société NGE Génie Civil et la SAS Lafarge Bétons Sud Est, Il n'est pas daté mais indique que les prix du marché sont révisables mensuellement en fonction du mois de référence de base marché de juin 2009, Il comporte en haut de chaque page les logos des deux sociétés NGE Génie Civil et Demathieu Bard, 1871 du code civil définit la société en participation comme la constitution d'une société non immatriculée, dont l'objet, le fonctionnement et les conditions sont librement convenus par les associés. L'article 1872-1 du même code prévoit que « Chaque associé contracte en son nom personnel et est seul engagea l'égard des tiers. Toutefois, si les participants agissent en qualité d'associés au vu et au su des tiers, chacun d'eux est tenu à l'égard de ceux-ci des obligations nées des actes accomplis en cette qualité par l'un des autres, avec solidarité, si la société cg commerciale, sans solidarité dans les autres cas. Il en est de même de l'associé qui, par son immixtion, a laissé croire au cocontractant qu'il entendait s'engager à son égard, ou dont il est prouvé que l'engagement a tourné à son profil ». La convention de groupement momentané d'entreprises solidaires signé entre la SAS Guintoli nommée mandataire, la SAS EIITP, la SAS NGE Génie Civil, la société Demathieu Bard et la SA Malet TP, qui s'apparente à une société en participation, a été conclue le 22 septembre 2009, soit postérieurement à l'engagement de la seule société NGE Génie Civil du mois de juin 2009, et faute pour ce groupement d'indiquer dans la convention qu'il reprend à son compte tous les marchés de travaux Signés antérieurement, cette convention n'est pas opposable à la SAS Lafarge Holcim Bétons Néanmoins la société Demathieu Bard Construction, titulaire du marché des ouvrages de génie civil aux côtés de la société NGE Génie Civil, qui est un tiers au contrat signé entre la société NGE Génie Civil et la société Lafarge Holcim Bétons, est bien fondée à se prévaloir de la responsabilité délictuelle de la société Lafarge Holcim Bétons. En modifiant unilatéralement la composition du béton, sans essais préalables, et en amoindrissant ainsi sa résistance, la SAS Lafarge Holcim Bétons a commis une faute à l'égard des entreprises chargées des divers lots de chantier, et la société Demathieu Bard Construction est en droit de prétendre à être indemnisée du dommage qu'elle a subi du fait du manquement contractuel commis par la SAS Lafarge Holcim Bétons. Le collège d'experts ayant évalué le, préjudice subi par les sociétés Génie Civil et Demathieu Bard Construction à la somme de 936 119,31 € HT, il y a lieu de leur allouer cette somme. 2. La SAS Guintoli. La SAS Guintoli, en charge des travaux de terrassement et d'assainissement du chantier, qui est un tiers au contrat signé entre la société ME Génie Civil et la société Lafarge Holcim Bétons, est elle aussi bien fondée à se prévaloir de la responsabilité délictuelle de la société Lafarge holcim Bétons, en 1 'état du dommage qu'elle a subi du fait du manquement contractuel commis par cette société, et sera indemnisée de son préjudice. Même s'il n'entrait pas dans la mission des experts de déterminer leur préjudice, ils ont évalué les coûts induits pour les sociétés Guintoli et Entreprise Malet. Le chiffrage des postes de ces préjudices a pu être contradictoirement discuté dans le cadre des opérations expertales et la cour estime que, faute pour la SAS Lafarge Holcim Bétons d'apporter des éléments techniques et comptables contraires, il convient de retenir le coût des travaux de remise en état à la somme de 282 660,07 £ HT. 3. La SA Entreprise Malet. Il en est de même pour la SA Entreprise Malet, chargée des travaux de chaussées, qui est fondée à se prévaloir de la responsabilité délictuelle de la société Lafarge Holcim Bétons, en l'état du dommage qu'elle a subi du fait du manquement contractuel commis par cette société. Elle sera indemnisée de son préjudice évalué par les experts à la somme de 113 460,06 € HT. »

