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24/09/2020 | FRANCE | N°19-22.317

France | France, Cour de cassation, Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 24 septembre 2020, 19-22.317


CIV. 2

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 septembre 2020




Rejet non spécialement motivé


M. PIREYRE, président



Décision n° 10693 F

Pourvoi n° A 19-22.317




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 SEPTEMBRE 2020

Mme R... G..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° A 19-22

.317 contre l'arrêt rendu le 4 décembre 2018 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. O... Q...,

2°/ à Mme Y... W..., épouse Q.....

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 septembre 2020

Rejet non spécialement motivé

M. PIREYRE, président

Décision n° 10693 F

Pourvoi n° A 19-22.317

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 SEPTEMBRE 2020

Mme R... G..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° A 19-22.317 contre l'arrêt rendu le 4 décembre 2018 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. O... Q...,

2°/ à Mme Y... W..., épouse Q...,

domiciliés tous deux [...],

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Besson, conseiller, les observations écrites de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de Mme G..., de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. et Mme Q..., après débats en l'audience publique du 24 juin 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Besson, conseiller rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme G... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille vingt, et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour Mme G...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris, en ce qu'il avait débouté Mme G... de sa demande de dommages-intérêts pour faute délictuelle, dirigée contre M. et Mme Q...,

AUX MOTIFS QUE Sur la faute : Attendu que l'action de Mme G... est fondée sur l'article 1382 du code civil, que la faute reprochée par l'appelante consiste en une utilisation de la somme de 30 000 euros non dans l'intérêt de la société mais à des fins personnelles par Mme Q..., et sans lui permettre d'entrer au capital de la société, Attendu que la remise du chèque de 30 000 euros par Mme G... n'est pas contestée par les intimés, Attendu qu'il résulte de l'attestation du directeur du CIC LYONNAISE DE BANQUE de LAGNIEU, M. I..., que le 19 septembre 2012, Mme G... a remis à l'intimée, en sa présence, un chèque de 30 000 euros encaissé sur le compte joint des époux Q... dans le but de faire un "apport" pour payer les factures de retard de la SARL LE JARDIN ZEN, qu'ultérieurement plusieurs virements pour une somme totale de 26 415,20 euros ont été effectués à partir de ce compte à destination du compte de la SARL, et non du compte courant d'associé de Mme Q..., qu'il résulte de ces éléments la preuve que la majeure partie de la somme de 30 000 euros a bien été utilisée au profit de la SARL, que pour le surplus la preuve n'est pas rapportée par l'appelante d'un usage personnel, Attendu qu'il résulte du mail de M. P..., expert-comptable, qu'un projet d'augmentation du capital suite à cet apport a été élaboré aux termes duquel la participation de Mme G... devait être de 10 %, celle-ci déclarant connaître les difficultés de la société et que son investissement était "à risque", sans qu'il résulte du dossier les raisons pour lesquelles ce projet n'a pas vu le jour, que dès lors la preuve d'une faute de Mme Q... n'est pas rapportée, Attendu qu'en outre, l'action fondée sur l'article 1382 du code civil nécessite la preuve d'un préjudice et d'un lien de causalité avec la faute reprochée, que la cession des parts de la SARL LE JARDIN ZEN et du compte courant de Mme Q... étant intervenus, au regard d'un passif important (56 268 euros au 31/12/2013), au prix d'un euro symbolique, il n'est pas rapporté la preuve que les parts qui devaient être cédées à Mme G... aient eu une quelconque valeur, que dès lors elle ne peut solliciter sur le fondement de l'article 1382 du code civil, en l'absence de preuve d'une faute et d'un lien de causalité entre le préjudice (la perte de la somme de 30 000 euros) et la faute allégués, la condamnation des époux Q... à lui payer ladite somme ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Sur la demande de dommages-intérêts pour faute : Aux termes de l'article 1382 ancien du code civil, applicable en la cause s'agissant d'une instance introduite avant le 1er octobre 2016, "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer." En l'espèce, Madame G... reproche à Madame Q... d'avoir commis un abus de