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30/09/2020 | FRANCE | N°18-24455

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 septembre 2020, 18-24455


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 771 F-D

Pourvoi n° D 18-24.455

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

M. N... L... , domicilié [...] , a formé le

pourvoi n° D 18-24.455 contre l'arrêt rendu le 2 octobre 2018 par la cour d'appel de Riom (4e chambre civile sociale), dans le litige l'opposant...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 771 F-D

Pourvoi n° D 18-24.455

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

M. N... L... , domicilié [...] , a formé le pourvoi n° D 18-24.455 contre l'arrêt rendu le 2 octobre 2018 par la cour d'appel de Riom (4e chambre civile sociale), dans le litige l'opposant à la société [...], société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. L... , de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [...], après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 2 octobre 2018), M. L... , engagé par la société [...] le 7 août 1995 en qualité de chef d'équipe et exerçant en dernier lieu les fonctions de chef de chantier, a été licencié pour faute grave le 2 octobre 2015 au motif de son refus d'une affectation sur un chantier en grand déplacement.

2. Contestant son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement justifié par une faute grave et de le débouter de toutes ses demandes indemnitaires, alors :

« 2°/ que le refus, par un salarié, d'un changement de ses conditions de travail ne constitue pas à lui seul une faute grave ; qu'en l'espèce, pour dire le licenciement du salarié justifié par une faute grave, la cour d'appel a relevé que l'affectation temporaire de l'intéressé ne constituait pas une modification de son contrat de travail mais un grand déplacement, et que cette mission pouvait être imposée par l'employeur en vertu de son pouvoir de direction, de sorte que le refus du salarié d'exécuter ses obligations contractuelles constituait une faute justifiant la rupture immédiate du contrat de travail ; qu'en statuant ainsi, quand le refus, par un salarié, d'un changement de ses conditions de travail, s'il rend le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas, à lui seul, une faute grave, la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;

3°/ que si le manquement du salarié à ses obligations contractuelles rend son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, un tel manquement ne peut caractériser une faute grave que s'il révèle la volonté délibérée de l'intéressé de se soustraire à ses obligations ; qu'en l'espèce, pour dire le licenciement du salarié justifié par une faute grave, la cour d'appel a relevé que son affectation temporaire ne constituait pas une modification de son contrat de travail mais un grand déplacement, et que cette mission pouvait être imposée par l'employeur en vertu de son pouvoir de direction, de sorte que le refus du salarié d'exécuter ses obligations contractuelles constituait une faute justifiant la rupture immédiate du contrat de travail ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée par le salarié, si son refus n'était pas exclusivement motivé par des raisons familiales, liées aux obligations de l'intéressé dans le cadre d'une garde alternée de ses enfants mineurs, faisant obstacle à un changement de résidence, alors surtout que le chantier auquel l'intéressé devait être affecté se trouvait à plus de 300 km du domicile du salarié, de sorte que celui-ci n'était aucunement animé par la volonté délibérée de se soustraire à ses obligations, mais uniquement soucieux de satisfaire à ses obligations familiales, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.1234-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que le salarié qui avait connaissance du jugement de divorce fixant les modalités de garde de ses enfants, avait d'abord accepté le 28 août 2015 le déplacement d'une durée de quatre mois qui lui avait été proposé par son employeur puis l'avait refusé quelques jours avant sa mise en oeuvre. Elle a ainsi fait ressortir que la décision du salarié procédait d'une volonté délibérée de se soustraire à ses obligations contractuelles et a pu décider que le comportement de l'intéressé rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. L... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. L...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de M. L... justifié par une faute grave et, par conséquent, d'AVOIR débouté le salarié de toutes ses demandes indemnitaires au titre de la rupture de son contrat de travail ;