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE « Attendu qu'il apparaît à ce Tribunal que les experts se sont livrés à un travail minutieux et rigoureux dont il convient d'homologuer les conclusions ; Que vainement la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS) fait état d'une conformité du béton fourni et émet l'hypothèse de l'existence d'une ou plusieurs causes étrangères à l'origine du sinistre, liées à un défaut de mise en oeuvre des armatures et dos bétons par la société DEMATHIEU BARD CONSTRUCTION (SAS) ou par la société NGE GENTE CIVIL (SAS) ou un défaut d'exécution lors de mise en précontrainte du béton ; Attendu qu'il ressort des conclusions du rapport des experts, lesquels ont écarté tout défaut de mise en oeuvre ou d'exécution de la procédure de précontrainte, que : « Le tablier de pont a été justifié avec un béton de résistance Moindre C30/37, au lieu de C35-45 prévu. Ce défaut de résistance a été démontré dans les pages précédentes. Il ressort de l'étude des pièces versées par les parties que : LAFARGE a livré un béton non conforme à ses engagements contractuels, de livrer un béton C35/45 S3 X F4 G-I-S respectant la composition prescrites par les épreuves d'étude et de convenances LAFARGE a fait évoluer cette composition en dehors des tolérances de fabrication fixée par la norme NF EN 206-1 et le fascicule 65 concernant le dosage en entraîneur d'air, - Conformément à la norme et fascicules précités, la formule finalisée doit être exécutée sans modification. Toute modification hors tolérance doit faire l'objet d'une nouvelle étude. – Les meilleurs spécialistes du réseau scientifiques et technique du Ministère de l'Economie, du développement durable et de l'Energie, sou direction du Réseau Autoroutier Concédé ont conclu à la nécessité de déclasser le béton livré par LAFARGE en C30/37 ; Attendu qu'il appartient à ce Tribunal de fixer la réparation des préjudices subis par les sociétés membres du groupement d'entreprises solidaires concernées par le litige, consécutivement à l'arrêt du chantier pour la période du 26 mai 2011 au 27 octobre 2011, lequel a entraîne une modification du planning d'exécution et généré des frais liés, selon le rapport d'expertise, à l'« Arrêt des travaux autoroutiers aux abords de l'ouvrage - Mise en place d'une déviation provisoire de la RD27 - Investigations complémentaires, analyses, laboratoires, études - Immobilisation matériel, amortissements, frais généraux - Réparations, rétablissement circulation sur ouvrage, démolition déviation et reprise travaux autoroutiers » ; Qu'il y a lieu d'homologuer les données retenues par les experts et de condamner, en conséquence, la société LAFARGE BETONS FRANCE (SAS) à payer : - Au titre de sa responsabilité contractuelle, aux sociétés DEMATHIEU BARD CONSTRUCTION (SAS) et NGE GENIE CIVIL (SAS), solidairement, la somme de 936,119,31 euros, - Au titre de sa responsabilité délictuelle : - à la société GUINTOLI (SAS) : la somme de 282.660,07 euros, - à la société ENTREPRISE MALET (SA) : la somme de 113,460,06 euros ; Qu'il appartient en outre à ce Tribunal de rappeler que le caractère indemnitaire attaché à la nature des sommes attribuées les exclut du champ d'application de la TVA ; Que les moyens soulevés par la société ENTREPRISE MALET (SA) aux fins de voir fixer la réparation de son préjudice à raison de la somme de 192,100 euros seront rejetés, le Tribunal faisant sien l'avis des experts selon lesquels, d'une part, au titre de la plus-value « transport pour contournement », le tonnage transporté et le nombre de jours ne sont pas justifiés, sans, au surplus, que la réalité du préjudice invoqué puisse être établie et, d'autre part, au titre des « jours supplémentaires d'atelier », de réaliser la grave bitume en deux journées n'était pas démontrée par la société ENTREPRISE MALET (SA) » ;

ALORS QUE le manquement à une obligation contractuelle de résultat n'est pas de nature à caractériser une faute délictuelle ; qu'en retenant que la société LAFARGE HOLCIM BETON n'a pas fourni le matériau conforme au contrat de fourniture signé avec la société NGE Génie Civil, pour décider que la société DEMATHIEU BARD CONSTRUCTION est en droit de prétendre à être indemnisé, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, du dommage subi du fait du manquent contractuel commis par la société LAFARGE HOLCIM BETON, la cour d'appel, qui a déduit une faute délictuelle du seul manquement à une obligation contractuelle de résultat, a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil.


Synthèse
Formation : Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 19-12.408
Date de la décision : 01/10/2020
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Troisième chambre civile, arrêt n°19-12.408 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3A


Publications
Proposition de citation : Cass. Troisième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 01 oct. 2020, pourvoi n°19-12.408, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12.408
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