confiance en détournant à des fins personnelles les fonds destinés à la société LE JARDIN ZEN. Il incombe donc à la demanderesse de prouver, d'une part, que les fonds remis devaient être affectés à un usage déterminé, d'autre part, que les fonds ont été utilisés à des fins différentes de celle convenue entre les parties. Il n'est pas contesté qu'il n'a pas été passé de contrat écrit entre les parties, de sorte que la détermination de l'affectation de la somme de 30 000 € doit être recherchée dans les pièces remises par les parties. A la lecture du courriel du 9 octobre 2012 émanant de Monsieur C... P..., expert-comptable, et de la note sur le projet d'augmentation de capital réalisé par ce dernier, il apparaît qu'il a été envisagé que la somme de 30 000 € soit affectée à hauteur de 17 676 € à l'augmentation du capital social de la société LE JARDIN ZEN, représentant 4 910 parts à 3,60 € l'une, et à hauteur de 12 324 € à l'apport en compte courant d'associé, Madame G... devenant associée de la société à raison de 10 % des parts. Il ressort des attestations versées aux débats, notamment de celles rédigées par Madame V... N..., Madame E... J... épouse F..., Madame A... H... et Madame K... B..., que la société LE JARDIN ZEN, qui connaissait des difficultés financières, devait être renflouée, d'une part, par l'apport de la somme de 30 000 € par Madame G..., d'autre part, par la cession de l'établissement de LAGNIEU. Les témoins évoquent un investissement ou un apport de 30 000 € réalisé par Madame G... en contrepartie de la prise de parts dans la société, sans apporter davantage de précision sur le montage projeté. Dans ses attestations établies le 16 juillet 2013 et 12 février 2015, Monsieur S... I..., directeur de l'agence CIC Lyonnaise de Banque de LAGNIEU, déclare que Madame G... a déposé le 20 septembre 2012 la somme de 30 000 € sur le compte joint de Monsieur et Madame Q..., que le but de l'opération était de faire un apport pour payer les factures en retard du JARDIN ZEN et que des virements ont été effectués depuis le compte joint des époux Q... vers le compte de la société LE JARDIN ZEN, soit 12 915,20 € le 20 septembre 2012, 4 000,00 € le 20 septembre 2012, 6 500 € le 21 septembre 2012 et 3 000 € le 26 septembre 2012, représentant un total de 26 415,20 €. Un projet de reconnaissance de dette a été établi courant 2013 par Maître L... U..., notaire associée à AMBÉRIEU-EN-BUGEY, entre Madame G... et les époux Q....
L'origine de ce document est controversée, mais les défendeurs produisent une attestation de Monsieur M... W..., père de Madame Q..., qui déclare qu'il a pris seul l'initiative de faire élaborer un projet de reconnaissance de dette. Il est mentionné dans l'acte que "il était prévu, ainsi déclaré par les parties, qu'en contrepartie de ce versement, Mme Y... W... cède une partie des parts possédées par elle dans la SARL Le Jardin Zen (...)" et que "la somme de 30 000 € correspondait au prix de la vente des parts à intervenir". Au vu de ces éléments, il y a lieu de retenir que la somme de 30 000 €, bien que remise par chèque établi à l'ordre de Madame Q..., était destinée à être déposée sur les comptes bancaires de la société LE JARDIN ZEN. Or il est prouvé par l'attestation du CIC Lyonnaise de banque du 16 juillet 2013 que quatre virements ont été effectués courant septembre 2012 du compte joint des époux Q... vers le compte de la société LE JARDIN ZEN pour un total de 26 415,20 €. En l'état, Madame G... ne démontre pas que la somme de 30 000 € ait été détournée de son objet, puisque, d'une part, la somme de 26 415,20 € a bien été transférée sur le compte de la société LE JARDIN ZEN, d'autre part, il n'est pas possible de présumer que le reliquat, soit 3 584,80 €, ait fait l'objet d'un détournement. S'il n'est pas contesté que Madame G... n'a pas obtenu l'attribution de parts sociales en contrepartie de son apport, ce manquement constitue une inexécution des obligations convenues entre les parties qui ne peut pas être sanctionnée sur le fondement de l'article 1382 du code civil. Il convient enfin de relever que la demanderesse n'allègue ni ne démontre l'existence d'une faute délictuelle commise par Monsieur Q.... En conséquence, la demande de dommages-intérêts pour faute délictuelle sera rejetée ;

1° ALORS QUE toute faute ayant causé un préjudice, entraîne obligation à réparation pour son auteur ; qu'en ayant jugé que les époux Q... n'avaient commis aucune faute délictuelle, après avoir constaté qu'une partie seulement des 30 000 € remis par Mme G... avaient été virée sur le compte de la société Le Jardin Zen, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1382 ancien du code civil ;