Aux motifs qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que le 21 juillet 2015, la société [...] a informé verbalement M. L... , chef de chantier, de son affectation temporaire, pour une durée de quatre mois, sur un chantier à La Roche Sur Foron (74), ce qui lui a été confirmé par courriers des 23 juillet 2015 et 13 août 2015 ; c'est seulement par courrier du 4 septembre 2015 que M. L... , invoquant sa situation familiale, notamment quant à l'hébergement alterné de ses filles suite à sa séparation conjugale, a avisé son employeur de son refus de ce « déplacement » selon ses propres termes ; contrairement à ce que soutient M. L... , son affectation temporaire, pour une durée de quatre mois, sur un chantier éloigné du secteur géographique habituel de l'entreprise, ne constituait pas une modification de son contrat de travail qu'il pouvait refuser, mais un grand déplacement ; cette mission, justifiée par l'intérêt de l'entreprise, s'inscrivait dans le cadre habituel de l'activité spécifique de chef de chantier du salarié, entraînant par nature des déplacements, et pouvait dès lors être imposée par l'employeur, en vertu de son pouvoir de direction ; il sera observation d'ailleurs d'une part que M. L... ne conteste pas avoir, jusqu'à cet incident, assuré sans difficulté les grands déplacements au titre de ses obligations contractuelles, d'autre part qu'il ressort des termes du courrier qu'il a lui-même adressé à l'employeur le 4 septembre 2015 que cette affectation correspondait bien à un « déplacement » et non à une mutation dont la légitimité devrait, comme il le soutient, être analysée au regard de l'existence et de la validité d'une clause de mobilité ; en conséquence, la société [...] a pu légitimement considérer que le refus, au demeurant tardif, de M. L... , d'exécuter ses obligations contractuelles constituait une faute justifiant la rupture immédiate du contrat de travail ; le jugement du conseil de prud'hommes sera dès lors confirmé sur ce point (arrêt, page 5) ;

1°/ Alors que si l'affectation occasionnelle d'un salarié en dehors du secteur géographique où il travaille habituellement ou des limites prévues par une clause contractuelle de mobilité géographique peut ne pas constituer une modification de son contrat de travail, il n'en est ainsi que lorsque cette affectation est motivée par l'intérêt de l'entreprise, qu'elle est justifiée par des circonstances exceptionnelles, et que le salarié est informé préalablement dans un délai raisonnable du caractère temporaire de l'affectation et de sa durée prévisible ;
Qu'en l'espèce, en se bornant, pour dire que la décision prise par l'employeur d'affecter le salarié, pendant quatre mois, à [...] , sur un chantier situé à 320 km de son domicile, ne constituait pas une modification de son contrat de travail, à énoncer que cette mission était justifiée par l'intérêt de l'entreprise et s'inscrivait dans le cadre habituel de l'activité spécifique de chef de chantier du salarié, sans rechercher si une telle mesure était justifiée par des circonstances exceptionnelles, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1234-1 du code du travail ;

2°/ Alors, subsidiairement, que le refus, par un salarié, d'un changement de ses conditions de travail ne constitue pas à lui seul une faute grave ;
Qu'en l'espèce, pour dire le licenciement de M. L... justifié par une faute grave, la cour d'appel a relevé que l'affectation temporaire du salarié ne constituait pas une modification de son contrat de travail mais un grand déplacement, et que cette mission pouvait être imposée par l'employeur en vertu de son pouvoir de direction, de sorte que le refus de l'exposant d'exécuter ses obligations contractuelles constituait une faute justifiant la rupture immédiate du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, quand le refus, par un salarié, d'un changement de ses conditions de travail, s'il rend le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas, à lui seul, une faute grave, la cour d'appel a violé l'article L 1234-1 du code du travail ;

3°/ Alors, subsidiairement, que si le manquement du salarié à ses obligations contractuelles rend son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, un tel manquement ne peut caractériser une faute grave que s'il révèle la volonté délibérée de l'intéressé de se soustraire à ses obligations ;
Qu'en l'espèce, pour dire le licenciement de M. L... justifié par une faute grave, la cour d'appel a relevé que l'affectation temporaire du salarié ne constituait pas une modification de son contrat de travail mais un grand déplacement, et que cette mission pouvait être imposée par l'employeur en vertu de son pouvoir de direction, de sorte que le refus de l'exposant d'exécuter ses obligations contractuelles constituait une faute justifiant la rupture immédiate du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée par M. L... , si le refus ainsi exprimé par le salarié n'était pas exclusivement motivé par des raisons familiales, liées aux obligations de l'intéressé dans le cadre d'une garde alternée de ses enfants mineurs, faisant obstacle à un changement de résidence, alors surtout que le chantier auquel l'intéressé devait être affecté se trouvait à plus de 300 km du domicile de l'exposant, de sorte que celui-ci n'était aucunement animé par la volonté délibérée de se soustraire à ses obligations, mais uniquement soucieux de satisfaire à ses obligations familiales, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 1234-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-24455
Date de la décision : 30/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 02 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 sep. 2020, pourvoi n°18-24455


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.24455
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