2° ALORS QUE si une somme destinée à alimenter le compte d'une société a été versée sur le compte personnel d'un tiers, il incombe à ce dernier de prouver qu'elle n'a, en réalité, pas été détournée ; qu'en ayant retenu que Mme G... ne rapportait pas la preuve que la somme de 3 584,80 € avait été détournée, quand, dès lors qu'elle avait été versée sur le compte personnel des époux Q... et non sur celui de la société Le Jardin Zen, il incombait aux intimés de prouver que, contrairement aux apparences, la somme en cause n'avait pas été détournée en étant versée sur leur compte personnel, la cour d'appel a violé l'article 1315 ancien du code civil ;

3° ALORS QUE si une somme a été versée en pure perte à une société afin de rentrer dans le capital de celle-ci, la dissipation de celle-ci en pure perte, entraîne un préjudice pour la personne qui l'a remise ; qu'en ayant jugé que Mme G... n'avait subi aucun préjudice par suite de la dissipation de la somme de 30 000 € qu'elle avait remise aux époux Q... pour rentrer dans le capital de cette société qu'elle souhaitait diriger, au prétexte que les parts sociales de celle-ci ne valaient rien, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris, en ce qu'il avait débouté Mme G... de sa demande subsidiaire en restitution de la somme de 30 000 €, dirigée contre M. et Mme Q... ;

AUX MOTIFS QUE Sur l'obligation de restitution : Attendu que Mme G... ne peut à la fois alléguer et rapporter la preuve de son intention d'acquérir des parts de la société de Mme Q... en lui versant 30 000 euros et que ladite somme a été remise avec une obligation de restitution, peu importe l'intention éventuelle de Mme Q... à une époque, sous la pression, de la lui rembourser, qu'en outre Mme G... ne rapporte pas la preuve de l'impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit, le lien d'amitié allégué étant insuffisant au regard des dispositions de l'article 1348 du code civil, que dès lors il y a lieu de la débouter de sa demande ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Sur la demande subsidiaire de restitution : A titre subsidiaire, Madame G... invoque une obligation contractuelle de restitution de la somme de 30 000 € remise à Madame Q.... S'agissant de la preuve d'un acte juridique, il résulte de l'article 1341 ancien du code civil et du décret n° 2004-836 du 20 août 2004 que les obligations portant sur une somme ou une valeur supérieure à 1 500 € à compter du 1er janvier 2005 ne peuvent être prouvées que par écrit. L'article 1348 du code civil écarte cette règle lorsque l'une des parties n'a pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique. En l'espèce, il n'est pas démontré que les liens d'amitié existant entre Madame G... et Madame Q... aient fait obstacle à l'établissement d'un contrat écrit, alors que le montant de l'opération était particulièrement élevé pour Madame G... qui a dû contracter un emprunt bancaire pour financer la totalité de son apport. A titre surabondant, il sera observé que, en tout état de cause, la demanderesse n'invoque pas l'existence d'un contrat de prêt mais se prévaut de la réalisation d'un apport en vue d'une augmentation du capital social de la société LE JARDIN ZEN. Madame G... n'est donc pas fondée à opposer à Madame Q... une obligation de restitution qui ne résulte pas du contrat allégué. La demande subsidiaire de restitution de la somme de 30 000 € sera rejetée ;

1° ALORS QUE la preuve écrite peut être suppléée par un commencement de preuve par écrit ; qu'en ayant jugé que Mme G... ne rapportait pas la preuve par écrit qui lui incombait, sans examiner le projet de reconnaissance de dette notariée établi à la demande de Mme Q..., la cour d'appel a violé les articles 1341 et 1347 anciens du code civil ;

2° ALORS QUE le lien d'amitié étroit existant entre deux personnes peut caractériser l'impossibilité de se procurer une preuve écrite ; qu'en ayant jugé que le lien d'amitié invoqué était insuffisant pour caractériser l'impossibilité, pour Mme G..., de se procurer une preuve écrite, la cour d'appel a violé l'article 1348 ancien du code civil ;

3° ALORS QUE le lien d'amitié étroit existant entre deux personnes peut caractériser l'impossibilité de se procurer une preuve écrite ; qu'en ayant jugé que le lien d'amitié invoqué était insuffisant pour caractériser l'impossibilité, pour Mme G..., de se procurer une preuve écrite, en se fondant sur le motif inopérant des premiers juges tiré de l'importance de la somme remise, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1348 ancien du code civil ;

4° ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en ayant jugé, par adoption des motifs des premiers juges, qu'en tout état de cause, Mme G... n'invoquait pas l'existence d'un prêt, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 19-22.317
Date de la décision : 24/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet

Publications
Proposition de citation : Cass. Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 24 sep. 2020, pourvoi n°19-22.317, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.22.317
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